Fourrages et tourteaux - ARVALIS

publicité
SEPTEMBRE 2013
PRAIRIES
Fertilisation azotée :
appliquer la règle des
200 °C cumulés
p. 3
Adventices : déjouer les
dangers potentiels des
prairies
p. 6
RÉCOLTE DE
LA LUZERNE
Bien rythmer les coupes
dans une luzernière p. 8
Les 3 clés : savoir-faire,
technicité et bonnes
conditions de séchage
p. 10
MAÏS & BOVINS
De l'enrubannage pour
les génisses
p. 12
Le maïs épis, ration de
base techniquement
performante
p. 14
Maïs ensilage : soigner
le tassement
p. 16
TOURTEAU DE COLZA
Les bovins et ovins
allaitants en réclament
aussi
p. 18
TOURTEAU DE
TOURNESOL
Une opportunité pour
les volailles
p. 20
GRAINES DE SOJA
Des protéines concentrées
pour les filières de qualité
p. 23
Membres de
Fourrages et tourteaux :
les meilleures stratégies pour
nourrir le troupeau
Azote minéral et prairies
3
Appliquer la règle
des 200 °C cumulés
© ARVALIS-Institut du végétal
En sortie d’hiver, les besoins en azote des plantes
des prairies ne sont pas couverts par la minéralisation
de la matière organique car le sol est trop froid. Pour
déterminer la date de l’apport d’azote minéral qui
optimise la production d’herbe au printemps, la règle
des 200 °C cumulés s’applique partout.
L
a fertilisation azotée de la prairie à la
sortie de l’hiver doit permettre d’assurer
l’alimentation de la plante du démarrage
de la végétation jusqu’à sa première exploitation. Les besoins en azote sont très importants
dès le début de la croissance, et l’absorption
d’azote est déjà active lors de la mise en place
de l’appareil foliaire. À cette époque, comptetenu de la température du sol, la minéralisation de la matière organique ne permet
cependant pas d’assurer une alimentation
suffisante en azote. En conséquence, pour
assurer le potentiel de production d’herbe au
printemps, il faut apporter un complément
d’azote, surtout pour les prairies de graminées
pures.
Premier apport d’azote sur les prairies : un optimum incontestable à 200 °C
100
90
80
70
60
50
40
30
20
10
Calculer une somme
de températures
- Enregistrer la température minimale et
maximale sous abri,
- faire la moyenne journalière : (Tmin
+ Tmax)/2,
- cumuler les moyennes journalières
supérieures à 0 °C.
0
-200
Date optimale d’apport
d’azote sur prairie
Historique : de 1983 à 1986 - 3 sites (44-38-76)
Jeu les Bois (36) - départ en végétation
Saint Hilaire en Woëvre (55) - départ en végétation
Jeu les Bois (36) - début épiaison
Saint Hilaire en Woëvre (55) - début épiaison
La Jaillière (44) - foin
Jeu les Bois (36) - foin
Saint Hilaire en Woëvre (55) - foin
-100
0
100
200
300
400
500
Somme de température (°C) à la date d’apport d’azote (base 0°C) à partir du 01/01
600
Figure 1 : Date optimale du premier apport azote sur prairies. Essais ARVALIS-Institut
du végétal sur trois sites de 1983 à 1986 et 2008 et 2009. Rendement en % du
rendement maximal de chaque essai.
Pour pouvoir juger de l’effet de la date d’apport, tous les résultats d’essais sont exprimés
en % du rendement maximum obtenu pour chaque modalité (même lieu, même dose
et même stade d’exploitation). Les points jaunes représentent les résultats obtenus
dans les années 80 et les points bleus, rouge et vert sont les résultats des essais conduit
en 2008 et 2009 sur les trois fermes expérimentales ARVALIS-Institut du végétal : La
Jaillière (44), Jeu-les-Bois (36) et Saint Hilaire-en-Woëvre (55).
un premier apport d’azote selon
le contexte de l’année…
À la différence des céréales, il n’existe pas pour
les prairies de stade physiologique « repère »
pour décider de réaliser l’apport d’azote. Pour
estimer la date de départ en croissance et,
donc, la date optimale d’apport d’azote, la
somme de température base 0 °C depuis le
1er janvier de l’année sert de guide. Ce critère
présente l’avantage de prendre en compte le
contexte climatique de l’année et le lieu de
la prairie.
Des essais conduits par ARVALIS - Institut du
végétal au début des années 1980 (figure 1)
mettent en relation le rendement de l’herbe
au printemps et la date d’apport d’azote,
exprimée en somme de températures base
0 °C depuis le 1er janvier. Les résultats obtenus sur trois sites, sur quatre années, avec
trois types d’exploitation et deux doses (70
et 140 unités) montrent que la date optimale
d’apport de l’azote est de 200 °C à compter
du 1er janvier. Avant cette somme de température comme après, le rendement diminue.
Pour les apports tardifs, les risques de perte
augmentent très vite !
… et la localisation de la prairie
Les essais menés dans les années 80, en 2008
et en 2009 étaient situés dans trois régions climatiques contrastées, océanique dans l’Ouest
ARVALIS CETIOM INFOS • SEPTEMBRE 2013
4
200 °C cumulé : une règle universelle,
une date régionalisée
Carte 1 : Dates médianes (30 ans) pour cumuler 200 °C base
0 °C au 1er janvier).
à continental dans l’Est. Même
si l’effet de la date d’apport sur
la production est atténué dans
l’Ouest, l’optimum est toujours
situé à 200 °C cumulés après le
1er janvier. Cet indicateur, converti
en date à partir des données
météo historiques (médianes sur
30 ans) permet d’établir les périodes optimales pour réaliser le
premier apport d’azote sur prairie
pour toutes les régions (carte 1).
Cette règle de décision s’applique
donc bien dans toutes les ré-
ARVALIS CETIOM INFOS • SEPTEMBRE 2013
Pour optimiser la production
d’une prairie, le premier
apport d’azote se déclenche
à 200 °C cumulés depuis le
1er janvier.
gions : l’Ouest, le Centre ou l’Est
de la France. L’intérêt de cette
préconisation est d’autant plus
important que la date de récolte
est précoce. Evidemment, le premier apport d’azote sur une prairie devra être réalisé si les conditions de portance le permettent
et dans le respect des règles
fixées par la Directive Nitrates…
6
Toxique ou pas ?
Déjouer les dangers potentiels
des prairies
Renoncules, galéga officinal ou digitale : la flore des prairies est riche, mais elle
recèle parfois des plantes toxiques pour le bétail, même si les cas d’intoxication
restent rares. Certaines plantes sont bien connues, d’autres moins. Revue de détail.
F
ace à des troubles de santé voire, au pire,
un cas mortel dans le troupeau, l’éleveur
s’interroge naturellement sur ce que ses
animaux ont consommé. Certaines plantes
présentes dans les prairies ou aux abords
contiennent des substances toxiques pour le
bétail. Si les animaux les évitent en vert ou si
certaines plantes perdent leur toxicité en séchant ou avec la maturité, d’autres à l’inverse
restent dangereuses dans les foins et les ensilages ou sont toxiques par leurs graines.
son. Elles provoquent des troubles digestifs et
une inflammation de la bouche. Comme les
animaux les évitent au pâturage, les empoisonnements restent très rares. Et comme la
substance toxique, la protoanémonine, est volatile, elle disparaît après séchage : les renoncules dans les foins ne sont pas dangereuses.
Grande cigüe : toxique en vert,
mais le danger est faible.
© J.H. Moral
Renoncule âcre : non consommée en
vert, pas de risque après séchage.
humides ou des bandes enherbées. Les fleurs
et les gousses de cette légumineuse sont très
toxiques. Elles contiennent plusieurs substances dangereuses qui ne disparaissent pas
lorsque la plante sèche : deux alcaloïdes, la
Autre plante bien connue des prairies, la
galégine et l’hydroxygalégine, ainsi qu’un glugrande cigüe (Conium maculatum) renferme
coside flavonique, la galutéoline. La plante séau moins cinq composés toxiques,
chée est la plus dangereuse :
dont la coniine. Elle en contient
un foin contenant 10 %
Les fleurs et
dans toutes ses parties, notamment
les gousses du de galéga peut entraîner la
les fruits. Mais la plante desséchée
mort chez des bovins ou des
galéga officinal ovins, souvent de façon très
sur pied ou mêlée au foin perd
sont à proscrire rapide après l’ingestion. La
quasiment toute sa toxicité. Les
empoisonnements sont donc égadose toxique est de 4 kg de
dans le foin.
lement très rares. D’une part parce
plante fraîche pour les boque la plante exhale une odeur désagréable
vins, 400 g frais ou 100 g secs pour les ovins,
lorsqu’on la froisse et est peu consommée par
voire seulement 40 g secs pour les chevaux.
le bétail. D’autre part, il faudrait qu’un cheval
ingère 2 kg de feuilles fraîches ou qu’un bovin
Le séneçon jacobée (Senecio jacobaea)
en consomme 4 à 5 kg pour atteindre la dose
conserve lui aussi sa toxicité après la récolte. Il
mortelle, ce qui est très improbable.
se rencontre surtout dans les prairies sèches ou
saines, souvent en pieds isolés. Le maximum
Il en est tout autrement pour le galéga offide risque existe dès les premiers stades de
cinal (Galega officinalis), encore appelé
la végétation, par la présence de substances
sainfoin d’Espagne ou lilas d’Espagne. Il se
dangereuses pour le foie (alcaloïdes hépatorencontre heureusement rarement dans des
toxiques), principalement pour les chevaux et
prairies entretenues, plutôt dans des zones
les bovins. Les intoxications sont rares au pâtu© D.R.
© A. Décarrier, ARVALIS-Institut du végétal
La plus répandue d’entre elles est probablement la renoncule, avec plusieurs espèces :
la renoncule âcre (Ranunculus acris), plus
connue sous le nom de bouton d’or, très
courante dans les prairies fraîches et pâturées, la renoncule bulbeuse (Ranunculus bulbosus) dans les milieux secs et la renoncule
rampante (Ranunculus repens) dans les sols
argileux, humides et riches en humus. Elles
sont toxiques à des degrés variables, mais à
un niveau qui reste faible. Les renoncules sont
toxiques en vert, surtout les feuilles à la florai-
ARVALIS CETIOM INFOS • SEPTEMBRE 2013
Galéga officinal : très toxique,
à proscrire absolument dans
les foins.
