Chapitre 1
CONVOLUTION
1.1 Pr´eliminaires sur les groupes
Tous les groupes seront implicitement suppos´es ab´eliens.
1.1.1 Groupes topologiques.
Un groupe topologique est un groupe muni d’une topologie telle que les applica-
tions x→−xet (x, y)→ x+ysoient continues.
Pour chaque ´el´ement ad’un groupe topologique Gl’application τa:x→ a+x,
appel´ee translation par a, est un hom´eomorphisme de Gsur G.SiAest une partie
de Get aun point de G,onnotera´egalement a+Al’image τa(A)deApar τaet,
plus g´en´eralement, si Aet Bsont deux parties de G,A+Besignera l’ensemble
{a+b;aA, b B}.
Il r´esultedelacontinuit´edex→−xque tout voisinage Vde 0 contient un
voisinage Wde 0, ouvert et sym´etrique (c’est-`a-dire W=W).
Il r´esulte de la continuit´e des translations que les voisinages de asont exactement
les a+Vo`uVest un voisinage de 0.
Il r´esulte de la continuit´een(0,0) de (x, y)→ x+yque tout voisinage ouvert de
0, V, contient un voisinage ouvert de 0, W, tel que l’on ait W+WV.
Voici quelques exemples de groupes topologiques.
1. Tout groupe ab´elien muni de la topologie discr`ete.
2. Le groupe additif Rnmuni de la topologie usuelle.
3. Les groupes R,R
+et Cmunis de la topologie induite par celle de C.
4. Le groupe T=R/2πZisomorphe et hom´eomorphe au groupe multiplicatif des
nombres complexes de module 1, ainsi que ses puissances.
5. Le groupe additif Qmuni de la topologie induite par celle de R.
Les trois premiers exemples sont des groupes localement compacts, non compacts ;
Tnest compact.
1
2CHAPITRE 1. CONVOLUTION
1.1.2 Action des translations sur les fonctions
et les mesures.
Soit aun ´el´ement d’un groupe G.Sifest une fonction d´efinie sur G,latranslat´ee
de fpar aest la fonction τafefinie sur Gpar la formule τaf(x)=f(xa).
Dans le cas particulier o`u l’on prend pour fla fonction indicatrice (caract´eristique)
1Ad’une partie Ade Gonaτa1A=1a+A=1τa(A).
Si aest un ´el´ement d’un groupe topologique Get si μest une mesure sur la tribu
de Borel de G,latranslat´ee de μpar aest la mesure τaμefinie sur la tribu de Borel de
Gpar la formule (τaμ)(A)=μ(Aa) (ceci est l´egitime car chaque translation, ´etant
un hom´eomorphisme, transforme un ensemble bor´elienenunensemblebor´elien). En
d’autres termes τaμest l’image de μpar l’hom´eomorphisme τa.Onafd(τaμ)=
(τaf)dμdans chacun des cas suivants :
1. la mesure μet la fonction bor´elienne fsont positives,
2. fest inegrable par rapport `a la mesure positive μ.
Mesures de Borel, mesures de Radon
Si Xest un espace topologique localement compact, une mesure de Radon positive
est une forme lin´eaire Lsur K(X), l’espace des fonctions num´eriques continues, `a
support compact dans X,`a valeurs positives sur les fonctions positives.
Nous dirons qu’une mesure positive μsur la tribu de Borel B(X)deXest une
mesure de Borel si, pour toute partie compacte Kde X,μ(K) est fini. Clairement,
si μest une mesure positive de Borel, l’application ϕ→ ϕdμest une mesure de
Radon sur X.
Exercice 1.1. Soit Xun ensemble non d´enombrable muni de la topologie discr`ete.
erifier que la fonction μainsi d´efinie sur l’ensemble des parties de X,
μ(A)=0 siAest d´enombrable, μ(A)=+sinon,
est une mesure de Borel. Quelle est la mesure de Radon qui lui est associ´ee ?
Une mesure de Borel est dite eguli`ere si, pour toute partie bor´elienne Ade X,
on a
μ(A)=sup{μ(K); Kcompact contenu dans X}
=inf{μ(U); Uouvert contenant X}.
La r´egularit´edeμentraˆıne la densit´edeK(X) dans tous les espaces Lp(μ), lorsque
1p<.
Si l’espace topologique Xposs`ede une base d´enombrable d’ouverts, toute mesure
de Borel est r´eguli`ere. Il en est ainsi, en particulier, lorsque X=Rn.
