L`insuffisance cardiaque: fréquente, mais (encore ) souvent

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L’insuffisance cardiaque: fréquente, mais
(encore) souvent méconnue
Préambule au programme d’information de la Fondation Suisse de Cardiologie
R. Lerch a, G. Noll b, W. Rutishauser c
Le présent numéro du Bulletin des médecins suisses
publie un article rédigé par le Prof. Peter Buser
consacré aux «Aspects psychosociaux et éthiques
de l’insuffisance cardiaque». C’est le premier
article d’une série de publications paraissant en
préambule au programme d’information menée
par la Fondation Suisse de Cardiologie sur le
thème de l’insuffisance cardiaque. Le programme d’information a été conçu par la Fondation Suisse de Cardiologie en collaboration
avec le groupe de travail «Insuffisance cardiaque» de la Société suisse de cardiologie et avec
la participation de délégués des Sociétés suisses
de médecine générale et de médecine interne.
croissement général de l’espérance de vie de la
population débouche sur une augmentation de
l’incidence de l’insuffisance cardiaque. Actuellement, le nombre d’insuffisants cardiaques en
Suisse est estimé à 150 000 personnes. Selon certaines projections, ce chiffre va doubler au cours
des vingt prochaines années. Malgré les progrès
thérapeutiques remarquables réalisés au cours de
la dernière décade, la mortalité due à l’insuffisance cardiaque demeure extrêmement élevée;
elle est comparable à celle de stades avancés de
tumeurs malignes. En outre, la qualité de vie du
patient insuffisant cardiaque est particulièrement entravée en comparaison avec d’autres maladies chroniques sévères car les patients vivent
en s’économisant, et le nombre d’hospitalisations nécessitées par des complications est élevé.
Enfin, last but not least, l’insuffisance cardiaque
est responsable de coûts élevés supportés par le
système de santé.
Pourquoi un programme d’information
sur l’insuffisance cardiaque?
Importance de l’insuffisance cardiaque
a Hôpitaux Universitaires de Genève
(HUG), Membre de la Fondation
Suisse de Cardiologie et responsable
de la campagne d’information sur
l’insuffisance cardiaque
b Hôpitaux Universitaires de Zurich,
Président du groupe de travail
«Insuffisance cardiaque» de la
Société suisse de cardiologie
c HUG, Président de la Fondation
Suisse de Cardiologie
* Les termes masculins utilisés
sont représentatifs également
pour la forme féminine.
Correspondance:
Prof. Dr René Lerch
Hôpitaux Universitaires de Genève
Service de Cardiologie
CH-1211 Genève 14
E-mail: [email protected]
Les efforts intenses fournis en recherche médicale pour développer les méthodes actuelles de
traitement de l’infarctus aigu du myocarde, qui
incluaient une large information de la population sur les symptômes et les mesures à prendre
en urgence, ont permis au cours des dernières décennies une amélioration progressive de l’espérance de vie des patients* victimes d’un infarctus.
Parallèlement à ce progrès, une autre pathologie
cardiaque gagne insidieusement en importance
dans la pratique ambulatoire, c’est l’insuffisance
cardiaque. Ces deux phénomènes sont interdépendants: l’amélioration de la survie après
infarctus conduit tôt ou tard à l’insuffisance cardiaque chez un grand nombre des patients. Ce
phénomène se retrouve également dans d’autres
cardiopathies telles que la cardiomyopathie hypertensive, les cardiomyopathies d’autre origine
ou des diverses valvulopathies, de sorte que l’ac-
Un diagnostic précoce de l’insuffisance cardiaque,
ou mieux, l’identification d’une diminution de
la fonction cardiaque asymptomatique au stade
qui précède l’éclosion de l’insuffisance cardiaque, permet de s’opposer au développement
ou à la progression de cette dernière par des mesures thérapeutiques ou préventives. Pour cette
raison, la mise en œuvre aussi précoce et aussi
complète que possible des recommandations
thérapeutiques fondées sur des preuves à long
terme joue un rôle fondamental. Chacun sait
qu’il est plus facile de parler des directives que de
les transposer dans la pratique. Des points
d’achoppement fréquents sont un manque d’adhésion thérapeutique des patients, ou leur lassitude à prendre des comprimés, surtout chez les
sujets atteints de comorbidités. Une autre cause
d’échec thérapeutique découle de l’absence
d’adaptation du traitement malgré l’apparition
de signes d’alerte ou de modification des cir-
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constances extérieures (p. ex. en voyage). Enfin,
un grand nombre de patients ne connaissent pas
les symptômes peu spécifiques de l’insuffisance
cardiaque, les ignorent (les banalisent) ou les
attribuent au vieillissement.
