École des Mines de Douai — FI1A Mathématiques Année 2008-2009
Correction du DM pour le 5 mai 2009
Définition
On appelle processus de Poisson d’intensité λla donnée d’une famille (Nt)tR+
de variables aléatoires toutes à valeurs dans Net vérifiant les conditions suivantes :
(1) pour toute famille strictement croissante (t0, t1, . . . , tn) de réels, les variables aléa-
toires
(Nt1Nt0),(Nt2Nt1),...,(NtnNtn1)
sont mutuellement indépendantes ;
(2) pour tout kN, tout tR+et tout h > 0, le nombre
Nt+hNt
ne dépend pas de tmais seulement de h;
(3) pour tout tR+,
P(Nt+hNt>1) = λh +o(h);
(4) pour tout tR+,
P(Nt+hNt>2) = o(h).
1. Interprétation des hypothèses. On suppose que Ntest la variable aléatoire qui
indique le nombre d’occurrences d’un événement donné (entrée d’un client dans une bou-
tique, par exemple) dans l’intervalle de temps [0, t].
1.1 La première hypothèse signifie que les nombres d’occurrences dans des intervalles
de temps disjoints sont mutuellement indépendants.
1.2 Pour un intervalle de temps très court, la probabilité qu’exactement un événement
survienne est quasiment proportionnelle à la longueur de l’intervalle. La probabilité d’au
moins deux occurrences est négligeable.
1.3 En remarquant que l’événement contraire de {Nt+hNt= 0}est {Nt+hNt>1},
on a
P(Nt+hNt= 0) = 1 P(Nt+hNt>1) = 1 [λh +o(h)]= 1 λh +o(h).
2. Loi de Nt.On se donne un processus de Poisson (Nt)t>0d’intensité λ.
2.1 On pose f0(t) = P(Nt= 0) ; soient t > 0et h > 0. Comme N0= 0,Nt+hcompte
le nombre d’occurrences de l’événement attendu entre les dates 0et t+h. Ce nombre est
nul si et seulement si NtN0et Nt+hNt= 0 : les nombres d’occurences entre les dates
0et tet entre tet t+hdoivent être nuls.
Une autre façon de le dire consiste à écrire que Nt+h= (NtN0)+(Nt+hNt)sachant
que les deux termes entre parenthèses sont des entiers naturels. On a donc
{Nt+h= 0}={NtN0= 0}∩{Nt+hNt= 0}.
Par conséquent,
f0(t+h) = P({NtN0= 0}∩{Nt+hNt= 0})=P(NtN0= 0)P(Nt+hNt= 0),
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la dernière égalité ayant lieu d’après l’hypothèse d’indépendance (1) de la définition d’un
processus de Poisson. On a donc, en tenant compte de la question 1.3 :
f0(t+h) = f0(t)P(Nt+hNt= 0) = f0(t)[1λh +o(h)]
soit encore, tétant fixé,
f0(t+h) = f0(t)λf0(t)h+o(h).
On reconnaît là une approximation linéaire affine de la fonction f0au point t, c’est-à-
dire un développement limité d’ordre 1en t, qui montre que f0est dérivable en tet
f0
0(t) = λf0(t).
Comme ceci est vrai quel que soit tR
+et que f0(0) = P(N0= 0) = 1, on en déduit
que f0est solution du problème de Cauchy
(y0=λy
y(0) = 1.
L’équation différentielle y0=λy est une équation différentielle linéaire homogène du
premier ordre à coefficient constant, et l’unique solution bien connue de ce problème de
Cauchy est
P(Nt= 0) = f0(t) = eλt.
2.2 Pour tout t>0et tout kN, on pose
fk(t) = P(Nt=k).
On a toujours Nt+h= (NtN0)+(Nt+hNt), les deux termes entre parenthèses étant
des entiers naturels. Si on note `la valeur prise par Nt+hNt, l’événement {Nt+h=k}
sera satisfait si et seulement si NtN0prend la valeur k`. Pour que `et k`soient
bien des entiers naturels, il faut et il suffit que `∈ {0, . . . , k}. Par conséquent,
{Nt+h=k}=
k
[
`=0
({NtN0=k`}∩{Nt+hNt=`}).
