ENCEPHALITES INFORMATIONS Pré-requis : Durée de l'item : Auteur(s) : Professeur Vincent Larrue (mail : ) Objectifs : 1-ENCEPHALITES AIGUES 1-1 Le syndrome d’encéphalite aiguë Le tableau clinique comporte au minimum un syndrome confusionnel. La vigilance est toujours altérée, de la simple obnubilation au coma. Des crises d’épilepsie s’observent dans la moitié des cas. Tous les signes déficitaires focaux sont possibles. Les plus fréquents sont l’aphasie, l’ataxie cérébelleuse, l’hémiparésie et les paralysies de nerf crânien. C’est l’existence d’une fièvre qui fait envisager la possibilité d’une encéphalite devant ce tableau de souffrance cérébrale aiguë. Les céphalées sont très fréquentes. En revanche, la raideur de la nuque est inconstante. L’analyse cyto-chimique du liquide céphalo-rachidien montre, dans la très grande majorité des cas, une méningite qui permet de confirmer le diagnostic. Il faut savoir toutefois que l’absence de méningite n’exclut pas une encéphalite. Le LCR peut être normal dans certaines encéphalites herpétiques ou listériennes. Ces diagnostics ne doivent donc pas être écartés s’il existe des données cliniques [ Précision : signes temporaux pour l’encéphalite herpétique, paralysie des nerfs crâniens pour une encéphalite listérienne ] ou neuro-radiologiques [ Précision : à l’IRM ] évocatrices. Néanmoins, un liquide céphalo-rachidien entièrement normal rend improbable une encéphalite aiguë. Les principaux diagnostics différentiels sont alors : Le neuro-paludisme [ Précision : la souffrance cérébrale résulte d’occlusions vasculaires multiples ] , envisagé après un séjour en pays d’endémie et confirmé par les examens sanguins. L’encéphalopathie septique. Ce diagnostic évoqué dans un contexte de sepsis sévère ne peut être retenu qu’après avoir exclu formellement une méningite [ Précision : par un examen du liquide céphalo-rachidien ] et un abcès cérébral [ Précision : par un scanner cérébral ou une IRM ] . Une thrombose veineuse cérébrale septique, reconnue à l’IRM qui montre les lésions parenchymateuses [ Précision : ischémie, hémorragie, oedème ] et l’occlusion du système veineux, dans un contexte d’infection d’un sinus, d’une oreille, d’une dent ou de staphylococcie de la face. L’existence d’une fièvre au cours d’un accident vasculaire cérébral ou d’un état de mal épileptique, secondaire à une inhalation ou d’origine centrale, peut poser problème et justifier la vérification du liquide céphalo-rachidien. Enfin, on peut citer chez l’enfant le syndrome de Reye survenant à la suite d’une infection virale. L’imagerie montre l’œdème cérébral diffus et il existe des signes biologiques reflétant la stéatose hépatique. 1-2 Encéphalites dans le cadre des méningites purulentes Les méningites purulentes graves sont caractérisées par des signes encéphalitiques. La fièvre est généralement élevée, la raideur de la nuque franche. Ce tableau clinique impose la ponction lombaire qui ramène un liquide louche dont l’analyse montre la présence de polynucléaires et une glycorachie effondrée. 1-3 Conduite à tenir devant un tableau d’encéphalite aiguë Le bilan initial doit comporter une analyse du liquide céphalo-rachidien, une IRM de l’encéphale ou, à défaut, un scanner cérébral avec injection de produit de contraste et un électroencéphalogramme. En l’absence d’autre orientation étiologique précise, il faut entreprendre un traitement par aciclovir [ Précision : voir encéphalite herpétique ] éventuellement associé à l’amoxyciline [ Précision : dans l’hypothèse d’une listériose ] . Dans un contexte d’infection respiratoire récente, il faut aussi envisager un traitement par fluoroquinolone [ Précision : infection à Mycoplasme ou Légionellose ] . 