Mécanique quantique relativiste de particules libres

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Séminaire des élèves : Diagrammatica
Mécanique quantique relativiste de particules libres
Daniel Suchet
20 janvier 2011
Après n'avoir étudié que la physique du
XIX eme
siècle jusqu'à la n de la prépa, nous avons abordé
en peu de temps beaucoup de notions fondamentales à la fois en mécanique quantique et en relativité. Ces
deux domaines nous ont cependant été présentés comme distincts et cloisonnés : la mécanique quantique
H=
n'utilise que l'expression classique de l'énergie
p2
2m tandis que la relativité ne rend pas compte de la
description de particules en tant que paquets d'onde.
La théorie des champs relativiste demande de réunir ces deux extrêmes, en proposant une description
quantique relativistes des particules. Une telle unication est en particulier indispensable à la compréhension des diagrammes de Feynmann. Cette première présentation du séminaire est une occasion de rappeler
des résultats fondamentaux de chacun des deux domaines pour en proposer une nouvelle formulation qui
rendra compte de l'ensemble des impératifs. Elle vise également à introduire la notion de champ, indispensable pour décrire correctement un système à nombre varaible de particules.
1 Des particules aux champs.
1.1
Description d'une particule libre
La description d'une particule unique libre permet de rappeler quelques uns des postulats fondamentaux
de la mécanique quantique.
D'après le principe de quantication, on peut associer au système un espace de Hilbert, que l'on notera
H1 .
La particule est alors décrite par un vecteur de cet espace, que l'on cherche à décomposer sur une
base adaptée.
Pour cela, on cherche le plus souvent les états propres d'opérateurs hermitiens, appelés
observables, car la théorie mathématique prédit que ces vecteurs forment une base orthogonale de l'espace.
Dans le cas d'une particule libre classique, on considère le hamiltonien
Ĥ0 =
p̂2
2m et on trouve ainsi
une base constituée d'ondes planes, états propres à la fois du hamiltonien et de l'opérateur impulsion.
Ces ondes planes sont des états entièrement dénis par leur impulsion
→
−̂ →
−
→
− →
−
que p | p i = p | p i. On montre
→
→
→
−
−i−
p .−
r . Son évolution
→
ψ−
p(r) ∝ e
p2 t
→
− −
−
→ (t)i = e−iE p t |→
|ψ−
p i = ei 2m |→
p i.
→
−
p
et on notera
−
|→
pi
alors que la fonction d'onde associée à l'état
−
|→
pi
dψ
est décrite par l'équation de Schrödinger i
dt
= − ∆ψ
2m
l'état tel
est de la forme
et implique
p
Deux problèmes sont cependant rapidement soulevés par cette description.
•
Tout d'abord, il faut remarquer que si les ondes planes sont bien orthogonales, elles ne constituent pas
des états normalisables, car l'intégrale
´
→
− ∗ (→
−
→
ψ−
r ) d3 r
→
p ( r ) ψ−
p
1
diverge. Pour pouvoir utiliser les ondes
planes dans les développements théoriques, on est amené à considérer que l'espace est périodique et
contenu dans un volume

→
−
p =
2π
L
nx
1
L×L×L = V .
Ces conditions entrainent la quantication des impulsions



→
−
→
 ny  et la normalisation des fonctions d'ondes ψ−
p(r)=
nz
√1
V
−
→−
→
e−i p . r
. Un état
→
|ψ−
p i peut
donc être décrit par la fonction d'onde
1 i
→
−
→
ψ−
p ( r , t) = √ e
V
•
p2
→
→
t−−
p .−
r
2m
D'autre part, les expressions utilisées jusqu'ici sont classiques, alors que notre cadre d'étude impose
de prendre en compte la mécanique relativiste.
être remplacée par
ψ ="
m2 ψ .
pµ =
E
→
−
p
−
E(→
p )2 = p2 + m2
L'expression de l'énergie
−
E(→
p) =
p2
2m doit donc
et l'équation de schrödinger par l'équation de Klein Gordon
Cependant, on peut toujours considérer comme solutions des ondes planes
|pµ i,
où
#
est le quadrivecteur imulsion énergie. Ces états peuvent être décrits par des fonctions
d'onde de la forme
→
−
i(pµ xµ )
→
ψ−
p ( r , t) = αe
avec la relation de dispersion
p− →
p0 = + →
p .−
p + m2
La normalisation des fonctions pose ici un nouveau problème. En eet, c'est la
probabilité
qui doit être
normalisée, ce qui demande de dénir correctement cette probabilité à partir des fonctions d'onde.