On peut remarquer que les événements délimités par les parenthèses dans l’expression
ci-dessus sont deux à deux incompatibles. Autrement dit, cette écriture est une partition
de l’événement {Nt+h=k}. On a donc
fk(t+h) = P(Nt+h=k) =
k
X
`=0
P({NtN0=k`}∩{Nt+hNt=`})
=
k
X
`=0
P(NtN0=k`)P(Nt+hNt=`)en vertu de (1).
Supposons k>1et isolons les deux premiers termes de cette somme :
fk(t+h) = P(Nt=k)P(Nt+hNt= 0) + P(Nt=k1)P(Nt+hNt= 1)
+
k
X
`=2
P(Nt=k`)P(Nt+hNt=`).
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Or on sait que
P(Nt+hNt= 0) = 1 λh +o(h)
P(Nt+hNt= 1) = λh +o(h)
`>2, P (Nt+hNt=`)6P(Nt+hNt>2) = o(h).
Par conséquent, l’expression précédente devient
fk(t+h) = fk(t)[1λh +o(h)]+fk1(t)[λh +o(h)]+o(h)
k
X
`=2
fk`(t)
d’où l’on tire
fk(t+h)fk(t)
h=fk(t)[λ+o(1)]+fk1(t)[λ+o(1)]+o(1)
k
X
`=2
fk`(t).
Ceci étant vrai, à tfixé, quel que soit h > 0, passons à la limite lorsque h0:
f0
k(t) = λfk(t) + λfk1(t).
D’autre part, fk(0) = P(N0=k) = P()=0puisque k>1et que {N0= 0}est
l’événement certain.
Finalement, on en déduit que la fonction fkest solution du problème de Cauchy
(y0=λy +λfk1(t)
y(0) = 0
dans lequel l’équation différentielle est linéaire du premier ordre à coefficient constant.
2.3 Pour calculer f1, utilisons le fait que cette fonction f1est solution du problème de
Cauchy précédent, dans lequel intervient la fonction f0calculée à la question 2.1 :
(y0=λy +λeλt (E1)
y(0) = 0
L’équation homogène y0=λy a pour solution générale y(t) = C eλt CR. Si
l’on cherche une solution de (E1)sous la forme y(t)=(a t +b)eλt (avec a, b R), on a
y0(t)=(aλt +aλb)eλt et donc
ysolution de (E1)eλt(aλt +aλb) = λeλt(a t b+ 1) a=λ.
Les solutions de (E1)sont donc les fonctions ydéfinies par y(t) = (λt +C)eλt Cest
un réel arbitraire, que l’on détermine par la condition initiale : C=y(0).
De tout ceci on tire que la fonction f1est donnée par
f1(t) = λt eλt.
De même, f2est la solution du problème de Cauchy suivant :
(y0=λy +λ2t eλt (E2)
y(0) = 0.
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Les solutions homogènes de (E2)étant toujours les fonctions ydéfinies par y(t) = C eλt
CR, cherchons une solution particulière de (E2)sous la forme y(t)=(at2+bt+c)eλt
avec a, b, c R. On a alors y0(t) = eλt [aλt2+ (2aλb)t+ (bλc)], de sorte que
ysolution de (E2)eλt haλt2+ (2aλb)t+ (bλc)i=λeλt hat2+ (λb)tci
(2aλb =λ2λb
bλc =λc (par identification des polynômes)
a=λ2
2et b= 0.
Les solutions de (E2)sont donc les fonctions ydéfinies par y(t) = y2
2t2+Ceλt C
est un réel arbitraire, que l’on détermine par la condition initiale : C=y(0).
De tout ceci on tire que la fonction f2est donnée par
f2(t) = λ2t2
2eλt.
