Infections à papillomavirus Springer Paris Berlin Heidelberg New York Hong Kong Londres Milan Tokyo Joseph Monsonego Infections à papillomavirus État des connaissances, pratiques et prévention vaccinale Joseph Monsonego 174, rue de Courcelles 75017 Paris ISBN-10 : 2-287-33479-3 Springer Paris Berlin Heidelberg New York ISBN-13 : 978-2-287-33479-5 Springer Paris Berlin Heidelberg New York © Springer-Verlag France, Paris 2006 Imprimé en France Springer-Verlag France est membre du groupe Springer Science + Business Media Cet ouvrage est soumis au copyright. Tous droits réservés, notamment la reproduction et la représentation, la traduction, la réimpression, l’exposé, la reproduction des illustrations et des tableaux, la transmission par voie d’enregistrement sonore ou visuel, la reproduction par microfilm ou tout autre moyen ainsi que la conservation des banques de données. 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SPIN : 11739364 Maquette de couverture : Jean-François Montmarché Avant-propos Avec près de 500 000 cas annuels et 230 000 décès, le cancer du col est la deuxième cause de cancer chez la femme dans le monde. En Europe, où beaucoup de pays ont mis en place un programme de dépistage du cancer du col, la maladie se situe au troisième rang des cancers féminins en termes d’incidence. En France en 2000, le cancer du col affecte 3 400 femmes et occasionne 1 000 décès chaque année. Le risque de développer un cancer du col est estimé à 1 % dans les pays développés et à 5 % dans les pays en voie de développement. Le triage des frottis ASC-US, qui représentent 2,5 à 4 % de la totalité des frottis, basé sur le test HPV, est largement admis, recommandé et remboursé en France. Après l’âge de 30 ans, le groupe des femmes à frottis négatif - HPV à haut risque positif représente environ 5 à 7 % de la population. Parmi ces femmes, il est possible désormais d’identifier avec plus de précision celles qui sont à risque réel de lésions précancéreuses sous-jacentes en utilisant des marqueurs moléculaires performants. Il est prouvé que la persistance virale ainsi que la charge virale élevée sont des indicateurs fiables de lésions précancéreuses. Plus récemment, le génotypage viral permet de répondre de manière plus précise à cette question. En effet, il est démontré que les papillomavirus 16 et 18 sont les types viraux auxquels les femmes sont le plus souvent exposées dans leur jeune âge, en particulier en Europe et en Amérique du Nord, et que ce sont sur ces types viraux que la persistance, après l’âge de 30 ans, est le plus souvent observée. Ainsi la persistance à HPV 16 ou 18 est un marqueur lésionnel encore plus fiable que la persistance dans un cocktail de papillomavirus à risque. D’autres marqueurs des lésions de haut grade sont aujourd’hui disponibles, les ARN messagers des gènes E6-E7 des papillomavirus à risque sont le plus souvent exprimés dans ces lésions. La détection d’ARN messagers E6E7 de certains papillomavirus à risque a une grande probabilité d’être associée à une lésion précancéreuse. Le marquage des cellules par la protéine P16ink4a en cytologie ou en histologie peut aider le pathologiste à reconnaître un sujet à risque lors du dépistage ou à améliorer l’assurance de qualité en histologie, en particulier pour les CIN 1. VI Infections à papillomavirus Malgré le succès considérable enregistré par le dépistage cytologique pour prévenir le cancer du col, le frottis n’a pas bénéficié de tous les espoirs auxquels on pouvait s’attendre pour réduire à une large échelle son incidence. Dans beaucoup de pays, le frottis de dépistage a transformé le cancer du col d’une maladie mortelle en une pathologie rare. Par ailleurs, le dépistage ne semble profiter qu’à une infime partie de la population mondiale alors qu’une large proportion de ceux qui en bénéficient endure ses faiblesses. L’impact de l’infection à papillomavirus dans la population est considérable. Plus d’une femme sur deux a été exposée aux HPV durant sa vie, 10 % en sont porteuses de façon chronique et parmi elles une femme sur cinq risque de développer un cancer du col en l’absence de dépistage ou en cas de dépistage défaillant. Le fait que le cancer du col soit la conséquence ultime de l’infection chronique à papillomavirus procure l’extraordinaire opportunité de prévenir la maladie par la vaccination. Les HPV 16 et 18 sont responsables de 70 % des cancers du col dans le monde. Ces types sont reconnus comme les principaux types viraux associés au risque de développer des lésions précancéreuses et cancéreuses tant chez les femmes à frottis normal que chez celles ayant des anomalies cytologiques de type ASC-US ou bas grade. Un vaccin prophylactique, pour prévenir les lésions précancéreuses et cancéreuses, composé de ces types viraux, devrait sauver des vies, réduire l’anxiété, les interventions coûteuses et aurait un bénéfice individuel et collectif non négligeable. Les vaccins HPV prophylactiques verront le jour avant la fin de l’année 2006. Basés sur la production de particules virales non infectantes issues de la protéine majeure de capside L1 qui a la particularité de s’autoassembler spontanément sous la forme de pseudo-particules virales (VLP L1), les essais cliniques qui bénéficient de plus de quatre ans de suivi postvaccinal montrent que les vaccins prophylactiques 16 et 18 induisent une forte production d’anticorps neutralisants avec un minimum d’effets secondaires, une protection de 100 % de l’infection à HPV 16 et 18 persistante et des CIN de haut grade associées. Les résultats issus des essais cliniques utilisant le vaccin bivalent (Cervarix©) de GSK et le vaccin quadrivalent (Gardasil©) de Merck sont concordants dans ce sens bien que chacun d’entre eux ait ses particularités propres. La