Dans le cas classique, la probabilité de présence d'une particule dans un volume
d3 x
est donnée par
|ψ(x)|2 d3 x. Cette expression ne peut pas être maintenue en physique relativiste : du fait de la contraction
des longueurs par la transformation de Lorentz, la grandeur
´
V
|ψ(x)|2 d3 x
ne saurait être un invariant
relativiste.
Pour adapter la conservation de la probabilité, on introduit le quadrivecteur
Pµ =
P0
→
−
P
!
. La conservation de la probabilité (
dP
dt
= 0)
courant de probabilité
est alors généralisée par la relation
∂µ Pµ = 0 .
On cherche donc une grandeur qui vérie une telle relation et redonne le résultat non relativiste à basse
vitesse. Ces contraintes conduisent l'expression suivante :
Pµ = i ([∂µ ψ ∗ ] ψ − ψ ∗ [∂µ ψ])
La normalisation des fonctions d'onde doit alors permettre de vérier
1=
=
´
V
i
´
V
P0 d3 x =
−ip0 α∗ e−i(pµ x
µ)
La quantité
L
V
i ([∂0 ψ ∗ ] ψ − ψ ∗ [∂0 ψ]) d3 x
αei(pµ x
=
1
´
´
V
µ)
− α∗ e−i(pµ x
2|α|2 p0 d3 x
µ)
µ ip0 αei(pµ x ) d3 x
.
introduite étant arbitraire, elle doit disparaitre des expressions physiques lorsque
2
L → +∞.
On en déduit la condition de normalisation
1
µ
→
−
→
ei(pµ x )
ψ−
p ( r , t) = √
2V p0
1.2
1.2.1
Plusieurs particules libres.
Opérateurs création et annihilation
Nous avons développé tous les outils nécessaires pour décrire l'évolution d'une particule libre. Malheureusement, la plupart des situations physiques demandent non seulement de décrire un grand nombre de particules, mais surtout des sytèmes dans lesquels le nombre de particules peut varier. Dans un processus
de collision par exemple, deux particules initialement libres forment un état nal constitués d'un grand
nombre de particules libres également.
décrivant 1 particule ou même
Hn
On ne peut donc pas se retreindre à un espace de Hilbert
décrivant
n
H1
espace de
particules. On est alors amenés à considérer l'
Fock, somme direct des espaces à n ∈ N particules (l'état n = 0 correspondant au vide) :
+∞
F (H) = ⊕ Hn
n=0
†
−
a(ˆ→
p)
→
−
d'impulsion p :
On introduit également les opérateurs créations
en ajoutant ou en enlevant une particule
1.2.2
et annihilations
−
a(→
p)
qui agissent sur un état
−
a(ˆ→
p ) : Hn → Hn−1
†
−
a(ˆ→
p ) : Hn → Hn+1
−
−
a(ˆ→
p )|→
qi=0
† −
−
−
−
a(ˆ→
p ) |→
q i = |→
p ,→
qi
√ − →
→
−
→
−
−
−
−
−
a(ˆ→
p )|→
p ,→
p ,→
q , k i = 2|→
p ,−
q, ki
√ − →
† − →
→
−
→
−
−
−
−
−
p ,−
p ,→
p ,→
q, ki
a(ˆ→
p ) |→
p ,−
p ,→
q , k i = 3|→
Notion de champs
Nous avons déjà rencontré le problème du traitement d'un très grand nombre de particules dans le cas
de la çorde vibrante.
son impulsion
p,
S'il est facile de décrire le mouvement d'un point matériel par sa position
x
et
on doit indexer chacun des points lorsqu'on en considère un nombre dénombrable et
considérer une desciption sous forme de champ de déplacement lorsqu'on passe au continu.
Passage du discret au continu
De la même manière, pour décrire correctement un très grand nombre de particules dont chacune peut
se trouver dans n'importe quel état d'impulsion
On note traditionnellement ce champ
φ
→
−
p,
on introduit la notion de champ.
et nous y consacrerons la suite de la présentation.