1-4 Encéphalites virales Principaux virus responsables d’encéphalites aiguës. VZV:varicelle zona virus; CML:chorioméningite lymphocytaire; EBV:Epstein-Barr virus 1-4-1 Encéphalite herpétique L’encéphalite à HSV1 est due à la réplication du virus jusqu’alors quiescent dans les ganglions sensitifs céphaliques. Elle est responsable de la plupart des encéphalites nécrotiques de l’adulte et de l’enfant. L’encéphalite à HSV2 affecte le nouveau-né ou le nourrisson. La contamination se produit lors du passage de la filière génitale à l’accouchement. Dans l’encéphalite à HSV1, les lésions nécrotiques prédominent à la partie antérieure des lobes temporaux. Cette localisation explique la fréquence de certains signes cliniques. Clinique Le début est généralement sub-aigu, en quelques jours, constitué de troubles du comportement et de troubles du langage, parfois d’un syndrome pseudo-grippal. La fièvre est constante, généralement élevée. De même, il existe presque toujours des troubles de la conscience, de la confusion discrète au coma avéré. Les céphalées sont fréquentes, mais la raideur méningée n’est présente que en moins de la moitié des cas. Lorsque le trouble de la conscience est modéré, la constatation d’une aphasie ou d’une amnésie sont des indices importants en faveur du diagnostic d’encéphalite herpétique. Des parésies ou d’autres déficits focaux sont possibles dans des formes plus évoluées. Enfin, des crises d’épilepsie surviennent chez la moitié des patients. L’existence d’une aura de type temporal est un argument en faveur d’une origine herpétique. Analyse cyto-chimique du liquide céphalo-rachidien La méningite est quasi constante, peu abondante, quelques dizaines d’éléments de type lymphocytaire. Elle est parfois discrète, de 5 à 10 éléments. La protéinorachie est modérément augmentée inférieure à 2 g/l avec glycorachie normale. Amplification génique ou PCR La technique est très spécifique. Elle permet de confirmer le diagnostic en 24-72 h. Toutefois, bien que très élevée, sa sensibilité n’est pas absolue. En conséquence, lorsque le tableau clinique est évocateur, le traitement anti-viral doit être poursuivi malgré une PCR négative. La PCR est aussi utile pour vérifier l’efficacité du traitement anti-viral sur un examen de contrôle effectué après 8 à 10 jours. Diagnostic neuroradiologique Le Scanner X est peu performant dans les encéphalites herpétiques en raison de la localisation temporale des lésions. L’examen de choix est l’IRM. L’IRM est le plus souvent anormale, même à un stade précoce. Les lésions prédominent à la partie interne et antérieure des lobes temporaux et peuvent s’étendre à l’insula (figure 1). Elles sont bien mises en évidence sur des coupes coronales. Ces lésions sont rehaussés par l’injection de gadolinium à la face aiguë. Il faut savoir cependant que l’IRM peut être normale. Electroencéphalogramme L’EEG peut montrer des ondes lentes survenant à intervalle régulier. Ces activités périodiques sont latéralisées ou diffuses. Elles sont évocatrices d’une origine herpétique dans un contexte d’encéphalite aiguë, mais elles ne sont ni spécifiques ni constantes. Traitement Le traitement est urgent. Il repose sur l’aciclovir, inhibiteur spécifique de l’ADN-polymérase virale. Il est administré par voie intraveineuse à la posologie de 10 à 15 mg/kg toutes les 8 heures. La durée du traitement reste discutée. Elle varie de 10 à 21 jours. Elle peut être fixée en fonction du résultat du contrôle de PCR dans le liquide céphalo-rachidien effectué au 10ème jour. L’aciclovir peut entraîner une insuffisance rénale régressive. Cette complication est dose- dépendante et ne justifie qu’un ajustement posologique. Rechutes Des rechutes sont observées dans 5 % des cas après un traitement de 10 jours. Elles peuvent être dépistées par un contrôle de la PCR effectué à ce stade. La constatation d’une PCR positive conduit à prolonger le traitement jusqu’à 21 jours. Pronostic En l’absence de traitement la mortalité est très élevée, de l’ordre de 80%. Sous traitement spécifique, la mortalité est réduite à 15 % environ. Les séquelles cognitives sont néanmoins fréquentes. La localisation temporale interne des lésions explique qu’il s’agit pour l’essentiel de syndromes amnésiques qui peuvent réaliser de véritables syndromes de Korsakoff. 