vaccination HPV réduirait de moitié la fréquence des frottis anormaux, le nombre de colposcopies et biopsies dirigées ainsi que les traitements des lésions précancéreuses. Associée au dépistage, on estime qu’une large couverture vaccinale induirait une réduction de l’incidence de ce cancer de 90 %. L’instauration d’une vaccination systématique pour les jeunes filles âgées de 11 à 16 ans, avec pendant 4 à 5 ans, un rattrapage progressif des cohortes de jeunes femmes âgées de 17 à 25 ans, correspond au positionnement démontré de la vaccination. L’introduction du vaccin HPV, couplé au dépistage, permettrait de démarrer l’âge de début de ce dépistage plus tard et, à moyen terme, d’autoriser sans risque majeur un espacement du dépistage à 3-5 ans. Les carences dans l’observance au dépistage constituent en effet l’un des échecs des campagnes de dépistage actuelles. Il faudra cependant veiller à ce qu’il n’y ait pas de relâchement conséquent de ce dépistage ou de la prévention des IST, étant donné les messages qui vont entourer une vaccination anti-cancer ou anti-IST. Avant-propos VII Cet ouvrage au contenu diversifié dresse un état des lieux des connaissances et des perspectives sur l’infection à papillomavirus et des pathologies associées. Il s’adresse aux acteurs principaux impliqués dans le dépistage, le diagnostic, le traitement et la prévention des précancers et cancers du col. Dans cet environnement en pleine mutation, marqué par beaucoup d’évidences et quelques incertitudes, décrypter les nouveaux enjeux, anticiper les évolutions à court et moyen terme, rappeler les stratégies cohérentes de prise en charge et des pratiques est l’un des objectifs de cet ouvrage qui se veut avant tout informatif et didactique. D’ores et déjà se dessinent les contours d’une nouvelle pratique clinique : un dépistage cyto-moléculaire ciblé et performant, à un rythme espacé, auprès d’une population potentiellement immunisée. L’éradication du cancer du col deviendra alors un objectif réaliste, à condition que des campagnes d’information et d’éducation adaptées génèrent une forte mobilisation des femmes et des professionnels de santé. Joseph MONSONEGO Du même auteur Dysplasies du col et papillomavirus humains. Maloine Paris, 1988 New Developments in Cervical Cancer Screening and Prevention. Blackwell Science, Oxford, 1997 Emerging Issues on HPV Infections: From Science to Practice. Karger Basel, 2006 Sommaire Avant-propos ............................................................................................................................................ V ÉTAT DES CONNAISSANCES ............................................................................................. 1 Infections génitales à HPV. Bases fondamentales ........................................ Caractéristiques des HPV. Biologie virale ................................................................. Données épidémiologiques.Transmission ................................................................ Indicateurs pronostiques de l’infection à HPV à risque ........................... Histoire naturelle de l’infection à HPV et des CIN ....................................... Mécanisme de la carcinogenèse ............................................................................................ Réponses immunitaires anti-HPV ..................................................................................... Conclusion. Différences fondamentales entre l’infection à HPV à bas risque et à haut risque ..................................................................................................... 3 4 8 16 23 25 30 Cancer du col en France et dans le monde ............................................................ Cancer du col utérin en France ............................................................................................. Cancer du col utérin en Europe ........................................................................................... Cancer du col utérin dans le monde ............................................................................... 47 48 53 58 35 DIAGNOSTIC DE L’INFECTION À PAPILLOMAVIRUS ET DES LÉSIONS ASSOCIÉES ........................................................................................... 65 Apport de la biologie. Le test HPV ................................................................................. Principales techniques ..................................................................................................................... Nouvelle génération de tests HPV ..................................................................................... Apport de la P16ink4a dans le dépistage et le diagnostic ........................ Conlusion ...................................................................................................................................................... 67 68 73 78 79 X Infections à papillomavirus Apport de la cytopathologie ................................................................................................... 85 Recueil en milieu liquide .............................................................................................................. 86 Classification de Bethesda ........................................................................................................... 93 Conclusion .................................................................................................................................................... 100 Apport de la colposcopie ............................................................................................................ 103 Le colposcope ............................................................................................................................................ 