Toxique ou pas ?
7
Plantes toxiques des prairies : à ne pas négliger
Organes toxiques
Espèces animales Observations
sensibles
Grande ciguë
Toute la plante.
Toutes
Empoisonnements rares : mauvaise odeur, seules les plantes fraîches
Les plus toxiques : tige, feuilles, graines
sont toxiques
Colchique d’automne
Toute la plante.
Bovins, ovins, chevaux Intoxications par les plantes fraîches et sèches, ou par consommation
Graines et bulbe : les plus toxiques
des fleurs
Digitale pourpre
Toute la plante, surtout les feuilles
Toutes
Empoisonnements très rares
Euphorbes épurge, characias Toute la plante
Bovins, ovins
Empoisonnements rares : plante peu appétente, goût amer. Possibles
par les foins (la toxicité persiste après séchage)
Galéga officinal
Parties aériennes. Toxicité maximale à la Toutes
Empoisonnements surtout par les foins. Mortalité rapide des animaux
floraison et à la fructification
après ingestion
Glycérie aquatique
Toute la plante
Bovins
Les risques sont importants les années sèches ou par distribution de
foin
Mercuriale annuelle
Toute la plante, surtout lors de la
Toutes
Intoxications possibles, même avec des plantes séchées ou ensilées
maturation des fruits en fin d’été
Millepertuis
Toute la plante.
Bovins, ovins, chevaux Intoxications rares, uniquement par ingestion de fourrages conservés
Fleurs : les plus toxiques, surtout en
chez les équins. Photosensibilisations (hypéricisme) chez les bovins à
début de floraison
peau et muqueuses non pigmentées.
Morelle noire
Toute la plante.
Toutes
Intoxications rares.
Baies vertes : les plus toxiques
Lors de consommation de la plante entière, de fourrage ou d’ensilage
contaminés.
Relativement peu de cas d’intoxications dus aux baies
Moutarde noire
Graines
Toutes
Intoxications rares, lors d’ingestion de graines, de tourteaux, d’ensilages
contaminés
Nielle des blés
Toute la plante.
Bovins, chevaux
Intoxications rares. La plante est refusée par le bétail, mais les graines
Graines : les plus toxiques
se mélangent aux moissons
Potentille
Toute la plante
Chevaux
Intoxications rares, uniquement par ingestion de fourrages conservés
chez les équins
Renoncules
Toute la plante
Toutes
Empoisonnements rares : pas consommées par les animaux, toxicité
faible, seules les plantes fraîches sont toxiques
Séneçon jacobée
Toute la plante
Chevaux, bovins
Intoxications rares, par ingestion de fourrages conservés (plante en vert
peu consommée)
© D.R.
rage, car il n’est pas consommé pas en vert. Le
danger augmente avec l’ensilage, car les animaux ne peuvent pas trier lors de l’ingestion.
Séneçon jacobée : prendre
garde aux ensilages.
Les animaux ne consomment généralement
pas non plus de prêles au pâturage. Sauf si la
prairie en est entièrement envahie. La prêle des
champs (Equisetum arvense) est présente dans
des prairies très dégradées, au bord des chemins ; la prêle des marais (Equisetum palustre)
préfère, quant à elle, les prairies inondées ou
marécageuses. Elles contiennent plusieurs
composés toxiques : thiaminase (provoquant
une déficience en thiamine ou vitamine B1,
surtout chez les chevaux), alcaloïdes (palustrine, équisétine), saponosides et nicotine. Les
ruminants sont peu touchés par la déficience
en thiamine, parce que cette substance est
produite dans le rumen. Toutefois, l’intoxication
La digitale pourpre (Digitalis purpurea) se
rencontre rarement dans les prairies, mais
en bordure des champs et dans les haies.
Les feuilles sont les plus toxiques. Les empoisonnements, extrêmement rares, sont
liés à la consommation de foin contenant
des digitales, les animaux n’y touchent pas
quand elles sont fraîches. Les composés qui la
rendent toxiques, la digitoxine et la digoxine,
lui confèrent également des vertus thérapeutiques, notamment cardiotoniques.
Digitale pourpre : ses feuilles restent
très toxiques, même après séchage.
peut survenir aussi bien chez les bovins que
chez les équins, après une consommation de
foin contenant plus de 5 % de prêles.
© J. L Viron, ARVALIS-Institut du végétal
Plantes toxiques
Prêle des champs : méfiance dans
les prairies très dégradées.
Pour en savoir plus
• 2003, « Guide pour un diagnostic prairial »,
F. Hubert et P. Pierre, Chambres d’Agriculture
Maine-et-Loire et Mayenne
• Site internet de l’Ecole Nationale Vétérinaire
de Toulouse : http://www.vegetox.envt.fr
• 1973, « Plantes vénéneuses », C. Jean-Blain
et M. Grisvard, Edition « La maison rustique »
© D.R.
ARVALIS CETIOM INFOS • SEPTEMBRE 2013
8
Exploitation des luzernes
La 3e coupe au
rendement plus faible
est celle à privilégier
pour la coupe à
floraison.
Bien rythmer les coupes
dans une luzernière
L
es essais menés par ARVALIS-Institut du
montagne, ces dates peuvent facilement être
végétal au fil des ans montrent que le
décalées d’une dizaine de jours voire plus serapport optimal entre le niveau de prolon l’altitude. Pour la zone méditerranéenne, il
duction de matière sèche et
faut au contraire les
la teneur en protéines d’une
avancer de presque
Un bon compromis,
luzernière est obtenu en rédeux semaines.
ménageant la quantité
gime de quatre coupes par an.
Les coupes suiet la qualité, consiste à
Comment les répartir pour obvantes sont égarécolter le premier cycle lement détermitenir les meilleurs résultats ? Le
entre le 10 et le 20 mai.
rendement d’une coupe de lunantes pour assurer
zerne augmente d’autant plus
la pérennité de la
que le stade de récolte est retardé… Sauf que,
luzernière. Lorsqu’elles sont trop fréquentes,
dans le même temps, la valeur alimentaire du
elles ne permettent pas à la plante de reconsfourrage chute, l’optimum étant généralement
tituer ses réserves racinaires (encadré). Les
obtenu au stade début de bourgeonnement
(figure 1). C’est donc à ce stade que doit avoir
lieu la première coupe. Cette date permet de
produire un fourrage de bonne qualité pour
une luzerne destinée à être ensilée ou enrubannée. Une telle stratégie pénalise un peu
’aptitude de la luzerne à la repousse
le rendement de la première coupe. Mais au
dépend du niveau des réserves carbonées
niveau du rendement total, la donnée à priviet azotées contenues dans le pivot. Dans les
légier, les résultats sont très corrects car, alors,
deux semaines suivant une coupe, sa vitesse de
la seconde coupe se réalise avant la séchecroissance est directement fonction des réserves
azotées puisées dans les racines. La plante
resse estivale.
Les repousses fonction
des ressources racinaires
L
Le 15 mai, une date pivot
Le choix de la date de la première coupe est
donc crucial. Dans les conditions françaises,
le 15 mai constitue une date pivot. Avant, il
est possible de récolter des fourrages de très
haute valeur nutritive avec des rendements
corrects. Au-delà, plus la fauche est retardée,
plus le rendement de la première coupe est
important mais plus la concentration énergétique et azotée du fourrage devient insuffisante pour les animaux à besoins élevés. Un
bon compromis, ménageant la quantité et la
qualité, consiste à récolter le premier cycle
entre le 10 et le 20 mai. Pour les régions de
ARVALIS CETIOM INFOS • SEPTEMBRE 2013
peut alors mobiliser jusqu’à 40 unités d’azote
par hectare à partir de ses réserves racinaires.
Si les coupes ont lieu trop fréquemment ou si
la nutrition azotée des plantes est déficiente,
le système racinaire s’appauvrit en azote
mobilisable et la repousse est alors plus faible.
Des coupes trop rapprochées remettent ainsi en
cause la pérennité de la luzerne.
En conditions agronomiques non limitantes
(bonne nutrition minérale et hydrique, absence
de pathogènes et de ravageurs), la croissance
aérienne de la luzerne dépend ensuite de trois
éléments : l’indice foliaire, qui correspond à la
surface totale de feuilles par unité de surface du
sol, la somme des températures reçues depuis
la coupe et le rayonnement photosynthétique
intercepté par le couvert.
© A.L. Bourigault, ARVALIS-Institut du végétal
Un rythme de quatre coupes par an optimise le
rendement, la qualité des fourrages produits et la
pérennité des luzernières. La première coupe aura
lieu au début de bourgeonnement, puis la récolte
des repousses toutes les cinq ou six semaines en
ménageant une floraison au moins une fois par an
afin que la plante reconstitue ses réserves.
expérimentations indiquent qu’un écart de
35 à 45 jours entre les coupes constitue une
bonne solution. Il est cependant nécessaire
de rallonger l’intervalle d’une semaine entre
la première et la seconde coupe si la première
exploitation a eu lieu au stade début de bourgeonnement : c’est un moyen de garantir une
meilleure reconstitution des réserves.
Au moins une floraison
Il est conseillé de laisser fleurir la luzerne au
moins une fois dans l’année afin de permettre
la reconstitution des réserves (10 % de fleurs
suffisent !). La plante les stocke sous forme de
sucre et d’amidon dans ses racines, et les mobilise en fin d’hiver ou après une coupe, pour
assurer la production fourragère. Cette reconstitution est assurée par le système aérien dès
qu’il est suffisamment développé. Les réserves
atteignent ainsi leur niveau normal au début
de la floraison (figure 1). La troisième coupe
s’adapte le mieux à cette contrainte, car
son rendement est plus faible que celui des
coupes précédentes.
Des réserves au top avant
les premières gelées
Dans les zones les plus continentales de
culture de la luzerne, la dernière coupe de
l’année doit intervenir autant que possible
un mois et demi avant les premières gelées.
Celles-ci entraînent la mise en repos de la
luzerne : il est important que la plante puisse
au préalable reconstituer ses réserves afin de
bien redémarrer au printemps suivant.
