Polymédication (in)évitable ? Prof Olivier Bugnon Pharmacie de la PMU Ecole de Pharmacie Genève-Lausanne Jeudi de la PMU interdisciplinaire « Ensemble, évitons l’évitable » 18.06.2015 Etude sur 1’751’841 patients de 314 cabinets médicaux , Ecosse 3 Quelques définitions… Polymédication = Polypharmacie Pas de seuil absolu pour parler de polymédication Polymédication : Hyperpolymédication: 5 à 9 médicaments quotidiens ≥10 médicaments quotidiens 4 Prévalence de la polymédication chez la personne âgée? Selon la littérature scientifique internationale: Usage courant de minimum 5 médicaments avec une prévalence plus élevée pour les patients « fragiles » et hospitalisés Aux USA, 60% des personnes âgées de plus de 70 ans reçoivent régulièrement au moins 5 médicaments et 20% d’entre eux prennent au moins 10 médicaments. 1. M. Runganga et al. Clinical Interventions in Aging (2014): 9, 1453-1462 2. I.A. Scott et al. The American Journal of Medicine (2012) 125, 529-537. 3. American Geriatrics Society Expert Panel on the Care of Older Adults with Multimorbidity . J Am Geriatr Soc (2012); 60: 1957-1968 4. A. Nobili et al. J of Comorbidity (2011); 1: 28-44 Prévalence de la polymédication chez la personne âgée? Selon deux études menées par la Pharmacie de la PMU: 1. En moyenne 10 ± 3 médicaments (min 2; max 19) prescrits à la sortie d’un séjour (2009) pour 230 patients âgés de 82 ± 7 ans au CUTR Sylvana (CHUV, Lausanne) 2. En moyenne 8 médicaments (min 1; max 17) prescrits à 21 patients âgés de 82 ans (min 65, max 92) suivis par les soins à domicile de Lausanne et environs MAIS… en moyenne 16 médicaments (min 2; max 62) retrouvés au domicile de ces patients lors d’un entretien de polymédication réalisé à domicile par un pharmacien. Environ 1/3 de ces médicaments en vente sans ordonnance. 6 RISQUE de la polymédication chez la personne âgée? Selon la littérature scientifique internationale (1/3): Parmi les personnes âgées prenant au moins 5 médicaments et vivant à domicile: • Environ 33% vont expérimenter 1 effet indésirable (EI) par année • 25% de ces EI pourraient être évités par un usage approprié des médicaments • 17% des hospitalisations liées à un effet indésirable sévère • 30-55% de ces EI sévères causant une hospitalisation pourraient être évités 1. M. Runganga et al. Clinical Interventions in Aging (2014): 9, 1453-1462 2. I.A. Scott et al. The American Journal of Medicine (2012) 125, 529-537. 3. American Geriatrics Society Expert Panel on the Care of Older Adults with Multimorbidity . J Am Geriatr Soc (2012); 60: 1957-1968 4. A. Nobili et al. J of Comorbidity (2011); 1: 28-44 RISQUE de la polymédication chez la personne âgée? Selon la littérature scientifique internationale (2/3): Présence d’au moins un médicament à risque pour la personne âgée observée chez… • 20% des personnes vivant à domicile • 33% des personnes hospitalisées • 50% des patients vivants en EMS 1. M. Runganga et al. Clinical Interventions in Aging (2014): 9, 1453-1462 2. I.A. Scott et al. The American Journal of Medicine (2012) 125, 529-537. 3. American Geriatrics Society Expert Panel on the Care of Older Adults with Multimorbidity . J Am Geriatr Soc (2012); 60: 1957-1968 4. A. Nobili et al. J of Comorbidity (2011); 1: 28-44 RISQUE de la polymédication chez la personne âgée? Selon la littérature scientifique internationale (3/3): Parmi les personnes hospitalisées dans un service d’urgence, le risque de trouver un effet indésirable comme raison de l’hospitalisation est de : • 13% chez les patients traités par 2 médicaments • 38% chez les patients traités par 4 médicaments • 82% chez les patients traités par au moins 7 médicaments 1. M. Runganga et al. Clinical Interventions in Aging (2014): 9, 1453-1462 2. I.A. Scott et al. The American Journal of Medicine (2012) 125, 529-537. 