103 Trois temps de l’examen ................................................................................................................ 104 Col normal ................................................................................................................................................... 105 Images élémentaires ........................................................................................................................... 107 Situations particulières et modifications physiologiques ........................ 107 Procédures de diagnostic .............................................................................................................. 109 Impressions colposcopiques ..................................................................................................... 111 Colposcopie satisfaisante et non satisfaisante ....................................................... 113 Reproductibilité de la colposcopie .................................................................................... 113 Effets secondaires potentiels de la colposcopie ................................................... 114 Indications .................................................................................................................................................... 114 Terminologies ............................................................................................................................................ 114 Compte rendu de colposcopie ............................................................................................... 117 Conclusion .................................................................................................................................................... 117 PRISE EN CHARGE DES LÉSIONS GÉNITALES À HPV ................... 119 Dépistage du cancer du col : le point actuel ........................................................ 121 Histoire des frottis des femmes qui développent un cancer invasif du col. Problématique du dépistage ............................................................. 121 Limites du dépistage basé sur le frottis conventionnel ............................... 122 Optimisation de la sensibilité du dépistage ............................................................. 123 Test HPV et dépistage primaire : apport des études actuelles ............ 126 Le test HPV peut-il remplacer le frottis de dépistage ? .............................. 129 Apport des études économiques .......................................................................................... 130 Peut-on éviter les dérives ? Problèmes non encore résolus ................... 130 Consensus et rapports disponibles .................................................................................... 131 Les perspectives d’un vaccin HPV prophylactique vont-elles modifier le dépistage ? ..................................................................................................................... 132 Conclusion .................................................................................................................................................... 133 Prise en charge d’un frottis anormal : apport de la colposcopie et du test HPV en pratique clinique ............................................................................. 139 Apport de la colposcopie dans la prise en charge des frottis anormaux ....................................................................................................................................................... 140 Colposcopie et test HPV positif de dépistage ....................................................... 148 Sommaire XI Colposcopie et test HPV de seconde intention ................................................... 149 Colposcopie pour le suivi des patientes avec atypies cytologiques mineures (ASC-US/LSIL), avec une CIN 1 non traitée ou après traitement d’une CIN ....................................................................................................................... 153 Patientes présentant des condylomes acuminés génitaux externes ou papulose bowénoïde (VIN 3) ......................................................................................... 154 Partenaire présentant des lésions à HPV .................................................................... 154 Populations à risque .......................................................................................................................... 155 Symptômes persistants à titre de leucorrhées et de métrorragies, en particulier métrorragies postcoïtales ...................................................................... 155 Colposcopie dans les situations particulières ........................................................ 155 Colposcopie de dépistage ............................................................................................................. 156 Conclusion .................................................................................................................................................... 158 Traitement des lésions génitales à HPV..................................................................... 163 Apport du laser CO2 ......................................................................................................................... 163 Traitement des CIN et des AIS .............................................................................................. 164 Indications, interprétation du test HPV et des marqueurs moléculaires ............................................................................................................................................... 