Bulletin No 29 - Avril 1997
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4 Recherches en cours
Thèses en cours
Abdelhakim BOUKARROUM : “ Appartenance culturelle et comparaison sociale. Contribution à
l’étude du versant social de l’identité de la personne à l’adolescence ”. Thèse de doctorat en
psychologie du développement, Université Aix-Marseille, Aix-en Provence.
Cette thèse s’inscrit dans la suite des travaux de Tajfel (1972) Vinsonneau (1973), sur l’étude de
l’impact des différences culturelles sur l’estimation des distances intergroupes. La perspective
de ce travail est l’étude de la relation entre appartenance culturelle et comparaison sociale dans
des groupes réels ayant entre eux une longue histoire de confrontation directe et indirecte,
vivant chacun dans un quartier populaire.
L’idée vise à formuler autrement le lien entre comparaison sociale et construction du versant
social de l’identité de la personne (Majeed & Gosh, 1982; Tajfel, 1972; Vinsonneau, 1993;
Serino, 1990). La comparaison intergroupes est, pour tout adolescent, un moteur de ses
positionnements dans le champ social. Plus concrètement, l’estimation des ressemblances
est à la fois constat ou recherche d’une communauté avec autrui à travers différentes formes
d’affiliation et de recherche de visibilité sociale. De son côté, l’estimation des différences est
constat ou recherche de spécificité par originalité ou affirmation de divergence. La recherche de
la ressemblance et de la différence contribuent à développer l’unicité de la personne en
permettant au sujet d’élaborer tout un système de distances à autrui susceptible de cadrer les
rapports avec lui dans la vie quotidienne.
On s’interroge dans ce travail sur la distance sociale entre trois groupes:deux groupes
nationaux culturellement différentes (Algériens et Français), et un groupe de transition
(adolescents issus de l’immigration algérienne, en France).
Par l’estimation que font les sujets de cette distance à leurs pairs dans leur groupe
d’appartenance et autres groupes de référence, on peut inférer différentes formes de
positionnement social. Un tel système de repères, progressivement social, aide le sujet à se
construire en tant que personne et agent social.
Méthode : Les expériences sont menées auprès de 3 groupes d’adolescents âgés de 16-18 ans
et de 20-24 ans de milieu populaire: Algériens, Français et enfants issus de l’immigration
algérienne.
Le questionnement comprend 4 parties : a) des questions générales sur l’histoire du sujet et de
sa famille présentées oralement; b) des questions sur les sentiments de ressemblance et de
différence focalisés sur deux dimensions de l’identité: valorisation de soi et autonomie
(Massonnat et Perron, 1990); c) une question demandant au sujet de choisir dans une liste
d’expressions faisant référence à différents domaines de vie (école, famille, travail, etc.) pour
exprimer le contenu des ressemblances et des différences qu’il établit entre lui-même et son
groupe et entre son groupe et les autres groupes. Les estimations des questions de b sont
recueillies sur un échelle en 9 points comportant deux extrêmes: “Très peu semblable ou
différent”. Cette partie sera traitée par analyse de variance.
Résultats : L’ensemble des résultats indique que les trois groupes: Algériens, Français et
enfants de migrants ont un sentiment d’appartenance très marqué à leur propre groupe (forte
ressemblance et faible différence attribuée à l’intergroupe) pour les deux dimensions: autonomie
et valorisation de soi. Par ailleurs, le groupe des enfants de migrants algériens exprime un
mode de construction identitaire spécifique fait de rapprochement avec le groupe français, avec
lequel il vit en permanence. Cela peut être interprété comme un signe d’insertion ou un
mouvement d’intégration dans la société d’accueil.
Ce même groupe d’adolescents manifeste par ailleurs une forte distanciation vis-à-vis du
groupe algérien qui peut s’expliquer comme une recherche de spécificité, voire une forte prise
de distance à la culture d’origine (intergroupe accentue). Par ailleurs, les Français et les
enfants de migrants se distancient (différence) de plus en plus du groupe algérien, distant
géographiquement et qui, dans le contexte actuel, ne sert plus de référence. L’appartenance
culturelle des groupes influence fortement l’estimation des ressemblances et des différences
dans la comparaison intergroupe, concernant les deux dimensions: la recherche d’autonomie et
la valorisation de soi.