1-4-2 Encéphalites compliquant la varicelle et le zona L’encéphalite de la varicelle survient quelques jours après l’éruption cutanée. Son expression clinique peut se limiter à une ataxie cérébelleuse. Sa pathogénie est imprécise. Il peut s’agir d’une infection directe du système nerveux central ou d’une réaction inflammatoire auto-immune. Compte tenu de ces incertitudes, un traitement par aciclovir est généralement préconisé. L’encéphalite associée au zona s’observe chez les sujets très âgés ou immunodéprimés. Le résultat de l’IRM est variable et reflète la pluralité des mécanismes pathogéniques. Il peut s’agir de lésions localisées, comme au cours d’une encéphalite nécrosante, d’anomalies diffuses de la substance blanche, rappelant ce que l’on observe au cours de la LEMP, de lésions péri-ventriculaires associées à un aspect de ventriculite, comme on le voit dans les encéphalites à CMV, ou encore d’hypersignaux multifocaux évocateurs d’ischémie par vascularite. Le diagnostic est facile quand l’encéphalite survient dans un contexte de zona disséminé. Cependant l’éruption peut manquer et dans ce cas le diagnostic est envisagé en raison du terrain immunodéprimé. Il est confirmé par la mise en évidence du génome viral par PCR dans le liquide céphalo-rachidien. Le traitement repose sur l’aciclovir. 1-4-3 Encéphalite due au cytomégalovirus L’encéphalite à CMV affecte les patients immunodéprimés. Les lésions prédominent dans les régions péri-ventriculaires. Cette prédominance visible à l’IRM évoque le cytomégalovirus. La réaction cellulaire dans le liquide céphalorachidien, inconstante, est modérée, à prédominance de polynucléaires. L’existence d’une autre localisation viscérale de l’infection à CMV [ Précision : rétine, tube digestif ] est un élément important du diagnostic. Celui-ci est confirmé par PCR sur le liquide céphalo-rachidien. Le traitement antiviral spécifique doit être débuté avant confirmation du diagnostic. 1-4-4 Autres encéphalites virales Encéphalite de la mononucléose infectieuse Le virus Epstein-Barr est rarement responsable d’une encéphalite dont l’évolution est généralement bénigne. La présence d’un syndrome mononucléosique et d’une élévation des transaminases oriente le diagnostic. (Lien vers : http://www.stethonet.org/fmc/hemato/hemato4.htm) Entérovirus La poliomyélite antérieure aiguë a presque entièrement disparu des pays occidentaux. Les virus Coxsackie et les échovirus sont à l’origine de nombreuses méningites aiguës d’évolution bénigne. Les encéphalites sont beaucoup plus rares et, mise à part l’encéphalite-myocardite néonatale, exceptionnellement graves. Rage Les cas de rage humaine sont devenus exceptionnels dans les pays occidentaux. Des cas importés restent toutefois possibles. L’incubation est en moyenne d’un mois. Le tableau clinique est caractérisé par l’excitation psychomotrice, des hallucinations, des convulsions, des troubles neurovégétatifs, l’hypersalivation, des mouvements involontaires et une hydrophobie. Encéphalites dues au virus ourlien Le virus des oreillons est responsable de nombreuses méningites, beaucoup plus rarement d’encéphalites dont l’évolution est généralement favorable. Arboviroses Les arbovirus sont transmis par piqûres de tique ou de moustique. Les encéphalites à arbovirus sont rares en France [ Précision : pourtour méditerranéen, Corse, Alsace ] . Encéphalites liées au virus de la rougeole Elles sont