169 Comprendre et interpréter les résultats ....................................................................... 169 Apports du test HPV en pratique clinique .............................................................. 170 Prise en charge après ASC-US/ASC-H ......................................................................... 174 Prise en charge après frottis L-SIL ..................................................................................... 175 Frottis et test HPV en dépistage primaire ................................................................. 176 Sept points clés pour une bonne utilisation clinique du test HPV ................................................................................................................................................. 177 Six informations pour les patientes .................................................................................. 177 Méthodes de diagnostic ................................................................................................................. 178 Lésions génitales externes à HPV .................................................................................... 189 Bilan et prise en charge des condylomes acuminés génitaux externes en pratique quotidienne ....................................................................................... 189 Néoplasies intravulvaires .............................................................................................................. 204 VACCINATION PROPHYLACTIQUE ANTI-PAPILLOMAVIRUS ........................................................................................................ 211 État des connaissances et perspectives pour la pratique clinique ........................................................................................................... 213 Cancer du col utérin. Les chiffres ....................................................................................... 214 Rôle des papillomavirus (HPV) ........................................................................................... 215 XII Infections à papillomavirus Vaccination HPV comme approche de prévention primaire du cancer du col .............................................................................................................................................. 218 Conclusion .................................................................................................................................................... 236 Espoir et promesses de la vaccination HPV ........................................................ 241 Annexe Aspects colposcopiques des lésions HPV associées (planches en couleur) ÉTAT DES CONNAISSANCES Infections génitales à HPV. Bases fondamentales La recherche de l’agent causal a été à la base du succès de la lutte contre la plupart des maladies infectieuses. On aurait pu penser que l’acquisition des outils nécessaires pour détecter la présence des papillomavirus humains (HPV) aurait été suivie rapidement d’une large utilisation de ces tests pour détecter les femmes à haut risque de néoplasies cervicales présentes ou à venir. Cependant, bien que des sondes moléculaires pour la recherche des HPV aient été disponibles dès 1983, les médecins ne se sont pas intéressés tout de suite aux applications cliniques potentielles de ces tests. La raison de ce désintérêt réside, en partie tout au moins, dans les conceptions erronées créées par les premières études de PCR qui utilisaient des modalités très imprécises. Ceci a conduit à des publications montrant une faible sensibilité, une spécificité médiocre et à des estimations considérablement atténuées quant à la relation entre l’infection à HPV, l’activité sexuelle et les néoplasies cervicales. Une nouvelle génération de tests HPV a permis de montrer l’étroite association entre l’infection à HPV et le cancer invasif du col utérin. Leur forte sensibilité et une spécificité acceptable ont été rapportées. La revue des études épidémiologiques sur l’infection à HPV établit le rôle de ces virus comme facteur causal indépendant des néoplasies cervicales intraépithéliales (Cervical Intraepithelial Neoplasia, CIN) et du cancer du col. Ces données prouvent aussi la valeur potentielle du test HPV dans le domaine clinique. Les associations importantes, rapportées dans la littérature, peuvent être résumées comme suit : des études cas-contrôles ont établi que la plupart des femmes ayant une CIN ont un HPV détectable dans des proportions significativement plus élevées que les contrôles ; la détection des HPV est associée à un risque de néoplasie cervicale au moins dix fois plus élevé que les sujets HPV négatifs ; plus la dysplasie a un grade élevé, plus forte est la prévalence de l’infection à HPV ; le risque relatif d’association d’une CIN 3 avec l’HPV est de 40 ; le pourcentage des CIN attribué à une infection à HPV est d’au moins 90 % ; la détection des HPV chez des femmes ayant des frottis normaux est un facteur prédictif de risque accru de détec- 4 Infections à papillomavirus tion de CIN futures ; enfin, le risque de progression de lésions liées aux HPV peut être corrélé aux types viraux (1). Étant donné l’association très forte qui existe entre les HPV et les néoplasies cervicales et la possibilité que les quelques tumeurs HPV négatives puissent représenter de rares exemples de détectabilité réduite, l’infection virale a été proposée comme l’événement précurseur plus ou moins lointain susceptible de conduire au cancer du col. Caractéristiques des HPV. Biologie virale Les HPV sont des virus de petite taille (de 45 à 55 nm de diamètre), non enveloppés, composés de 72 capsomères disposés selon une symétrie icosaédrique. Leur génome est constitué d’une molécule circulaire d’ADN double brin