3. American Geriatrics Society Expert Panel on the Care of Older Adults with Multimorbidity . J Am Geriatr Soc (2012); 60: 1957-1968 4. A. Nobili et al. J of Comorbidity (2011); 1: 28-44 PROMOTION DE LA SANTE PREVENTION/REDUCTION DES RISQUES OBJECTIFS DES SOINS Transition des priorités thérapeutiques au cours de la vie Parfaite santé Légers Troubles de santé Modérés Sévères Décès Traduit et adapté de « Recommandations on palliative care and treatment of older people with Alzheimer’s disease and other progressive dementias. EAPC Dementia White Paper 2013 Polymédication (in)évitable ? 10 pistes de réflexion interdisciplinaire (1/2) 1. Prioriser les problèmes de santé (maladies, symptômes, médicaments) exprimés par les patients (ou leurs proches) 2. Faire une revue complète de la médication (y compris automédication) 3. Identifier les patients et les médicaments à haut risque d’effets indésirables 4. Estimer le confort du patient avec le traitement actuel (Escalade thérapeutique? Iatrogénie? Adhésion thérapeutique?) 5. Considérer les préférences et les objectifs individuels des patients 6. Privilégier les médicaments aux évidences scientifiques solides, éviter les changements inutiles et… « start slow, go slow » 11 Polymédication (in)évitable ? 10 pistes de réflexion interdisciplinaire (2/2) 7. Adapter les objectifs du plan de traitement (p.ex. prévention IIaire) à l’estimation de l’espérance de vie 8. Evaluer la balance bénéfices/risques et coûts/avantages de chaque élément du plan thérapeutique (y compris les mesures non médicamenteuses) 9. Informer et accompagner le patient, respectivement les proches et l’équipe de soins, lors de l’instauration, la modification ou l’arrêt d’un traitement 10. Réévaluer régulièrement l’intérêt du traitement (bénéfices, adhésion thérap., concordance avec les préférences du patient), notamment lors des transitions de soins (p.ex. sortie d’hôpital) 12 Ensemble, évitons l’évitable : « Dé-prescription » ? Oser envisager d’arrêter un traitement (« dé-prescrire ») en répondant aux questions suivantes: • L’objectif thérapeutique est-il en phase avec l’objectif de vie du patient et de ses proches ? • Le médicament est-il là pour soulager l’effet indésirable évitable d’un autre médicament qui lui pourrait être substitué ou arrêté ? • Existe-t-il une alternative non médicamenteuse réaliste? • Existe-t-il une alternative plus sûre et plus efficace ? • Un traitement continu sur le long terme est-il vraiment nécessaire ? • La dose d’entretien peut-elle être diminuée ? • L’arrêt du médicament ou la diminution de sa dose présente-t-il un risque particulier pour le patient? 13 En cas de dé-prescription… Attention à l’arrêt brutal de ces médicaments Alpha-bloquants: Hypertension rebond, agitation Bêta-bloquants: Risque de rebond : tachycardie, palpitations; réapparition de symptômes d’angine de poitrine Dérivés nitrés: Réapparition de symptômes d’angine de poitrine Furosémide: Réapparition des symptômes d’insuffisance cardiaque Benzodiazépines: Effets de sevrage (p.ex. délirium, insomnie, crise convulsive) Anticholinergiques: anxiété, nausée, vomissements, maux de tête, vertiges Antipsychotiques: Dyskinésie, nausées, vomissements, agitation Antidépresseurs: Baisse de l’humeur, agitation, maux de tête Digoxine: Réapparition d’une fibrillation auriculaire rapide 14 Polymédication (in)évitable ? Les messages clés avant les ateliers • Ne pas culpabiliser les soignants face à la polymorbidité • Maîtriser les risques de la polymédication (prévenir, détecter, minimiser) • Individualiser le traitement (préférences du patient, espérance de vie) • Evitons l’évitable escalade thérapeutique, la iatrogénie, les sous-traitements, la non-adhésion thérapeutique • Oser envisager la possibilité d’une dé-prescription Pour en savoir plus… (1/2) 16 Pour en savoir plus… (2/2) 17 MERCI de votre attention… Adresses de contact : Prof Olivier Bugnon Section des sciences pharmaceutiques, Pharmacie communautaire, Université de Genève, Université de Lausanne Pharmacie de la Policlinique Médicale Universitaire (PMU), Rue du Bugnon 44, 1011 Lausanne (Switzerland) E-mail: [email protected] / Secrétariat : [email protected]