La Lettre économique NomoS n°150
ACTUALITES CONCURRENCE
Conseiller des entreprises parties à une entente peut être sanctionné
Dans une décision du 11 novembre 2009, la Commission européenne la Commission ») avait
sanctionné une société de conseil pour sa participation à des ententes et, plus précisément, pour
avoir proposé ses services à des entreprises parties à un cartel. Cette société avait organisé
plusieurs réunions auxquelles elle avait « assisté et participé activement, en collectant et en fournissant aux
entreprises concernées des données sur les ventes des marchés en cause, en proposant d’agir en tant que modérateur
(…) et en encourageant [les entreprises concernées] à dégager des compromis et ce, contre rémunération ».
Un recours en annulation avait été formé par la société de conseil devant le Tribunal de l’Union
européenne (« TUE »). Son recours a été rejeté par le TUE dans un arrêt du 6 février 2014.
Saisie de cette affaire, la Cour de justice de l’Union européenne CJUE ») s’est prononcée dans
un arrêt du 22 octobre 2015 sur la question de savoir si « une entreprise de conseil peut être tenue pour
responsable d’une infraction à l’article 81 (…) lorsque celle-ci contribue activement et en toute connaissance de
cause à la mise en œuvre ou au suivi d’une entente entre producteurs actifs sur un marché distinct de celui sur lequel
ladite entreprise opère ».
Après avoir relevé que rien dans le libellé de ce texte « n’indique que l’interdiction qui y est énoncée vise
uniquement les parties à de tels accords ou pratiques concertées qui sont actives sur les marchés affectés par ceux-
ci », la CJUE fait référence, de manière générale, aux modes passifs de participation à une
infraction aux règles sur les ententes en précisant que cela traduit une complicité de nature à
engager la responsabilité des entreprises. La CJUE insiste ensuite sur l’objectif des règles sur les
ententes qui est d’assurer une concurrence non faussée à l’intérieur du marché.
Elle relève enfin que le comportement de la société de conseil « s’inscrit directement dans les efforts des
producteurs (…) relatifs tant à la négociation qu’au contrôle de l’application des obligations souscrites par ces
derniers dans le cadre des ententes » et qu’il « ne peut être considéré que les interventions de [la société de conseil],
en cette qualité, constituaient de simples services périphériques, sans relation avec les obligations contractées par les
producteurs et les restrictions de concurrence en découlant ». La CJUE en conclut que la responsabilité de la
société du fait de sa participation aux ententes doit être retenue, rejette donc le recours et
confirme l’arrêt du TUE.
Arrêt de la CJUE C-194/14 du 22 octobre 2015
La Lettre économique NomoS n°150
ACTUALITES CONCURRENCE
Avis de l’Adlc sur le passage à la TNT gratuite des chaînes LCI, Paris Première et
Planète +
Saisie par le Conseil supérieur de l’audiovisuel CSA »), l’Autorité de la concurrence Adlc ») a
rendu un avis le 21 octobre 2015 sur l’impact concurrentiel du basculement sur la TNT gratuite
des chaînes LCI, Paris Premières et Planète + et « sur la nécessi de subordonner l’autorisation
d’agrément à des obligations de nature concurrentielle ».
Pour l’Adlc, si le passage de la TNT payante à la TNT gratuite ne constitue qu’ « un simple
changement de modèle d’affaires d’une entreprise déjà existante », il est toutefois susceptible d’emporter
« des effets sur l’équilibre concurrentiel du marché de la publicité télévisuelle et des marchés des droits de diffusion
des contenus » entre lesquels l’Autorité relève une forte interdépendance.
L’impact concurrentiel du passage à la TNT gratuite des chaînes Paris Premières et Planète + est
faible compte tenu de leurs parts sur les marchés concernés. S’agissant de la chaîne LCI et dans la
mesure la commercialisation de ses espaces publicitaires est réalisée par la régie du groupe
TF1, l’Adlc relève la possibilité d’un « effet de levier par pratiques de couplage » et d’un « effet de levier par
une pratique de promotion croisée » sur le marché de la publicité télévisuelle.
En substance, l’Adlc recommande l’interdiction de couplage des espaces publicitaires et de
promotion et publicité croisée entre LCI et le groupe TF1. L’Adlc suggère également au CSA
d’assortir ces mesures d’une clause de rendez-vous dans les 18 mois à 2 ans, afin de permettre
d’en évaluer l’adéquation à l’évolution du secteur audiovisuel.
Avis n°15-A-14 du 21 octobre 2015 relatif à une demande d'avis du Conseil supérieur de
l'audiovisuel sur le fondement de l'article 41-4 de la loi du 30 septembre 1986 sur la demande de
passage sur la plateforme de TNT gratuite des chaînes LCI, Paris Première et Planète +
La Lettre économique NomoS n°150
ACTUALITES CONCURRENCE
Interdiction de revente sur les places de marché en ligne : clôture de l’enquête contre
Adidas
L’Autorité de la concurrence Adlc ») a publié un communiqué le 18 novembre 2015 pour
informer de la clôture d’une enquête ouverte à l’encontre de la société Adidas France.