En pratique, il est parfois difficile de respecter l’ensemble de ces recommandations, notamment dans un système d’affouragement
en vert où il faut exploiter tôt une partie des
Maïs
9
La valeur alimentaire baisse en cas de récolte tardive
Tonnes
de MS/ha
8
Qualité
optimum
UFL/kg MS
1,0
7
MAT
(% MS)
0,9
6
30
5
0,8
4
20
3
15
0,7
2
10
10
20
30
40
50
60
Jours
Figure 1 : Évolution du rendement et de la valeur alimentaire
selon le stade de récolte (source tables INRA 2007).
Toute augmentation de production se traduit par une
diminution du rapport feuilles sur tiges et, donc, de la valeur
nutritive de la biomasse produite. Qu’elle soit due à une
récolte plus tardive ou bien à une croissance plus rapide
de la luzerne, la part des feuilles, plus riches en énergie et
protéines, se réduit au profit des tiges qui, dans le même
temps, durcissent et se lignifient. La valeur énergétique et
protéique du fourrage se dégrade donc d’autant plus que le
stade de récolte de la luzerne est tardif.
Les réserves au maximum en début de floraison
CROISSANCE
DE LA PLANTE
Floraison
Début fl
oraison
Bourgeonnement
Luzerne
à 30 cm
Temps
RESERVE
RACINAIRE
Figure 2 : Évolution de la croissance et des réserves racinaires à la
première pousse ou après une coupe (selon Demarly).
Stockées sous forme de sucre et d’amidon dans les racines,
les réserves sont mobilisées en fin d’hiver ou après
une coupe, pour assurer la production fourragère. Leur
reconstitution est permise par le système aérien dès qu’il est
suffisamment développé. Les réserves atteignent ainsi leur
niveau normal au début de la floraison.
surfaces de façon à étaler les
repousses régulièrement dans
l’année. Mais il faut se rappeler
que l’exploitation intensive d’une
luzernière pénalise la durée de
vie de la culture : les rendements
se réduisent au bout de la troisième année.
ARVALIS CETIOM INFOS • SEPTEMBRE 2013
10
Réussir ses récoltes de luzerne
Les 3 clés : savoir-faire, technicité
et bonnes conditions de séchage
L’objectif de valorisation de la luzerne (type d’animaux à nourrir, importance de
ce fourrage dans la ration...) détermine très souvent son mode de récolte. Mais
ensilage, foin et enrubannage peuvent se succéder dans l’année au gré des
coupes successives selon les conditions de séchage au moment de la récolte et
les équipements disponibles pour récolter, stocker puis distribuer.
pour les bovins et un peu plus courte pour les
petits ruminants. Ainsi, les sucres des brins
hâchés, libérés rapidement, seront immédiatement disponibles pour le démarrage rapide
des fermentations. Les bactéries lactiques se
mettent au travail dès que l’oxygène enfermé
dans le silo est épuisé par la respiration du
fourrage. Si la récolte s’effectue à moins de
35 % de MS, il faudra compenser l’insuffisance d’acidification par l’ajout de conservateurs (acide formique, sels d’acides ou encore
enzymes cellulolytiques), d’autres sources de
sucres comme la mélasse ou de produits absorbant l’excès d’humidité (pulpes sèches…).
Les feuilles de luzerne se
dessèchent 1,5 à 2 fois plus
vite que les tiges.
© N. Cornec
L’enrubannage : pour sécuriser
les récoltes
L
a récolte de la luzerne, en ensilage, enrubannage ou foin, dépend de bonnes
conditions de séchage au champ : de un
à trois jours pour l’ensilage, de deux à quatre
pour l’enrubannage et de trois à six pour le foin.
Pour sécuriser la récolte de la luzerne, d’autres
modes de récolte existent mais ils nécessitent
des équipements et des investissements spécifiques : affourragement en vert, silo-tours,
séchoir en grange, unités de déshydratation…
La luzerne naturellement difficile
à ensiler… mais, c’est possible !
L’ensilage est pratiqué généralement à la
première coupe, quand la surface en luzerne
permet de confectionner un silo de taille suffisante. Comme la teneur en sucres de ce
fourrage est faible (de 7 à 8 % contre 15 à
20 % pour des graminées type ray-grass) et
ARVALIS CETIOM INFOS • SEPTEMBRE 2013
que ses teneurs en protéines et en minéraux
sont élevées, la baisse du pH nécessaire à
la conservation exige que le taux de matière
sèche dépasse 35 % (un à trois jours peuvent
être nécessaires). Dans ce cas, un pH de 4,6 à
4,7 est suffisant pour empêcher le développement des butyriques.
Réaliser un pré-fanage
suffisant pour bien conserver
la luzerne.
La bonne conservation de l’ensilage de luzerne en silo à plat exige donc de redoubler
de vigilance sur le degré de pré-fanage, mais
aussi sur le tassement et l’herméticité du silo.
Le système de hachage de l’ensileuse homogénéise la teneur en matière sèche : il faut
viser une longueur de brins de 2 cm environ
Les éleveurs plébiscitent de plus en plus
l’enrubannage de luzerne car cette technique
combine de nombreux avantages : première
coupe plus précoce au printemps, moindres
pertes au champ que pour le foin… Deux
conditions sont essentielles pour limiter le développement de spores butyriques en cours
de conservation : l’absence de terre dans les
balles (grâce à une hauteur de coupe d’au
moins 6 à 8 cm) et une MS de 50 à 60 %. Ainsi, le taux de MS en chaque point de la balle
enrubannée sera d’au moins 35 %.
6 couches de plastique ?
L
e nombre de couches de film plastique
pour l’enrubannage dépend avant tout
de la qualité de sa pose. Si 4 couches bien
posées suffisent généralement pour assurer
l’herméticité d’une balle de graminée au stade
feuillu, il vaut mieux passer à 6 couches voire 8
en balles de luzerne, car les tiges ont tendance
à perforer le plastique. C’est encore plus
nécessaire pour les balles rectangulaires.
Réussir ses récoltes de luzerne
11
La qualité du pressage sera également déterminante sur les quantités d’oxygène emprisonnées dans la balle : elles doivent être les plus
faibles possibles en visant une densité des
balles d’au moins 200 à 220 kg MS/m3. Cet
objectif sera plus facile à atteindre si la presse
est équipée du système rotocut qui coupe les
tiges en tronçons d’environ 5 cm, si les andains
à presser sont réguliers et homogènes (surtout
en pressage à balles rondes) et si le nombre de
tours de liage filets ou ficelles est suffisant.
Le foin, le risque de pertes
est au champ
Plus encore que les deux précédents modes
de récolte, le savoir-faire est essentiel à la
réussite de la récolte du foin de luzerne. Les
pertes au champ peuvent dépasser 30 % du
rendement initial quand les interventions de
récolte ne sont pas maîtrisées. Ce sont les
feuilles, deux à trois fois plus riches que les
tiges, qui occasionnent le plus de pertes en se
desséchant 1,5 à 2 fois plus vite que les tiges.
Pour le fauchage, il est conseillé d’intervenir
après la rosée de façon à optimiser le séchage
le 1er jour. L’idéal pour les légumineuses est
la faucheuse conditionneuse à rouleaux qui
écrasent et plient les tiges pour une meilleure
dessiccation. Il est déconseillé d’utiliser une
conditionneuse à fléaux, « véritables effeuilleuses » pour les feuilles de luzerne. Quant
à la faucheuse à disques classique, elle étale
plus largement l’andain et économise un
premier fanage aussitôt après la fauche pour
amener le fourrage de 15 à 35-45 % de MS.
Le fanage et l’andainage sont les interventions
les plus délicates avec des risques de pertes
importantes. Ne jamais intervenir en pleine
Fanage : adapter
vitesse d’avancement et
de rotation des toupies
D
es mesures de qualité de fourrage sur de
la luzerne, effectuées par ARVALIS - Institut
du végétal dans le cadre d’un essai mené dans
l’Aveyron en 2012 par le pool machinisme
Midi-Pyrénées et coordonné par les Cuma
de Midi-Pyrénées, ont montré que la simple
baisse de la vitesse de rotation des toupies de
faneuse de 100 tr/min et l’ajustement de la
vitesse d’avancement du tracteur préservent de
plus d’un point la Matière Azotée Totale.
chaleur mais impérativement pendant la rosée. Les fenêtres d’intervention sont parfois
limitées à 1 à 2 h en fonction des conditions
météo ce qui confère un avantage aux faneuses et andaineurs de grande largeur pour
augmenter les débits de chantier.
Le fanage est souvent inutile en 3e et 4e coupe
si la faucheuse a pu étaler l’andain. Le foin de
luzerne ne doit pas « voler » en l’air, mais il
doit être simplement remué sans être plaqué
au sol après le passage de la faneuse. Dans
l’idéal, il faudrait baisser la vitesse d’entraînement de la faneuse à la prise de force à moins
de 300 tr/min.
L’andainage (voir un pré-andainage quand le
rendement est conséquent) doit se faire idéalement à environ 50 % à 60 % de MS pour
atteindre les 80-85 % de MS qui autorisent
une conservation en foin sans risques. Là aussi, il est impératif d’intervenir le matin dans la
rosée et de créer des andains aérés pour terminer le séchage.
Le pressage se fera le matin après la rosée ou
tard le soir à la reprise d’humidité. Les pertes
sont minimisées par la récolte de gros andains
avec les presses à balles rondes à chambre variable : le temps de rotation dans la chambre
est alors limité. Le liage filet est indispensable
pour ne pas gâcher toutes les précautions
mises en œuvre en amont.
L’idéal pour les légumineuses est la
faucheuse conditionneuse à rouleaux
qui écrasent et plient les tiges pour une
meilleure dessiccation.
© G. Crocq, ARVALIS-Institut du végétal
© A.L. Bourigault, ARVALIS-Institut du végétal
Avec une récolte en ensilage à plus de
35 % de MS, la luzerne exige un excellent
tassage.
ARVALIS CETIOM INFOS • SEPTEMBRE 2013
12
Finition des bovins
De l’enrubannage
pour les génisses
Des régimes produits sur les exploitations, à base
d’enrubannage de fétuque élevée ou de luzerne et
de blé, conviennent pour engraisser des génisses
limousines « rajeunies », présentant des viandes très
claires et des gras blancs.