Les constats suivant, faits lors d’études cliniques récentes menées dans différents pays européens, montrent clairement qu’une meilleure
information sur l’insuffisance cardiaque s’impose
à tous les niveaux:
– Le respect des directives publiées pour le diagnostic et le traitement, en particulier chez les
personnes âgées, est à améliorer.
– Les patients et leurs proches ne connaissent
pas suffisamment la maladie et ne savent pas
comment (mieux) vivre avec une insuffisance cardiaque. Ce manque d’information a
des conséquences indésirables telles que le
manque de compliance et la méconnaissance
des symptômes d’alerte.
– La population ne connaît pas suffisamment
le tableau clinique et les causes de l’insuffisance cardiaque, et la confond avec l’infarctus du myocarde, très souvent évoqué par les
médias. Une étude récente, présentée lors du
dernier Congrès européen sur l’insuffisance
cardiaque (2003), montre que seuls 3 % de la
population connaissent les signes de cette
maladie. Par manque d’information, la compréhension de base indispensable à la mise
en pratique d’une prophylaxie ciblée et à un
diagnostic précoce fait défaut.
Le programme d’information
Le programme d’information mené par la Fondation Suisse de Cardiologie, qui débutera en
février 2004, s’adressera dans une première phase
au patient et à son entourage. La seconde phase,
qui sera lancée en 2005, s’adressera à la population générale.
L’efficacité et le succès de ce programme d’information dépendra dans une large mesure de la
collaboration des médecins de premier recours,
car c’est à eux que revient le dépistage des patients à risque, le diagnostic et la prise en charge
primaire des insuffisants cardiaques. Par conséquent, quasiment en «préambule» à ce programme, une série d’articles spécialisés dédiés au
thème de l’insuffisance cardiaque seront publiés.
Le Bulletin des médecins suisses publiera quatre
articles destinés à couvrir les aspects de santé pu-
blique de ce syndrome. Cinq autres articles seront
publiés dans le Forum Médical Suisse afin d’apporter aux médecins les connaissances les plus
récentes relatives à la physiopathologie, au diagnostic et au traitement de l’insuffisance cardiaque. Tous ces articles spécialisés seront disponibles sous forme d’un fascicule auprès de la
Fondation Suisse de Cardiologie à partir du mois
de février 2004.
Lors de la première phase, tous les médecins
de premier recours suisses recevront un mailing
leur présentant ce projet, accompagné d’un kit
destiné aux patients atteints d’insuffisance
cardiaque. Ce kit contient du matériel d’information concernant la formation des patients
aux techniques d’autocontrôle. Il pourra être
commandé gratuitement par les praticiens auprès
de la Fondation Suisse de Cardiologie. L’objectif
de cette initiative consiste à soutenir les praticiens dans leur tâche d’information et de motivation des patients à participer activement à leur
traitement en assumant davantage de responsabilités. En complément, la Fondation Suisse de
Cardiologie et le groupe de travail «Insuffisance
cardiaque» ont également prévu d’encourager la
formation des infirmières dans le domaine
spécifique qu’est l’insuffisance cardiaque, afin
qu’elles puissent soutenir les médecins dans
la prise en charge des patients, également à domicile.
Sous le thème général de «L’âge et le cœur»,
la seconde phase comportera une campagne d’information générale du public avec l’objectif de
présenter la nature, les causes et la prévention de
l’insuffisance cardiaque. En effet, plus de 80 %
des insuffisants cardiaques sont âgés de plus de
65 ans. Toute une série d’actions sont prévues,
incluant notamment la publication d’une brochure d’information, des communiqués de presse,
des conférences publiques et un concours. La population pourra également poser des questions
grâce à une ligne téléphonique d’information
aboutissant à la Fondation Suisse de Cardiologie.
D’autres informations relatives à la campagne
d’information «Insuffisance cardiaque» peuvent
être obtenues auprès de la Fondation Suisse de
Cardiologie au numéro de tél. 031 388 80 85 ou
par e-mail: [email protected]. La Fondation suisse de cardiologie espère que son programme contribuera à améliorer la qualité de
vie des insuffisants cardiaques et à sensibiliser la
population générale à ce sujet d’importance
croissante.
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