Compte rendu de la rencontre-débat : Cancer : Comment soulager et prévenir la douleur ?
08/11/2012 - ERI CHU de Nîmes
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Cancer :
Comment soulager et prévenir la douleur ?
Jeudi 08 novembre 2012, ERI CHU de Nîmes
Durée : 2h
Intervenants :
- Dr Olivier BREDEAU, Centre d'évaluation et de traitement de la douleur,
CHU de Nîmes.
- Laure SEGURA, infirmière référente douleur, Centre d'évaluation et de
traitement de la douleur, CHU de Nîmes.
-Modération: Anne GRANGEON, psychologue en onco-hématologie au CHU de
Nîmes.
Coordination : Marion GAIDAN, animatrice ERI territorial Gard.
Participants : 6
1 patient
3 proches
2 professionnels
Objectif de la rencontre-débat
Cette rencontre-débat a pour objectif de répondre aux interrogations des
patients soignés pour un cancer et de leurs proches sur les traitements
antidouleur.
Quels sont les traitements proposés aux malades? Quels sont leurs effets ?
Comment sont-ils choisis ?
La rencontre-débat initiée par HELPP, se déroule à l'Espace de Rencontres et
d'Information, dans un cadre convivial et "intimiste" pour permettre aux
participants d'échanger en petit nombre. La rencontre-débat est ainsi
matière à médiation, à rencontre, entre patients, proches et professionnels
en dehors des services de soins.
Déroulé de la rencontre-débat
Après avoir présenté le thème de la rencontre-débat et les intervenants,
Anne GRANGEON, modératrice, donne la parole au Dr Olivier BREDEAU du
Centre d'évaluation et de traitement de la douleur au CHU de Nîmes.
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Compte-rendu des échanges :
Le service, spécialisé dans la prise en charge des douleurs rebelles et/ou
chroniques dispose d'une unité de consultation et d'une équipe mobile qui se
déplace dans les services de soins du CHU de Nîmes.
Ces experts de la douleur interviennent sur demande ou prescription du
médecin référent du malade lorsque ce dernier considère que la douleur
nécessite une prise en charge particulière, du ressort du Centre d'Evaluation
et de traitement de la douleur. Le patient ou son entourage peut également
demander à rencontrer ces spécialistes de la douleur, il est demandé d'en
référer à son médecin pour veiller à la bonne coordination des soins.
Les experts douleurs interviennent en dernier recours, lorsque les
traitements antidouleur standards administrés au patient par son médecin
référent s'avèrent inefficaces pour soulager sa douleur et nécessitent une
meilleure adaptation.
Le Dr BREDEAU propose de faire un état des lieux de la prise en charge de la
douleur pendant et après la maladie, avant de répondre aux questions des
participants de la rencontre.
On peut se demander pourquoi en 2012, les patients atteints de cancer ne
sont pas tous soulagés de leur douleur? Une récente enquête de l'INCA
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a
montré que 60% de patients soignés pour un cancer se disent non soulagés
de leur douleur, et plus de la moitié n'ont pas reçu de réponse concernant
leur douleur au sortir de la consultation avec l'oncologue. Ce déficit de
réponse aux patients est interpelant.
Aujourd'hui, on sait comment améliorer la qualité des traitements en
soulageant la douleur pendant et après. La gestion de la douleur améliore le
pronostic. Pourtant, on sait que 40% des patients gardent des douleurs
séquellaires de la maladie.
On parle ici de qualité de vie. Les soignants accordent souvent plus
d'importance à la maladie qu'à ses symptômes et ses conséquences sur le
plan esthétique, alimentaire, ou de la douleur.
