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Sans surprise, la mondialisation de l’activité financière a entraîné une demande de mise en place de structures
et de mécanismes de gouvernance mondiale de la finance. Le Conseil pontifical pour la justice et la paix
préconise « un corpus minimum, partagé, de règles nécessaires à la gestion du marché financier mondial,
dont la croissance est plus rapide que celle de l’économie réelle »
4
. Ce qui est préconisé ici n’est pas une
forme de gouvernance qui dépossède les peuples de leur pouvoir et les aliène des processus politiques en leur
ôtant le contrôle sur certaines prises de décision, mais plutôt un modèle de gouvernance dont les limites sont
claires et imposées par des exigences de solidarité et de subsidiarité. En fonction du principe de subsidiarité,
les institutions internationales ne sont censées intervenir qu’en cas de nécessité, pour épauler des États
confrontés à des enjeux qu’ils ne peuvent affronter seuls. Une bonne partie des grands enjeux auxquels les
États sont aujourd’hui confrontés entrent dans cette catégorie, qu’il s’agisse de la criminalité transnationale,
du changement climatique, de la faim et de l’accès à l’eau ainsi qu'à d'autres ressources naturelles. Cette
forme de collaboration internationale doit renforcer la prise de conscience essentielle de notre
interdépendance les uns vis-à-vis des autres, et ainsi faire passer le bien commun avant nos intérêts
personnels (en veillant à une juste répartition et à un juste accès aux ressources essentielles, par exemple). La
gouvernance mondiale doit veiller à ce que les mêmes normes s’appliquent partout, dans tous les pays, et que
les gouvernements puissent prendre des mesures vigoureuses pour s’attaquer aux inégalités et aux injustices,
sans craindre que les grands investisseurs / employeurs ne délocalisent leurs activités.
La crise a eu pour conséquence bénéfique d’accentuer la demande publique de transparence et de régulation
de l’activité financière par une autorité indépendante. Les coûts de la dissimulation et de la fraude dans les
domaines de la fiscalité et de la comptabilisation des bénéfices réalisés dans les pays en développement ont
été mis en évidence et dénoncés par des militants depuis des années. On prend mieux conscience aujourd’hui
que les pays européens paient, eux aussi, le prix de leur incapacité à faire face à ces pratiques. Tout en
reconnaissant l’apport positif que procurent à la société les entreprises et les activités financières, le
gouvernement doit veiller à ce que cet apport soit juste et équitable. À un niveau international, les
gouvernements doivent obliger les sociétés à publier des comptes détaillés par pays. Le problème des paradis
fiscaux doit être traité de façon sérieuse si nous voulons mettre en œuvre à l’avenir un modèle économique
plus juste et plus durable.
Sur le plan européen, l’intégration européenne doit impérativement se poursuivre et aller de pair avec la mise
en place d’une législation et de structures qui accentuent la justice sociale et la participation démocratique.
La Commission des épiscopats de la Communauté européenne (COMECE), dans un document publié en
2012 sous le titre « Une Communauté européenne de solidarité et de responsabilité », nous rappelle que le
modèle de l’économie sociale de marché est un objectif du Traité de Lisbonne. Bien que l’UE doive encore
définir les ingrédients de l’économie sociale de marché qu’elle envisage, la justice sociale et la promotion de
la cohésion sociale devront impérativement être au cœur du dispositif.
Nous soutenons le discours du Conseil pontifical pour la justice et la paix lorsque celui-ci affirme « qu’il est
nécessaire de retrouver la primauté du spirituel et de l’éthique et, e
n même temps, de la politique
- responsable du bien commun - sur l’économie et la finance »
5
. Lorsque l’activité financière se déconnecte
de l’économie réelle, les personnes impliquées peuvent trop facilement perdre de vue les conséquences
humaines de leurs actes. Ce problème ne peut se résoudre uniquement par une réforme du secteur financier.
Nous devons entreprendre diverses démarches, en termes de réglementation, d’éducation et de participation,
afin de renforcer les liens entre l’activité économique et le bien commun de la société.
4 « Pour une réforme du système financier international dans la perspective d'une autorité publique à compétence universelle »,
Conseil Pontifical «Justice et Paix», 2011. Pour avoir accès à ce texte : http://www.justpax.it/fra/home_fra.html
5 « Pour une réforme du système financier international dans la perspective d'une autorité publique à compétence universelle »,
Conseil Pontifical «Justice et Paix», 2011. Pour avoir accès à ce texte : http://www.justpax.it/fra/home_fra.html