de 8 000 paires de bases environ. La diversité génomique des HPV a permis d’individualiser plus de 120 génotypes (2). Leur classification, basée sur le génotype et l’analyse phylogénétique (fig. 1), permet de les différencier en fonction de leur tropisme (cutanés ou muqueux), de leur propriété biologique et de leur potentiel oncogénique (bas risque et haut risque) (3). Parmi les HPV cutanés, les HPV 1, 2, ou 4 sont responsables des verrues plantaires et palmaires. Quant aux HPV 5 et 8, ils sont majoritairement retrouvés chez des patients atteints d’une génodermatose rare, l’épidermodysplasie verruciforme. Parmi les HPV muqueux, les HPV dits à bas risque oncogène (HPV 6, 11) sont responsables de lésions anogénitales bénignes telles que les condylomes acuminés et les HPV à haut risque oncogène (HPV 16, 18, 31, 45) sont associés aux lésions précancéreuses et cancéreuses du col de l’utérus (tableau I). Toutefois, il n’est pas rare de détecter plusieurs types d’HPV au sein d’une même lésion. L’analyse comparée des séquences nucléotidiques des papillomavirus dans les différentes espèces a révélé une organisation génétique commune. Une dizaine de phases ouvertes de lecture ou ORF (open reading frame des Anglo-Saxons) portées par un seul des deux brins d’ADN sont groupées en une région E (early) codant pour des protéines non structurales et une région L (late) codant pour les protéines de capside (fig. 2, tableau II). La région non codante (non coding region, NCR) comprenant 400 à 1 000 nucléotides et située entre les ORF L1 et E6/E7 est très variable. Elle contient un site ori (site d’origine de la réplication virale), les promoteurs des gènes précoces et des séquences de régulation de la réplication et de la transcription. Ces séquences sont des sites reconnus par des facteurs d’origine cellulaire ou virale. La protéine virale E2 intervient à la fois dans la réplication et la modulation de la transcription du génome des HPV. La réplication virale est étroitement contrôlée par la protéine E1, couplée à la protéine E2. L’hétérodimère E1-E2 se lie à la séquence ori qui possède un site de liaison pour E1 (E1BS : E1 binding site) flanqué lui-même de plusieurs sites de liaison pour E2 (E2BS). La protéine E2, sous forme d’homodimère module la transcription des gènes E6/E7 ; elle bloque l’expression de ces gènes. Les protéines E5, E6 et E7 sont impliquées dans les processus d’im- Infections génitales à HPV. Bases fondamentales Fig. 1 - Arbre phylogénique basé sur la séquence de E6. 5 6 Infections à papillomavirus Tableau I - Types d’HPV dans les lésions génitales. Types de lésion génitale Types d’HPV Moins prévalents Plus prévalents Condylomes acuminés 42, 44, 51, 53, 83 6,11 Lésions intraépithéliales 18, 26, 30, 33, 34, 35, 39, 40, 42, 43, 45, 51, 52, 57, 58, 59, 61, 62, 64, 53, 54, 55, 56, 66, 67, 68, 69, 70, 71, 73, 74, 79, 81, 82, 83, 84, 6, 11 16 Cancers cervicaux et anogénitaux 18, 31, 33, 35, 39, 45, 51, 52, 54, 56, 58, 59, 66, 68, 69 16 Fig. 2 - Organisation du génome d’HPV 16. Infections génitales à HPV. Bases fondamentales 7 Tableau II - Rôle des protéines des papillomavirus à haut risque. Protéine E1 E2 E3 E4 E5 E6 E7 E8 L1 L2 Fonction Réplication de l’ADN viral Réplication, régulation de la transcription Pas de fonction connue Maturation des virions Stimulation de la prolifération cellulaire Protéine oncogène, favorise la dégradation de la protéine p53 Protéine oncogène, favorise la dégradation de la protéine de susceptibilité au rétinoblastome pRb Pas de fonction connue Protéine majeure de capside Protéine mineure de capside mortalisation et de transformation cellulaire. La protéine L1 est la protéine majeure de capside. Capables de s’auto-assembler en l’absence d’autres protéines virales pour former des particules virales vides ressemblant à des capsides et dénommées VLP (virus like particules), ces protéines L1 possèdent les mêmes épitopes conformationnels que la protéine native et sont hautement immunogènes. Elles sont une source d’antigènes pour le développement de tests sérologiques ELISA et pour la production de vaccins. La protéine L2, protéine mineure de capside, est capable de lier l’ADN viral et de le positionner correctement au sein de la capside. En association avec la protéine L1, elle permet l’assemblage du virus et la stabilisation de la capside. Les HPV infectent les cellules souches basales des épithéliums pluristratifiés vraisemblablement au profit d’une microlésion. Selon le génotype, l’entrée des virus dans les cellules se fait par endocytose. Le transport cytosolique des particules virales emprunte alors les réseaux de microtubules et des filaments d’actine pour se diriger vers le noyau. Enfin, la translocation de l’ADN des HPV dans le noyau cellulaire nécessite le démantèlement de la capside virale (4). Le cycle viral (fig. 3) comporte deux phases distinctes (5). La première, non productive, est observée dans les cellules basales de l’épithélium qui conservent des propriétés de division. Le nombre de génomes d’HPV atteint alors 50 à 100 copies par noyau. Le nombre de copies d’ADN viral est ensuite maintenu dans les cellules filles dont l’arrêt du cycle cellulaire et la différenciation, normalement observés lors de l’ascension des cellules dans l’épithélium, sont retardés par l’infection. La réplication du génome viral se fait classiquement sous forme épisomale, sous le contrôle des deux protéines E1 et E2. Cette réplication est à l’origine d’un effet cytopathogène caractéristique des infections par HPV. La seconde phase conduit, en plus de l’amplification des génomes viraux, à l’expression des protéines tardives et à la production de virions. Cette phase, étroitement dépendante du processus de différen- 8 Infections à papillomavirus 2 1 1 