Faire en sorte que le public se diversifie et que la relation

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Documentaliste - Sciences de l’information
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2008, vol. 45, n°1
simple caractéristique (leur âge, leur CSP, leurs pratiques cul-
turelles ou autres, etc.); ce qui aboutit, qu’on le veuille ou non,
d’une part à « trier » les êtres en niant leur complexité, leur
multi-appartenance, et d’autre part à limiter leurs rencontres.
Cela ne signifie pas, bien entendu, que nous ne concevions
jamais de projets destinés spécifiquement à un type de public;
mais nous le faisons toujours dans le cadre d’un ensemble
conçu dans la plus grande diversité possible, en évitant au maxi-
mum la segmentation des populations en « mar chés »
. Il s’agit
au contraire de jouer les mélanges, les synergies.
Élitaire pour tous.
Nous avons tous été plus ou moins influencés
par le projet démocratique de Jean Vilar, et par cet oxymore –
encore un – qu’Antoine Vitez avait inventé pour l’exprimer :
« élitaire pour tous ». On sait qu’il est facile de glisser d’un côté
ou de l’autre de la crête, et plus souvent du côté élitaire… On
sait aussi que les dépenses publiques dans la culture sont les
plus « anti-redistributives » qui soient, puisqu’elles sont payées
par tous les contribuables, et qu’elles profitent souvent, socio-
Le moteur de cette évolution est une attention
constante des équipes de l’institution à sa relation avec
ceux qui la fréquentent, et ceux qui ne la fréquen-
tent pas encore. Attention donc, et interrogations.
MOCRATISATION ? EXIGENCE ? Interrogeons-
nous d’abord sur ce drôle de mot de « public ». Que
se cache-t-il derrière lui? L’expression « grand public »
est bannie de notre vocabulaire. L’employer serait
accepter de ne voir qu’un grand monstre indistinct
là où nous voulons nous adresser à chaque per-
sonne. Nous tournons autour de l’expression « tous
publics » pour ce qu’elle exprime de la diversité des
hommes et des femmes que nous souhaitons attein -
dre. Certains commencent à parler de « cibles » : les
débats sont vifs (et d’ailleurs encore non résolus).
Pour ma part, je fais partie de ceux qui considèrent
le « ciblage » avec circonspection, parce qu’il
conduit à « viser » des individus en fonction d’une
dossier
marketing stratégique
LADÉQUATION ENTRE
offre et besoins
03
Florence Muet : Lors de sa création, vous
avez pris la fonction de direction marke-
ting au sein du réseau des bibliothè-
ques municipales de Lyon. Avec quel
objectif?
Sandrine Chomel-Isaac :
Le réseau
des bibliothèques municipales
de Lyon (BML) souhaitait se
doter d’une véritable stratégie
de service. La BML a toujours
été très active, mais avec des
actions souvent cloisonnées.
La nécessité aujourd’hui est de
créer des flux : il y a des
« sites » forts (des équipes, des
départements thématiques) et
des experts ; il faut aussi activer
des dynamiques de réseau. Par
exemple, nous avons travaillé
pendant plus d’un an pour
développer le service « Cap
Culture Santé » avec l’équipe
de la nouvelle médiathèque
du Bachut. La résultante web
de cette thématique forte de
la BML est une traduction,
commune à tous, de cette
dynamique. Nous pourrons
déployer ce type de démarche
sur d’autres activités, par
exemple dans le réseau
jeunesse ou sur d’autres théma-
tiques culturelles. Et, bien sûr,
nous devons toujours veiller à
ce que notre offre corresponde
aux attentes et aux pratiques
des publics.
Et du côté des publics, justement?
Ma deuxième mission est de
faire en sorte que notre public
se diversifie et que notre
relation avec lui se densifie.
Les bibliothèques de lecture
publique sont faites pour tout
le monde ; et tout le monde
doit y trouver son compte.
C’est ce qu’attendent de nous
les élus de la municipalité. Cela
veut dire une offre plurielle, qui
réponde de façon ciblée aux
différents types de besoins.
Nous avons développé des ser-
vices d’information, comme le
service questions-réponses en
ligne du « Guichet du savoir »
ou la lettre d’information Points
d’actu! pour des segments de
public qui ne viendront jamais
emprunter sur place. Nous
travaillons aussi à sortir les
bibliothèques de leurs murs.
Pour la « Semaine bleue », par
exemple, nous avions « trans-
porté » une partie de la biblio-
thèque dans les locaux de
l’hôtel de ville ! Enfin, il nous
faut envisager des modalités
de participation des publics
à la construction du service…
Comment cette dimension marketing
est-elle intégrée au sein du réseau?
Une bibliothèque, c’est avant
tout un service. Ce service ne
peut se réaliser sans les gens
qui y travaillent. Et le marketing
de ce service non plus ! Il y a
donc tout un travail de « mar-
keting interne » à faire, pour
démystifier la démarche auprès
des équipes, développer des
services transversaux, engager
les gens sur des projets qui
aboutissent. Et tout le monde
est concerné. Nous allons, par
exemple, conduire un travail
avec le service du public, qui
gère l’accueil et le prêt, pour
structurer ensemble notre poli-
tique de qualité de service.
Propos recueillis
par FLORENCE MUET
[ 3 questions à ] Sandrine Chomel-Isaac, directrice marketing des bibliothèques municipales de Lyon
Faire en sorte que le public
se diversifie et que la relation avec
lui se densifie
Après un parcours
dans le secteur de la
librairie, Sandrine
Chomel-Isaac a créé
en 2004 la direction
marketing des
bibliothèques
municipales de Lyon.
Le site des
bibliothèques
municipales
de Lyon :
www.bm-lyon.fr
schomel-isaac
@
bm-
lyon.fr
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