3
2 Du champs aux opérateurs : seconde quantication
2.1
Analogie avec l'électromagnétisme
Dans le cours d'optique quantique 2 : photons d'Alain Aspect, nous avons déjà eu à mener un raisonnement
semblable. Rappelons en les étapes principales :
•
Développer le champ série de Fourier pour faire apparaitre les diérents modes
−
→−
P
→
− →
→ →
→ (t) ei kl . r −
→
E (−
r , t) = −
e−
l
l
−
→
l
•
Utiliser les équations de Maxwell pour faire apparaitre des relations sur les coecients des modes
propres
−
→−
−
→ →
P (1) →
− →
→
∗
−i kl .−
r −
→ (t) ei kl . r − iα−
−
→
E (−
r , t) = E−
iα−
e→
→ (t) e
→
l
l
−
→
l
•
Exprimer le hamiltonien du système pour y faire apparaitre des variables canoniques conjuguées
H = 20 V
•
l
l
P
−
→
l
(1) 2 2 P
ωl
2
2
→ =
α−
2 Ql + P l
l
E−
→
l
−
→
l
Passer à l'expression quantique en remplaçant les expressions par de opérateurs
H
Ĥ
→
Qˆ−
l
→
Pˆ−
→
Q−
l
→
P−
l
On obtient ainsi un opérateur
l
→
aˆ−
l
→†
aˆ−
l
l
−
→
l
→†
aˆ−
l
et
→
aˆ−
l
sont analogues à ceux considérés dans la section
précédente : ils ajoutent ou enlèvent un quantum d'énergie
†
−
a(ˆ→
p)
∗
α−
→
l
−
→−
−
→−
P (1) →
−̂
→
→
→ ei kl . r − iaˆ
−
→ † e−i kl . r −
−
→ qui agit sur un espace décrivant
E = E−
iaˆ−
e→
→
l
l
l
le champ électromagnétique. Les opérateurs
comme les opérateurs
→
α−
l
et
−
a(ˆ→
p)
→
~ω−
l
dans le mode
→
−
l
ajoutent une particule élémentaire d'énergie
→ = ω−
→,
k−
l
l
−
E dans l'état |→
pi
avec
tout
avec
p− →
E= →
p .−
p + m2 .
Cet opérateur permet d'établir la valeur de toutes les expressions mesurables du système, aux uctuations du vide près. Pour s'en convaincre, on peut considérer un champ électromagnétique monomode
décrit par
N
photons dans le mode
→
−
l
:
Point de vue opérateur
−
→−
−
→−
→
→
→ ei kl . r − iaˆ
−
→ † e−i kl . r
iaˆ−
l
l
l
−
→→
−
→ →
√
(1) √
i kl .−
r − N + 1hN |N + 1ie−i kl .−
r
Valeur moyenne : hEi = hN |Ê|N i = iE−
N
hN
|N
−
1ie
=0
→
l
1
1
2
2
−
→
Ecart type : hE i = hN |Ê |N i =
0 V N + 2 ~ω l
Expression :
(1)
Ê = E−
→
Point de vue champ
−→ →
→ t − k−
→ .−
r
, où E0
E = E0 cos ω−
l
l
´
1
Valeur moyenne : hEi =
T T E dt = 0
E2
1
1
2
−
→
Ecart type : hE i = 0 =
2
0 V N + 2 ~ω l
Expression :
4
doit donner une énergie
→
H = V 12 0 E02 = N ~ω−
l
2.2
Application aux champs
En appliquant la même méthode que pour les champs électromagnétiques, on obtient l'expression suivante
:
φ (xµ ) =
√ 1
2V p0
−
→
p
P
µ
µ
−
−
α(→
p ) eipµ x + α∗ (→
p ) e−ipµ x
On introduit alors l'opérateur champ, qui agit sur l'espace de Fock :
φ̂ (xµ ) =
µ
µ
−
−
â(→
p ) eipµ x + ↠(→
p ) e−ipµ x
√ 1
2V p0
−
→
p
P
On décompose cet opérateur en deux parties, en regroupant les opérateurs création et annihilation :
φ̂ (xµ ) = Â(xµ ) + † (xµ )
Les opérateurs
Â
et
†
avec
Â(xµ ) =
µ
−
â(→
p ) eipµ x
√ 1
2V p0
−
→
p
P
sont les développements en série de Fourier des opérateurs
Comme dans le cadre de l'électromagnétisme, l'opérateur champ
φ̂
â
et
↠.
associé aux particules permet
d'obtenir toutes les informations nécessaires sur un état donné du système dans l'espace de Fock.
3 Causalité
L'une des propriétés fondamentales de ce champ est d'être local : son expression dépend du point de
l'espace-temps considéré. On peut par conséquent se demander si ces opérateurs respectent bien la causalité
: si on considère l'action de
φ̂
en un point
(xµ ),
cette action modie-t-elle l'action de
? Autrement dit, il y a t il une diérence entre appliquer d'abord
φ̂ (xµ )
puis
φ̂ (y µ )
en un point
(y µ )
et l'opération inverse
? En terme plus mathématiques, cette question revient à considérer le commutateur
φ̂ (xµ ) φ̂ (y µ ) − φ̂ (y µ ) φ̂ (xµ ).
