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Item 145 : Tumeurs malignes de l’hypopharynx.
OBJECTIFS
savoir diagnostiquer une tumeur de l’hypopharynx
apprécier les signes de gravité et les facteurs pronostiques
l'étudiant doit connaître les stratégies de prévention, de dépistage, de diagnostic
et de traitement des principales tumeurs bénignes et malignes afin de participer
à la décision thérapeutique multidisciplinaire et à la prise en charge du malade
à tous les stades de la maladie.
RAPPEL ANATOMIQUE ET PHYSIOLOGIQUE
L'hypopharynx se compose de trois régions anatomo-cliniques :
- Les sinus piriformes : expansions latérales se réunissant au niveau de la bouche de
l'oesophage ;
- La région rétrocrico-aryténoïdienne ;
- La face postérieure de l'hypopharynx.
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POINT DE DEPART ET EXTENSION :
Les cancers du sinus piriforme peuvent intéresser soit la partie haute, soit la partie moyenne,
notamment l'angle antérieur, soit la paroi interne (mur pharyngo-laryngé), soit la paroi
externe. Les formes totales sont les plus fréquentes, envahissant à la fois l'angle, la paroi
interne, la paroi externe et réalisant soit une forme haute, soit une forme basse atteignant le
fond du sinus piriforme et la bouche oesophagienne. Les formes évoluées s'étendent aux
régions voisines : pharynx, base de langue, bouche de l’œsophage.
Le cancer de la paroi postérieure de l'hypopharynx se développe à bas bruit et envahit
rarement le plan pré vertébral mais peut remonter vers l'oropharynx ou descendre et atteindre
la bouche oesophagienne.
Le cancer de la région rétro-cricoïdienne envahit rapidement la bouche oesophagienne.
EPIDEMIOLOGIE
Les cancers des voies aérodigestives supérieures (VADS) sont dominés en France par
l'atteinte des sinus piriformes. Ils représentent 12 % des cancers des VADS, et 90 % des
cancers de l'hypopharynx sont localisés aux sinus piriformes.
On retrouve les facteurs favorisants classiques : tabac, alcool.
Le sexe masculin est le plus souvent atteint (dans 98,5 % des cas). Certains cancers rétro-
cricoïdiens surviennent plus volontiers chez la femme.
ANATOMO-PATHOLOGIE
Histologiquement, il s'agit le plus souvent d'un carcinome épidermoïde plus ou moins bien
différencié. Plus rarement il peut s'agir d'un adénocarcinome ou d'un sarcome. Les métastases
ganglionnaires sont très fréquentes et parfois bilatérales dans les tumeurs dépassant la ligne
médiane.
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LES SIGNES CLINIQUES D'APPEL
Les signes révélateurs sont souvent tardifs :
- une adénopathie cervicale métastatique le plus souvent en position jugulo-
carotidienne moyenne unilatérale, parfois surinfectée ;
- une gêne pharyngée latéralisée ;
- une dysphagie haute progressive, puis une odynophagie (douleur pharyngée à la
déglutition des aliments). Cette odynophagie s'accompagne volontiers d'une otalgie
réflexe unilatérale ;
- plus tardivement apparaissent une dysphagie avec hypersialorrhée, une dysphonie
qui signe l'extension au larynx.
Le caractère permanent, progressif et unilatéral de ces troubles doit attirer l'attention. En
fait le diagnostic est souvent retardé du fait de la gêne fonctionnelle qui reste longtemps
modérée
.
BILAN CLINIQUE ET PARACLINIQUE
o L'examen au miroir ou en fibroscopie précise l'aspect de la tumeur, son siège et
son extension. Il apprécie la mobilité des aryténoïdes et des cordes vocales. La
fixité d'un hémilarynx signifie une infiltration du mur pharyngo-laryngé,
rendant impossible toute chirurgie partielle. La palpation des aires
ganglionnaires est systématique.
o Le bilan endoscopique des VADS sous anesthésie générale permettra la
recherche d'éventuelles deuxièmes localisations synchrones très fréquentes au
niveau des VADS. Elle permettra également la biopsie et le bilan d'extension
loco-régional avec œsophagoscopie et trachéo-bronchoscopie. Cet examen
précisera également l'extension locale de la tumeur et l'atteinte éventuelle de la
bouche oesophagienne.
o Ce bilan clinique est complété par un bilan paraclinique avec :
- un examen tomodensitométrique du pharyngo-larynx qui permettra d'apprécier le
siège de la tumeur, ses extensions aux espaces para-glottiques, l'existence d'une
éventuelle lyse cartilagineuse, l'extension à la musculature extrinsèque du larynx
ou aux espaces sous-cutanés, la présence éventuelle d’adénopathies.
- un cliché thoracique ;
- un bilan hépatique ou une échographie abdominale selon les écoles.
