Les Juifs religieux et le sionisme
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Les Juifs religieux et le
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Date de mise en ligne : dimanche 20 mars 2011
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Les Juifs religieux et le sionisme
Quels sont les liens entre la fondation de l'Etat d'Israël et la religion juive ?
Celle-ci a-t-elle porté au cours de l'histoire une aspiration à la création d'un Etat juif autour
de Jérusalem ?
Quel rôle joue aujourd'hui la religion juive dans les lois et le fonctionnement de l'Etat
d'Israël ou dans la colonisation des territoires occupés ?
À ces questions, il n'y a pas de réponses simples.
1) La religion juive aux origines. Une religion nationale confrontée à la question de l'exil.
La Bible hébraïque est un assemblage d'histoires, de légendes, de textes de lois, de poèmes, de prophéties, de
réflexions philosophiques composés principalement en hébreu et un peu en araméen. On y trouve la Torah (ou
Pentateuque car composée de cinq livres : la Genèse, l'Exode, le Lévitique, les Nombres et le Deutéronome).
Suivent les Prophètes qui racontent l'histoire du peuple d'Israël de la conquête de Canaan à l'exil (à Babylone). Enfin
les Ecrits regroupent des homélies, des psaumes, des poèmes, des prières, des proverbes probablement écrits
tardivement pendant les périodes perses et hellénistiques (du VIe au IVe siècle avant JC).
Les archéologues ont commencé à s'intéresser à la Palestine dès le milieu du XIXe siècle. Ils pensaient trouver les
preuves archéologiques du caractère historique du récit biblique. Presque à la même époque, l'Allemand Schliemann
trouvait le site de Troie et imaginait trouver les traces de la guerre racontée par Homère. Pourquoi risquer cette
comparaison entre la Bible et « l'Iliade et l'Odyssée » ? Dans les deux cas, il s'agit de textes fantastiques qui fondent
des peuples et des identités. Ces textes ont été écrits à partir de traditions orales. Mais l'archéologie révèle des
réalités beaucoup plus compliquées. À Troie, on a trouvé de nombreuses couches superposées correspondant à
plusieurs époques très distinctes. Mais aucune d'entre elles ne semble correspondre à la « Guerre de Troie » qui fait
partie de notre culture. Plus personne ne croît dans l'ancienne religion grecque et il a été facile d'admettre que le
récit d'Homère a été fabriqué à partir de diverses traditions orales et de légendes anciennes. En dehors de l'intérêt
stratégique du contrôle des détroits, rien ne prouve qu'une coalition de toutes les cités grecques se soit constituée
pour ce contrôle. Avant le texte d'Homère, il y avait plein de cités grecques rivales. Après, il y a une conscience d'un
destin commun.
En Palestine, les premiers archéologues ont multiplié les erreurs grossières. Il faut dire que de nombreuses traditions
protestantes font une lecture littérale de la Bible. Les conquêtes coloniales européennes en Amérique du Nord ou en
Afrique du Sud se sont largement inspirées du texte sur la conquête sanglante de Canaan par Josué. Donc ces
premiers archéologues croyaient en l'historicité du texte biblique.
Dans le désert du Néguev, à 30 Km d'Eilat, ils ont appelé « mines du roi Salomon » des mines de cuivre qui sont
manifestement égyptiennes et plus anciennes (datant de Ramsès II). À Hatzor ou Meggido, ils ont trouvé des ruines
de forteresses, mais là encore, les méthodes modernes de datation montrent qu'elles sont soit antérieures, soit
postérieures à l'époque de David et Salomon. À Jérusalem, le site est occupé depuis plusieurs millénaires, mais on
ne trouve pas grand-chose correspondant au Xe siècle av JC et à la magnificence du royaume présumé de
Salomon.
Petit à petit, le doute s'est installé chez les archéologues. Il y a aujourd'hui un large consensus sur le fait que les
principaux épisodes de la Bible sont légendaires. Ce consensus inclut des archéologues religieux comme
Jean-Baptiste Humbert qui est dominicain et dirige l'école biblique et archéologique française de Jérusalem.