L
es génisses limousines dites « rajeunies »
Elles sont abattues en février 2013, après 135 à
140 jours d’engraissement, âgées de 15,5 mois.
sont abattues entre 13 et 15 mois, essentiellement pour l’exportation, mais ce
Pour sécuriser la ration, l’enrubannage de fénouveau débouché demande des viandes très
tuque est complété avec 3 kg de blé, 1 kg de
claires et un gras blanc. L’engraissement exige
tourteau de colza et 1 kg de tourteau de tourdonc des régimes capables d’assurer ces spécinesol. L’enrubannage de luzerne est, quant à
ficités tout en sécurisant l’alimentation. L’enrului, complété avec 3,5 kg de blé (tableau 1).
bannage d’herbe, de
L’enrubannage est
fétuque élevée ou de
disponible à voUtiliser de l’enrubannage de
luzerne, permet de
lonté à l’auge, le
fétuque permet de gagner
construire des rations
concentré est disenviron 200 kg de blé et 20 kg
simples
produites
tribué pour moitié
sur l’exploitation et
le matin et pour
de tourteau par génisse à
suffisamment denses
moitié le soir.
l’engraissement par rapport à
en énergie pour finir
L’ e n r u b a n n a g e
une ration sèche blé, tourteau
des génisses jeunes,
de fétuque élede colza, tourteau de tournesol. vée a été récolté
tout en sécurisant au
maximum la ration
sur la Ferme des
et en assurant les couleurs de la viande et
Bordes avant épiaison, entre le 5 et 15 mai en
du gras demandées par le marché. La Ferme
1er cycle, à 60 % de matière sèche. Le stade
Expérimentale des Bordes* l’a confirmé en
de récolte est primordial (autour de 750 °C en
expérimentant, à l’automne 2012, deux rations
base 0 à partir du 1/02) afin de garantir une
mixtes à base d’enrubannage et de blé. Pour les
digestibilité et une valeur énergétique élevées
deux types de prairies, afin d’obtenir un fourdu fourrage, nécessaires pour engraisser des
rage de bonne qualité, le fourrage est récolté
jeunes bovins. Il apporte 0,75 UFV/kg MS en
tôt : en début d’épiaison pour la fétuque élevée
moyenne. L’enrubannage de luzerne a été
et début bourgeonnement pour la luzerne.
acheté à l’extérieur. Il s’agit d’une première
Les résultats présentés ne sont cependant iscoupe fauchée le 18 mai au stade début
sus que d’un seul essai, sachant qu’un second
bourgeonnement et récoltée à un taux de
essai avec 16 génisses par lot a démarré fin
70 % de MS. Il apporte 0,67 UFV/kg de MS en
mars 2013. Il convient donc d’attendre les
moyenne. La qualité de conservation des deux
résultats complets de ces deux essais avant de
enrubannages est bonne.
conclure définitivement sur l’utilisation de ces
régimes mixtes enrubannage + blé pour la
Un « plus » pour l’enrubannage
finition de génisses limousines « rajeunies ».
de fétuque
Des rations mixtes
enrubannage et blé
L’enrubannage est distribué à volonté pendant
l’intégralité de l’engraissement et constitue
la ration de base de deux lots de 15 génisses
limousines. Elles pèsent 336 kg vif en septembre 2012 et sont alors âgées de 11 mois.
ARVALIS CETIOM INFOS • SEPTEMBRE 2013
Les génisses affichent de bonnes croissances
avec l’enrubannage de fétuque élevée : avec
1 025 g de gain moyen quotidien (GMQ),
les performances sont semblables à celles
obtenues avec une ration sèche testée précédemment à base de blé à volonté, de tourteau de colza et de tourteau de tournesol. Les
croissances obtenues avec l’enrubannage de
luzerne sont en retrait de 163 g/jour, à 862 g/
jour en moyenne. Ceci est sans doute dû à
la plus faible valeur énergétique de la luzerne
et à une complémentation énergétique insuffisante de la ration (tableau 2). Les consommations totales sont similaires entre les deux
régimes. L’indice de consommation se révèle
moins bon pour le régime « enrubannage de
luzerne » que pour le régime « enrubannage
de fétuque », avec 9,97 contre 8,83 kg MS
consommés par kg de gain de poids vif.
Les animaux n’ont présenté aucun problème
sanitaire particulier. La couleur des carcasses
et celle du gras sont conformes à la demande
du marché.
Ces régimes sont particulièrement adaptés à
des naisseurs qui « repoussent leurs génisses »
et envisagent de les finir sur des durées d’engraissement très courtes, inférieures à 4 mois,
pour valoriser des bâtiments existants, par
exemple en vêlages d’automne. Par rapport
à une ration sèche, utiliser de l’enrubannage
de fétuque leur permet d’économiser environ 200 kg de blé et 20 kg de tourteaux par
génisse à l’engraissement.
* À Jeu-les-Bois dans l’Indre, la Ferme Expérimentale
des Bordes regroupe ARVALIS - Institut du végétal et 4
Chambres d’Agriculture (Indre, Cher, Creuse et HauteVienne) au sein de l’OIER des Bordes
Plus d’infos
P
laquette « Engraissement de génisses
limousines à base d’herbe enrubannée » à
paraître fin 2 013.
L'enrubannage complémenté de blé
pour sécuriser la ration apporte une
solution technique pour engraisser
des génisses limousines "rajeunies".
13
© ARVALIS-Institut du végétal
Maïs
Deux régimes mixtes : des enrubannages sécurisés
(tableau 1)
kg/génisse/jour
Enrubannage de fétuque Enrubannage de luzerne
Enrubannage de fétuque élevée
À volonté
Enrubannage de luzerne
À volonté
Paille
À volonté
À volonté
Blé
3
3,5
Tourteau de colza (industriel)
1
Tourteau de tournesol (industriel)
1
CMV 0-25-5
0,18
0,18
Source : ARVALIS – OIER des Bordes
Performances zootechniques :
l’enrubannage de fétuque en tête (tableau 2)
Poids vif début d’essai (kg)
Poids vif à l’abattage (kg)
Durée d’engraissement (j)
G.M.Q. engraissement (1) (g/j)
Poids de carcasse (kg)
GMQ carcasse (2) (g/j)
Rendement commercial (%)
Note de conformation
Note d’état d’engraissement
Consommation en kgMS/jour
IC vif (3)
IC carcasse (4)
Enrubannage de fétuque Enrubannage de luzerne
336
336
475
457
134
139
1 025
862
280,5
269,1
728
621
59,1
58,9
UU-/R+
3,0
3,0
9,05
8,62
8,83
10,03
8,89
9,97
Source : ARVALIS – OIER des Bordes
(1) GMQ engraissement : Gain moyen quotidien engraissement vif (Moyennes pondérées par la durée de la période)
(2) GMQ carcasse : Gain moyen quotidien carcasse (Moyennes pondérées par la
durée de la période)
(3) IC vif : Indice de Consommation vif : kg de MS consommés/kg gain de vif
(4) IC carcasse : Indice de Consommation carcasse : kg de MS consommés/kg gain
de carcasse
ARVALIS CETIOM INFOS • SEPTEMBRE 2013
Engraissement de jeunes bovins
© ARVALIS-Institut du végétal
14
Le maïs épis, ration de base
techniquement performante
Au lieu d’ensiler du maïs entier, certains élevages ensilent leurs excédents
de maïs fourrage en épis complets. Sur la ferme expérimentale de St Hilaireen-Woëvre, cette ration de base, très bien consommée par de jeunes bovins
charolais, leur a assuré une vitesse de croissance élevée.
L
’ensilage de maïs épis complets présente de bonnes valeurs alimentaires, un atout que certains élevages valorisent depuis plusieurs années.
La ferme expérimentale professionnelle Lorraine (FEPL) de Saint Hilaireen-Woëvre (55) a donc suivi des jeunes bovins charolais nourris avec cet
aliment en ration de base en 2012 – 2013. Les premiers résultats obtenus
témoignent d’une vitesse de croissance élevée avec des niveaux de consommation importants.
Grains, rafle et spathes récoltés à l’ensileuse
L’ensilage de maïs en épis complets se réalise un peu plus tard que l’ensilage
plante entière, l’éleveur pouvant accepter une maturité plus avancée du grain
sans se soucier de l’état des feuilles et des tiges. Munies d’un bec cueilleur à
maïs de moissonneuse batteuse, les ensileuses récoltent en effet uniquement
les épis avec un objectif de 50 à 65 % de MS, pour l’ensemble composé
des grains de maïs, de la rafle et des spathes. Le reste de la plante (tige plus
ligneuse et feuilles) est broyé et laissé au sol. En conditions normales, le rendement d’ensilage en épis complets atteint les deux tiers de celui en plante
entière. Le produit est stocké, tassé en silo comme de l’ensilage de maïs. Il est
conseillé de bien dimensionner la taille du silo ainsi que sa hauteur pour une
avancée quotidienne suffisante du front d’attaque (20 cm minimum). Bien
conservé, cet aliment est très bien consommé.
ARVALIS CETIOM INFOS • SEPTEMBRE 2013
En ration de base : de bons résultats techniques
Résultats des JB 2012-2013 de la FEPL à St Hilaire en Woëvre (55)
Maïs épis + 2,8 kg de tourteau de colza
Poids initial (kg) : 404,6 - Poids final (kg) : 738,4
Âge moyen à la vente (mois) :15,5 - Durée (j) : 176
GMQ (g/jour) : 1 894 - GMQ carcasse (g/jour) : 1 187
Poids de carcasse (kg) : 432,2
Rendement (%) : 58,5
Classement : U- (5 % U + ; 26% U = ; 63 % U- ; 6 % R +)
État d’engraissement : 3 (100 % 3)
Bilan de consommation (kg brut consommés)
/jour
Maïs épis
12,67
(8,27 kg MS)
Tourteau de colza
2,55
(2,27 kg MS)
CMV 0/19
0,19
(0,19 kg MS)
Total
15,41
(10,73 kg MS)
IC (1)
IC carcasse (2)
Total
2 234
450
33
2 717
5,67
9,05
1 - IC vif : Indice de consommation vif : kg MS consommés/kg gain vif
2 - IC carcasse : Indice de consommation carcasse : kg MS consommés/
kg gain de carcasse
Engraissement de jeunes bovins
Le maïs épis est un aliment riche en énergie
(1,05 UFV/kg de matière sèche) avec une teneur en cellulose 4 fois plus élevée que celle
du maïs grain. Pauvre en matière azotée totale, la ration qui l’incorpore doit être enrichie
avec un correcteur azoté.
