Cancer : la question de la reprise du travail Jeudi 03 mai 2012, ERI CHU de Nîmes Durée : 2h Intervenants : - Brigitte BONIFAY, responsable du service social (CHU de Nîmes) - Magali MEGE, assistante sociale (CHU de Nîmes) - Isabelle HAAS, responsable SAMETH 30 - Judith BAUX, assistante sociale CARSAT 30 - Modérateur : Anne GRANGEON, psychologue en onco-hématologie au CHU de Nîmes. - Coordination : Marion GAIDAN, animatrice ERI territorial Gard. Participants : 10 9 patients 1 proche Objectif de la rencontre-débat Cette rencontre-débat a pour objectif de permettre aux patients soignés pour un cancer et à leurs proches de s'informer sur les modalités de reprise de travail possibles, de connaître les démarches à effectuer et d'identifier les personnes ressources à contacter. La rencontre-débat initiée par HELPP, se déroule à l'Espace de Rencontres et d'Information, dans un cadre convivial et "intimiste" pour permettre aux participants d'échanger en petit nombre (15 personnes maximum par rencontre). La rencontre-débat est ainsi matière à médiation, à rencontre, entre patients, proches et professionnels en dehors des services de soins. Déroulé de la rencontre-débat Après avoir présenté le thème de la rencontre-débat et les intervenants, Anne GRANGEON, modératrice, donne la parole à Brigitte BONIFAY, responsable du service social du CHU de Nîmes. 1 Compte rendu de la rencontre-débat : Cancer : la question de la reprise du travail 03/05/2012 - ERI CHU de Nîmes Compte-rendu des échanges : Brigitte BONIFAY rappelle la mission des assistant(e)s sociales en centre hospitalier. L'assistant(e) sociale a un rôle de médiateur, de facilitateur entre le patient et l'hôpital, l'hôpital et la ville. Il/Elle intervient auprès des patients pour améliorer leurs conditions de vie et prévenir leurs difficultés sociales et médicosociales, économiques, culturelles. Le CHU de Nîmes compte 28 assistant(e) sociales qui interviennent à temps partiel dans les services de soins. Leur intervention peut être demandée par l'équipe soignante, le patient, l'entourage et toujours en accord avec le patient. Leur temps de présence dans chaque service est restreint, ce qui explique la difficulté à suivre les patients en dehors du temps d'hospitalisation. C'est pourquoi, pour joindre un(e) assistant(e) sociale lorsque vous n'êtes plus hospitalisé, il vous faut joindre le secrétariat du service social 04.66.68.33.65 ou 39.13 plutôt que le service lui-même. Anne GRANGEON, psychologue, parle de la représentation parfois négative des services sociaux. Hors, ces services sont là pour soulager, déléguer, faire de la médiation entre les préoccupations du médecin et la réalité du malade. Il peut rentrer chez lui ?... Mais quelqu'un sera-t-il là pour s'occuper de lui ? Faut-il envisager un temps de repos en établissement spécialisé? Possède-t-il une couverture sociale ? Le patient peut reprendre le travail à temps partiel, comment sera compensé la perte de revenus? La reprise du travail lorsqu'elle est envisageable peut demander une modification, une adaptation du poste. Il est préférable d'anticiper ces démarches avant la reprise. Pour cela, différents organismes peuvent vous accompagner vous et votre employeur pour faciliter le maintien dans l'emploi. La CARSAT La CARSAT est un service spécialisé de la sécurité sociale. Elle intervient auprès des assurés actifs confrontés à un risque d'inaptitude au poste de travail à cause de leur état de santé. Sa mission est de faciliter la reprise du travail en proposant des solutions adaptées. En lien avec le médecin du travail, le médecin conseil de l'Assurance maladie et votre employeur, les équipes de la CARSAT vous présenteront les différents choix qui s'offrent à vous en fonction de votre situation personnelle : temps partiel thérapeutique, aménagement du poste de travail, bilan de compétences, formations, reconversion … Judith BAUX, assistante sociale à la CARSAT du Gard rappelle le rôle du médecin du travail, pas assez sollicité par les patients. Son rôle est d'éviter toute altération de la santé des travailleurs du fait de leur environnement professionnel. Il possède un double regard : il connait votre pathologie puisqu'il est médecin mais il connaît aussi votre entreprise, vos conditions de travail. Vous pouvez le rencontrer à tout moment au cours de votre arrêt de travail pour mettre les choses à plat et préparer au mieux 2 Compte rendu de la rencontre-débat : Cancer : la question de la reprise du travail 03/05/2012 - ERI CHU de Nîmes une reprise envisagée comme difficile. Cela s'appelle une visite de préreprise. Le médecin du travail se rapprochera de votre entreprise et du