ANATOMIE CYTOLOGIE PATHOLOGIQUES
REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES — JANVIER 2016 — N°478// 53
tion d’ALK peut être recherchée après enrichissement par
ltration dans les CTC dans l’adénocarcinome pulmonaire
par hybridation in situ ou immunocytochimie permettant
ainsi une indication à la thérapie ciblée par Crizotinib®
[19]. Marchetti et al. ont mis en évidence des mutations
d’EGFR par séquençage de nouvelle génération (NGS) sur
les CTC isolées par technique Veridex® chez des patients
atteints de cancers non à petites cellules du poumon [20].
D’autres facteurs prédictifs ont été étudiés : la mise en
évidence de facteurs influençant le métabolisme d’un
traitement comme la thymidylate synthétase, enzyme
impliquée dans le métabolisme du 5- uorouracil a été
réalisée sur les CTC de patients atteints de cancers du
colon métastatiques permettant ainsi de prédire la résis-
tance à ce traitement [21].
Chen et al. ont étudié l’expression de gènes impliqués dans
la transition épithélio-mésenchymateuse sur cellule unique
après enrichissement par ltration et micromanipulation à
partir de CTC de cancers prostatiques : ces gènes étaient
plus souvent exprimés dans les cancers résistants à la cas-
tration que dans les cancers sensibles à la castration [22].
Ainsi, une signature moléculaire pourrait prédire la sen-
sibilité à la castration et orienter le choix thérapeutique.
Ainsi, les CTC permettraient un monitoring de facteurs
prédictifs durant les différentes étapes de la maladie.
De plus, les CTC pourraient être plus représentatives de
l’hétérogénéité tumorale qu’un petit fragment de tumeur.
2.1.5. Un intérêt diagnostique
Les CTC peuvent montrer un intérêt diagnostique dans
les tumeurs pour lesquelles l’obtention d’un prélèvement
histologique est difcile. Notre groupe a évalué le béné-
fice des CTC enrichies par une technique de filtration
Screencell® dans les tumeurs pancréatiques, habituelle-
ment diagnostiquées par cytoponction pancréatique sous
échoendoscopie [23]. La sensibilité et la spécicité étaient
de 55.5 % (95 % CI 40.1 %-70.9 %) et 100 % (95 % CI
75 %-100 %), respectivement. Les CTC représentent ainsi
une alternative diagnostique non invasive à la cytoponc-
tion pancréatique. Les tumeurs pulmonaires sont égale-
ment souvent difciles d’accès : Fiorelli et al. ont réuni une
cohorte de 77 patients présentant des pathologies bénignes
et malignes pulmonaires, la sensibilité diagnostique des
CTC isolées par ISET® pour un seuil à 25 était 89 % et la
spécicité 100 % [24] avec dans 72 % des cas positifs,
un diagnostic exact du type histologique grâce à l’étude
immunocytochimique.
La détection des CTC pourrait avoir un intérêt dans le
dépistage du cancer. Les CTC semblent pouvoir être détec-
tées au début du développement tumoral [25]. Ilie et al.
ont étudié la présence de CTC dans les bronchopneumo-
pathies chroniques obstructives, facteur prédisposant au
cancer pulmonaire [26] : cinq patients présentaient des
CTC sans signes cliniques ni radiologiques de tumeur et
ont été surveillés annuellement par scanner hélicoïdal à
basse dose. Pour tous ces patients, des nodules pulmo-
naires, correspondant histologiquement à des cancers
pulmonaires débutants, ont été détectés 1 à 4 ans plus
tard. Ces CTC « sentinelles » pourraient ainsi prédire la
survenue de cancers dans une population à haut risque et
pourraient être utilisées dans un programme de dépistage.
2.2. Perspectives
2.2.1. Les techniques plus précises et sensibles :
les techniques microuidiques
Les systèmes microuidiques permettent un enrichisse-
ment de CTC plus précis et plus efcace que les dispo-
sitifs d’enrichissement traditionnels. Pour les techniques
d’enrichissement antigène-dépendantes, la circulation des
cellules dans des structures de dizaine de micromètres
recouvertes d’anticorps (chevrons sur la puce Herringbone
chip® et microplots sur la puce CTCchip®) permet une aug-
mentation de la probabilité de rencontre avec l’anticorps
[27, 28]. La CTCichip® permet également une sélection
négative des CTC par un anticorps anti-CD45 [29]. Les
systèmes sélectionnant les cellules par la taille sont basés
sur une ltration plus efcace que les techniques classiques
[30]. Ces technologies permettent d’obtenir une très bonne
sensibilité : Nagrath et al. mettent en évidence des CTC
chez 99 % des patients atteints de cancers métastatiques
(115/116) [28]. De plus, ces technologies peuvent faciliter
les applications en aval sur les CTC [31]. Mais ces nouvelles
technologies doivent être testées sur de grandes séries
de patients pour établir leur validité clinique.
2.2.2.… et des applications de plus en plus
nombreuses !
Au niveau thérapeutique, la culture de CTC permet l’accès
à des tests précliniques de sensibilité thérapeutique. En
effet, Maheswaran et al. ont mis en culture, après enri-
chissement par CTCichip®, des CTC chez des patientes
atteintes de cancer du sein [32]. Certaines de ces lignées
formaient des tumeurs chez la souris et des mutations
« driver » et « actionable » apparues secondairement ont
été mises en évidence sur certaines d’entre elles. Sur
une des lignées présentant des mutations de FGFR2 et
PIK3CA, l’association de thérapies ciblées anti-FGFR2 et
anti-PIK3CA a montré un effet synergique induisant la mort
des cellules. Ainsi, les tests précliniques sur les cultures
de CTC pourraient permettre une thérapie personnalisée
adaptée à chaque étape de la maladie.
3. L’ADN tumoral circulant
3.1. Avantages et applications
3.1.1. Technique
Ce matériel est facilement accessible. Le sang total doit
être prélevé sur tube EDTA et techniqué dans les 4h sui-
vant la ponction veineuse. Il est possible d’utiliser des
tubes STRECK® (Cell-Free DNA BCT®) qui permettent de
conserver jusqu’à 14 jours à température ambiante ces
échantillons avant extraction. Après centrifugation « douce »
qui permet de ne pas lyser les leucocytes (pour ne pas
libérer l’ADN contenu dans ces cellules), l’extraction de
l’ADN libre circulant est réalisé à partir de quelques mil-
lilitres de sérum ou de plasma. Les techniques de haute
sensibilité comme le séquençage haut débit ou séquen-
çage de nouvelle génération (NGS) et la PCR digitale,
seront favorisées an de détecter l’ADNtc chez le plus
grand nombre de patients, en particulier ceux présentant
une faible quantité d’ADNtc. Pour rappel, le principe des