Deux des archéologues les plus réputés d'Israël (Israël Finkelstein qui dirige l'Institut d'archéologie de l'université de
Tel-Aviv et a travaillé dans les fouilles de Meggido et Neil Asher Silberman) ont rassemblé ces doutes devenus des
certitudes dans le livre « La Bible Dévoilée » (Éditions Bayard, 2002). Il y a des discussions sur certaines hypothèses
faites par les auteurs mais pas sur les faits principaux. Dans son livre « Comment le peuple juif fût inventé ? »
(Éditions Fayard, 2008), l'historien israélien Shlomo Sand reprend à son compte ces faits. En gros, les épisodes de
l'arrivée des Hébreux depuis la Mésopotamie (via Harran) sous la conduite d'Abraham, de l'entrée puis de la sortie
d'Egypte sous la conduite de Moïse et enfin de la conquête sanglante de Canaan par Josué sont très largement
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légendaires. Le récit biblique contient de nombreuses contradictions et ces faits sont infirmés par les fouilles
archéologiques ou les documents des autres civilisations.
Il y a même des doutes sérieux sur l'existence du « royaume unifié » de David et Salomon. L'archéologie infirme
cette existence car à l'époque présumée du roi Salomon, Jérusalem n'était apparemment qu'une bourgade.
Ces découvertes archéologiques ont bien sûr des conséquences sur le présent. De nombreux événements récents
sont liés au récit biblique : le massacre de 29 Palestiniens en train de prier du caveau des patriarches. Ce massacre,
perpétré par le colon Baruch Goldstein le 25 février 1994, correspond au « tombeau d'Abraham » vénéré à la foi par
les religions musulmane et juive. Aujourd'hui, 250000 colons de Cisjordanie (sans compter Jérusalem) vivent dans
des colonies dont la plupart ont des noms bibliques (Shilo, Efrat, Eli ...). Pour eux, les Palestiniens sont des intrus et
ils se considèrent comme les successeurs de Josué ayant fait leur retour en Judée-Samarie. Les chrétiens sionistes,
très puissants aux Etats-Unis financent très fortement la colonisation parce qu'ils ont associé les Arabes au mal, à
Armageddon et à la catastrophe de la défaite du roi Josias face aux troupes égyptiennes. À Silwan (Jérusalem Est),
des maisons palestiniennes sont détruites pour faire place à un musée du roi David.
Si le récit biblique est légendaire et si les fêtes religieuses juives (Pessah, Soukkot ...) se rapportent à des
événements non historiques, d'où viennent les Hébreux ? Comment et quand a été écrite la Bible ?
Les avis sont partagés sur l'origine des Hébreux. La première mention d'Israël, cité comme peuple cananéen soumis,
se trouve sur la stèle du pharaon égyptien Mérenptah (1207 av JC). Aucune allusion n'existe quant à leur
monothéisme alors que l'Egypte a déjà connu avec Akhénaton une courte expérience monothéiste. En fait le
territoire correspondant à ce qui est aujourd'hui Palestine/Israël est une région clé convoitée par les grands empires
Hittites, Egyptiens, Assyriens, Babyloniens, Perses et il est peu probable qu'un grand royaume indépendant ait pu
exister face à ces convoitises.
Les archéologues divergent sur l'origine des Hébreux. Pour certains, ce seraient des Cananéens. Pour d'autres, des
pasteurs vivant en bordure du désert et commerçant avec les Cananéens. La destruction des villes cananéennes par
les Peuples de la Mer les aurait poussés à devenir aussi agriculteurs et à migrer vers les collines. Là où le récit
biblique est vraisemblable, c'est quand il fait sentir qu'à tout moment, plusieurs peuples et plusieurs religions ont
cohabité sur cette terre. Au côté des Hébreux et des Cananéens, il y a des Philistins, des Moabites, des Iduméens,
des adorateurs de Baal ou d'autres divinités. Dans le récit biblique, Josué a beau massacrer tous ses ennemis, il y
en reste toujours.
Il est peu probable que les deux royaumes (Israël et Juda) aient jamais été unifiés. Il n'est pas resté grand chose du
souvenir du royaume d'Israël, détruit en 722 av JC par les Assyriens avec la déportation d'une partie de la population
en Mésopotamie.