Le Dr BREDAU parle du cas d'une patiente de 38 ans, rencontrée récemment
pour des douleurs osseuses dues à un myélome
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. Durant 4 ans cette patiente
s'est entendue dire que sa douleur était d'ordre psychosomatique avant que
le diagnostic ne soit posé. Avec un traitement antidouleur adapté cette
patiente a été soulagée. Elle a pu reprendre une activité physique comme
elle le souhaitait. Elle a pour cela, négocié avec les médecins. Elle voulait ne
pas être trop traitée, ne pas être captive de ses traitements antidouleur : elle
craignait de rester endormie toute la journée, de "planer". Son traitement a
été choisi avec elle, pour lui garantir la meilleure qualité de vie possible, en
fonction de ses critères.
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Institut National du Cancer
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Cancer de la moelle osseuse
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On sait que les patients qui évoluent le mieux sont ceux qui sont acteurs du
programme de traitements. C'est un partenariat avec les médecins. Je vois
certains patients très douloureux après les traitements qui me disent cette
phrase très triste : "Si c'était à refaire, je ne le referai pas", tellement ils ont
souffert et souffrent.
La psychologue Anne GRANGEON relève cette question: "Qu'est-ce qui fait
que cette question de la gestion de la douleur n'est pas dans les priorités? Du
côté du patient, il y aurait également comme une gêne à évoquer la douleur,
à l'aborder avec son médecin".
"C'est ce qui se passe. On se dit que ça peut attendre, que c'est pas pressé."
"Le médecin passe tous les deux jours et pendant ce temps, on a mal".
La psychologue dit aux patients qu'ils ont le droit d'insister.
"Ca se met en route dix à quinze jours après, lorsqu'ils nous ont entendu.
C'est pas pressé." Observe un participant, apparemment désabusé…
Le Dr BREDEAU : On a autant de difficulté à convaincre les patients qu'à
informer les soignants. Il existe un slogan : "la douleur : un droit pour le
patient, un devoir pour le soignant". La douleur sera prise en charge parce
qu'il l'exprime et parce que c'est une obligation pour le soignant.
"Je comprends pas, s'il y a un centre antidouleur au CHU. Pourquoi vous
n'êtes pas appelé?".
Pour la psychologue, il y a quelque chose qui fait frein et que le défaut
« d’utilisation » de la consultation de la douleur amène à s’interroger sur une
dynamique des soins, une conception qui peine à évoluer vers une
complémentarité des approches.
Le Dr BREDEAU souligne que la consultation de la douleur n’est pas toujours
sollicitée comme elle devrait l’être et que la douleur continue d’être trop
souvent passée sous silence.
Peut-on parler de négligence ?
Il ajoute que leur équipe travaille autant à répondre aux patients, qu'à
former les professionnels des services :
« Je crois beaucoup à l'éducation thérapeutique. Le patient doit être
demandeur.
Les services peuvent nous voir comme une aide dérangeante. La douleur
c'est un élément qui permet de revisiter la maladie. Souvent, lorsqu'on
intervient, c'est dans un contexte conflictuel entre patients pas soulagés et
soignants ».
"Je pense que les équipes se sentent en échec. C'est comme s'ils n'avaient
pas réussis".
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La douleur représente la première source de conflits entre patients et
soignants. Chaque soignant ne considère pas la douleur de la même
manière.
La douleur peut être présente à différentes étapes.
Pour 70% des patients, c'est la douleur qui a annoncé le cancer.
La douleur est parfois ressentie comme un indicateur et détermine leur
moral, quelqu’un parle de « girouette » : « lorsque je n'ai pas mal tout va
bien, si j'ai mal, alors ça ne va plus ».
Pour 30 à 40%, la douleur vient après les traitements (chirurgie,
radiothérapie, etc.). Dans certains traitements, on ne peut employer que des
médicaments qui entrainent des douleurs au niveau des nerfs. Lorsque le
malade s'en plaint, le traitement est diminué. Le patient craint alors de
perdre des chances de guérison.
En stade palliatif, on estime à 80% le taux de malades douloureux.
Toutes ces douleurs peuvent être prises en charge si elles sont exprimées.
