POURQUOI LA NOTION DE TIERS-MONDE
APPARAÎT-ELLE DÉPASSÉE AUJOURD’HUI?
qIl n’existe plus un,
mais des tiers-mondes!
La plupart des indicateurs écono-
miques usuels font apparaître un éclate-
ment du bloc naguère formé par les pays
du tiers-monde. En effet, alors que la crois-
sance fait du surplace en Afrique et patine
en Amérique du Sud, les pays d’Asie de
l’Est connaissent – jusqu’aux récentes
crises monétaires et financières– des taux
de croissance du PNB particulièrement
élevés.
De même, certains PED (pays en déve-
loppement), victimes d’une hyperspéciali-
sation sur les produits de base, ont subi
une réduction de leur part dans les
échanges internationaux; d’autres au
contraire, notamment en Asie, ont réussi
à pénétrer avec succès les marchés occi-
dentaux et participent activement au
commerce international.
Enfin, les indicateurs sociaux que sont
l’espérance de vie ou le taux de mortalité
infantile révèlent de profondes inégalités
entre PED: certains sont en passe de
rejoindre des niveaux proches des PDEM (pays développés à économie de marché),
alors que les conditions de vie qui s’aggravent (en Afrique notamment) traduisent un
«développement du sous-développement».
qPays développés et pays en développement sont désormais seuls
à se confronter
Opposer aujourd’hui pays riches et pays du tiers-monde n’a plus autant intérêt que
pendant les années de la guerre froide. Durant cette période, les pays non alignés
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LE TIERS-MONDE
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Créée en 1952 par Alfred Sauvy, l’expression «tiers-monde» pouvait qualifier
le troisième monde (ni communiste, ni capitaliste), mais les pays du tiers-
monde auraient surtout occupé une position dans les relations internationales
analogue à celle du tiers état dans la société française sous l’Ancien Régime.
Le calcul de l’IDH
L’IDH (indicateur de développement hu-
main) est un indicateur synthétique va-
riant de 0 à 1 (le niveau de développe-
ment optimal étant mesuré par 1)
intégrant, sous forme de pondération,
trois variables complémentaires dans
l’appréciation de niveau de vie:
• le PIB par habitant, mesuré en parité
de pouvoir d’achat (PPA – parité de
pouvoir d’achat, c’est-à-dire intégrant
les différences de pouvoir d’achat entre
pays);
• l’espérance de vie à la naissance,
c’est-à-dire le nombre moyen d’années
que pourrait vivre en moyenne un indivi-
du né l’année considérée, s’il était expo-
sé pendant toute sa vie aux conditions
de mortalité de l’année;
• le niveau d’éducation, lui-même appré-
hendé par le taux de scolarisation des
moins de 16 ans et le nombre moyen
d’années d’études.
constituaient un groupe courtisé par les deux camps, qui réglaient souvent leurs
comptes par pays du tiers-monde interposés.
De nos jours, les pays ex-socialistes ont, pour certains, rejoint les PDEM ou sont en
passe de le faire (pays baltes, République tchèque, Pologne, Hongrie…), alors que d’autres
sont en voie de «tiers-mondisation» (Roumanie, Russie…). En effet, la désorganisation du
système économique s’accompagne d’une baisse du niveau de vie de la population, d’une
contraction des échanges internationaux et d’une sévère récession.
La distinction serait plutôt à établir entre pays qui ont adopté l’économie de marché,
tout en s’étant plus ou moins dotés d’instances de régulation, et pays tentés par l’écono-
mie de marché, mais cherchant à la plaquer sur des structures inadaptées du fait de leur
héritage culturel et économique.
EN QUOI LE TIERS-MONDE REPRÉSENTE-T-IL TOUJOURS
UNE RÉALITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIALE?
qDes caractéristiques économiques et sociales communes
Lorsqu’on cherche à comparer l’écart de niveau de développement entre les pays, on
bute sur un obstacle: le choix de l’indicateur de développement à utiliser. Plusieurs clas-
sifications sont basées sur le PNB par habitant, parfois corrigé des écarts de pouvoir
d’achat. On peut aussi recourir à un indicateur composite élaboré par les Nations unies,
l’IDH (indicateur de développement humain).
Celui-ci fait apparaître des inégalités criantes entre PDEM et PED. En effet, l’IDH
prend en compte l’espérance de vie à la naissance, ainsi que le niveau d’éducation en
plus du PIB par habitant.
Or, si ces variables se sont améliorées pour les PED, elles ont aussi progressé pour les
PDEM si bien qu’il demeure toujours un écart d’IDH, d’autant que des disparités existent
entre PED. Par exemple, l’espérance de vie a reculé en Afrique subsaharienne depuis les
années soixante-dix, de même que le niveau de scolarisation.
Ainsi, il subsiste toujours un écart dans les conditions de vie, dans la qualité des ser-
vices publics comme dans la consommation privée entre les PDEM, plus favorisés, et les
PED, plus mal lotis.
qUne place marginale dans les relations internationales
Même si les PED participent davantage au commerce international, leur part demeure
modeste et surtout inégalitaire. En effet, l’ensemble des PED ne pèse qu’un peu plus du
quart des exportations mondiales, alors qu’il représente environ 40% du PIB mondial en
PPA (parité de pouvoir d’achat), et environ 80% de la population mondiale.
Cette position minoritaire dans les échanges internationaux masque des inégalités:
par exemple, les pays de l’Asie de l’Est, ceux du Pacifique et d’Asie du Sud réalisaient en
2003 environ 7,8% du PIB mondial en PPA, mais l’Afrique et le Moyen-Orient seulement
5,9%; de même, l’Afrique et le Moyen-Orient ne participent qu’à hauteur de 6,6% des
exportations mondiales, contre près de 20% pour la région d’Asie citée.
Cette situation s’explique par le positionnement des pays africains sur des productions
peu propices au développement, notamment celles de produits agricoles ou miniers, dont
les cours ont été orientés à la baisse depuis les années quatre-vingt.
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