Maïs épis à volonté
Les animaux mis à l’engraissement sont nés
sur la FEPL et sont tous issus d’insémination artificielle. Le sevrage a eu lieu le 6 septembre 2012 à un poids vif moyen de 405 kg.
Les animaux n’ont reçu aucune complémentation depuis leur naissance.
Le GMQ carcasse s’élève
à 1 187 g/j.
Après une transition de 5 semaines, la ration
journalière se composait de maïs épis à volonté (65,3 % de MS) complété avec 2,8 kg
de tourteau de colza et 200 g CMV (0-19). Les
animaux ont à disposition permanente de la
paille de qualité et un bloc de sel.
Maïs épis complets : un concentré énergétique et sécurisé
Composition physique
grain + de la rafle + spathes
Hachage : 80 % des particules < 2 mm
Mélange homogène : amidon et parois cellulosiques
% MS : 50 à 65 % MS
Amidon : 61,6 % de la MS
MAT : 8,3 % de la MS
Cellulose brute : 9 % de la MS
UFL : 0,57 UFL/kg brut
1,08 UFL/kg MS
UFV : 0,56 UFV/kg brut
1,05 UFV/kg MS
PDIN : 32 g/kg brut
61 g/kg MS
PDIE : 52 g/kg brut
98 g/kg MS
Complément de la ration de la VL : 2 à 4 kg brut/j
Engraissement des jeunes bovins en ration de base ou en complément
Economie de séchage
Teneur en cellulose plus élevée
Hachage fin, tassement du silo
Avancement du front d’attaque (5 cm/j en hiver, 10 cm/j en été)
Composition chimique
Valeurs alimentaires
Table INRA 2007
53 % MS
Place dans la ration
Atouts
Précautions
Remplissage du grain, %
100
MGS
MGHE
MGH épis
Une ration bien valorisée
par les jeunes bovins
© ARVALIS-Institut du végétal
Le régime distribué donne de bons résultats de croissance ce qui écourte la durée
d’engraissement. Le GMQ carcasse s’élève à
1 187 g/j soulignant une très bonne efficacité de la ration. En moyenne, les animaux
ingèrent 10,73 kg de matière sèche par jour
(hors paille). Cette quantité est élevée mais
l’efficacité alimentaire de ce régime est bon
grâce notamment au GMQ élevé (indice de
consommation hors paille : 5,67 kg de MS)
Il n’y pas de contre-indication à utiliser du
maïs épis complet en ration de base pour
l’engraissement de jeunes bovins capables
de bien valoriser des rations très énergétiques
(charolais, limousin, blonde d’aquitaine). Cela
demande, comme pour toutes les rations
riches en céréales, de la rigueur, de la surveillance et de la vigilance du sevrage jusqu’à
l’abattage avec l’application stricte des recommandations (encadré). La décision d’engraisser avec ce type d’aliment est surtout liée son
intérêt économique, défini par le prix d’achat.
15
broyé
ensilé
85
MAÏS
FOURRAGE
maïs
séché
entier
inerté
Récolte
grain
Récolte
grain
(+rafle + spathes)
MGH = Maïs Grain
Humide
Maïs épis
complet
65
H2O grain
: 50-55 %
Août
35
Septembre
30
Octobre
25
20 humidité du grain, %
Novembre
Une transition bien soignée et de la fibre,
toujours de la fibre…
G
age de réussite de l’engraissement, l’adaptation de l’animal à un nouvel aliment doit se faire
sans précipitation pour éviter tout problème métabolique. La transition doit durer au minimum 5
semaines. Mais, plus l’animal est lourd au sevrage, plus la durée de transition sera longue.
Le respect d’un plan de transition adapté à la production est essentiel.
• La distribution de céréale doit se réaliser deux fois par jour (matin et soir) et augmente seulement d’un
kilo par semaine et par jeune bovin, en deux fois (un palier de 0,5 kg tous les 3 à 4 jours).
• La paille de blé est distribuée tout au long de l’engraissement. Cette fibre, primordiale, permettra à
l’animal de ruminer. Elle doit être appétente et conservée dans de bonnes conditions (trier les bottes de
paille au stockage).
• Le correcteur azoté minéral et vitaminique devra bien équilibrer la ration
Paille, eau, ration et bloc de sel pur sont disponibles à volonté. Pour sécuriser le régime, un apport
de complémentaire azotée fibreux, de pulpe de betterave (2 kg/j) et/ou des apports de bicarbonate
de soude peuvent être recommandés. Les animaux sont déparasités (strongle et douve) et vaccinés
(entérotoxémie, RSV…).
Toute chute d’appétit ou des fèces jaunes et liquides doivent alerter (début d’acidose).
ARVALIS CETIOM INFOS • SEPTEMBRE 2013
16
Récolte du maïs fourrage
© AGPM
La qualité du tassement du maïs
fourrage influence non seulement la
rapidité du démarrage de l’acidification
mais aussi sa conservation lors de
l’ouverture du silo.
Soigner le tassement…
Le tassement soigneux du maïs fourrage limite les pertes tant à la fermeture qu’à
l’ouverture du silo : c’est à l’ensileuse de s’adapter au rythme du tassement soit en
réduisant son débit au champ, soit en alimentant deux silos équipés chacun d’un
tracteur tasseur. Il faut tout mettre en œuvre pour que l’oxygène présent dans le
silo disparaisse le plus rapidement possible.
A
vec l’augmentation du débit des chantiers de récolte grâce aux ensileuses
puissantes et rapides, le tassement du
fourrage devient le point faible de la chaine
de récolte. Or, un bon tassement est essentiel pour que le processus de fermentation
démarre bien juste après la fermeture du silo
mais aussi pour limiter les pertes lors de son
ouverture.
Installer l’anaérobiose
au plus vite
À la fermeture du silo, la première étape
consiste à mettre en place l’anaérobiose
(c’est-à-dire l’absence total d’air) dans la
masse du fourrage. Cette phase comprend le
temps de remplissage du silo et les heures qui
ARVALIS CETIOM INFOS • SEPTEMBRE 2013
suivent, tant qu’il reste de l’oxygène. Le tassement limitera la quantité d’air enfermé dans
le silo lors de sa confection. Les phénomènes
enzymatiques, liés à la respiration des cellules
du fourrage et au développement de microorganismes aérobies, sont prépondérants dans
cette première phase : dégagement de chaleur, décomposition des glucides solubles et
des protéines en molécules plus petites. C’est
alors que moisissures et levures se multiplient,
avant d’adopter une vie ralentie (sporulation,
fermentation alcoolique…). Plus le fourrage
est sec et moins il est tassé, plus cette phase
dure (voir encadré). Le processus d’acidification démarre quand tout l’oxygène a disparu.
La qualité du tassement a également un impact à l’ouverture du silo, quand le fourrage
est remis en contact avec l’air. Sous l’effet de
l’oxygène, les levures et les moisissures se
réactivent. Lorsque l’oxygène n’atteint que
la couche superficielle du front d’attaque,
les conséquences ne sont pas graves : il suffit d’avancer chaque jour suffisamment le
front d’attaque, d’environ 10 cm pendant les
mois d’hiver et 20 cm en période chaude.
En revanche, si l’oxygène peut s’infiltrer dans
les porosités d’un silo mal tassé, les microorganismes ont le temps de se développer
pendant plusieurs jours dans les couches les
moins denses ce qui se traduit par des échauffements importants et des pertes de matière
sèche (environ 0,23 % par jour et par degré
d’échauffement). L’appétence du fourrage se
dégrade et certaines moisissures peuvent, en
plus, sécréter des toxines dangereuses pour
les animaux.
Récolte du maïs fourrage
Bonnes pratiques de confection du silo : du choix de la précocité variétale
à l’ouverture du silo
ACTION
OBJECTIFS
MOYENS
PRÉCAUTIONS
EN DÉBUT DE SAISON… METTRE LES ATOUTS DE SON CÔTÉ
Optimiser son choix
variétal
32 % MS, rendement,
valeur alimentaire
Résultats d’essais,
conseils…
Éviter les variétés
trop tardives
Semer aussi tôt
que possible
Valoriser
le potentiel du milieu
Une graine > une plante
> un épi
Travailler
un sol ressuyé
EN COURS DE VÉGÉTATION… DÉTERMINER LA DATE OPTIMALE DE RÉCOLTE
Noter la date de la
floraison femelle
Surveiller l’apparition
de la lentille vitreuse
1re estimation
de la date de récolte
50 % des plantes
présentent des soies
Préciser
la date de récolte
Ouvrir les épis
et observer les grains
Floraison = indicateur de
précocité de la parcelle
QUELQUES JOURS AVANT LE CHANTIER… PRÉPARER LE SILO
Nettoyer le silo
Eliminer les sources
de contamination
Calculer la hauteur
maximale du silo
Assurer un avancement
minimum
du front d’attaque
Garantir la cohérence
du chantier de récolte
Assurer un tassement
homogène du fourrage
au silo
Un bon balai (!), et des
bâches sur les murs…
10 cm/j en hiver
20 cm/j en été
Une ensileuse,
des remorques,
un ou deux silos ?
un ou deux tasseurs ?
Attention au débit de
chantier trop élevé
17
Qui des maïs trop secs ?
Q
uand le maïs fourrage est très sec (plus
de 35 % de MS), chaque m3 du silo est
plus difficile à tasser. L’air enfermé dans le
silo représente 2 à 4 litres par kg de matière
sèche, le volume d’air étant beaucoup plus
important en haut du tas. Les cellules encore
vivantes du maïs fourrage sec sont moins
actives : il faut donc beaucoup plus de temps
pour épuiser l’oxygène enfermé (3 à 5 jours).
Pendant ce délai, les bonnes fermentations
lactiques ne démarrent pas, mais les levures
et moisissures se multiplient. Si le silo est
bien hermétique, leurs activités s’orientent
vers une vie ralentie et cessent d’échauffer
le silo… Mais, plus tard, en présence d’air
(trou dans la bâche, front d’attaque) les
dégradations reprennent de plus belle : c’est
la principale cause de perte de matière sèche
lors de la conservation du fourrage.