devenues rares depuis la généralisation de la vaccination. On en distingue trois types: - Encéphalite aiguë, contemporaine de l’éruption cutanée ou la suivant de quelques jours. Il s’agit d’une encéphalite aiguë disséminée, possiblement auto-immune. - Encéphalite sub-aiguë, survenant chez les immunodéprimés, de 1 à 6 mois après l’éruption cutanée, liée à la réplication du virus et mortelle. - Pan-encéphalite sclérosante sub-aiguë dont les signes apparaissent plusieurs années après la rougeole, liée à la persistance du virus dans le système nerveux central (voir ci-dessous) Encéphalite aiguë liée au virus de l’immunodéficience humaine Une encéphalite aiguë spontanément résolutive est possible lors de l’invasion. A ce stade les anticorps sont absents et le diagnostic repose sur l’antigène P24. 1-5 Encéphalites bactériennes pouvant simuler une encéphalite virale aiguë Tuberculose Les méningites tuberculeuses évoluées peuvent avoir une présentation encéphalitique. Le début progressif, par des signes généraux, le terrain [ Précision : sujet immigré ] , les caractéristiques du LCR [ Précision : méningite lymphocytaire, protéinorachie élevée, hypoglycorachie ] orientent le diagnostic. En cas de doute, le malade doit être traité avec des antituberculeux sans attendre la confirmation du diagnostic. Listeriose La méningite aiguë est la manifestation neurologique habituelle de l’infection à listeria. Les encéphalites aiguës focales sont plus rares. L’atteinte est typiquement localisée au tronc cérébral. Les micro-abcès peuvent être visibles à l’IRM. Les signes cliniques s’installent en quelques jours : céphalées et fièvre, suivies de paralysies de nerfs crâniens, de signes cérébelleux, d’hémiparésie ou de tétraparésie, et de troubles de la vigilance. Il faut savoir que l’analyse cytochimique du liquide céphalo-rachidien peut être normale. La bactérie est rarement mise en évidence dans le liquide céphalo-rachidien, plus souvent dans le sang. Rickettsios La fièvre Q peut se compliquer, rarement, d’une encéphalite. Infection à mycoplasma pneumoniae Les infections à mycoplasme peuvent se compliquer d’une encéphalite aiguë globale ou limitée au cervelet. Il faut y penser dans un contexte de pneumopathie atypique ou de rhinopharyngite. Le mécanisme de ces encéphalites est incertain. La PCR peut être positive sur le liquide céphalorachidien. Dans d’autres cas, l’IRM évoque davantage une encéphalomyélite aiguë disséminée. (voir plus bas) Légionellose Des tableaux d’encéphalite aiguë globale ou limitée au cervelet sont observés au cours de légionellose. Ce diagnostic est à discuter dans un contexte de pneumopathie atypique. L’analyse cytochimique du liquide céphalo-rachidien est normale. Maladie des griffes du chat Un tableau d’encéphalopathie aiguë associant fièvre, coma et crises d’épilepsie est possible. Le liquide céphalo-rachidien est normal. Le diagnostic doit être évoqué devant la présence d’une adénopathie axillaire ou cervicale. L’évolution est habituellement favorable. Encéphalite à amibes libres Ces encéphalites sont exceptionnelles. Elles sont contractées lors de la natation sub-aquatique dans des eaux stagnantes. L’évolution est fulminante. L’analyse cyto-chimique du liquide rachidien met en évidence une méninge à polynucléaires, une élévation des protides et une hypoglycorachie. Des amibes peuvent être mises en évidence à l’examen direct du liquide céphalo-rachidien lorsqu’ils sont recherchés spécifiquement. Un traitement par amphotéricine B doit être essayé, mais ces encéphalites sont généralement mortelles. 