Phase non productive 2 Phase productive Fig. 3 - Le cycle de réplication viral. ciation des cellules épithéliales, ne se déroule que dans les couches les plus superficielles de l’épithélium. Les virions matures et infectieux sont alors libérés au cours du processus de desquamation et les risques de transmission à un partenaire sont possibles. En conclusion, on retiendra que la réplication virale n’a lieu que dans les couches superficielles très différenciées des épithéliums malpighiens alors que dans les couches basales, seules sont exprimées les régions précoces. L’effet cytopathogène résultant de la réplication des HPV se traduit par la présence de koïlocytes, cellules vacuolisées à gros noyaux dont la présence dans les frottis est pratiquement pathognomonique d’une infection virale à HPV. Données épidémiologiques.Transmission Parmi les génotypes d’HPV (près de 120), une vingtaine présente un tropisme génital. Parmi eux, on distingue les HPV dits à « haut risque » (HPV 16, 18, 31, 33, 35, 39, 45, 51, 52, 56 et 58) et les HPV dits à « bas risque » (HPV 6, 11, 42, 43 et 44). De nombreuses études ont montré que les femmes infectées par les HPV à haut risque ont un risque élevé de progression vers une CIN par rapport à celles infectées par les HPV à bas risque et une incidence marquée de cancers du col par rapport aux femmes non infectées (6, 7, 8, 9, 10, 11). La distribution de ces types varie avec la géographie mondiale. Sur une série de cancers invasifs provenant de 22 pays (Amérique, Europe, Afrique, Asie), la prévalence de l’HPV 16 est prédominante (50-60 %), suivie de celle de l’HPV 18 (1012 %), de l’HPV 31 et 45 (4-5 % chacun), de l’HPV 33 (3 %)… En Amérique du Infections génitales à HPV. Bases fondamentales 9 Nord et en Europe, environ 70 % des cancers du col utérin sont associés aux HPV 16-18 et en Asie du Sud-Est, les HPV 18 sont présents avec une fréquence élevée de 32 % (12). La voie sexuelle représente la voie traditionnelle de transmission (13, 14, 15). Les infections à HPV, exceptionnelles chez les femmes vierges, sont très fréquentes chez les jeunes femmes en période d’activité sexuelle (16, 17, 18). Elles sont majoritaires parmi les infections sexuellement transmissibles. Sept femmes sur 10 rencontreraient l’HPV au moins une fois au cours de leur vie sexuelle. Dans une série d’étudiantes américaines âgées de 18 à 20 ans, il a été montré que l’ADN des HPV est retrouvé dans 28 % de la population, alors que des anticorps anti-herpès et antichlamydiae ne sont retrouvés que chez 3 % des jeunes femmes ; Trichomonas vaginalis a rarement été observé (0,2 % des cas étudiés) (19). Le rôle des HPV dans l’épidémiologie des néoplasies intraépithéliales est l’un des plus fascinants développements de nos connaissances sur les processus de carcinogenèse du col de ces dernières années. Aujourd’hui, nous connaissons avec précision les mécanismes moléculaires par lesquels les HPV agissent dans le développement des néoplasies. Infection à HPV L’infection génitale à HPV est l’une des infections sexuellement transmissibles les plus fréquentes. Alors que les premières études utilisant la PCR dans des conditions non satisfaisantes indiquaient un taux de prévalence de l’infection d’environ 80 %, ainsi que des variations importantes pour les génotypes de HPV chez les femmes saines et celles présentant une pathologie cervicale, les études plus récentes utilisant des PCR plus spécifiques indiquent en fait que moins de 10 % des femmes saines après 35 ans sont porteuses d’HPV. L’exposition aux HPV se produit le plus souvent chez la femme jeune, peu après le début de son activité sexuelle. Le taux d’infection à HPV chez la femme jeune se situe entre 19 et 49 %. La prévalence de l’infection à HPV est fonction de l’âge : le pic de prévalence se situe entre 20 et 25 ans ; cette prévalence diminue ensuite très sensiblement (20, 21, 22) (fig. 4a, b, c et d). Ce pic de prévalence correspond assez bien à celui des atypies cytologiques (koïlocytes) causées par les HPV. Il est par ailleurs démontré que la présence de HPV chez les jeunes femmes est fortement corrélée au nombre de partenaires sexuels (fig. 5) et il est vraisemblable que plus de 50 % des femmes en activité sexuelle sont ou ont été exposées aux HPV. À partir d’un échantillon de 242 jeunes filles âgées de 15 à 19 ans et recrutées au plus tard 6 mois après leur premier rapport, Collins démontre, sur un suivi de 3 ans, que le risque d’exposition à l’HPV après le premier rapport est de 46 %, les HPV à risque sont les plus fréquents (18). Parce que la transmission se fait par contact et non par le sperme ou le sang, le préservatif peut protéger l’homme mais pas la femme d’une éventuelle autotransmission. 10 Infections à papillomavirus Fig 4a - Fréquence de l’infection à HPV et des atypies koïlocytaires selon l’âge. Adapté de 1) Curie et al. Health Behaviour in School-aged Children (HBSC) study : 2001/2002 survey ; 2) Bozon (2003) Population et Sociétés 31 : 3-13. Fig. 4b - Pourcentage de jeunes filles âgées de 15 ans ayant déjà eu un rapport sexuel (2001/2002). Infections génitales à HPV. Bases fondamentales 11 Fig. 4c - Prévalence de l’infection HPV selon l’âge. Adapté de P.W. Melkert (29) Adapté de C.B. Woodman (42) Fig. 4d - Prévalence de l’infection HPV selon l’âge aux Pays-Bas et au Royaume-Uni. Adapté de S. Collins (18) Fig. 5 - Risque cumulé d’infection HPV après le 1er rapport. 