Facilité de tassement : Mieux vaut
un maïs à 30 % qu’à 40 % de MS
LE JOUR DU CHANTIER DE RÉCOLTE… ASSURER LA CONSERVATION DU FOURRAGE
Maîtriser la finesse
de hachage
Permettre le tassement et
la rumination…
Réglage couteaux
contre-couteaux
Tamis secoueur
< 1 % gros morceaux,
10 à15 % particules
moyennes (1 à 2 cm)
Éviter la terre
dans le silo
Limiter le risque de
contamination butyrique
Silo bétonné,
aire d’accès stabilisée
Prendre un échantillon
de fourrage
Connaître son fourrage :
stocks, rations
Analyse de laboratoire
Représentativité
de l’échantillon
Tasser
Chasser l’air du silo :
anaérobiose
Tasser en couches
de 20 cm d’épaisseur
Etape importante !
Bâcher et protéger le
silo
Conserver le fourrage
à l’abri de l’air
Le jour du chantier.
Double bâche
Bâche neuve,
bâche usagée en surface
Air 250 l
Air 500 l
Eau 545 l
Eau 325 l
MS 205 l
Composition
de m3 d’ensilage
à 30 % de MS
MS 180 l
Composition
de m3 d’ensilage
à 40 % de MS
Délai avant ouverture
du silo
Temps nécessaire à la
stabilisation de l’ensilage
Attendre trois semaines
minimum
Déssilage
Limiter l’échauffement du
front d’attaque
Respecter l’avancement
du front d’attaque
© ARVALIS-Institut
du végétal
APRÈS LE CHANTIER DE RÉCOLTE… LIMITER LES PERTES AU SILO
ISSN n°2266 - 6753
Dépôt légal à la parution
Réf : 13I10
Travailler en couches
de 15 à 20 cm
ter en alternance deux silos équipés chacun
de son tracteur tasseurs.
Assurer un bon tassement exige de travailler en
couches successives de 15 à 20 cm d’épaisseur
car l’action du tracteur tasseur ne dépasse pas
cette épaisseur. L’objectif est d’atteindre 240 kg
de MS par m3. Les pneus basse pression sont
à bannir. En fin de silo, le tassement sera plus
long (environ une heure) parce que les couches
supérieures du silo ne profitent pas du poids du
fourrage placé au-dessus.
Pour la cohérence du chantier, c’est donc bien
à l’ensileuse de s’adapter au rythme du tassement. Elle peut ralentir au champ, ou alimen-
Privilégier les maïs récoltés
verts et humides
Plus le maïs fourrage est récolté vert et humide, moins le silo tassé conserve de porosité,
et plus vite le peu d’oxygène retenu dans le
silo est consommé par la respiration du végétal ou l’activité microbienne. À 30 % de MS, on
enferme environ 1 litre d’air par kg de matière
sèche. En 3-4 heures il n’y a plus d’oxygène
dans le silo et le processus de fermentation
démarre rapidement.
Impression :
Corlet Roto (53)
Ont collaboré à ce document :
les équipes d'ARVALIS-Institut du végétal
et du CETIOM
Photos de couverture :
ARVALIS-Institut du végétal et CETIOM
Un bulletin d’inscription ARVALIS-infos.fr et un encart
Editions ARVALIS sont jetés dans ce numéro.
Imprimé sur du papier 100 % recyclé
Document imprimé par une entreprise
Imprim'Vert
Avec la participation financière du Compte d'Affectation
Spéciale pour le Développement Agricole et Rural (CASDAR),
géré par le ministère de l’Agriculture, de l’Alimentation, de la
Pêche, de la Ruralité et de l’Aménagement du territoire.
ARVALIS CETIOM INFOS • SEPTEMBRE 2013
18
Le tourteau de colza
Les bovins et ovins allaitants
en réclament aussi
Source protéique métropolitaine utilisée et connue par un grand nombre
d’éleveurs de vaches laitières et de porcs, le tourteau de colza est beaucoup
moins utilisé dans les élevages allaitants (ovins et bovins). La question de son
utilisation pour cette catégorie d’animaux apparait donc comme essentielle dans
le cadre d’une recherche d’amélioration de l’autonomie protéique.
L
’Institut de l’Elevage travaille depuis
plusieurs années avec l’ONIDOL sur
l’incorporation de tourteau de colza en
substitution du tourteau de soja dans les élevages allaitants. Les bovins allaitants en France
représentent plus de 4 millions de vaches
essentiellement réparties dans trois bassins
de production : le Grand Ouest, le Massif Central et le croissant Est. Cependant, cette filière
doit résister à la baisse de consommation de
viande et rechercher une meilleure compétitivité. Il en est de même des 3,7 millions de
brebis allaitantes réparties sur les zones de
montagne, les zones herbagères de l’Ouest et
les zones défavorisées.
Avec un prix du tourteau de soja ayant atteint
des records durant l’année 2012 (569 €/t
départ Montoir le 20/07/2012), l’utilisation
dans les élevages de tourteau de colza, produit en grande partie à proximité des zones
de consommation, parait être une bonne
alternative.
Série d’essais sur jeunes bovins
en stations expérimentales et
fermes de lycées agricoles
Un protocole commun d’essai a été établi. Sur
chaque site, deux conduites séparées étaient
mises en œuvre. Le lot témoin était la conduite
habituellement pratiquée sur l’exploitation.
Les dispositifs d’expérimentation avaient pour
objectif d’évaluer la qualité nutritionnelle du
tourteau de colza sur des lots de jeunes bovins
de races différentes (tableau 1). Ainsi, six essais
ont été réalisés dans quatre sites et les rations
de concentrés des différents régimes devaient
être équilibrées et de même valeur nutritionnelle (iso-énergétiques et iso-azotées).
Des résultats favorables
Le tourteau de colza n’a posé aucun problème
lors des essais. Il a toujours été bien consom-
ARVALIS CETIOM INFOS • SEPTEMBRE 2013
Dispositif expérimental des 6 essais de tourteau de colza comme source
alternative de protéines (tableau 1)
Lieu
essai
Catégorie
animaux
Race
Effectifs
Age
Durée Alimentation
pendant d’essai
lot colza
l’essai
(j)
TC + céréales
10-13 mois
93
aplaties + foin
+ EM
TC + blé/orge
24-28 mois
112
+ foin
Alimentation
lot témoin
TS + céréales
aplaties + foin
+ EM
Périgueux
TS + blé/orge
Génisses Limousin
2X15
(24)
+ foin
Triticale
Bressuire
Rouge
TC + triticale
Génisses
2X10
8-12 mois
120
+ correcteur
(79)
des prés
+ paille
azoté
Bressuire
TC + EM
EM + correcteur
JBE
Charolais
2X12
13-17 mois
126
(79)
+ triticale
azoté
TC + céréales
TS + céréales
Jalogny
JBC
Charolais
2X15
10-13 mois
94
aplaties + foin
aplaties + foin
(71)
+ EM
+ EM
Mauron
TS : 240
TC + blé + LD
TS + blé + LD
JBE
Limousin
2X14
9-17 mois
(56)
TC : 222
+ paille
+ paille
JBE : jeunes bovins mâles à l’engrais, JBC : jeunes bovins mâles en croissance, TC : tourteau de colza, TS : tourteau de soja, EM : ensilage de maïs, LD : luzerne déshydratée
Jalogny
(71)
Génisses
Charolais
2X16
Croissances observées dans les six essais (GMQ en g/j) (figure 1)
1418
Mauron mâles
1311
1576
Bressuire mâles
1717
885
Jalogny mâles
929
895
Jalogny génisses
813
834
Bressuire génisses
790
Lot témoin
642
Périgueux génisses
Lot colza
662
0
200
400
600
800
1000
1200 1400 1600 1800
Le tourteau de colza
Comparatif du coût de la ration avec les prix
homogénéisés (figure 2)
19
Evolution du rapport de prix entre les tourteaux de
colza et de soja entre 2000 et 2012 (figure 3)
0,9
tx cz/ tx soja
0,8
0,7
0,6
0,5
Des protéines à un prix
compétitif
Un comparatif du coût des rations en €/kg de
croît a été réalisé, soit en prenant en compte
les prix réels constatés sur les différents sites,
soit avec des prix identiques retenus pour l’ensemble des essais et avec un rapport de prix
du tourteau de colza sur le tourteau de soja de
0,62 égal au rapport moyen observé au cours
des 10 dernières années.
La figure 2 montre que pour la majorité des
essais, le coût de la ration à base de tourteau
de colza est légèrement inférieur au coût de la
ration témoin. L'Institut de l'Elevage considère
que le prix du tourteau de colza doit être inférieur à 77 % du prix du tourteau de soja 48
pour qu’il soit économiquement intéressant
pour l’alimentation des jeunes bovins d’élevage ou à l’engraissement. Même si le rapport
moyen observé est régulièrement favorable
comme indiqué dans la figure 3, il est indispensable, pour les éleveurs, de suivre l’évolution des cours avant de prendre une décision
d’achat, d’anticiper les achats ou encore de
se grouper avec d’autres éleveurs de façon à
réduire les coûts d’approvisionnement.
Une enquête réalisée en été 2012 auprès
d’éleveurs a confirmé que le coût est bien le
principal argument cité justifiant l’utilisation
du tourteau de colza comme source azotée,
le deuxième argument étant l’utilisation d’une
matière première non OGM ou d’origine française (critère mis en avant pour les éleveurs
produisant en filière de qualité).
1
ju
il
02
ju
il
03
ju
il
04
ju
il
05
ju
il
06
ju
il
07
ju
il
08
ju
il
09
ju
il
10
ju
il
11
ju
il
12
0
ju
il
0
Les travaux se poursuivent sur
les animaux plus jeunes
Des interrogations demeurent quant à l’effet de la
moindre concentration du tourteau de colza sur
la croissance des jeunes veaux, forts consommateurs de protéines dans les exploitations de
bovins viande. Dans cette perspective, de nouveaux essais sont en cours pour étudier l’utilisation de tourteau de colza pour différentes
catégories de veaux (veaux laitiers, veaux sous
la mère au pâturage ou en stabulation).