1-6 Encéphalomyélite aiguë post-infectieuse Sur le plan anatomo-pathologique cette encéphalite est caractérisée par une inflammation et une démyélinisation péri-veinulaire. Il s’agit probablement d’une maladie auto-immune déclenchée par une infection virale [ Précision : fièvre éruptive, MNI, CMV ] ou à Mycoplasma Pneumoniae, extra-neurologique et sans gravité apparente. Bien souvent cependant, l’enquête étiologique est négative ou ne retrouve que la notion imprécise d’une infection non spécifique des voies aériennes supérieures dans les jours précédents. Les symptômes associent céphalée, fièvre, raideur de la nuque, trouble de la vigilance, déficits focaux, crises d’épilepsie et mouvements anormaux à des degré divers. Le tableau est donc celui d’une encéphalite aiguë. L’IRM met en évidence des lésions de démyélinisation multi-focale de l’encéphale et, parfois, de la moelle épinière. L’analyse cyto-chimique du liquide céphalo-rachidien montre le plus souvent une méningite lymphocytaire avec une élévation modérée des protéines et une glycorachie normale. Dans les formes les plus graves, le LCR contient aussi des polynucléaires et des globules rouges. A l’opposé, le liquide céphalo-rachidien peut être normal. Le diagnostic repose donc surtout sur l’aspect de l’IRM qui est évocateur. Le traitement repose sur des corticoïdes à fortes doses selon des protocoles qui sont proches de ceux utilisés dans la sclérose en plaque. Les échanges plasmatiques peuvent être essayés dans les formes les plus graves. 2- ABCÈS CEREBRAL, EMPYEME SOUS-DURAL, TOXOPLASMOSE CEREBRALE, MYCOSES, NEUROCYSTICERCOSE 2-1 Abcès cérébral Les abcès cérébraux résultent d’une infection régionale [ Précision : sinus para-nasal, oreille moyenne, dent, plaie crânienne ] ou de la dissémination hématogène d’une bactérie à partir d’un foyer thoracique [ Précision : pleuro-pulmonaire ou endocardite ] ou abdominal. Plus rarement, l’abcès cérébral survient chez un patient porteur d’une cardiopathie congénitale ou d’une fistule artério-veineuse pulmonaire. L’origine de l’abcès ne peut être précisée dans près de 20 % des cas. Les méningites bactériennes ne se compliquent presque jamais d’abcès cérébraux. En revanche un abcès cérébral profond peut se rompre dans les ventricules et entraîner une méningite bactérienne secondaire. Les abcès dus à des causes régionales sont uniques, alors que les abcès métastatiques sont souvent multiples. Les principaux germes sont les streptocoques anaérobies, bacteroides ,les entérobactéries et les stahylocoques. Chez les sujets immunodéprimés, il faut penser aux actinomycètes et à nocardia. La flore est souvent polymicrobienne. Le symptôme initial est généralement une céphalée. Mais il peut s’agir aussi d’un déficit focal ou d’une crise d’épilepsie. Après quelques jours, le tableau clinique associe un syndrome d’hypertension intra-crânienne évident et un syndrome déficitaire focal. La fièvre est très inconstante, surtout au stade d’abcès encapsulé. De même l’hyperleucocytose, l’accélération de la vitesse de sédimentation, l’élévation de la CRP sont inconstantes. La ponction lombaire est contre-indiquée en raison de l’hypertension intra-crânienne. Si elle est effectuée, elle montre une réaction cellulaire modérée, souvent à prédominance de polynucléaires. La protéinorachie est élevée, mais la glycorachie est normale et la culture du liquide céphalo-rachidien reste stérile sauf dans les rares cas de rupture intra-ventriculaire de l’abcès. Il faut savoir que l’analyse cyto-chimique du liquide céphalo-rachidien peut être normale. Le diagnostic repose sur la neuroimagerie, scanner ou mieux IRM. L’image caractéristique est une prise de contraste annulaire, régulière et fine, avec un centre hypodense et entourée d’œdème (figure 2). Au stade plus précoce d’encéphalite pré-suppurative, l’image est celle d’un oedème cérébral focal non rehaussé par le contraste ou avec des prises de contraste multifocales. Le diagnostic neuroradiologique inclut les gliomes cérébraux, les métastases cérébrales, les granulomes