Plus généralement, on conjecture que
kN,tR
+, fk(t) = λktk
k!eλt.
Vérifions cette formule à l’aide d’un raisonnement par récurrence sur l’entier k. On a
déjà vérifié cette assertion pour k∈ {0,1,2}. Supposons-la vraie pour un kNfixé. On
a alors
tR
+, fk(t) = λktk
k!eλt.
On sait d’autre part, d’après la question précédente, que fk+1 est solution du problème
de Cauchy
(y0=λy +λfk(t)
y(0) = 0 soit
y0=λy +λk+1 tk
k!eλt (Ek+1)
y(0) = 0.
Comme l’équation (Ek+1)est une équation différentielle linéaire du premier ordre (à co-
efficient constant), le théorème de Cauchy linéaire assure l’existence et l’unicité d’une
solution maximale à ce problème de Cauchy. Ainsi, pour prouver l’assertion concernant
la fonction fk+1 il suffit de vérifier que la fonction
g:t7−λk+1tk+1
(k+ 1)! eλt
est elle-même solution de ce problème de Cauchy. Via l’unicité, on aura fk+1 =g. Calcu-
lons :
g0(t) = (k+ 1)λk+1tk
(k+ 1)! λλk+1tk+1
(k+ 1)! !eλt =λλktk
k!eλt λfk+1(t)
=λfk(t)λfk+1(t).
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Ceci montre que la fonction gest bien solution de (Ek+1). En outre elle vérifie bien g(0) = 0
donc elle est solution du problème de Cauchy, ce qui montre bien ce qu’on voulait.
Finalement, pour tout entier naturel ket tout réel t > 0,
fk(t) = eλt (λt)k
k!.
2.4 La formule précédente s’écrit
kN, P (Nt=k) = eλt (λt)k
k!.
On y reconnait la définition de la loi de Poisson de paramètre λt :Nt∼ P(λt).
En particulier, E[Nt] = λt et Var(Nt) = λ2t2.
3. Loi du temps d’attente. Soit à nouveau (Nt)t>0un processus de Poisson d’intensité
λ. Pour tout nN, on note Tnla variable aléatoire égale au plus petit indice tpour
lequel Nt=n. Autrement dit, si le processus de Poisson correspond au comptage d’oc-
currences d’un événement particulier, Tnreprésente l’instant auquel la nème occurrence de
cet événement survient.
3.1 On a tout simplement
{T1> t}={Nt= 0}
car réaliser {T1> t}signifie que la première occurrence intervient à une date supérieure
àt, c’est équivalent à dire que le nombre d’occurrences entre les dates 0et test nul.
On en déduit donc que la fonction de répartition de la variable aléatoire T1est donnée
(pour t > 0) par
FT1(t) = P(T16t) = 1 P(T1> t)=1P(Nt= 0) = 1 eλt
avec également FT1(t) = 0 de façon triviale pour t60. On reconnaît la fonction de
répartition de la loi exponentielle : T1∼ E(λ).
Plus généralement et de la même façon, pour nNet t > 0,
{Tn+1 Tn> t}={NTn+tNTn= 0}
donc
FTn+1Tn(t) = P(Tn+1 Tn6t)=1P(Tn+1 Tn> t) = 1 P(NTn+tNTn= 0).
D’après l’hypothèse (2) de la définition d’un processus de Poisson, cette probabilité est
invariante par «translation dans le temps» : P(NTn+tNTn= 0) = P(NtN0= 0). Il
reste donc
FTn+1Tn(t)=1P(NtN0= 0) = 1 P(Nt= 0) = 1 eλt
avec à nouveau FTn+1Tn(t) = 0 si t60.
La variable aléatoire Tn+1 Tn, qui désigne le temps d’attente entre deux occurrences
consécutives, suit donc toujours la loi exponentielle E(λ).
3.2 Pour t>0, on a de la même façon que précédemment :
{Tn> t}={Nt6n1}=
n1
[
k=0{Nt=k}.
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