Enon¸cons, sans d´emonstration, le th´eor`eme de Riesz qui relie les deux notions de
mesures :
Th´eor`eme 1.2. Si Lest une mesure positive de Radon, il existe une unique mesure
de Borel r´eguli`ere μtelle que, pour tout ϕK(X),onaitL(ϕ)=ϕdμ.
1.1. PR ´
ELIMINAIRES SUR LES GROUPES 3
Si Lest une mesure de Radon positive sur le groupe localement compact G,sa
translat´ee τaLpar l’´el´ement ade Gest la mesure de Radon d´efinie par la formule
(τaL)(ϕ)=L(τaϕ), o`uϕK(G).
1.1.3 Mesure de Haar.
A partir de maintenant nous ne consid´ererons plus que des groupes localement
compacts, ceci `acausedur´esultat suivant que nous admettons.
Th´eor`eme 1.3. Soit Gun groupe ab´elien localement compact. Il existe sur Gune
mesure de Radon positive, non nulle, invariante par translation. De plus deux telles
mesures sont proportionnel les.
Une mesure dont le th´eor`eme pr´ec´edent affirme l’existence est appel´ee mesure de
Haar de G.
Si fest une fonction d´efinie sur Gon note ˇ
fla fonction qui `axassocie f(x). Si
fest dans K(G), ˇ
fy est aussi.
Proposition 1.4. Soit Lune mesure de Haar du groupe localement compact G.Pour
toute fonction ϕdans K(G)on a Lϕ)=L(ϕ).
emonstration. La formule ˇ
L(ϕ)=Lϕ)d´efinit une mesure de Radon sur G.On
aˇ
L(τaϕ)=L(τaϕ)ˇ=L(τaϕ)) = Lϕ)= ˇ
L(ϕ). Ceci montre que la mesure ˇ
L
est invariante par translation. Puisque la mesure Lest non nulle il existe ϕ0dans
K+(G), l’ensemble des ´el´ements positifs de K(G), tel que l’on ait L(ϕ0)>0. La
mesure ˇ
L, invariante par translation, positive et non nulle (ˇ
Lϕ0)>0) est une mesure
de Haar. Il existe donc un nombre positif λtel que l’on ait ˇ
L=λL. D’autre part, on
aˇ
L(ϕ0ϕ0)=L(ϕ0ϕ0)ˇ=Lϕ0+ϕ0)L(ϕ0)>0, d’o`u l’on d´eduit l’´egalit´e
λ=1,cequiach`eve la d´emonstration.
Exemples 1.5. Voici quelques exemples de mesures de Haar :
1. la mesure de d´enombrement sur un groupe discret,
2. la mesure de Lebesgue sur Rn,
3. la mesure dx/x sur R
+(dxesigne la mesure de Lebesgue sur R).
La mesure de Haar de Tnsera d´etermin´ee au paragraphe 1.1.4
Proposition 1.6. Soit λunemesuredeHaarsurGet Ωun ouvert non vide. On a
λ(Ω) >0.
emonstration. Soit Kun compact de G. On peut recouvrir Kpar un nombre fini
de translat´es de Ω ; si λ(Ω) ´etait nul on aurait donc λ(K) = 0, ce qui ne peut se
produire pour tous les compacts puisque la mesure λn’est pas nulle.
1.1.4 Mesure de Haar de Tn.
Soit Tun nombre strictement positif. Les groupes R/T Zsont tous isomorphes et
hom´eomorphes. Les choix les plus courants de Tsont 1 et 2π.
4CHAPITRE 1. CONVOLUTION
Soit pla projection canonique de Rsur R/T Z.Cest,pard´efinition de la topologie
quotient, une fonction continue. La formule λ(A)=T
01Ap(x)dx
T,o`uAest un
bor´elien quelconque de R/T Z,d´efinit une mesure de Borel positive λsur R/T Z.
Montrons que la mesure λest invariante par translation :
λ(p(a)+A)=T
0
1p(a)+A(p(x)) dx
T=T
0
1A(p(x)p(a)) dx
T
=T
0
1Ap(xa)dx
T=Ta
a
1Ap(x)dx
T
=T
0
1Ap(x)dx
T=λ(A)
(l’avant derni`ere ´egalit´er´esultedeceque1Apest une fonction p´eriodique de p´eriode
T). La mesure λest donc une mesure de Haar de R/T Z. La mesure est ´egalement
l’image par pde la restriction de la mesure de Lebesgue `a n’importe quel intervalle
de longueur T.