à toxoplasme, les abcès tuberculeux, ainsi que les abcès à champignon. Dans les cas douteux, une biopsie est requise pour assurer le diagnostic. Le traitement antibiotique en l’absence d’orientation bactériologique associe C3G et métronidazole ou phénicolé. La ponction de l’abcès est indiquée en cas de lésion volumineuse, afin de contrôler rapidement l’hypertension intra-crânienne, ou en cas d’échec du traitement antibiotique probabiliste. La durée du traitement antibiotique n’est pas codifiée. Elle est au minimum de 4 semaines et doit être adaptée à l’évolution clinique et neuroradiologique. 2-2 L’empyème sous-dural Il s’agit d’une collection de pus entre la dure mère et l’arachnoïde. L’empyème sous-dural complique l’évolution d’une sinusite frontale ou d’une otite. Les symptômes sont une céphalée et une fièvre généralement élevée suivies d’un trouble de la conscience et, plus tardivement, de signes déficitaires focaux. Le diagnostic repose sur le scanner ou l’IRM. L’analyse cyto-chimique du liquide céphalorachidien, lorsqu’elle est effectuée, montre une méningite à polynucléaires avec glycorachie normale et dont la culture restera stérile. L’empyème sous-dural est une urgence neurochirurgicale. 2-3 Toxoplasmose (en dehors de la toxoplasmose congénitale) La présentation clinique est généralement celle d’un abcès cérébral, rarement celle d’une encéphalite aiguë. Les lésions au scanner ou mieux à l’IRM sont généralement multiples, arrondies, entourées de prise de contraste annulaire, associées à une réaction oedémateuse périphérique. La toxoplasmose cérébrale ne se développe que chez les sujets immunodéprimés. Chez un sidéen, l’infection est si fréquente que l’observation d’images caractéristiques au scanner ou à l’IRM justifie un traitement anti-parasitaire empirique. Celui-ci entraîne une amélioration des signes cliniques après quelques jours. Les anomalies neuroradiologiques peuvent persister plusieurs semaines. En l’absence d’amélioration clinique, une biopsie cérébrale est nécessaire pour préciser le diagnostic. 2-4 Cysticercose La neuro-cysticercose résulte de localisations cérébrales des larves de Taenia Solium. On peut observer en France des cas importés des pays d’endémie. (Lien vers : http://www.doctissimo.fr/html/sante/encyclopedie/sa_1182_vers_intestin05.htm) La manifestation clinique la plus fréquente est une épilepsie. La neuro-imagerie met en évidence initialement des kystes cérébraux multiples avec une prise de contraste annulaire au sein desquels on peut observer le ver. A un stade plus tardif, les lésions se résument à des calcifications punctiformes cortico-sous-corticales. 2-5 Mycoses du système nerveux central central Les mycoses du système nerveux central peuvent se développer chez les sujets immunocompétents, mais le plus souvent elles surviennent dans un contexte d’immunodépression avérée. La cryptococose neuro-méningée se présente comme une méningite sub-aiguë [ Précision : voir méningites ] . Les lésions de candidose du système nerveux central consistent en de multiples micro-abcès, des abcès volumineux, des granulomes volumineux non abcédés ou une méningite. La présentation clinique des candidoses du système nerveux central est variable en fonction des lésions anatomo-pathologiques. Il peut s’agir d’une méningite sub-aiguë, d’un syndrome encéphalitique aigu [ Précision : micro-abcès multiples ] ou, en cas d’abcès ou de granulome volumineux, d’un syndrome d’hypertension intra-crânienne associé à des signes focaux. L’analyse cyto-chimique du liquide céphalo-rachidien montre une méningite lymphocytaire ou à prédominance lymphocytaire. La protéinorachie est élevée, la glycorachie habituellement abaissée. L’aspergillose pulmonaire peut se compliquer d’abcès cérébraux ou d’une vascularite cérébrale qui se manifeste par des infarctus cérébraux et des hémorragies cérébrales multiples. La mucormycose orbito-nasale est une complication rare du diabète ou d’autres états d’immunodépression. L’infection se développe dans un sinus para-nasal et se propage à l’orbite et à la base du cerveau ou elle détermine une atteinte des nerfs crâniens et une vascularite cérébrale à l’origine d’ischémies et d’hémorragies cérébrales. 