D'où l'hypothèse que le Livre, la Bible, soit postérieur à cette période. Pour Finkelstein et Silberman, la Bible a été
essentiellement écrite dans le royaume de Juda, sous le règne du roi Josias au VIIe siècle av JC. À cette époque, le
royaume est tout petit et fort peu peuplé. Il est entouré par de très puissants voisins. Josias sera tué face aux
Egyptiens et peu après, les Babyloniens prendront Jérusalem, détruiront le Temple et déporteront la population. Pour
d'autres, la Bible serait encore postérieure et daterait de l'exil à Babylone (VIe siècle av JC). La Bible donne aux Juifs
une histoire et une raison d'être qui sont fantastiques : ce peuple serait venu de Mésopotamie et aurait été en
esclavage en Egypte, les deux grands empires menaçants. Il faut sans doute voir ce livre comme un récit fondant un
peuple en lui donnant une histoire et une identité nationale dignes. Quant au monothéisme juif, il n'est pas si
exceptionnel. Il est en tout cas postérieur à l'expérience monothéiste égyptienne.
C'est la Bible qui va permettre la survie de la religion hors du contexte territorial où elle est née. C'est en tout cas le
Livre qui permet aux Juifs de continuer d'exister pendant l'exil de Babylone, de ne pas disparaître comme le royaume
d'Israël peu de temps avant et même, pour une partie d'entre eux, d'être autorisés à revenir à Jérusalem par
l'empereur perse Cyrus à la fin du VIe siècle av JC. Si les Juifs vont devenir plus tard le peuple du Livre, c'est en
quelque sorte parce que le Livre a fondé le peuple et sa religion.
2) La religion, ciment des communautés juives dispersées
La dispersion desJuifs est très antérieure à la destruction du deuxième temple par les troupes de Titus en 70 ap JC.
Une partie des Juifs est restée à Babylone et s'est répandue en Orient. Plus à l'ouest, il y a eu d'importantes
communautés juives assez tôt à Alexandrie et même à Rome.
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Au IIe siècle av JC sur le territoire actuel d'Israël/Palestine, un conflit divise les Juifs entre ceux qui acceptent
l'Hellénisation et ceux qui la refusent. La dynastie des Maccabées qui s'installe à l'issue d'une révolte contre les
Séleucides symbolise l'indépendance juive et s'appuie sur un fort sentiment à la fois religieux et national.
Cette question religieuse va devenir centrale lors de la conquête romaine. Traditionnellement, les peuples soumis
finissent par accepter les institutions romaines et superposent les dieux romains à leurs propres dieux (c'est clair en
Grèce ou en Gaule). En Palestine, une partie des Juifs va accepter cette « romanisation », mais une autre va
totalement la refuser, pour des raisons à la fois religieuses et nationales. L'historien juif Flavius Josèphe sera d'abord
révolté contre les Romains. Puis, il se ralliera à l'empire dont il deviendra citoyen. Dans son introduction au livre de
Flavius Josèphe (« la guerre des Juifs »), l'historien Pierre Vidal-Naquet décrit une véritable guerre civile entre Juifs
à l'intérieur de la ville de Jérusalem assiégée par les troupes de Titus. Avant de se révolter contre Rome, les zélotes
commettront de nombreux massacres contre les Juifs romanisés. Et à Massada, ils préfèreront le suicide à la
reddition. Ce courant à la fois religieux et nationaliste préfigure un peu ce qui est à l'oeuvre aujourd'hui. Il y avait
déjà, il y a 2000 ans, un antagonisme entre Juifs acceptant le monde extérieur et Juifs estimant que le mélange est
impossible et que les Juifs ne peuvent vivre qu'entre eux. En même temps, cette époque est celle d'une très grave
crise de la religion juive avec l'apparition de nombreux courants ou sectes. Et bien sûr du christianisme qui a été au
début une branche du judaïsme.
De nombreux historiens ont longtemps affirmé qu'après la prise de Jérusalem par Titus (70 av JC), des centaines de
milliers de Juifs auraient quitté la Palestine et se seraient répandus autour de la Méditerranée. C'est en contradiction
avec l'histoire de la dernière révolte juive (Bar Kokhba, 132-135 ap JC) contre laquelle Rome a été obligée de
dépêcher 12 légions (1/3 de l'armée !). On sait aujourd'hui qu'il était impossible que la terre puisse nourrir à cette
époque une population supérieure à 700 000 ou 800 000 habitants dans cette région. Shlomo Sand a recherché des
livres ou des documents sur cet exil, il n'en a pas trouvé. Et il conclut dans son livre qu'il n'y a eu « ni exil, ni retour ».
Pourtant, il y a consensus sur l'idée que les Juifs représentaient entre 5 et 10% de la population de l'empire romain
au moment de son apogée et on trouve des synagogues de cette période un peu partout. D'où viennent ces Juifs ?