L’enquête de l’Adlc portait sur les pratiques commerciales d’Adidas dans le cadre de son réseau
de distribution sélective : les contrats de distribution sélective d’Adidas contenaient des
dispositions interdisant à ses distributeurs agréés de commercialiser ses produits sur les places de
marché en ligne.
L’Adlc rappelle sa position selon laquelle « chaque fabricant est libre d’organiser le mode de distribution de
ses produits sous réserve qu’il ne porte pas atteinte à la concurrence ». Toutefois et s’agissant de la vente en
ligne, « les conditions posées par le fabricant à ses distributeurs ne peuvent conduire à freiner de manière injustifiée
le développement de ce type de vente et, en tout état de cause, un fabricant ne peut interdire par principe à un
distributeur agréé de vendre en ligne. »
A l’issue de l’enquête, Adidas a supprimé l’interdiction pour ses revendeurs agréés de recourir aux
places de marché en ligne.
La Lettre économique NomoS n°150
ACTUALITES CONCURRENCE
Sanction d’une pratique de remises fidélisantes par la SNCM
Dans un arrêt du 22 octobre 2015, la Cour d’appel de Paris s’est prononcée sur une pratique de
remises et ristournes mise en place par la Société Nationale Maritime Corse Méditerranée
SNCM »).
La société Rocca Transports (« Rocca »), spécialisée dans le transport des marchandises vers la
Corse, faisait valoir que la SNCM avait mis en place un système de remises et ristournes
discriminatoire et anticoncurrentiel, notamment en ce que ce système aboutissait à « favoriser les
transporteurs routiers s’engageant à augmenter le volume de marchandises confié à la SNCM, en leur faisant
bénéficier de ristournes sur la totalité du volume, alors que d’autres transporteurs qui confieraient pourtant à la
SNCM un volume plus important n’en bénéficieraient pas, au seul motif qu’ils n’augmenteraient pas leur volume
de marchandises confié à la SNCM ». En accordant une prime à l’exclusivité, ce système conduisait
par ailleurs à discriminer « les transporteurs routiers ayant recours aux services de la compagnie concurrente de
la SNCM ».
Dans un jugement du 4 février 2014, le Tribunal de commerce de Marseille avait débouté Rocca
de l’ensemble de ses demandes.
Dans son arrêt du 22 octobre 2015, la Cour d’appel de Paris a considéré, au contraire, que les
ristournes en cause ont eu pour conséquence de favoriser les transporteurs s’engageant à
augmenter leur volume « alors même que des transporteurs confiant un volume plus important en étaient
exclus, et de léser les transporteurs ayant déjà acquis une certaine taille et étant déjà en relations avec la SNCM ».
En conséquence, la SNCM, qui dispose d’une position dominante sur le marché des liaisons
maritimes entre Marseille et la Corse, a abusé de cette position et de la situation de pendance
économique dans laquelle se trouvait Rocca, selon la Cour.
S’agissant par ailleurs du préjudice de Rocca, la Cour d’appel a estimé que « celle-ci a été désavantagée
sur le plan, concurrentiel en ayant des coûts supérieurs et qu’elle a ainsi perdu une chance de conquérir de nouveaux
clients » et a évalué le montant de son préjudice à 50 000 euros.
Cour d'Appel de Paris, 22 octobre 2015, n°14/03665.
Autorité de la concurrence, Communiqué de presse, 18 novembre 2015
La Lettre économique NomoS n°150
[CONTRATS / DISTRIBUTION]
La connaissance de l'action du ministre est réservée aux juridictions françaises
Le Tribunal de commerce de Paris a été saisi par le ministre de l’économie de la validité de
différentes dispositions du contrat-type proposé par la société de droit néerlandais Booking.com
BV aux hôteliers français, au regard de l’article L.442-6 du Code de commerce, et plus
précisément de la prohibition du déséquilibre significatif et des clauses de parité tarifaire. Bien
que le contrat-type soit soumis au droit néerlandais et comporte une clause attributive de
compétence aux juridictions d’Amsterdam, le Tribunal a, par un jugement du 24 mars 2015,
retenu sa compétence et estimé que les dispositions litigieuses devraient s’apprécier au regard du
droit français.
Saisie d’un contredit, la Cour d’appel de Paris a confirmé par arrêt du 15 septembre 2015 l’analyse
et la solution retenues par le Tribunal sur la compétence.
Elle relève ainsi que l’action ouverte au ministre par l’article L.442-6-III du Code de commerce
lui est attribuée dans le cadre de sa mission de gardien de l’ordre public économique, qu’elle vise à
la protection du marché et de la concurrence, et qu’il s’agit d’une action autonome de celle des
contractants lésés, distincte du fait de son objet de défense de l’intérêt général.
Elle en déduit que la connaissance de cette action est, au regard de sa nature et de son objet,
réservée aux juridictions françaises, le fait que le siège de la société Booking.com soit situé aux
Pays-Bas et que le fait dommageable serait intervenu audit siège étant indifférent.
La Cour renvoie donc les parties devant le Tribunal afin qu’il soit statué sur le fond.
TC Paris, 24 mars 2015, RG n° 2014027403 [lien vers pdf]
CA Paris, 15 septembre 2015, RG n° 15/07435 [lien vers pdf]
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