médecin-conseil de l'Assurance maladie, afin d'étudier ensemble les solutions de retour à l'emploi : temps aménagé, changement de poste, … Cette visite est préventive, elle a pour objectif de permettre à chaque partie d'anticiper au mieux la reprise à venir. Elle n'est pas à confondre avec la visite de reprise, celle-ci, obligatoire lors du retour au travail. C'est à l'issu de la visite de reprise que le médecin du travail se prononce sur l'aptitude au poste. Gardez en tête que vous pouvez effectuer plusieurs visites de pré-reprise durant l'arrêt de travail pour être conseillé et mieux vous projeter. L'équipe de la CARSAT est là pour vous accompagner. La SAMETH (Service d'Appui au Maintien dans l'Emploi des Travailleurs Handicapés) Isabelle HASS, responsable de l'antenne gardoise de la SAMETH présente les missions et le fonctionnement de l'association. La SAMETH (108 antennes en France) collabore avec les services de la CARSAT. Elle est l'interlocutrice privilégiée des entreprises et des travailleurs indépendants qui recherchent des aides techniques et financières pour aménager un poste de travail. L'association peut être contactée par l'employeur ou le salarié lorsque l'état de santé du salarié ou du travailleur indépendant devient incompatible avec l'exercice de son activité professionnelle. Elle ne peut intervenir sans l'accord de l'entreprise. Ses services sont gratuits "Au bout de combien de temps d'arrêt de travail ces démarches sont elles proposées?" Ces démarches sont proposées après 6 mois d'arrêt de travail. "Il est difficile d'avoir quelqu'un au téléphone ou en direct. N'avoir que des informations par mail ne convient pas." Pour une phase d'information et de conseil, vous pouvez contacter l'assistant(e) sociale dès le début de votre arrêt de travail pour connaître les démarches à engager. "J'avais envisagé de reprendre le travail après la chimiothérapie et puis finalement tout change. Est-ce que j'ai envie de reprendre le travail de la même manière ? Je suis passé voir la DRH et c'est un monde du passé pour moi." "Ça ne se passe pas comme on avait pensé." "On a pas les idées claires". "On n'arrive pas à se reconnaître". 3 Compte rendu de la rencontre-débat : Cancer : la question de la reprise du travail 03/05/2012 - ERI CHU de Nîmes "Quand on commence les traitements, on a des échéances : opération, puis chimiothérapie, puis radiothérapie. Est-ce que c'est parce qu'on s'est battu à fond mais après les traitements on n'a plus de force, on ne croit pas qu'on pourra reprendre." La responsable de la SAMETH30 signale que pendant cette période de doutes, vous avez la possibilité de faire un bilan de compétences. Cela peut permettre de mieux se connaître, de se poser les bonnes questions : Est-ce que j'ai envie de reprendre mon métier ? Est-ce que je le peux ? Avec le même rythme ? Ce bilan de compétences se fait dans des centres agrées. La demande doit être engagée par un(e) assistant(e) sociale de la SAMETH ou de la CARSAT. "Est-ce que l'employeur est mis au courant ? Il peut s'en inquiéter." L'entreprise est mise au courant. C'est pour ça qu'il est important d'engager le dialogue avec votre employeur, de communiquer avec lui pendant l'arrêt de travail afin qu'il puisse lui aussi organiser votre remplacement, anticiper votre reprise. Un bilan de compétences effectué pendant un arrêt maladie est vu différemment d'un bilan effectué en activité. C'est positif pour l'employeur, cela signifie que le salarié se met en situation de reprendre le travail dans les meilleures conditions possibles. L'employeur pourra être rassuré par ce bilan de compétences. "Nos arrêts de travail sont d'un mois, c'est embarrassant vis-à-vis de notre employeur qui doit organiser notre remplacement. Du coup, c'est à nous de nous projeter pour savoir quoi dire à l'entreprise." "J'avais dit à mon patron que je reprendrai en mai. Mais il m'a dit en juin, ils ont plus le sens des réalités que nous." La responsable de la CARSAT 30 indique que, même en arrêt de travail, vous continuez à être salarié de l'entreprise, d'où la nécessité de garder le lien. "J'ai des réflexions de collègues de travail qui ne comprennent pas, parce que la maladie ne se voit pas. En plus, on se maquille, on met des prothèses; du coup, les gens ne se rendent pas compte qu'on est malade. On entend "tu as de la chance d'être à mi-temps, tu finis à midi". Il y a souvent cette idée, qu'une fois les traitements finis, on est "comme avant" intervient la psychologue. C'est faux, c'est différent, en bien ou en mal. Du coup, on peut ressentir une déception, un malaise pendant l'arrêt de travail. Il faudrait mieux que le patient sache à l'avance qu'il lui faudra du temps, après la fin des traitements, pour retrouver son rythme, se projeter, qu'il ne pourra pas de suite reprendre le travail. Quand je dis "un temps de repos", c'est un temps de réparation, pour recharger les batteries. 