Place du kinésithérapeute dans une unité transversale pour l

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SOiNS CADRES - n° 73 - février 2010
RÉFÉRENCE
Gregoire L, Pataky Z,
Golay A. Efficacité de
l’éducation thérapeutique.
La lettre de la SETE, 14 ;
2009 : 1-5.
L’éducation thérapeutique du patient
[
L’unité transversale pour l’éducation du patient (Utep) vise à favoriser le développement
de l’éducation thérapeutique (ETP)
[
Le kinésithérapeute, comme ses collègues exerçant
dans d’autres spécialités, y a toute sa place
[
L’objectif de l’ETP est d’améliorer la qualité
de vie des personnes souffrant notamment de maladies chroniques.
[
Elle permet
aux patients de devenir acteurs dans la gestion de leur maladie et partenaires
des soignants dans le parcours de soins, optimisant ainsi l’efficacité des traitements.
MOTS CLÉS
Apprentissaget
Éducation t
thérapeutique
du patient
Formationt
Kinésithérapeutet
Unité transversale t
pour l’éducation
des patients
stratégie soignante
Place du kinésithérapeute
dans une unité transversale
pour l’éducation des patients
JEAN-YVES BOUCHET
Depuis quelques années, l’éducation thérapeu-
tique des patients (ETP) s’est formalisée sous
l’influence de l’évolution sociologique de la relation
soignant/patient, des nouveaux droits décrits dans
la charte des patients1 et de l’application des
connaissances didactiques et psychologiques
(notions développées en sciences de l’éducation
appliquées à des adultes dans un contexte de soins).
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a
confirmé l’importance des programmes d’éduca-
tion thérapeutique et la Haute Autorité de santé
(HAS) a élaboré des recommandations pour la
structuration et l’élaboration de ces programmes
dans le champ des maladies chroniques. De la sim-
ple information, on est progressivement passé à une
stratégie d’accompagnement du patient.
CONCEPT DÉDUCATION THÉRAPEUTIQUE
La HAS reprend la définition de l’OMS : « L’éduca-
tion thérapeutique du patient vise à aider les patients à
acquérir ou maintenir les compétences dont ils ont besoin
pour gérer au mieux leur vie avec une maladie chronique.
Elle fait partie intégrante et de façon permanente de sa
prise en charge »2. Un programme d’ETP comprend
quatre étapes :
élaborer un diagnostic éducatif ;
définir un programme personnalisé d’ETP avec
priorités d’apprentissage ;
planifier et mettre en œuvre les séances d’ETP
individuelles ou collectives, ou en alternance ;
réaliser une évaluation des compétences acquises
et du déroulement du programme.
PLACE DU KINÉSITHÉRAPEUTE
L’élaboration du diagnostic éducatif est indépen-
[
dante de la profession de l’éducateur.
Selon Brigitte
Sandrin-Berthon, il s’agit d’un bilan partagé inau-
gural3. Deux positions sont à rapprocher, celle du
patient, de ses connaissances sur sa pathologie, de
ses problèmes immédiats, de ses souhaits... et celle
du soignant, qui a un message à faire passer. Cette
approche est forcément très large, il s’agit d’être à
l’écoute du patient, d’évaluer avec lui sa situation,
de lui expliquer les intentions d’éducation.
À l’issue d’un ou de plusieurs entretiens indivi-
[
duels,
il est convenu avec le patient d’un pro-
gramme par étapes faisant appel à des personnes
ressources pour chercher à évacuer les probléma-
tiques empêchant la réceptivité des messages d’édu-
cation. Ces dernières peuvent être d’ordre psycho-
logique, social ou familial. On définit alors des
actions plus ciblées sur la maladie et son contrôle
par le patient, celui-ci peut être vu en groupe ou
individuellement. En fonction de la pathologie, le
kinésithérapeute apporte ses connaissances tech-
niques en usant de moyens didactiques pour faci-
liter la démarche d’apprentissage des patients. C’est
là que la formation professionnelle initiale est tout
à fait insuffisante et nécessite d’être complétée pour
ajouter à la compétence professionnelle de spécia-
lité celle d’éducateur. Cette formation complémen-
taire doit lui permettre de ne pas simplement faire
de l’information unilatérale mais d’entrer dans un
processus d’acquisition de compétences qui fait du
patient un partenaire des soignants. Il est nécessaire
que le malade chronique se prenne en charge pour
modifier son mode de vie afin de concilier au maxi-
mum ses désirs et les impératifs liés à sa maladie. Il
doit, pour cela, être persuadé qu’il a une influence
sur le déroulement de sa pathologie et qu’il peut
en modifier certains paramètres.
Le kinésithérapeute
[ doit être capable de s’éloi-
gner de sa filière au moment du diagnostic éduca-
tif pour que le bilan partagé avec le patient aborde
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SOiNS CADRES - n° 73 - février 2010
L’AUTEUR
Jean-Yves Bouchet,
directeur des soins, faisant
fonction, CHU Grenoble (38)
JYBouchet@chu-grenoble.fr
NOTES
1. Charte des patients
hospitalisés annexée
à la circulaire ministérielle
n° 95-22 du 6 mai 1995
relative aux droits des
patients hospitalisés.
2. Haute Autorité de santé
(HAS). Guide
Méthodologique.
Structuration d’un
programme d’éducation
thérapeutique du patient
dans le champ des maladies
chroniques. Juin 2007,
consultable sur
www.has-sante.fr.
3. Sandrin-Berthon B,
Carpentier PH, Quéré I,
Satger B. Partnering with
patients to reflect on the
conceptual design of a
therapeutic patient
education programme.
