
158 | La Lettre du Psychiatre • Vol. VI - n° 5 - septembre-octobre 2010
La dépression : quels impacts chez le patient
atteint de cancer ?
DOSSIER THÉMATIQUE
Dépression et cancer
Chez le patient atteint de cancer, la dépression vient
nuire à cette attitude d’observance thérapeutique
et entraîne :
➤
une diminution de la capacité à comprendre les
explications (ralentissement psychomoteur, diffi-
cultés de concentration), le sens ou les objectifs
du traitement ;
➤
une diminution de la capacité à s’investir person-
nellement dans une prise de décision de façon
continue (aboulie, culpabilité) ;
➤
une majoration de la symptomatologie doulou-
reuse, de la fatigue ;
➤des refus de traitements inattendus (incurie).
Enfin, un autre symptôme de la dépression est le
retrait social, avec un isolement important et/ou
une irritabilité rendant les relations interpersonnelles
difficiles, ce qui altère potentiellement la relation de
soins, support de la bonne observance et de l’adé-
quation entre le projet thérapeutique et les souhaits
du patient. N’oublions pas que la dépression est
également associée aux demandes d’euthanasie ou
au désir de mort anticipée avec une prévalence de
ce type de demande jusqu’à 4 fois plus élevée en
présence d’un état dépressif (11).
Dépression et qualité de vie
L’amélioration des effets sur la survie des théra-
peutiques anticancéreuses, l’allongement de la
durée de vie prévisible des patients, l’adminis-
tration au long cours de certains traitements ont
rendu l’évaluation de la qualité de vie incontour-
nable aujourd’hui en cancérologie. Un traitement
nouveau doit démontrer qu’il améliore non
seulement le contrôle biologique de la tumeur et
la durée de vie du patient, mais aussi sa qualité
de vie.
Cette extension des objectifs part d’une vision holis-
tique de la personne, conçue dans sa globalité. La
qualité de vie englobe 4 dimensions : physique,
psychologique, sociale et spirituelle. La plupart
des études consacrées à ce sujet comportent une
évaluation quantitative de la qualité de vie globale
ou de ses différentes dimensions.
L’existence d’un syndrome dépressif va moduler
l’évaluation de la qualité de vie de 2 façons :
➤par son impact sur l’évaluation d’au moins une
des 3 dimensions non somatiques (psychologique,
sociale ou spirituelle) ;
➤
par son impact sur l’évaluation du fonction-
nement physique, lié soit à une symptomatologie
d’origine potentiellement somatique, soit à la
modification par le patient déprimé de l’évaluation
de ses symptômes (12).
Ainsi, M.A. Weitzner et al. ont retrouvé, sur un échan-
tillon de 60 patientes atteintes d’un cancer du sein
(en rémission), une prévalence de la dépression de
29 % et une association de la dépression à un bas
niveau de qualité de vie (13).
D’autres études ont rapporté une influence négative
de la dépression sur les effets secondaires des traite-
ments spécifiques (chirurgie, radiothérapie, chimio-
thérapie, hormonothérapie), celle-ci majorant les
troubles digestifs (nausées), ainsi que la perception
de la fatigue, et altérant les fonctions cognitives
(troubles de la concentration), tous ces facteurs
ayant un impact négatif sur la qualité de vie (14, 15).
M. Lloyd-Williams et al. ont également rapporté
une corrélation entre la dépression et la cotation
de l’intensité d’autres symptômes physiques : les
patients présentant un état dépressif attribuent
une cotation plus élevée aux symptômes tels que
la douleur ou la fatigue (16).
L’intrication de la douleur et de la fatigue avec les
troubles émotionnels est en effet importante. La
perception douloureuse des patients déprimés
augmente et, inversement, une douleur persistante
crée ou accentue la dépression (16, 17). Les patients
dont la dépression est bien prise en charge, c’est-
à-dire dépistée et traitée, sont plus favorisés avec,
en particulier, une amélioration des symptômes
douloureux.
La fatigue est l’un des symptômes les plus
fréquemment ressentis par les femmes atteintes d’un
cancer du sein, et elle perturbe considérablement
leur vie au quotidien. Cette fatigue peut être liée
à la maladie elle-même et/ou à son traitement,
notamment en cas de chimiothérapie. Elle peut
être physique ou psychique, avoir plusieurs causes
comme le traitement ou la dépression, et être
majorée par des troubles du sommeil.
Les interactions entre la dépression et d’autres
symptômes comme la douleur, la fatigue, l’anxiété et
les troubles cognitifs sont complexes (figure 2). Cette
complexité doit être un facteur d’incitation supplémen-
taire à l’évaluation stricte de chaque dimension consi-
dérée isolément (fatigue, douleur, état émotionnel,
etc.), seule à même de permettre un bon repérage
symptomatique et une bonne prise en charge.
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