On obtient une mesure de Haar sur (R/T Z)nen consid´erant la mesure produit de
mesures de Haar sur chacun des facteurs.
1.1.5 Espaces Lp(G).
Lorsque l’on a un groupe localement compact Gon le suppose muni d’une mesure
de Haar λ. Habituellement on choisit la mesure de Haar sur un groupe compact de
fa¸con que sa masse totale soit 1 et, sur un groupe discret, on choisit la mesure de
enombrement (ces deux habitudes sont en conflit dans le cas des groupes finis !). Les
espaces Lp(λ)sontleplussouventnot´es Lp(G). Lorsqu’il n’y aura pas de confusion
`a craindre on utilisera les notations suivantes :
f(x)dx=fdλ, fp=fLp(G).
Comme on le sait, les ´el´ements des espaces Lpsont des classes de fonctions
mesurables modulo l’´egalit´e presque partout. Occasionnellement, nous utiliserons les
espaces Lpdont les ´el´ements sont les fonctions mesurables dont la puissance pi`eme est
inegrable.
Proposition 1.7. Les translations sont des isom´etries de Lp(G),(1 p≤∞).Sip
est dans l’intervalle [1,[et fdans Lp(G)on a
lim
a0τaffLp(G)=0.
emonstration. Le fait qu’une translation soit une isom´etrie de Lp(G)sed´eduit
facilement des d´efinitions.
Soit εun nombre strictement positif. K(Getant dense dans Lp(G)(carpest
fini) on peut choisir ϕdans K(G) tel que l’on ait fϕpε/3. Soit V0un
voisinage compact de 0. La fonction ϕ,continue`a support compact, est uniform´ement
continue : il existe un voisinage Vde 0 tel que l’on ait supaVτaϕϕ1
3ελ(V0+
1.2. CONVOLUTION 5
supp ϕ)]1/p (ceci est possible car V0+ support ϕest compact, donc a une mesure
finie). Alors si aest dans VV0, qui est un voisinage de 0, on a
τaffp≤τa(fϕ)p+τaϕϕp+ϕfpε,
ce qui ach`eve la d´emonstration.
1.2 Convolution
Soit fet gdeux fonctions `a valeurs complexes d´efinies sur un groupe localement
compact G, muni de la mesure de Haar λ. Chaque fois que cela sera possible on
efinira fg(x)=Gf(xy)g(y)dλ(y), la convolution de fet gau point x.Voici
une fa¸con ´equivalente d’´ecrire la formule pr´ec´edente : fg(x)=Gτx(ˇ
f)gdλ.
Lemme 1.8. Soit fet gdeux fonctions bor´eliennes de Gdans C. La fonction (x, y)→
f(xy)g(y)est une fonction bor´elienne. Si fet gsont positives fgest une fonction
bor´elienne de Gdans R+et l’on a
fgdλ=fdλgdλ.
emonstration. La fonction (x, y)→ f(xy)g(y), compos´ee de la fonction continue
(x, y)→ (xy, y) et de la fonction bor´elienne (x, y)→ f(x)g(y), est bor´elienne. La
seconde partie de l’´enonc´er´esulte de l’application du th´eor`eme de Fubini-Tonelli `a
l’inegrale  f(xy)g(y)dλ(x)dλ(y).
Remarque. Si fet gsont bor´eliennes positives, fgest une fonction semi-continue
inf´erieurement : fet gsont limites partout de suites croissantes {fn}et {gn}de
fonctions born´ees nulles hors d’un compact ; or il r´esultera du th´eor`eme 1.12 que fngn
est une fonction continue, on conclut en remarquant que l’on a fg=supfngn.
Proposition 1.9. Soit fet gdeux fonctions bor´eliennes.
1. Si elles sont positives on a fg=gf.
2. Si |f|∗|g|(x)est fini, alors fg(x)et gf(x)existent, sont ´egaux et l’on a
|fg(x)|≤|f|∗|g|(x).
emonstration. Par changement de variable on obtient
fg(x)=f(xy)g(y)dλ(y)=f(z)g(xz)dλ(z)=gf(x),
ceci est l´egitime si fet gsont positives ou bien si la fonction y→ f(xy)g(y) est
inegrable, ce qui a lieu si |f|∗|g|(x) est fini.
Proposition 1.10. fg(x)ne d´epend que des classes de fet gpour l´egalit´e
λpresque partout.
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