Des essais similaires
sur les ovins
Des essais ont également été suivis depuis
2009 par l’Institut de l’Elevage sur les ovins
allaitants. Ils ont montré qu’avec des rations
équilibrées, le tourteau de colza distribué
à des brebis en lactation a permis d’obtenir
dans tous les essais des performances équivalentes à d’autres sources azotées. Cependant,
les résultats sont contrastés pour les agneaux
à l’engraissement, ce qui a conduit à compléter l’étude par de nouveaux travaux ciblés sur
les animaux jeunes. Ainsi, la priorité
a été mise sur l’apprentissage et
la distribution précoce du tourteau de colza dès le démarrage.
Des infos pratiques
sur www.cetiom.fr
L
es essais suivis par l’Institut de l’Elevage
entre 2010 et 2012 ont permis l’élaboration
d’une plaquette « Pratiques d’utilisation du
tourteau de colza pour les bovins viande »
coéditée par l’Institut de l’Elevage, l’ONIDOL
et le CETIOM et téléchargeable sur www.
cetiom.fr, rubrique Publications. Elle présente
des informations sur la production du
tourteau de colza en France et sur les valeurs
nutritionnelles retenues dans les tables INRAAFZ. Des règles simples d’utilisation telles
que le remplacement, comme en production
laitière, de 1 kg de tourteau de soja par
1,5 kg de tourteau de colza sont rappelées.
La plaquette indique également la nécessité
d’adapter la complémentation minérale du fait
d’une richesse particulière du tourteau de colza
en calcium et phosphore.
ARVALIS CETIOM INFOS • SEPTEMBRE 2013
© J. Raimbault, CETIOM
mé par les animaux et ce, quelle que soit la
céréale associée. Le traitement statistique
des différents essais a mis en évidence des
croissances semblables entre les deux lots de
chaque essai, les très faibles écarts constatés
n’étant jamais significatifs (figure 1).
0,4
ju
il
0
(TS = 450 €/t, TC = 280 €/t, céréales = 200 €/t, minéraux = 700 €/t, EM = 105 €/t,
LD = 215 €/t, foin = 100 €/t, paille = 64 €/t, aliment du commerce = 350 €/t)
20
Le tourteau de tournesol décortiqué
Une opportunité
pour les volailles
La forte dépendance française en protéines du
secteur de l’alimentation animale, encore proche
de 40 %, incite à la recherche de nouvelles sources
alternatives pouvant se substituer aux protéines
d’importation telles que le tourteau de soja. La
mise en place d’une nouvelle unité de décorticage
de graines de tournesol sur le site de Bassens
(33) permet de produire un tourteau de tournesol
métropolitain à haute teneur en protéines.
L
a France dispose de sources de protéines
variées telles que les tourteaux de colza
et tournesol, les drèches et les protéagineux. Cependant, ces ressources métropolitaines ont de moindres teneurs en protéines
et de plus fortes teneurs en cellulose que
le tourteau de soja et sont par conséquent
moins polyvalentes et moins adaptées aux
aliments des volailles à forte croissance. Les
traitements technologiques et notamment
le décorticage préalable des graines appliqué avant la trituration, ont un impact sur la
composition des tourteaux et influent directement sur les valeurs nutritionnelles et les taux
d’incorporation potentiels dans les différentes
formules d’aliments composés. Ces procédés
sont par conséquent déterminants pour l’intérêt économique des tourteaux.
Qualité des tourteaux de
tournesol décortiqués
Caractéristiques des graines, amandes
et coques
Les proportions de coques des graines de
tournesol sont comprises entre 22 et 28 %
et varient en fonction du cultivar, de la taille
des graines et de leur teneur en huile. Les
amandes sont composées de plus de 80 %
d’huile et de protéines, ce qui permettrait
d’obtenir, dans l’hypothèse d’un déshuilage
complet, un tourteau d’amandes de teneur en
protéines supérieure à 50 % (tableau 1).
Les coques de tournesol contiennent seulement 2 à 3 % de l’huile et 10 % des protéines
de la graine. En revanche, elles renferment
l’essentiel des composés pariétaux : 85 % de
ARVALIS CETIOM INFOS • SEPTEMBRE 2013
la fraction NDF (soluble dans un détergent
neutre), 90 % de la fraction ADF (soluble dans
un détergent acide) et 95 % de la fraction ADL
(lignine) contenues dans la graine. Le décorticage est donc un bon moyen de séparer les
composés pariétaux sans perte importante de
protéines et d’huile.
Les procédés de décorticage
Plusieurs types de décortiqueurs existent et
se distinguent par la manière dont des chocs
sont appliqués aux graines. Les décortiqueurs
les plus performants sont de type multi-chocs.
Leur principe de fonctionnement est similaire
à celui des batteurs équipant les machines
moissonnant les céréales. Par rapport aux
appareils « mono-choc » ils génèrent des
impacts multiples d’intensité modérée, ce
qui améliore le rendement du décorticage et
réduit la formation de fines. Une version du
décortiqueur multi-chocs est le « ripple-Mill »
est présentée figure 1.
Décortiqueur multichocs type
« Ripple mill » (figure 1)
Composition moyenne des graines, amandes, coques et
tourteaux de tournesol (tableau 1)
Graines Amandes Coques
Tourteau de graines
non décortiquées
88,8
Tourteau
d’amandes
90,5
Matière sèche (MS) %
92,8
90,5
Huile (%MS)
48,0
61,3
2,5
2,2
1,2
Protéines (%MS)
16,7
20,6
6,2
31,9
52,6
Cellulose brute (%MS)
17,3
2,4
57,6
28,1
6,2
Cendres brutes (%MS)
3,5
3,6
3,2
7,1
9,2
NDF (%MS)
26,6
5,4
83,9
45,1
13,7
ADF (%MS)
19,5
2,7
64,9
32,0
7,0
ADL (%MS)
6,3
0,4
22,3
10,5
0,9
Le tourteau de tournesol décortiqué
Il est donc nécessaire de trouver des valorisations complémentaires de la biomasse de
coques comme la production d’électricité ou
la distribution de vapeur à des industries situées à proximité.
Les teneurs en protéines des tourteaux de
tournesol semi-décortiqués du marché national sont voisines de 33 % (sur brut) et ces
valeurs sont obtenues en pratiquant un décorticage de 34 %. Des teneurs supérieures en
protéines proches de 40 % sont possibles.
Elles supposent un taux de décorticage de
66 %, raisonnablement atteignable avec des
décortiqueurs multi-chocs. Le contexte actuel
d’économies d’énergie d’origine fossile et le
besoin en tourteau riche en protéines substituable au tourteau de soja concourent donc
au développement du décorticage poussé, en
usine de trituration.
© P. Jouffret, CETIOM
Développement de la
production de tourteaux de
tournesol décortiqués
La séparation des coques et des amandes est
réalisée sur la base de la différence de leurs
densités dans un courant d’air, les fines étant
préalablement séparées par des tamis. Le coût
de cette opération est fortement impacté par
la performance du décorticage et sa capacité
à éviter la formation des fines.
Contraintes et opportunités
du décorticage du tournesol
Du fait de son effet très positif sur la qualité
des tourteaux de tournesol, le décorticage est
devenu une pratique courante. Il est cependant limité par deux facteurs : la valorisation
parfois difficile des coques et la perte d’huile
dans ces coques. Généralement, les coques
sont valorisées par combustion pour générer
l’énergie calorifique nécessaire à l’usine, mais
seulement 60 kg de coques sont suffisantes
pour fournir l’énergie nécessaire pour la trituration d’une tonne de graines qui peut en
contenir plus de 200 kg. Avec un potentiel
aussi limité d’autoconsommation des coques,
l’amélioration de qualité du tourteau est assez
faible. Dans un contexte de forte concurrence
entre matières à teneurs en protéines intermédiaires, ce taux de décorticage ne garantit
pas une valorisation optimale des tourteaux.
Les tourteaux partiellement décortiqués ont
été développés en Argentine et se sont généralisés dans le monde mais restent minoritaires
en France. Cependant, la mise en place d’une
nouvelle unité de décorticage de graines de
tournesol sur le site de Bassens (33) permet
de produire un tourteau de tournesol métropolitain à haute teneur en protéines et dont
les caractéristiques sont proches de 36 % de
protéines et 19 % de cellulose (par rapport à
la matière brute) ou encore « type 36 ».
Les principaux critères de composition et
valeurs nutritives mentionnés dans les tables
INRA-AFZ de 2004 sont indiqués dans le tableau 2 pour les deux types de tourteaux et
renseignent également sur la variabilité des
deux paramètres déterminants que sont les
teneurs en protéines brutes et en cellulose
brute. Même s’il existe une bonne relation
entre ces deux critères, comme l’indique la figure 2, pour une teneur en protéines de 36 %
(soit près de 40 % exprimée sur la matière
sèche), la teneur en cellulose brute peut varier
entre 16 et 21 %. Une telle variabilité est un
facteur limitant pour les fabricants d’aliments
21
Relation entre teneurs en cellulose
brute et protéines du tourteau de
tournesol (figure 2)
Cellulose brute
Protéines
R2 = 0,65 ; ETR = 1,95 : P < 0,01 ; N = 14 171 ;
Cellulose Brute (% sur MS) = 55,21-0,84*(MAT %
sur MS) ; source : FeedBase. com
du bétail qui doivent formuler au plus près
des valeurs réelles pour éviter les marges de
sécurité importantes et coûteuses.
Quant aux valeurs nutritionnelles des différentes qualités de tourteaux, celles-ci sont
assez mal renseignées pour les tourteaux partiellement décortiqués du fait du très faible
nombre de mesures réalisées in vivo sur les
tourteaux de tournesol français ces dernières
années. Cependant, des travaux réalisés dans
les années 90, notamment sur volailles, ont
clairement mis en évidence l’amélioration de
la valeur énergétique et de la digestibilité des
acides aminés associée au décorticage.