φ̂
h
i
φ̂ (xµ ) , φ̂ (y µ ) =
On se propose alors de montrer le résultat suivant :
Si les deux points sont en dehors du cône de lumière l'un de l'autre, alors
h
i
φ̂ (xµ ) , φ̂ (y µ ) = 0
Démonstration
En rappelant les relations de commutations
→
→
δ−
p ,−
q,
−
−
−
−
−
−
[â (→
p ) , â (→
p )] = ↠(→
p ) , ↠(→
q ) = 0 et â (→
p ) , ↠(→
q) =
on montre que
h
i
 (xµ ) ,  (y µ ) = 0
h
i
† (xµ ) , † (y µ ) = 0
h
i P
µ
µ
 (xµ ) , † (y µ ) = 2V1p0 eipµ (x −y )
−
→
p
On en déduit l'expression suivante
5
h
i P
µ
µ
µ
µ ∆(x − y) ≡ φ̂ (xµ ) , φ̂ (y µ ) = 2V1p0 eipµ (x −y ) − e−ipµ (x −y )
−
→
p
On considère alors le passage en continue en replaçant la somme par une intégrale pondérée par la
densité d'état
∆(x − y) =
´
−
→
p
•
Montrons que la valeur
L'intégrale qui dénit
∆(z)
∆(z)
1
2p0
eipµ (x
µ −y µ )
− e−ipµ (x
µ −y µ )
d3 p
(2π)3
est invariante de Lorentz.
pµ
ne porte que sur les composantes spatiales de
rajouter la relation de dispersion
p− →
p0 = →
p .−
p + m2 .
et nécessite de
Nous allons la rajouter directement dans
la somme de la manière suivante :
´ +∞
´ +∞
−∞
´ +∞
"
−∞
√→1 −
p .→
p +m
p0 − −
−
−
δ p20 − →
p .→
p − m2 θ(p0 )dp0 =
p− →
p− →
p .−
p + m2 p0 − →
p .−
p + m2 θ(p0 )dp0
p0 + →
−∞
δ
=
p→
−
−
δ p0 +
p .→
p + m2 + 2
=
´ +∞
"
−∞
δ
√→1 −
p .→
p +m2
p0 + −
∆(z) =
´
∆(z)
µ
pµ
1
2p0
µ
d4 p
δ pµ pµ − m2 θ(p0 ) (2π)
3
d4 p
z 0µ = Λµν z ν
Λ qui change z µ
Ces changements ne modient ni la valeur de produit scalaire
diérentiel
#
p→
−
→
−
2
p0 − p . p + m
θ(p0 )dp0
sous la forme :
eipµ z − e−ipµ z
Considérons une transformation de Lorentz
#
p→
−
→
−
p0 − p . p + m2 θ(p0 )dp0
=
On peut donc réécrire l'expression de
δ
√→1 −
p .→
p +m2
p0 + −
0
peut être relié à d4 p par le jacobien :
et
p0µ = Λµν pν .
pµ
pµ z µ , ni la norme pµ pµ .
d4 p = |detΛ| d4
p0
=
L'élément
d4 p0 . Enn, comme
les transformations de Lorentz ne permettent pas de passer du cône de lumière supérieur au
pµ
cône de lumière inférieur et que le vecteur
couche de masse, on doit avoir
•
Montrons que si
z
θ(p0 ) = θ(q0 ).
est bien à l'intéreur du cône supérieur car sur la
On en déduit que
∆(z) = ∆(Λz)
est de genre temps, alors on peut transformer
z
en
z0
avec
z00 = 0
par
transformation de Lorentz.
On raisonne dans une transformation de Lorentz spéciale :
z0 = βz1 ⇔ β =
z0
z1
•
≤1
donc
z0
z1 et dans le cas d'un vecteur de genre temps,
β ≤ 1,
Montrons que
z00 = γ (z0 − βz1 )
zµ z µ ≤ 0
donc
d'où
z00 = 0 ⇔
z02 − z12 ≤ 0
ce qui est acceptable.
z0 = 0 ⇒ ∆(z) = 0.
´ i−
→−
→
−
→−
→
d4 p
e p . z − e−i p . z δ pµ pµ − m2 θ(p0 ) (2π)
∆(z)z0 =0 =
3
pµ
=
´
−
→
p
1
2p0
−
→−
→
−
→−
→
ei p . z − e−i p . z
d3 p
(2π)3
Or l'intérgale d'une fonction impaire sur l'espace des phases est nulle, d'où
6
∆(z) = 0.
et
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