La prise en charge de la douleur est fonction de son intensité et de ses
conséquences sur la vie quotidienne. Lorsque la douleur ne peut être prise
convenablement en charge dans le service, l'expert douleur intervient. Cela
représente un patient sur cinq, mais tous ne sont pas vus par l'équipe.
"Ma femme est entrain de se faire opérer d'un cancer du sein, en ce moment
même. En tant que proche, comment agir?".
Quand quelqu'un a mal, il devient irritable avec son entourage.
Le proche doit penser qu'il n'y a rien d'irrémédiable, qu'il faut parvenir à
trouver une réponse, avant d'arriver à l'état d'épuisement.
Le proche doit se faire l'avocat du patient, embrasser sa cause avec une
certaine lucidité.
Il est important de savoir faire la part entre ce que vous pouvez faire à
travers votre présence, votre compassion et là ça relève du travail d'une
équipe experte de la douleur.
Pour la psychologue, il y a la compassion, mais il faut aussi considérer que
les observations du proche sont utiles aux médecins de la douleur, pour
ajuster ses réponses thérapeutiques et qu’ensemble, le médecin de la
douleur, l’équipe et les proches peuvent aider le patient dans l'observance
des traitements.
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L'aumônier protestant : "Le proche est le premier interlocuteur face à cette
douleur, il peut être agressé par le patient. Il doit arriver à prendre du recul,
savoir que l'agressivité et dirigée sur la maladie et pas envers le proche".
"Si tant de pourcentage de patients sont douloureux, pourquoi cette
consultation douleur n'est-elle pas automatique? Pourquoi ce serait aux
patients et aux proches d'interpeller les médecins. C'est votre boulot, pas le
notre."
Personne n'est programmé pour vivre ça, la maladie, la douleur.
Lors de l'annonce du diagnostic de cancer, les personnes sont en état de
choc, et n'entendent pas tout ce qui leur est dit. C'est pour ça qu'a été mise
en place, à distance, une seconde consultation d'annonce avec un soignant,
pour replacer les choses.
Le but est d'expliquer les traitements, parler des effets secondaires
possibles, et dire que si vous ressentez de la douleur, une perte d'appétit, un
état de déprime, des professionnels sont là pour vous accompagner.
Laure SEGURA, infirmière spécialiste de la douleur : "Il faudrait presque une
seconde consultation à six mois, pour parler de ce qui a pu évoluer".
"Quand les médecins passent, ça va trop vite. On est fatigué, on n'a pas le
temps de leur poser des questions et de comprendre leurs réponses."
"Ma femme, avant son opération du sein, a eu une anesthésie locorégionale3
pour prévenir la douleur au réveil".
L'infirmière souligne que c'est une bonne chose car ça permet qu'il n'y ait
pas de mémorisation de la douleur. On garde la mémoire d'une douleur et
lorsqu'elle revient, on la ressent d'autant plus fortement.
En chirurgie, on est performant. C'est surtout en ambulatoire, on n'est
pas assez à l'écoute, ce n'est pas automatique.
Pour le Dr BREDEAU, il y a cette idée reçue comme quoi la douleur ferait
partie des dégâts collatéraux, comme une double peine. Les soignants disent
"on s'habitue à la douleur". Or ce n'est pas vrai, plus on fréquente la douleur,
plus on avance en âge, plus on la mémorise et plus ça devient grave :
Ainsi, par exemple, on voit beaucoup de douleurs chroniques chez des
adultes qui ont été maltraités pendant l'enfance et ont moins de capacités
que la moyenne à se défendre de la douleur. La douleur laisse une trace.
Gérer sa douleur peut s'apprendre. Est cité un mode d’approche par
l'hypnose.
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L’anesthésie locorégionale consiste à injecter des médicaments appelés anesthésiques locaux, au voisinage d’un
nerf ou de la moelle épinière. Elle permet de supprimer la sensibilité et la mobilité d’une partie du corps pendant une
intervention : un examen médical, une opération chirurgicale, un accouchement ...
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