3- ENCÉPHALITES SUBAIGUES OU CHRONIQUES Les signes neurologiques, au premier rang desquels figure un syndrome démentiel, évoluent sur un mode sub-aigu ou chronique. Il n’existe pas de fièvre. 3-1 Encéphalite chronique liée au VIH Au stade d’immunodépression, le VIH est responsable d’un syndrome démentiel de type sous cortical [ Précision : ralentissement psychomoteur, inattention, dysfonctionnement exécutif ] associé à des troubles moteurs qui vont de la discrète ataxie à la paraparésie. L’IRM montre une atrophie cérébrale et des anomalies diffuses et modérées de la substance blanche des hémisphères cérébraux. Le liquide céphalo-rachidien est normal ou montre une discrète réaction lymphocytaire et une légère élévation des protéines avec une glycorachie normale. Ce syndrome démentiel lié au VIH évolue de façon chronique. Il est amélioré par les thérapeutiques anti-rétrovirales. 3-2 Leucoencéphalite multifocale progressive (LEMP) Elle est due à la réplication du papovavirus JC jusqu’alors quiescent chez un sujet immunodéprimé. L’évolution est sub-aiguë ou chronique. Il n’existe pas de fièvre ni de syndrome méningé. Les premiers signes cliniques sont souvent un déficit du champ visuel qui reflète la fréquente localisation des lésions au niveau du lobe occipital. Une hémiparésie, un syndrome démentiel, une ataxie apparaissent ensuite. L’IRM met en évidence des lésions de la substance blanche prédominant dans la partie postérieure des hémisphères cérébraux, asymétriques, n’entraînant pas d’effet de masse et non rehaussées par le gadolinium. L’analyse cyto-chimique du liquide céphalo-rachidien est normale. Le diagnostic est confirmé par la PCR sur le liquide céphalo-rachidien. Cette encéphalite est spontanément mortelle en quelques mois. Il n’existe pas de traitement anti-viral spécifique. L’évolution peut être ralentie lorsque l’affection responsable de l’immunodépression est accessible à un traitement. 3-3 Pan-encéphalite sclérosante sub-aiguë La pan-encéphalite sclérosante subaiguë survient plusieurs années après la rougeole, chez un enfant ou un adolescent, exceptionnellement après 18 ans. Elle est liée à la persistance du virus dans l’encéphale. Les signes cliniques sont progressifs, limités d’abord à un déclin des performances et des troubles du comportement, suivis d’ataxie et de myoclonies. Une choriorétinite associée est possible. L’électroencéphalogramme montre des complexes périodiques très évocateurs dans le contexte. L’analyse cyto-chimique du liquide céphalo-rachidien ne montre pas de réaction cellulaire. Il existe en revanche un profil oligoclonal des immunoglobulines G correspondant à la présence d’anti-corps antirougeoleux. La maladie est mortelle en 1 à 3 ans. Un tableau clinique semblable a été décrit plusieurs années après une infection par le virus de la rubéole. 3-4 Neurosyphilis La syphilis peut être responsable d’une démence progressive. Elle est systématiquement recherchée dans ce contexte. Le diagnostic peut être évoqué lorsqu’il existe une pupille d’Argyll-Robertson. 3-5 Maladie de Whipple Une encéphalite sub-aiguë ou chronique est possible. Le syndrome clinique qui associe démence, myoclonies oculaires et mandibulaire rythmiques, et paralysies oculomotrices est évocateur. Le diagnostic peut être confirmé par PCR sur le liquide céphalo-rachidien. 