Quand la crise de la religion romaine traditionnelle est devenue aiguë, de nombreuses religions se sont trouvées en
concurrence : christianisme, culte de Mithra et ... judaïsme. Cette religion était alors prosélyte et il y a eu des
convertis dans toutes les régions de l'empire. Cette phase prosélyte du judaïsme va s'arrêter dans l'empire quand
l'empereur Constantin fait du christianisme la religion officielle au début du IVe siècle ap JC. De nombreux Juifs vont
rallier la nouvelle religion dominante alors que les conversions au judaïsme vont se poursuivre plus tard au Yémen
avec le royaume juif Himyarite, en Afrique du Nord où de nombreuses tribus Berbères se convertissent, au Kurdistan
ou dans l'empire Khazar, empire à la fois turc et slave entre Caspienne et Mer Noire (IX et Xe siècle ap JC).
Il n'y a pas de race juive. Les Juifs d'aujourd'hui sont principalement des descendants de convertis alors que les
descendants des Hébreux sont essentiellement la population qui est toujours restée en Palestine. La diaspora juive
correspond à la dispersion de la religion mais pas à la dispersion d'un peuple. Elle a donné lieu à la naissance de
plusieurs peuples (séfarade, judéo-arabe, ashkénaze, falasha ...) ayant une communauté de destin liée à la religion.
La diaspora n'est pas une parenthèse de l'histoire juive. Elle est son centre. C'est dans la diaspora que sont apparus
les langues juives, les traditions, les rites et même les hérésies (Caraïtes, Sabbatéens).
Au Moyen Age, la majorité des Juifs vivent en petites communautés dans des pays musulmans ou chrétiens. Les
musulmans leur appliquent le statut de dhimmi, réservé à toutes les religions du livre, qui codifie les droits et les
devoirs de ces religions. Ce statut a permis aux Juifs, jusqu'à l'apparition du colonialisme occidental, de pouvoir
partiellement s'auto administrer autour de leur religion et leurs traditions. Contrairement à ce qui s'est passé dans le
monde chrétien, il n'y a pas eu de massacre spécifique contre eux en terre d'islam.
Dans le monde chrétien, l'antijudaïsme est apparu très tôt et a provoqué dans de nombreux pays des expulsions ou
des confiscations de biens. Les chrétiens ont inventé toute une série de stéréotypes contre les Juifs, le plus grave
étant celui de déicide. Ils leur ont interdit, sauf rares exceptions, la possession de la terre. Ils les ont enfermés dans
des quartiers spécifiques (juderias, ghettos ...). S'il y a eu quelques moments fastes dans l'histoire du judaïsme
européen (sous Charlemagne, dans les premiers temps de l'Espagne chrétienne ou du royaume de Pologne), cette
histoire est ponctuée de nombreux massacres (les croisades, l'inquisition...). Dans l'Europe chrétienne, les Juifs
jouent un rôle original (banquiers ou usuriers, artisans, intermédiaires entre les seigneurs et la population) qui fait
qu'on a besoin d'eux, mais qu'il est très pratique de se débarrasser d'eux et de les spolier. Parce qu'ils sont « le
peuple du Livre », les Juifs savent lire et ont parmi eux des médecins et des intellectuels.
Les différentes communautés juives dispersées ont des relations entre elles. C'est d'ailleurs par des Juifs andalous
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que l'on connaît l'histoire de la conversion de certains Khazars au judaïsme.
L'histoire des Juifs espagnols est exemplaire. Au XIVe siècle, les Juifs forment 5 à 10% de la population de
l'Espagne. Ils parlent une langue espagnole (le ladino). Certains des leurs occupent des postes importants. Et
pourtant, en 1391, un gigantesque pogrom qui commence à Ecija en Andalousie aboutit au massacre de 100000
Juifs et à un siècle d'agonie du judaïsme espagnol. Une moitié des Juifs se convertit et parmi les antisémites les plus
fanatiques, il y aura de nombreux convertis. En 1492, les derniers Juifs doivent quitter l'Espagne, principalement vers
le Maghreb et l'empire ottoman. Les persécutions vont se poursuivre contre les convertis (les marranes) avec la «
limpieza de sangre » (pureté du sang). De nombreux marranes seront tués ou quitteront l'Espagne. Certains
reviendront au judaïsme, mais cet épisode chrétien modifiera leur foi, avec notamment une volonté d'ouverture sur le
monde. Certains chrétiens garderont plus ou moins consciemment le souvenir de leurs origines juives. L'expulsion
des Juifs et des Maures d'Espagne préfigure les temps modernes : les nouveaux Etats centralisés ne tolèrent pas la
diversité, surtout religieuse.