Intérêt économique du tourteau
décortiqué « type 36 »
Un travail de simulation de l’intérêt économique d’un tourteau de tournesol 36 à
l’échelle de la France entière a été réalisé par
le CEREOPA à l’aide du modèle Prospective
Aliment. Celui-ci simule l’incorporation des
matières premières pour le secteur des aliments composés industriels français qui représentait en 2010/2011 plus de 19 millions
Composition des tourteaux de tournesol (en % de produit brut) (tableau 2)
Partiellement décortiqué
(N = 1 141)
Moyenne
Ecart-type
Non décortiqué (N = 2 729)
Moyenne
Ecart-type
Matière sèche
89,7
1,2
88,7
1,4
Protéines brutes
33,4
2,2
27,7
2,2
Cellulose brute
21,2
2
25,5
2,6
Matières grasses brutes
1,7
0,6
2
0,8
Cendres brutes
6,7
0,5
6,2
0,6
Source INRA-AFZ, 2 004
ARVALIS CETIOM INFOS • SEPTEMBRE 2013
Le tourteau de tournesol décortiqué
de tonnes d’aliments. Le modèle prend en
compte la particularité des différentes régions
en appliquant des coûts de transport spécifiques ce qui permet de tester l’intérêt des
matières premières sur les différents bassins
de productions animales.
Les simulations ont été réalisées avec des
hypothèses de prix des matières premières
correspondant aux moyennes des cotations
observées sur la campagne 2010/2011
(soit, blé = maïs = 214 €/t, tourteau de soja
= 327 €/t). Les prix des tourteaux de soja,
colza et tournesol sont comparés dans la figure 3. Ils montrent le lien fort existant entre
les prix des tourteaux.
La présence simultanée de trois types de tourteaux de types 36, 32 et 29 a été étudiée pour
déterminer les prix d’intérêt au-delà desquels
l’incorporation de la matière première testée
n’est pas possible car trop chère.
Ainsi, les prix d’intérêt exprimés par rapport au
prix du tourteau de soja seraient de 0,43 pour
un tourteau de type 29, 0,50 pour un tourteau
32 et 0,70 pour un tourteau 36.
Un intérêt particulier pour
les formules volailles
Si on s’intéresse aux espèces potentiellement
consommatrices, il apparaît que ce sont les
volailles qui consommeraient quasi exclusivement le tourteau de type 36 alors que le
tourteau 29 serait plutôt incorporé dans les
formules bovines.
Cet intérêt particulier du tourteau 36 pour les
formules volailles pourrait être un atout comme
source de protéines métropolitaines tracées et
non OGM pouvant satisfaire aux exigences de
cahiers des charges de production sous signe
© Proléa
22
de qualité. Ainsi, le modèle précise que ce sont
les pondeuses à plus de 50 % qui utiliseraient
le tourteau 36, suivies par les canards pour près
de 40 % et enfin les poulets label.
Quant au tournesol 29, il serait incorporé
essentiellement dans les formules pour bovin
viande à près de 70 %, puis par les lapins et
les truies, ce qui est caractéristique des utilisations du tourteau de tournesol non décortiqué plus riche en fibres et difficile à incorporer dans les régimes plus concentrés comme
ceux de la volaille.
Les niveaux d’incorporation atteints dans les
différentes formules ont également été étudiés et l’on distingue deux comportements
différents pour les deux types de tourteaux.
Le tourteau 36 serait incorporé à des taux
variant de 5 à 10 % dans les formules pour
volailles et, pour réduire fortement la place du
tourteau de soja dans les formules, il faudrait
atteindre des taux d’incorporation bien supérieurs (de l’ordre de 30 % et non réalisés en
pratique) en formule canard par exemple et,
soit accepter des surcoûts de formules, soit ré-
Comparaison des prix des tourteaux de soja, colza et tournesol de 2008
à 2013 (figure 3)
ARVALIS CETIOM INFOS • SEPTEMBRE 2013
duire assez sensiblement les ratio de prix par
rapport au tourteau de soja. Il faut cependant
noter que ces résultats sont susceptibles de
varier avec la conjoncture économique.
Le tourteau de tournesol 29 plus classique
d’utilisation dans les formules moins concentrées en énergie et protéines attendraient des
taux d’incorporation beaucoup plus élevés
de l’ordre de 35 % en bovin viande et 25 %
en lapin. De tels taux supposent une homogénéité de la qualité des tourteaux dans le
temps pour minimiser les risques d’erreur sur
les apports nutritionnels.
L’augmentation des disponibilités en tourteau
de tournesol 36 et 29 pourrait se traduire par
une baisse sensible des utilisations de tourteau
de soja. La production de tourteau de tournesol
de type 36 semble donc être une opportunité
pour les productions de volailles telles que les
pondeuses, les canards et les poulets labels.
En plus de représenter une source métropolitaine de protéines végétales tracées pour l’alimentation animale, le tournesol 36 permet les
meilleurs prix d’intérêt avec des ratio de prix au
tourteau de soja de l’ordre de 70 % beaucoup
plus intéressants que ceux du tourteau de tournesol non décortiqué de type 29 toujours inférieurs à 50 %. Par ailleurs, ces travaux montrent
une certaine « spécialisation » des différents
tourteaux métropolitains. Ainsi le tourteau de
tournesol 36 permettrait d’accéder au débouché volaille non encore atteint par les tourteaux
métropolitains de colza et tournesol plus classiquement utilisés par les ruminants. Cette complémentarité pourrait être un atout pour les
différentes sources de protéines françaises qui
seraient ainsi moins concurrentes.
Cependant, il convient de nuancer ces premiers
résultats qui mériteraient des travaux complémentaires de suivi de la qualité, mesures de
valeurs nutritionnelles et simulations économiques dans des contextes plus tendus tant
sur les protéines que sur les deux céréales
dominantes que sont blé et maïs qui, par leurs
profils différents en acides aminés, influent sur
les sources de protéines qui leur sont associées.
Les graines de soja métropolitain
23
Des protéines concentrées pour
les filières de qualité
Les graines de soja français ont une carte à jouer dans
les filières à haute valeur ajoutée.
Utilisation des graines
de soja crues
Les graines entières crues broyées peuvent être
utilisées en quantité limitée chez les ruminants
notamment les vaches laitières, sans altérer la
digestion des protéines car les FAT sont détruits
par la fermentation dans le rumen. Cet usage
est particulièrement intéressant chez les vaches
laitières à haute production en début de lactation pour lesquelles une augmentation de
la concentration énergétique de la ration est
recherchée et peut être apportée par les lipides
de graines oléagineuses. L’azote des graines
crues est bien utilisé dans les conditions d’énergie non limitante (PDIN). La quantité totale de
matière grasse de la ration ne doit cependant
pas dépasser 5 % de la matière sèche, ce qui
correspond à environ 4,5 à 5 kg de graines de
soja de teneur en huile de 18 %.
Utilisation des graines de soja
toastées ou extrudées
Le toastage ou l’extrusion permet par traitement thermique de détruire les FAT préjudiciables aux monogastriques. Le toastage est
de moins en moins pratiqué et l’extrusion a
pour avantage d’améliorer la disponibilité des
nutriments. Les graines ainsi traitées peuvent
être utilisées aussi bien pour les ruminants
que pour les porcs et volailles. Le tableau 2
indique les valeurs de digestibilité de l’énergie
du soja extrudé chez les volailles et les porcs.
Energie et valeur azotée des graines de soja crues et extrudées
pour les ruminants (tableau 1)
Graines de soja
Crues
Extrudées
INRA
Io7
INRA
Io7
Unité Fourragère Lait (UFL)
1,08
1,03
1,09
1,01
Unité Fourragère Viande (UFV)
1,05
0,99
1,10
0,96
PDIN (g) (1)
215
210
259
277
PDIE (g) (2)
76
88
199
235
(sources INRA et Io7, 2002, valeurs moyennes par kg brut)
(1) Protéines digestibles dans l’intestin lorsque l’azote est le facteur limitant de l’activité microbienne du rumen.
(2) Protéines digestibles dans l’intestin lorsque l’énergie est le facteur limitant de l’activité microbienne du rumen.
© L. Jung, CETIOM
L
es graines de soja constituent une matière première riche en protéines (environ 34 % sur la matière brute MB) et
en huile (18-22 % MB), mais renferment des
facteurs antitrypsiques (FAT) qui réduisent
fortement leur valeur nutritionnelle pour l’alimentation des monogastriques et des jeunes
ruminants. Les tourteaux déshuilés classiques
(soja 46 ou 48) n’ont pas cet inconvénient car
le procédé d’extraction de l’huile et de désolvantation détruit les FAT, et sont en conséquence, largement utilisés pour tous types
d’animaux.
Ils ont cependant l’inconvénient d’être importés et parce que très majoritairement issus
de graines de soja génétiquement modifiées
(GM), ils ne satisfont pas aux cahiers des
charges de certaines productions animales
de qualité. Des filières d’approvisionnement à
l’import de soja non GM ont été créées, mais
elles coûtent de plus en plus cher et leur fiabilité n’est plus certaine.
Le soja produit en France est non GM et
pourrait être valorisé plus largement dans ces
filières de qualité mais les faibles volumes
produits n’autorisent pas, pour des raisons de
rentabilité des installations, l’application du
procédé de transformation classique. Depuis
l’arrêt de l’activité de trituration de soja de
l’usine de Sète en 2003, les graines de soja
produites en France et valorisées en alimentation animale ne sont plus déshuilées et ont
été utilisées soit crues, soit extrudées ou toastées.
Energie métabolisable coq et
digestible porc des graines de soja
extrudées (tableau 2)
Energie brute (kcal/kg brut)
Energie métabolisable coq
(kcal/kg brut)
Energie digestible porc
(kcal/kg brut)
INRA
5 000
Io7
4 920
3600-3800
3 600
4 200
4 500
(sources INRA et Io7, 2002, valeurs moyennes)
La forte teneur en huile de ces graines extrudées peut constituer une limite à leur incorporation et à l’optimisation au moindre coût
des formules d’aliments. Une meilleure valorisation de la graine est possible par extraction
d’une partie de la fraction huile et obtention
d’un tourteau partiellement déshuilé. Récemment des études d’extrusion-pression et
de cuisson-pression ont été réalisées par le
CETIOM et l’ONIDOL pour disposer de tourteaux partiellement déshuilés (6 à 8 % d’huile
résiduelle) et aux FAT désactivés. Ces procédés sont pour le moment appliqués dans des
filières de transformation Bio à forte valeur
ajoutée. Ils pourraient se développer plus largement dans des unités de trituration de taille
moyenne, fournissant des tourteaux tracés
pour l’alimentation des ruminants ou des monogastriques dans des filières de qualité, si les
conditions d’un approvisionnement régional
suffisant en graines de soja et d’un débouché
en partie garanti, sont réunies.
ARVALIS CETIOM INFOS • SEPTEMBRE 2013
Téléchargement