"La mise en mouvement vers le marketing et le commercial n`est pas

Tristan-Nathaniel Poinot
Directeur assoc
b-ready
"La mise en mouvement vers le marketing et le
commercial n'est pas majoritaire"
Les cabinets comptables doivent-ils définir une stratégie marketing et commerciale ? Et dans
l'affirmative, comment s'y prendre ? Voici l'avis de Tristan-Nathaniel Poinot, directeur assocdu cabinet
de consultants b-ready.
Les cabinets comptables ont-ils besoin d'adopter une démarche marketing et
commerciale ?
L'économie de certains cabinets devient moins confortable. Les marges se réduisent et le chiffre d'affaires
commence à être tendu. L'acquisition de nouveaux clients est très faible et des cabinets commencent même à
perdre des clients non compensés par les nouveaux entrants. La concurrence, qui existait déjà, est de plus en
plus présente. Ces cabinets expriment de plus en plus souvent le besoin d'adopter une démarche marketing et
commerciale mais se demandent comment faire.
Cette prise de conscience est-elle majoritaire ou minoritaire ?
La mise en mouvement vers le marketing et le commercial n'est pas majoritaire. Mais un verrou a sauté avec la
directive services et la fameuse décision de justice sur le démarchage. Des cabinets prennent conscience que la
libéralisation du marché est une réalité qui risque de bouleverser les équilibres et que leur protection va s'étioler.
Le marketing et le commercial deviennent des moyens pour réagir face à cette évolution du marché.
Comment les cabinets s'y prennent-ils?
Deux comportements se dégagent chez les cabinets que l'on rencontre. Certains nous questionnent par exemple
pour savoir comment booster leur chiffre d'affaires, comment améliorer la valeur contributive du client ou encore
comment éviter des départs clients dans l'hypothèse d'un rachat de cabinet. D'autres nous interpellent sur des
solutions déjà envisagées : est-il pertinent d'acheter un cabinet ? Faut-il embaucher un commercial ? Est-ce
intéressant de développer un site web ? Chacun aborde le sujet sous l'angle qui le préoccupe le plus. Cette
approche, si elle est bien naturelle, n'est pourtant pas la plus pertinente car elle ne permet pas toujours de se
poser les bonnes questions. Ainsi, embaucher un commercial, créer un site ou racheter un cabinet ne doit pas
être la réponse à un problème ponctuel et isolé mais le fruit d'une réflexion stratégique en amont.
Comment mener cette réflexion stratégique en amont ?
Il faut travailler en plusieurs temps. Le premier consiste à faire émerger une vision stratégique à 3 ou 5 ans, c'est-
à-dire définir et formaliser le projet de cabinet. Ensuite, il faut adopter une stratégie qui réponde aux trois
questions de base qui se posent : faut-il développer de nouveaux services sur un marché existant ? Faut-il
développer les services existants sur un nouveau marché ? Faut-il se diversifier en proposant des services
nouveaux à un nouveau marché ? Après, il faut se positionner. Cela revient à choisir entre une stratégie qui
repose sur les prix, ce qui suppose de disposer des moyens d'industrialisation et de mutualisation pour tirer les
coûts vers le bas, une stratégie basée sur la différenciation, c'est à dire s'extraire de la pression concurrentielle
avec une offre à valeur ajoutée qui échappe à la comparaison et, enfin, une stratégie de concentration, c'est à
dire investir sur une niche où l'on dispose d'une expertise. Une fois positionné, il faut définir l'offre. Et enfin
seulement, il faut aborder la question du marketing et du commercial. Une campagne commerciale efficace ne
peut être que la conséquence d'une démarche structurée et ne doit pas être un acte isolé. A défaut, le cabinet fait
"un coup" mais ne construit rien de pérenne.
Cette démarche est-elle adaptable à tous les cabinets ?
Il est évidemment plus simple pour les grandes structures qui disposent de moyens plus importants de se lancer
dans un tel projet. Mais, d'un autre côté, les petits cabinets sont plus réactifs et ont des circuits de décision plus
courts. La taille n'est pas un problème dans le sens où il faut penser autrement. Il faut déjà mener une réflexion
sur le projet qui s'affranchisse de la question des ressources. Dans cette première étape de projection dans
l'avenir, il faut que les experts-comptables soient convaincus, qu'en cette période de mutation, leur avenir est plus
à inventer qu'à découvrir. Ce n'est qu'ensuite qu'il faut travailler pour concilier ce projet du cabinet avec les
moyens disponibles. Les démarches les plus efficaces ne sont pas nécessairement les plus coûteuses. On peut
remplacer certains investissements financiers par de bonnes idées !
Comment organiser les ressources humaines, en interne ou de façon externalisée, pour
cette démarche marketing et commerciale ?
Ce n'est pas un scoop mais on ne transformera pas, du jour au lendemain, les collaborateurs en commerciaux !
Néanmoins, on peut les former sur l'écoute clients et l'amélioration des services en leur rappelant qu'on attend
surtout pas d'eux qu'ils vendent tout et n'importe quoi mais que le cabinet rende de nouveaux services aux clients
qui en ont besoin. Il faut aussi se demander si le dirigeant du cabinet a une appétence pour la démarche
commerciale et s'il a le temps de s'en occuper. Dans la négative, des solutions de responsable marketing et
commercial en temps partagé commencent à voir le jour. Je crois beaucoup à ce type d'externalisation du temps
partagé en phase de conquête et de lancement d'une nouvelle offre.
Les associés sont-ils prêts à déléguer la fonction commerciale quand c'est nécessaire ?
L'expérience montre que les associés ont souvent du mal à confier cette mission à quelqu'un d'autre. Cependant,
dans leur quête du temps, cette situation évoluera nécessairement. L'expert-comptable doit rester maître de
l'acceptation de la lettre de mission. Néanmoins, ce n'est pas du tout incompatible avec la délégation de l'acte de
vente. C'est ce que font les structures on line qui utilisent des télévendeurs ou certains cabinets qui font appel à
des commerciaux externalisés. Je crois à une telle solution temporaire où le cabinet externalise cette culture
commerciale par du temps partagé, c'est à dire par un accompagnement pour bénéficier d'un transfert de
compétences rapide.
Par Ludovic Arbelet
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