SPECIAL AVIGNON
La grande épopée indienne en vedette à Avignon
A la recherche
dû Ram ayana
La geste de Rama est au coeur de la religiosité hindoue. Guy Dumur est allé
en Thailande, en Inde et en Indonésie pour compren,dre pourquoi un long poème du
BI siècle adapté en spectacles enflamme toujours les foules de ces pays
Lorsque les frères Lumière présentèrent
en Inde, dès 1896, leur premier film
« l'Arrivée d'un train en gare de La
Ciotat », personne ne s'est enfui. Il y eut,
en revanche, une véritable panique lors-
que les spectateurs indiens virent apparaître
Rama dans le film de Phalki, un de leurs premiers
cinéastes (« Lanka Dahan »), en 1918. Ils croyaient
que leur héros légendaire, qu'ils avaient pourtant
l'habitude de voir dans toutes sortes de transposi-
tions théâtrales, était réellement revenu sur terre.
Depuis, ces mêmes spectateurs, du moins leurs
descendants, ont revu Rama — qu'ils nomment
Ram— dans d'innombrables films et, récemment,
dans une série télévisée en quarante épisodes.
Quand ils passent à la télévision, la vie s'arrête...
Mais le Ramayana (la geste de Rama) n'est pas
à l'Inde ce qu'est pour nous « Dallas » ou « Dy-
nasty ». C'est plus qu'une légende, plus qu'une
épopée comme « l'Iliade » ou
e
la Chanson de
Roland». Le Ramayana faitpartie intégrante de la
religiosité hindoue. Rama est un avatar de Vish-
nou, un des trois grands dieux de l'hindouisme et
même, pour certains, la réincarnation de Brahrna,
l'Etre suprême. Il est l'image de la perfection. Il
est sanctifié dans l'Inde du Nord, où
des
temples
lui sont consacrés.
Célébré dans tout le Sud-Est asiatique, du
Cambodge à l'Indonésie, on trouve son histoire
peinte ou sculptée sur les murs des temples,
comme on peut le voir à Bangkok ou à Pranbanam,
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NOUVEL OBSERVATEUR /ARTSSPECTACLES
à côté de Jogjakarta, à Java. Gandhi est mort en
prononçant le nom sacré de « Ram », qui ouvre les
portes du ciel. Le texte original du Ramayana,
long de vingt-quatre mille distiques — la moitié de
l'autre grande légende de l'hindouisme, le Ma-
habharata —, aurait été écrit en sanskrit au Hf
siècle avant J.-C. par un moine-poète, Valmiki.
Mais il est certain que la légende remonte à la nuit
des temps. Depuis Valmiki, de nombreux poètes
indiens ont récrit leur version du Ramayana, sans
compter celles qui ont cours dans les autres pays
d'Asie.
Le Ramayana n'est pas seulement l'histoire
d'un prince parfait. C'est la parabole du dieu qui
se fait homme pour vaincre le mal. C'est la lutte du
jour contre la nuit, de la civilisation contre le
primitivisme et, accessoirement, l'histoire cryp-
tique de la conquête du Sud par l'Inde du Nord.
Réduit à sa plus simple anecdote, c'est l'histoire
de Rama, fils du roi du Kosala, Dasharata, de la
dynastie solaire, qui, après avoir imploré les
dieux, a eu quatre fils, dont des jumeaux, de ses
trois épouses. Vishnou s'est incarné en chacun
d'eux. Mais, des quatre, c'est Rama qui est l'élu.
Il est le seul à pouvoir soulever et bander l'arc de
Shiva, capable de transpercer plusieurs arbres
d'une seule flèche. A 16 ans, il extermine des
milliers de démons, les
Râksasa («
rôdeurs de
nuit »).
Rama a épousé la belle Sita, fille de la Terre —
son nom veut dire « sillon » tandis que son père
le désigne comme héritier du trône d'Ayodhya, la
ville sainte. Une
des
épouses du roi, Kaïeki, exige
que ce soit son fils, Bharata, qui règne. Le vieux
roi, fidèle à une ancienne parole donnée, s'y
résigne Rama est condamné à passer quatorze ans
en exil dans la forêt. Un de ses demi-frères,
Lakshmana, et son épouse Sita l'accompagnent.
Le roi des Raksasa, le géant Ravana aux dix têtes,
qui règne au-delà de la mer, à Lanka (Ceylan),
tout en voulant se venger de Rama, tombe amou-
reux de Sita et l'enlève. Désespéré, Rama n'aura
de cesse de la retrouver. Pour mener cette quête
et engager une guerre sans merci, il reçoit l'aide de
l'armée des singes, de leur roi Sougriva et,
surtout, du singe blanc Hanuman (au Hanumat),
fils du vent, héros entre les héros et le plus loyal
des... singes C'est lui, Hanuman, malin et coura-
geux, qui découvre la forêt où Ravana tient Sita
prisonnière, après avoir volé au-dessus des mers.
Fait prisonnier lui-même, il met le feu à la ville de
Lanka avec sa queue, que ses ennemis ont en-
flammée. Les singes construisent un pont im-
mense pour envahir Lanka, où Rama tuera
Ravana de sa flèche. Il revient avec Sita dans son
royaume, où son frère, le très saint Bharata, lui a
conservé son trône.
La fin est plus triste. Soupçonnée de n'avoir pas
pu résister à Ravana, quand elle était captive, Sita
subit victorieusement l'épreuve du feu. Mais elle
sera répudiée par Rama, sous la pression du
peuple. Les deux fils dont elle accouche en exil
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