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monde extérieur. C’est à partir de cela qu’apparait l’attention conjointe*. Elle est une étape
indispensable à l’enfant pour qu’il puisse lier une séquence de sons, un signe linguistique* et
une chose signifiée* (Vinter, 2008). A l’opposé, chez l’enfant porteur de trisomie 21, l’interaction
mère/enfant est ralentie car le contact « œil à œil » prend plus de temps pour s’établir et est
assez court. Ce contact oculaire ne s’établit qu’à l’âge de 7 ou 8 semaines (Lysens,1997).
Diverses malformations engendrées par la maladie sont les causes de ce retard (telle que
l’hypotonie relative* des muscles des yeux) (Vinter, 2008). L’enfant atteint montre une difficulté
à détacher son regard de son interlocuteur pour se concentrer sur un objet de son
environnement ainsi qu’un retard de l’attention conjointe*. Ces conduites sont, comme nous
l’avons déjà dit, à la base d’une expérience partagée. La relation triangulaire « mère-enfant-
objet » est dès lors difficile à établir (Vinter, 2008). Rossana Tricoli, la maman de Simon, nous
confirme l’importance de stimuler la perception visuelle : « Pour Simon, il nous avait été
conseillé de stimuler son attention visuelle en lui mettant, au-dessus de son berceau, un mobile
blanc et noir. En tournant cela faisait un contraste qui faisait travailler son cerveau et sa vue.
Les couleurs pastelles et douces existantes dans les commerces n’ont que peu d’attrait pour les
enfants porteurs du syndrome de Down et ne les stimulent pas. »
Avant de savoir parler, l’enfant doit pouvoir se faire comprendre. Le pointage* le permet. Ce
dernier, prédicteur du développement du langage, ne peut malheureusement pas se faire de
façon identique que chez l’enfant tout-venant : celui-ci pointe son doigt en direction d’un objet et
émet des sons pour signifier à l’adulte ce qu’il attend. Les enfants porteurs du syndrome de
Down arrivent à produire ce geste tout en émettant des vocalisations, mais ils le font sans
regarder leur partenaire. Celui-ci ne sait donc pas donner de sens, ni au pointage*, ni aux
vocalisations, qu’il ne décode pas (Vinter, 2008). Il est également intéressant de noter que
l’acquisition de l’attention conjointe* précède toujours celle du pointage* (Marcos, 1998).
Au niveau du travail de l'articulation et du contrôle des organes, ils présentent, en fait,
beaucoup plus de difficultés parce qu'ils sont imprécis, précipités, et qu'ils ont une attention
conjointe* qui est très inconstante. Quand ils doivent reproduire la même chose que l’enfant
tout-venant, cela reste très compliqué (Irène Vacca, logopède, ligne 12).
Au niveau du babillage*, et plus particulièrement dans le cas des voyelles, les sons produits
par un enfant tout-venant et ceux produits par un enfant souffrant de la pathologie sont plus ou
moins identiques, et ce malgré les nombreuses difficultés articulatoires de l’enfant porteur du
syndrome de Down. Des difficultés semblent plutôt être rencontrées au niveau des consonnes.
La protrusion linguale* est une autre caractéristique majeure des troubles de l'oro-facial* et
de la nutrition chez les enfants trisomiques. Elle peut être causée par divers facteurs propres à
la trisomie 21 et ne facilite en rien la communication langagière (Association Romande Trisomie
21, 2004). Notons cependant que dans la majeure partie des cas, le problème de la protrusion
linguale* n'est qu'une étape transitoire. Elle ne persiste que dans des cas où d'autres facteurs
interviennent. L'enfant ne présentera donc, à priori, des problèmes de protrusion linguale* que
durant une période restreinte (t21somie Haute Garonne, 2006). La maman de Simon nous a dit
à ce sujet que « les enfants porteurs de trisomie ont l’impression que leur bouche est trop petite
et qu’ils ne savent donc pas en faire sortir des beaux sons. » Elle nous dit également qu’ « il
existe des exercices pour les aider à maitriser leur bouche comme par exemple souffler sur une
bougie, inspirer dans une paille… »
Afin de mieux comprendre les origines physiologiques de ces difficultés, décrivons de
manière globale les particularités propres au syndrome qui peuvent expliquer certaines de ces
difficultés articulatoires. L'enfant nait avec un espace oral plus restreint que la moyenne et
présente un tonus musculaire de la langue plus faible. Sa langue grandit à un rythme décalé
par rapport au reste du visage et du coup, dans les premières années de sa vie, sa langue se
trouve plus à l'avant et en haut de la bouche (Association Romande Trisomie 21, 2004).