D'autres examens paracliniques seront utiles en fonction des antécédents du patient et
selon les orientations thérapeutiques choisies (appréciation de l'état nutritionnel, de l'état
cardio-respiratoire, de l'état hépatique et rénal).
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Le bilan stomatologique en vue d'une éventuelle radiothérapie doit être mis en route dès
que possible.
FORMES CLINIQUES
o Formes cliniques selon le siège de la tumeur
- La localisation aux sinus piriformes est la plus fréquente en France. Elle peut être
limitée soit au repli pharyngo-épiglottique, au carrefour des trois replis, soit au
repli ary-épiglottique et à l'aryténoïde. Dans ce cas, cette tumeur intermédiaire
entre larynx et pharynx amène rapidement une diminution de la mobilité laryngée.
Ces atteintes limitées sont peu fréquentes. Le plus souvent l'atteinte s'étend à tout
le sinus piriforme avec fixité de l’hémilarynx.
- La tumeur rétro-cricoïdienne, rare en France s'étend rapidement vers la bouche
oesophagienne et son pronostic est mauvais.
- L'atteinte de la paroi postérieure de l'hypopharynx est souvent de découverte
tardive car la symptomatologie est peu marquée.
o Formes cliniques selon l'anatomo-pathologie
Il s'agit le plus souvent de carcinome épidermoïde plus ou moins différencié. Les lésions
précancéreuses à type de leucoplasie sont rares. Les autres types tumoraux : cylindrome,
lymphome, sarcome, sont exceptionnels.
CLASSIFICATION TNM
A l'issue du bilan clinique et paraclinique, la classification TNM est possible :
T1 tumeur limitée à un des trois secteurs de l'hypopharynx
T2 tumeur étendue au secteur hypopharyngé adjacent ou à une région voisine sans
trouble de la mobilité laryngée
T3 tumeur de plus d'une région avec fixité d'une corde vocale
T4 tumeur étendue aux cartilages ou aux parties molles.
N0 pas d'envahissement ganglionnaire
N1 envahissement ganglionnaire homolatéral de moins de 3 cm dans sa plus
grande dimension
N2A métastase dans un seul ganglion de plus de 3 cm ou de moins de 6 cm
N2B métastases homolatérales multiples, toutes de moins de 6 cm
N2C métastase controlatérale ou bilatérale de moins de 6 cm
N3 métastase dans un ou plusieurs ganglions de plus de 6 cm dans la plus grande
dimension
M0 pas de métastase à distance
M1 présence d'une métastase à distance.
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TRAITEMENT
Le traitement est en règle radio-chirurgical.
Méthodes
o La radiothérapie le plus souvent associée à la chirurgie délivre 60 à 70
grays sur le lit tumoral et les aires ganglionnaires cervicales.
o La chirurgie : il s'agit d'une pharyngo-laryngectomie totale le plus souvent
dans les cancers étendus. Les pharyngectomies partielles sont réservées aux
cancers limités de la paroi externe du sinus piriforme. Dans les tumeur de
l'angle antérieur ou du versant laryngé chez les sujets sans problème
respiratoire et sans adénopathie importante, une hémipharyngo-
laryngectomie verticale peut être proposée. Enfin, en cas d'extension trop
importante, une pharyngo-laryngectomie circulaire enlevant la totalité du
larynx et de l'hypopharynx doit être effectuée. La reconstruction du
pharynx se fait alors par diverses techniques : transplant colique ou
gastrique, transplant jéjunal, lambeau antébrachial micro-anastomosé.
La chirurgie des aires ganglionnaires est en général un évidement
ganglionnaire cervical traditionnel en monobloc associé à une lobo-
isthmectomie thyroïdienne homolatérale à la lésion et à un curage
récurrentiel. Pour les lésions atteignant la ligne médiane, le geste sera
bilatéral.
o La chimiothérapie
La chimiothérapie peut être proposée dans le cadre de procotoles de
conservation d'organe chez les sujets redevables d'une chirurgie mutilante
et pour lesquels l'état général et l'état local (absence d'atteinte
cartilagineuse) autorise une chimiothérapie néo-adjuvante.
Indications thérapeutiques
Pour les tumeurs de petit calibre, sans adénopathie palpable, on peut proposer soit une
chirurgie partielle avec curage, suivie de radiothérapie, soit une radiothérapie isolée sur la
lésion et les aires ganglionnaires.
Pour les lésions de plus gros volume, souvent classées T3 ou T4, une chirurgie radicale de
type pharyngo-laryngectomie totale avec curage ganglionnaire monobloc suivi
d'irradiation externe, est proposée.
En cas d'atteinte de la bouche oesophagienne ou de la paroi pharyngée postérieure, une
pharyngo-laryngectomie circulaire associée à une oesophagectomie et un curage uni ou
bilatéral peut être proposé avec reconstruction par un transplant.
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