12 Infections à papillomavirus La diminution du taux de prévalence avec l’âge reflète l’acquisition d’une immunité aux différents types d’HPV mais peut correspondre à la diminution du nombre de partenaires. Elle suggère qu’une grande proportion des infections à HPV sont transitoires. Toutefois, si l’acquisition d’une immunité naturelle spécifique est responsable de la disparition des virus avec l’âge, nous ne savons pas si cela correspond à une élimination du virus ou simplement à la non-détection par les techniques habituelles d’une faible quantité de virus résiduel. Aussi, la détection de l’ADN des HPV chez la femme après 30 ans reflète souvent la persistance de l’infection qui est souvent corrélée à une forme clinique. De la même façon, l’infection à HPV 16 ou 18 et une charge virale élevée sont significativements corrélées à la présence de lésions plutôt qu’à une forme latente (23, 24). Le suivi au long cours des femmes par typage viral utilisant des méthodes ultrasensibles ne confirme pas toujours la progression de ces cas en CIN. Seules les méthodes détectant les types 16 et 18 et/ou une charge virale élevée permettraient de prédire plus spécifiquement le risque de lésion actuel ou futur. Néoplasies cervicales La majorité des études confirme une augmentation très sensible de l’incidence et de la prévalence des CIN. La moyenne d’âge des femmes porteuses de CIN a diminué, suggérant l’âge précoce de l’acquisition des HPV. Ces observations coïncident avec l’augmentation d’incidence des cas de cancer du col chez les femmes jeunes avant 40 ans dans certains pays (25). Malgré le succès attribué au dépistage cytologique de masse dans la diminution de l’incidence du cancer du col, une augmentation de l’incidence des carcinomes in situ a été observée aux États-Unis chaque année, totalisant 200 % à 300 % d’augmentation depuis ces dernières décades. Par ailleurs, même dans les pays où le dépistage du cancer du col a fait la preuve de son efficacité par la diminution de son incidence, les récentes données rapportées à l’âge ont montré, en particulier en Angleterre et États-Unis, une augmentation des cancers du col chez les femmes jeunes dans les tranches 25-29 ans et 30-34 ans (27) ; cette tendance ne semble pas cependant confirmée ailleurs. L’augmentation d’incidence du cancer du col semble limitée au type de cancer du col qui est le moins bien détecté, à savoir l’adénocarcinome du col. Même dans les pays où le dépistage a fait la preuve de son efficacité, l’incidence de ce cancer n’a pas diminué. Dans les pays développés, son incidence est estimée à 2/100 000 alors que celle du carcinome épidermoïde est en moyenne de 10/100 000 (26). D’autre part, l’augmentation de risque de cancer du col, quel que soit le type de cancer, a été observée lorsque les intervalles du dépistage excédaient deux ans. Les femmes ayant un dépistage triennal ont un risque accru (multiplié par 3,9) de développer un cancer du col comparées aux femmes dépistées tous les ans et ce risque augmente de treize fois pour les femmes dont l’intervalle est de plus de dix ans. Cependant le risque de développer un cancer du col est très faible pour les femmes qui suivent sans discontinuer un calendrier de dépistage très régulier de 20 à 65 ans (1,4/100 000). Infections génitales à HPV. Bases fondamentales 13 Infection à HPV et néoplasies cervicales Dans le monde, deux tiers des cancers du col sont dus aux HPV 16 et 18 (fig. 6). En Europe, près de 70 % des cancers du col sont associés aux HPV 16-18. En Asie du Sud-Est, les HPV 18 sont présents dans près de 32 % des cas alors que, en Amérique du Nord et en Afrique, les HPV 45 sont détectés en moyenne dans 13 % des cancers du col (11, 12). Les deux facteurs de risque traditionnels du cancer du col sont l’âge précoce des premiers rapports et le nombre de partenaires sexuels (30, 31). Le risque diminue graduellement en plateau (fig. 4a, b, c). Cela suggère la vulnérabilité de la zone de transformation du col à un âge précoce. Lors des premiers rapports, cette vulnérabilité tient probablement à l’immaturation de la zone de transformation du col et à la métaplasie malpighienne active chez la jeune femme rendant cette zone sensible à l’exposition d’un agent sexuellement transmissible. On ne peut exclure le rôle des modifications hormonales et leur conséquence sur l’immunité. Toutefois, l’association à l’âge précoce des premiers rapports est plus souvent corrélée au nombre de partenaires sexuels. Cependant un seul partenaire suffit pour être exposé et majorer le risque (fig. 5). L’association entre l’activité sexuelle et le développement des CIN a été rapportée comme directement corrélée au risque de Adapté de N. Munoz (12). Fig. 6 - Distribution mondiale des HPV dans les cancers du col. 14 Infections à papillomavirus l’infection cervicale à HPV chez les femmes jeunes (32, 33, 34). En Europe, 15 à 40 % des femmes de 15 ans sont sexuellement actives (fig. 4b). Le rôle du partenaire masculin influence le risque (35, 36, 37, 38, 39). L’identification des hommes qui ont plus d’une partenaire dans le risque de développement de CIN chez la conjointe suggère un facteur étiologique sexuellement transmis. Aussi l’importance de la vie sexuelle de la femme et de son partenaire, en termes de risque de développement de cancer du col, est-elle aujourd’hui bien comprise comme la conséquence de l’exposition à l’infection aux HPV. De la même façon que l’âge précoce des premiers rapports comme facteur de risque de cancer du col n’est que le reflet de l’acquisition précoce des HPV, le nombre de partenaires sexuels est aussi la traduction de l’exposition répétée aux HPV. Ainsi, l’exposition à un seul partenaire sexuel est associée à la détection de l’ADN des HPV par PCR dans 21 % des cas, l’exposition à 10 partenaires ou plus est significativement corrélée à une augmentation de la détection d’environ 69 %. Malgré la fréquence relative de l’infection à HPV chez la jeune femme, les CIN à cet âge sont relativement rares (fig. 7a, b) (21, 30, 31). Cependant les CIN 3 demeurent fréquentes chez les jeunes, le pic de fréquence est