Libérale Pathologie iatrogène chez le sujet âgé Plus fréquente et plus grave Le constat de la surconsommation de médicaments chez les personnes âgées est alarmant. Face aux polypathologies, il est important de savoir remettre en question un traitement s’il est devenu inutile et de ne traiter que les pathologies qui handicapent les pronostics fonctionnels. U ne surveillance rapprochée à domicile ou par les infirmières et l’entourage est plus que nécessaire. Les problèmes de surconsommation de médicaments surviennent le plus souvent lors de l’initiation du traitement ou longtemps après, lorsque d’autres traitements sont institués. Polymédication fréquente La polymédication chez le sujet âgé en rapport avec la polymorbidité augmente avec l’âge. Elle est lourde de conséquences : les pathologies iatrogéniques représentent entre 5 % à 10 % des motifs d’hospitalisation après 65 ans et plus de 20 % après 80 ans. Il est acquis que l’incidence des effets indésirables augmente exponentiellement avec le nombre de médicaments administrés. Outre la prescription plurimédicamenteuse (en tête : les médicaments cardiovasculaires, les psychotropes et les anti-inflammatoires), de nombreux facteurs favorisent les accidents médicamenteux, dont certains sont inévitables puisque liés au vieillissement physiologique : les modifications pharmacocinétiques et pharmacologiques telles que l’altération du métabolisme et de l’élimination des médicaments et les modifications de systèmes d’homéostasie à des degrés divers (une hypoglycémie aura plus de retentissement clinique à 80 ans qu’à 30 ans). Par ailleurs, interviennent le terrain des pathologies chroniques, le sexe féminin (la consommation médicamenteuse est moindre chez l’homme), la dénutrition, l’insuffisance rénale et/ou hépatique), la personnalité anxieuse ou le bas niveau de compréhension du patient. En premier lieu, la prudence s’impose quant à la prescription des psychotropes afin d’éviter la survenue de la confusion et la détérioration des fonctions cognitives. C’est dire l’importance de préférer les antidépresseurs qui n’ont pas des effets anticholinergiques (l’acétylcho- line est un médiateur important pour la mémoire) ou d’instaurer le traitement neuroleptique de façon progressive (en commençant par de faibles doses pour atteindre la dose minimale efficace) pendant la durée la plus courte possible. Rappelons que la plupart des neuroleptiques ont des effets anticholinergiques pouvant aggraver les fonctions cognitives et qu’ils agissent aussi sur la régulation de l’humeur et l’attention en bloquant les récepteurs dopaminergiques du système mésolimbique. A noter que, d’après les statistiques, 20 % des patients âgés recevant un psychotrope n’en ont pas d’indication précise et près d’un tiers ont des psychotropes à la demande. Concernant les médicaments susceptibles de favoriser le syndrome confusionnel, citons également les corticoïdes au long cours, les anti-H2, les digitaliques ou les opiacés. Des accidents fréquents comme les chutes sont le plus souvent en rapport avec l’altération de la vigilance (psychotropes), mais peuvent aussi résulter des effets des médicaments hypotenseurs ou de ceux responsables d’un syndrome vestibulaire (aminosides), d’un syndrome extrapyramidal (neuroleptiques), d’une myopathie (corticoïdes, hypolipémiants) ou d’une neuropathie des membres inférieurs (amiodarone, antipaludéens de synthèse). Quant aux malaises et aux syncopes, ils sont le plus souvent dus à une hypotension orthostatique, secondaire à une hypovolémie (diurétiques, laxatifs au long cours), à un blocage de la réponse adrénergique à l’orthostatisme (bêtabloquants), à une vasodilatation artérielle et veineuse (dérivés nitrés). Autres situations cliniques : la pathologie digestive consécutive aux AINS, l’hépatite cytolytique ou cholestatique, l’insuffisance rénale aiguë par hypovolémie, les anomalies de la numération formule sanguine. Ludmila Couturier Entretiens de Bichat, Paris 2002. Professions Santé Infirmier Infirmière - No 41 - novembre 2002 35