4 Compte rendu de la rencontre-débat : Cancer : la question de la reprise du travail 03/05/2012 - ERI CHU de Nîmes "C'est moi qui ai dit à mon médecin de m'arrêter au moins trois mois au lieu d'un, pour que mon employeur puisse embaucher quelqu'un en CCD. Ca ne devrait pas être à moi de le faire. Ce n'est pas normal que, soigné pour un cancer, on doive chaque mois renouveler nos arrêts de travail quand on sait pourtant que les traitements s'étalent sur plusieurs mois." "On a l'impression de quémander chaque mois". De devoir renouveler tous les mois son arrêt de travail fait que chaque mois on doit se poser la question "Je reprends ou pas" dit la psychologue. Comme si c'était le patient qui devait se poser cette question. Ca donne l'impression que c'est le patient qui décide, c'est faux. C'est mauvais, pas rassurant. C'est aux médecins d'informer le patient sur le temps durant lequel l'arrêt de travail devra être prolongé, pour qu'il le sache à l'avance et puisse s'organiser, se projeter. C'est l'effet pervers du "patient au centre de son projet de vie". Pour le coup, le médecin devrait être plus directif. Quand la personne malade a pu parler avec l'employeur de sa maladie et de ses conséquences sur son poste de travail, quand tout cela a pu être discuté et pensé avec le médecin, l'employeur, la personne est soulagée, elle déculpabilise et peut mieux s'investir dans les traitements". La responsable de la SAMETH30 souligne que la décision de reprendre le travail doit être prise de manière pluridisciplinaire, par le médecin traitant et le médecin conseil de l'Assurance maladie. "En plus, on peut reprendre le travail, même si on est en arrêt, avec l'accord du médecin". "On a pas trop d'occasions de parler avec d'autres patients, de voir ce que les autres ressentent. Ce genre de rencontres permet d'échanger". "L'employeur peut-il refuser une demande de temps partiel thérapeutique?" L'assistante sociale de la CARSAT confirme qu'un employeur peut refuser la mise en place d'un temps partiel thérapeutique. Le temps partiel est prescrit par le médecin traitant, validé par le médecin du travail, mais si l'employer le refuse, on ne peut rien faire. D'où l'importance d'en discuter en amont avec son employeur pour lui permettre de s'organiser. C'est la SAMETH qui s'occupe de ce type de négociations, avec un regard extérieur. "Le renouvellement d'un temps partiel thérapeutique est il possible?" Un temps partiel thérapeutique peut durer jusqu'à un an, mais c'est un usage, pas une règle. Cette année de travail à temps partiel est vue comme un tremplin vers une reprise progressive. Si la situation doit se prolonger, il faudra changer de dispositif. Par exemple : travailler à mi-temps et compenser la perte de salaire par une pension d'invalidité est possible. 5 Compte rendu de la rencontre-débat : Cancer : la question de la reprise du travail 03/05/2012 - ERI CHU de Nîmes Il y a un équilibre à trouver entre travail et santé, précise la responsable de la SAMETH30. On va s'assurer que la reprise n'entraine pas un risque de rechute. Un temps partiel thérapeutique peut démarrer à un jour par semaine, puis deux, puis trois… Les trajets pour se rendre jusqu'au lieu de travail peuvent être pris en compte, précise l'assistante sociale de la CARSAT. Mettons que vous deviez faire le trajet Nîmes-Montpellier pour vous rendre au travail chaque jour, cela sera considéré par le médecin du travail comme un élément entrainant de la fatigue, à intégrer à sa réflexion. Des aides temporaires pour les trajets sont possibles. La responsable du service social du CHU remarque que la notion de temps change, la durée moyenne des séjours diminuent, le temps du médecin n'est pas celui du patient, il faut guérir vite. La psychologue encourage les patients à s'écouter : il faut arriver à s'écouter, mon corps me parle, me dit stop, il faut que je l'écoute, que je m'arrête un temps, c'est une coupure avec ce que l'on faisait avant. Les questions du travail sont essentielles parce que c'est la vie, mais la priorité des patients restent de se soigner. Il ne faut pas que le travail soit vu comme un risque. C'est pourquoi, il est fondamental de pouvoir s'appuyer sur quelqu'un, une assistante sociale, un médecin, pour mener ces démarches. Restitution : Marion GAIDAN Animatrice ERI 6 Compte rendu de la rencontre-débat : Cancer : la question de la reprise du travail 03/05/2012 - ERI CHU de Nîmes