Sante Publique, 2007
Jul-Aug;19(4): 313-22.
4. 50 000 articles
référencés sur Med Line
dont 34 méta-analyses.
5. Ephora est un outil
au service des soignants
investis dans des projets
d’éducation du patient
en région Rhône-Alpes
(www.ephora.fr).
Place du kinésithérapeute dans une unité
transversale pour l’éducation des patients
sa situation de façon globale. Il reprend ses caracté-
ristiques de professionnel du mouvement et devient
personne ressource pour aider le patient à trouver
des solutions concernant des problèmes liés aux
incapacités physiques. Cette dichotomie n’est cepen-
dant pas évidente : l’analyse des contenus des dia-
gnostics éducatifs montre une dominante profes-
sionnelle spécifique au métier de l’éducateur. Le
pharmacien est le spécialiste concernant les médi-
caments, la diététicienne l’alimentation et le kinési-
thérapeute concernant les incapacités physiques.
Ce constat plaide en faveur de réunions de synthèse
ou de concertations régulières pour conserver une
cohérence dans les objectifs d’éducation.
[
Le kinésithérapeute participe à l’évaluation
multidisciplinaire.
L’évaluation du programme
d’éducation constitue probablement la plus grande
difficulté. Les patients sont généralement très satis-
faits. La quantification individuelle des acquis, les
impacts socio-économiques ou les améliorations de
la qualité de vie sont difficiles à évaluer tant ces
approches sont multi factorielles. De nombreux tra-
vaux ont montré le bénéfice de ces actions d’éduca-
tion thérapeutique4. Et la volonté politique expri-
mée ces dernières années ainsi que les problèmes de
démographie médicale incitent à développer ce type
de partenariat avec les patients.
L’UTEP, UNE UNITÉ RESSOURCE
L’unité transversale pour l’éducation du patient
[
(Utep)
n’est ni un centre d’éducation des patients
ni une équipe mobile d’éducation. Elle n’a pas
pour vocation à se substituer aux équipes soignan-
tes pour réaliser l’éducation des patients. Il est
particulièrement important que le soignant soit
expert dans sa spécialité pour faire de l’ETP. Il ne
s’agit pas de créer un nouveau métier d’éduca teur
multi-compétent dans toutes les pathologies.
L’Utep est une unité ressource multi-profession-
[
nelle et multi-disciplinaire.
Elle cherche à créer
une dynamique favorable au développement de
l’éducation thérapeutique. Le kinésithérapeute
apporte ses compétences et son expérience au
même titre que ses collègues issus d’autres pro-
fessions. Il ne cherche pas à développer la trans-
versalité au niveau de sa spécialité mais à lui
définir une place au sein de l’équipe soignante
en charge du patient. L’importance de cette place
varie en fonction des répercussions fonctionnel-
les de la maladie. Il est personne ressource, avec
ses collègues de rééducation, pour tout ce qui
touche à l’activité, à l’autonomie et à l’environ-
nement du patient. Il apporte ses compétences
d’éducateur à ses collègues kinésithérapeutes
soignants, experts en ce domaine.
Au centre hospitalier universitaire (CHU) de
[
Grenoble (38),
la création d’une Utep a été inscrite
au projet d’établissement. Ses premiers objectifs
ont consisté à :
recenser les démarches existantes dans le CHU
en matière d’éducation (enquête Ephora5).
44 actions éducatives dans 30 pathologies différentes
ont été relevées, avec quatre professionnels interve-
nant en moyenne pour chacune. Près de 4 000 patients
sont concernés et 18 métiers soignants impliqués en
dehors des associations de patients ou travailleurs
sociaux. Des partenariats ont été développés avec les
réseaux et parfois le secteur privé. Ce qui ressort de
ce premier audit, sont le foisonnement d’activités,
le fort engagement humain mais aussi, la grande
disparité des moyens et l’ancienneté variable des
actions : peu d’équipes dédiées, “chacun dans son
coin”, problèmes de valorisation et de cotation des
actes, confusion entre l’éducation et l’information ;
animer des réunions d’échanges et de partage
d’expériences sur les pratiques. Chacun a pu expo-
ser les actions éducatives entreprises, les moyens
utilisés et l’expérience acquise dans ces démarches.
Cet enrichissement mutuel est lié à la diversité des
pathologies concernées, des acteurs et des organi-
sations mises en place ;
organiser des rencontres annuelles de l’Utep,
ouvertes à tous. Deux journées ont d’ores et déjà
eu lieu au CHU de Grenoble en 2008 et 2009.
La construction d’un site internet, la création d’un
diplôme universitaire de formation en éducation
thérapeutique et la mutualisation des outils sont les
perspectives de travail du groupe constituant
l’Utep. Des réunions bibliographiques se déroulent
régulièrement.
UNE FORMATION INDISPENSABLE
Trois niveaux de formation peuvent être en visagés :
des journées d’information sur l’éducation thérapeu-
tique permettant aux professionnels de s’associer à des
actions d’éducation au côté d’acteurs formés ;
des formations, d’une durée supérieure à 5 jours,
conférant la compétence pour animer des séquen-
ces d’un programme d’éducation ;
des formations validantes de type universitaire
autorisant à être promoteur et organisateur de
programmes d’éducation.
La valorisation en MIGER des actions d’ETP est condi-
tionnée, entre autres, par la nécessité de recourir à un
personnel formé en ETP mais aussi par le respect des
quatre étapes définies par la HAS.
L’ETP est maintenant opposable dans de nombreuses
pathologies chroniques. Elle modifie les relations
entre les soignants et les patients. Elle leur permet de
mieux s’adapter aux contraintes liées à leur maladie. O
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