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Napoléon et la Pologne
À la fin de 1806, après avoir écrasé la
Prusse, Napoléon entre à Varsovie où il
est accueilli en libérateur. Les Polonais
sont convaincus qu'il fera renaître leu
nation. Mais l'Empereur, qui n'a pas
renoncé à s'entendre avec le tsar, sait
que celui-ci ne supporterait pas une telle
résurrection. Il se contente donc de
vagues promesses qui n'iront pas au-
delà de ta création du Grand-Duché de
Varsovie. « Dieu seul est l'arbitre de ce
grand problème politique », dit-il alors.
Sainte-Hélène, il dira toutefois à propos
de Poniatowski : « Je me proposais de
le faire roi de Pologne si j'avais réussi
en Russie. »
Blessé à la Bérézina
Le corps d'armée du général Poniatowski se bat avec détermination à la
Moskowa où, malgré toutes ses prouesses, il parvient difficilement à
déborder puis à refouler les grenadiers de Toutchkov. Après l'incendie de
Moscou, l'armée impériale entreprend son immense retraite vers la
Pologne et la Prusse. Poniatowski est blessé lors du passage de la
Bérézina. Quant au contingent polonais, il donne, au milieu de
l'effondrement général, un remarquable exemple de discipline et de
cohésion. La défaite dénoue toutes les alliances. Une à une, les nations
alliées à la France rejoignent la coalition, sixième du nom, que forment
l'Angleterre et la Russie. La Prusse est la première, l'Autriche, la Suède,
puis la Bavière changent de camp. Les Saxons le feront en pleine bataille.
Mais Poniatowski demeure fidèle à l'Empereur et à la France.
Nommé maréchal sur le champ de bataille
Au printemps de 1813, débute la campagne de Saxe. Dans le nouvel
ordre de bataille de la Grande Armée, le contingent polonais prend le
rang de 8e corps d'armée. Celui-ci, précise le décret impérial du 12 mars,
« sera commandé par le prince Poniatowski qui aura le même rang et le
même traitement que les maréchaux de notre Empire ». Mais les affaires de Napoléon tournent mal en Saxe
où, après un armistice, il doit affronter trois armées ennemies : cent mille Suédois commandés par
Bernadotte, autant de Prussiens sous Blücher et deux cent mille Autrichiens conduits par le prince de
Schwarzenberg qui attaquent en Bohême. C'est à ces derniers que doit faire face le 8e corps de Poniatowski.
Confrontés à des forces très supérieures en nombre, les Polonais reculent pied à pied en livrant d'incessants
combats qui retardent la progression de l'ennemi. Début octobre, le 8e corps d'armée est refoulé sur la Saxe.
Le 12, toujours en bon ordre, il rejoint le Grande Armée dans la région de Leipzig et prend place à l'aile
droite du vaste arc de cercle que forme devant la ville le dispositif militaire français.
Le 16 octobre, pour récompenser une fidélité jamais démentie et une bravoure chaque jour affirmée,
l'Empereur nomme sur le champ de bataille le général Poniatowski maréchal de l'Empire. C'est la première
fois, ce sera aussi la dernière, que cette dignité est conférée à un général étranger.
Les Français se battent à un contre dix
La bataille de Leipzig commence par une intense canonnade.
La disproportion d'effectifs est énorme entre les adversaires. Les
Français, qui se battent à un contre dix, sont trahis en pleine
action par leurs alliés saxons qui retournent leurs canons
contre eux. La Grande Armée est prise dans les deux
mâchoires d'un étau. Au nord, les Prussiens de Blücher ; au
sud, les Austro-Russes de Schwarzenberg. Le 18 au soir,
l'Empereur commande la retraite. L'armée va tenter de se
dégager vers l'ouest en franchissant de nuit les obstacles
constitués par les innombrables cours d'eau qui coupent le
champ de bataille. Huit ponts ont été hâtivement jetés par le
génie pour aider au franchissement de la Pleisse et de l'Elster
qui coulent parallèlement et que les fortes pluies d'automne
ont grossies. Ces ponts doivent sauter après le passage des
derniers bataillons français.
Il pleut encore lorsque l'aube du 19 se lève. Durant la nuit,
une partie de l'armée a pu franchir les ponts. Le maréchal
■ Poniatowski, prince polonais et maréchal
d'Empire, 1763-1813 (image d'Épinal, Pellerin).