3) Le messianisme. « L'an prochain à Jérusalem ». Sabbatéisme et Frankisme.
Le judaïsme est une religion messianique. Les Juifs attendent la venue du Messie. Leur religion se rapporte (comme
le Christianisme et l'Islam) à un autre monde très lointain et à une autre époque. Faut-il voir dans la phrase
traditionnelle : « l'an prochain à Jérusalem », prononcée régulièrement lors des fêtes de Pessah une aspiration
messianique à revenir à Jérusalem, voire à y reconstruire le Temple et un Etat juif ? En fait, non ! Il y a toujours eu
sur le territoire actuel d'Israël/Palestine, après la défaite face aux Romains, une petite minorité juive, plutôt moins
importante en proportion que le nombre de Juifs dans des pays voisins (Egypte, Mésopotamie, Perse ...). Quand en
1492, l'empire ottoman offre l'asile aux Juifs chassés d'Espagne, ils s'installent à Salonique, Smyrne, Sarajevo, mais
pas à Jérusalem. Il y aura bien une petite communauté de Juifs espagnols à Safed, mais c'est en Galilée, pas en
Judée. Il faut comprendre que cette phrase sur Jérusalem est essentiellement symbolique, un peu comme la prière
musulmane qui est tournée vers le Mecque. Même quand le voyage sera devenu possible, il n'y aura jamais de
pèlerinage vers le mur des lamentations à l'image du pèlerinage de La Mecque chez les musulmans.
À partir du XVIIe siècle, les différentes communautés juives connaissent des bouleversements. En 1648, les troupes
du Cosaque Khmelnitsky déclanchent des pogromes terribles en Ukraine. Cette même année, un Juif de Smyrne,
Sabbataï Tsevi, se proclame le Messie. Il aura un succès très important parmi les Juifs notamment à Salonique, mais
aussi chez les musulmans. Dans son livre « Vidal et les siens » (1989) sur l'histoire de son père, Edgar Morin
raconte l'épopée sabbatéenne. Arrêté en 1666, Sabbataï se convertit à l'islam et beaucoup de ses fidèles reviennent
à leur religion d'origine. Les Sabbatéens subsisteront jusqu'au XXe siècle (Mustafa Kemal était l'un deux), mais cet
épisode bouleversera le judaïsme. Un phénomène un peu semblable aura lieu en Pologne avec le Frankisme. Le
philosophe Gershom Scholem y a vu les origines du judaïsme laïque.
Au XVIIIe siècle, la majorité des Juifs européens vit en Pologne et en Ukraine. Cette région deviendra la zone de
résidence de l'empire russe avec les annexions faites par l'impératrice Catherine. C'est là que naît le hassidisme
avec le rabbin Israël Ben Eliezer, devenu Baal Shem Tov. Un de ses descendants sera Nahman de Bratslav qui
attirera au début du XIXe siècle des milliers de hassidims autour de la ville ukrainienne d'Ouman. C'est à cette
époque que des Juifs religieux commencent à voyager et même à s'établir en Palestine, notamment à Jérusalem en
provenance aussi bien de Pologne que du Maroc.
4) La religion et l'émancipation des Juifs. Religieux face aux socialistes et aux sionistes.
La Haskala est un mouvement de pensée juive fortement influencé par le mouvement des Lumières qui naît en
Europe à la fin du XVIIIe siècle. Un de ses représentants fut le Gaon de Vilnius (Wilno en polonais). La Haskala va
contribuer à laïciser les communautés juives et va les pousser à s'intégrer dans les sociétés où elles vivent dès que
ce sera possible. En Europe de l'Ouest, l'émancipation des Juifs commence en France et en Allemagne. En France
avec l'Abbé Grégoire au moment de la Révolution, les Juifs deviennent des citoyens. Avec Napoléon, ils seront des «
Français de confession mosaïque ». En Allemagne, ils sortent du ghetto et, s'ils se convertissent, accèdent à des
postes dirigeants. Rapidement, les Juifs vont constituer une partie très importante de l'élite intellectuelle allemande.
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