4- MALADIES A PRIONS Les maladies à prions s’observent chez l’homme et dans plusieurs espèces animales. On les désigne aussi sous le terme d’encéphalopathies spongiformes car elles sont caractérisées par une spongiose du système nerveux central. Elles sont transmissibles. Les maladies à prions sont liées à la déconformation d’une protéine neuronale, la protéine P. L’origine de la déconformation peut être génétique ou acquise par contamination. La protéine déconformée est appelée prion. Il semble qu’un prion puisse entraîner la déconformation en chaîne des protéines P normales par un mécanisme purement allostérique. Ce phénomène pourrait rendre compte du pouvoir infectant du prion. La maladie de Creutzfeldt-Jakob (Lien vers : http://www.mhr-viandes.com/fr/docu/docu/d0001467.htm) est la maladie à prion humaine la moins rare. Elle se manifeste par une démence sub-aiguë de type frontal associée à une ataxie cérébelleuse, des troubles visuels et des myoclonies, chez un sujet de plus de 50 ans. L’IRM est généralement normale. L’électroencéphalogramme montre des activités périodiques évocatrices dans le contexte. L’analyse cyto-chimique du liquide céphalo-rachidien est normale ou ne montre q’une élévation modérée de la protéinorachie. La présence dans le liquide céphalo-rachidien de la protéine 14 3-3, protéine neuronale normalement absente du LCR, sans être tout à fait spécifique, augmente la probabilité du diagnostic. Le diagnostic de certitude repose sur l’examen anatomo-pathologique du cerveau. La maladie est toujours mortelle, en quelques mois. L’origine de la maladie de Creutzfeldt-Jakob n’est pas connue. Elle survient en l’absence de contexte familial et de contamination identifiée. Il existe des cas de maladie à prions qui résultent d’une contamination inter-humaine. Ces cas ont été observés après greffe de dure mère, greffe de cornée ou après administration d’extraits d’hypophyse humaine dans le cadre du traitement de nanismes. La présentation clinique est un peu différente. Il s’agit au début d’une ataxie cérébelleuse, puis d’une démence. Les myoclonies et les anomalies périodiques de l’EEG ne sont pas habituelles. Le diagnostic repose donc sur l’exclusion d’autres causes possibles de ces syndromes et la notion d’une contamination possible. Il est confirmé par l’examen anatomopathologique. Le nouveau variant de la maladie de Creutzfeldt-Jakob est la forme humaine de l’encéphalopathie spongiforme bovine. Elle est probablement contractée par l’ingestion de tissus bovins contaminés. La maladie reste rare en France où cinq cas seulement ont été identifiés. Elle est plus fréquente au Royaume Uni. A la différence de la maladie de Creutzfeldlt-Jakob classique, le nouveau variant affecte surtout des adolescents et des adultes jeunes. Les symptômes initiaux consistent en des troubles psychiatriques associés à des dysesthésies et des douleurs. Une ataxie cérébelleuse et un syndrome démentiel apparaissent ensuite. Il n’existe pas de myoclonie et l’électroencéphalogramme est normal. En revanche l’IRM montre souvent des hypersignaux au niveau de la partie postérieure des thalamus. Le diagnostic peut être confirmé par une biopsie d’amygdale pharyngée qui montre la présence de prions. La maladie est mortelle en quelques mois. Une prédisposition génétique est sans doute nécessaire pour permettre le développement de cette maladie à prions car les sujets atteints étaient tous homozygotes méthionine-méthionine sur le codon 129 du gène de la protéine P. Il existe enfin des maladies à prions familiales déterminées génétiquement. Figure 1 : Encéphalite herpétique. IRM. Lésions temporales internes bilatérales et de l’insula droite, hyperintenses en T2 (droite), hypointenses en T1 (gauche). Figure 2 : Abcès cérébraux. Scanner avec produit de contraste. Lésions frontales gauches hypodenses, prise de contraste annulaire, œdème péri-lésionnel.