estimé à 4/1 000 entre 25-29 ans (fig. 7b). Ainsi, entre 15 et 25 ans, la fréquence de l’infection à HPV est de 30 % à 35 %, celle des atypies koïlocytaires est d’environ 4 %, celle des CIN 3 est de 1 % et les cancers du col sont pratiquement inexistants. Chez les femmes ayant des frottis normaux, la prévalence de l’infection à HPV diminue avec l’âge. Elle passe ainsi de 30 % entre 15 et 25 ans à 10 % après 30 ans. De la même façon, la prévalence de l’infection à HPV d’après les atypies koïlocytaires observées sur les frottis diminue avec l’âge, passant de 4 % entre 15 et 20 ans à moins de 1 % après 55 ans (fig. 4a, b, c, d). À l’inverse, l’incidence des CIN 3 augmente avec l’âge. On note un pic entre 25 et 29 ans et une diminution par la suite probablement due en partie à un dépistage insuffisant après 30 ans. Ainsi, entre 15 et 20 ans, la prévalence des CIN 3 se situe à 0,01 % pour atteindre entre 25 et 30 ans un taux de 0,1 % et diminuer à environ 0,01 % après 55 ans. De la même façon, l’incidence du cancer du col augmente en plateau jusqu’à 35-39 ans et continue d’augmenter très légèrement après cet âge-là. Dans les pays développés, elle est évaluée à environ 0,1 pour 100 000 entre 15 et 20 ans, 10 pour 100 000 entre 35 et 39 ans et 12 pour 100 000 vers 55 ans (fig. 7a). Autour de la quarantaine, la prévalence de l’infection à HPV est d’environ 10 %, celle des atypies koïlocytaires de 1 %, celle des CIN 3 de 0,1 % et celle du cancer invasif de 0,01 %. À la ménopause, on observe dans certains pays une augmentation de la prévalence de l’infection à HPV qui pourrait s’expliquer par les modifications hormonales et leur conséquence immunitaire, peut-être aussi par l’atrophie et le risque de microtraumatismes accrus favorisant la pénétration des HPV. Le risque de développer un cancer du col durant la vie est estimé à 4 % dans les pays en voie de développement et à 1 % dans les pays développés. Le rapport cancer/infection HPV est estimé à 1 pour 1 000 à 40 ans. Cependant, en l’absence de dépistage, on peut penser que le rapport infection HPV/cancer du Infections génitales à HPV. Bases fondamentales 15 Fig. 7a - Incidence des CIN 3 et du cancer invasif du col selon l’âge. Adapté de R. Peto et C.B. Woodman (42). Fig. 7b - Les lésions de haut-grade surviennent à un âge relativement jeune. 16 Infections à papillomavirus col serait de 10 à 50 fois plus important soit, en termes de relation directe, 1 cancer pour 100 à 20 infections (1-5 %). Tout ceci suggère que la majorité des infections à HPV, en particulier chez la jeune femme, sont transitoires mais que l’impact de l’infection à HPV sur le développement des néoplasies du col est fort. Indicateurs pronostiques de l’infection à HPV à risque Il y a une dizaine d’années des conceptions erronées sur l’infection à HPV ont prévalu à la suite d’études utilisant des tests de détection, en particulier par PCR, très contestables sur leur performance. Ces rares publications ont laissé planer un certain nombre d’idées fausses mais encore présentes dans l’esprit des professionnels. Ainsi, il n’est pas rare de s’entendre observer que l’infection à HPV est très répandue ou ubiquitaire en particulier pour les HPV à risque ou même que les HPV 611 sont communément détectés dans les cancers du col et de fait, le potentiel carcinogène des HPV n’est pas établi. Ces différentes idées fausses dues à des tests inadéquats ont laissé planer le doute sur l’intérêt réel du typage viral en pratique clinique. Une partie seulement des femmes exposées aux HPV, en particulier dans la période de vulnérabilité du col (15-25 ans), ont un risque de développer un cancer du col plus tard en l’absence de dépistage (rapport 1/100 à 1/20). Il apparaît clairement que toutes les femmes ne sont pas biologiquement et immunologiquement égales face à cette infection. Plusieurs facteurs sont considérés comme des indicateurs pronostiques pour le développement synchrone ou métachrone de néoplasies cervicales. Les types viraux, l’âge, la persistance et la charge virale sont parmi les plus importants. Âge Le taux de détection de l’ADN des HPV est fortement lié à l’âge (21, 30, 31, 40, 41, 42) (fig. 8 et 9). Le pic de détection est observé entre 20 et 24 ans et après 35 ans les taux sont de moins de 10 %. Pour les HPV à risque, la détection est marquée par les mêmes fluctuations : moins de 10 % avant 25 ans, moins de 5 % après 35 ans et moins de 2 % après 55 ans. Cela confirme que la majorité des infections à HPV et en particulier les HPV à risque sont transitoires avant 35 ans et la proportion des femmes concernées par cette infection après 35 ans sont celles qui ont une infection persistante par les HPV à risque et pour lesquelles une lésion cervicale actuelle ou future a une forte probabilité d’être détectée. Aussi, avant 35 ans, la prévalence élevée (25 % HPV, 10 % HPV à risque) laisse supposer une valeur prédictive faible du test HPV (évaluée à 20 % seulement) pour détecter une lésion sous-jacente. Après 55 ans, la faible prévalence de l’infection (4 % HPV, 2 % HPV à risque) indique une valeur prédictive du test à détecter une lésion sous-jacente de l’ordre de 90 %. Enfin, entre 35 et 55 ans avec une prévalence de 1’infection très modérée (10 % HPV, 5 % HPV à risque), la valeur prédictive positive est de l’ordre de 70 %, ce qui est tout à fait acceptable pour reconnaître l’intérêt du typage HPV comparé à d’autres tests de détection. Infections génitales à HPV. Bases fondamentales 17 Adapté de L. Ferlay (25). Fig. 8 - Fréquence de l’infection à HPV, des CIN 3 et du cancer invasif selon l’âge. Groupe d’âge Le groupe d’âge est défini sur la base de l’âge à l’inclusion. Adapté de P.E. Castle (49). Fig. 9 - Acquisition des papillomavirus selon les génotypes et l’âge.