I. Couret
Médecine Nucléaire - Imagerie fonctionnelle et métabolique - 2004 - vol.28 - n°2 57
Résumé
Le squelette adulte se renouvelle en permanence, de l’ordre de dix pour cent par an, dans
des unités cellulaires de base où agissent les ostéoclastes et les ostéoblastes. Ce remodelage os-
seux, est nécessaire au maintien de l’homéostasie calcique, à la conservation des propriétés méca-
niques de l’os et à la cicatrisation des fractures. Les grandes étapes du remodelage osseux sont
caractérisées par l’engagement, la prolifération et la différenciation de cellules souches
pluripotentes. Les ostéoclastes proviennent de cellules hématopoïétiques dont la différenciation
est sous la dépendance des cellules précurseurs ostéoblastiques du stroma médullaire. Ce sont des
cellules multinuclées géantes capables de détruire de grandes quantités de la matrice extracellulaire
osseuse et d’en dissoudre la partie minérale. Les ostéoblastes ont pour origine des cellules
mésenchymateuses du stroma médullaire. Les ostéoblastes différenciés produisent la matrice
extracellulaire osseuse et la minéralisent. Ils se caractérisent par la synthèse de collagène de type
I, de protéines non collagèniques, de facteurs locaux et par l’expression de la phosphatase alca-
line osseuse. A la fin de la phase de formation, une partie des ostéoblastes meurent par apoptose,
l’autre partie des ostéoblastes devient des cellules bordantes ou des ostéocytes inclus dans l’os.
L’équilibre entre destruction et formation de l’os est régulé par un réseau complexe d’interactions
entre les cellules osseuses, les hormones systémiques (hormone parathyroïde, vitamine D, calcito-
nine), et les facteurs de croissance et les cytokines du microenvironnement local. Le système RANK-
L, RANK, OPG, identifié comme le médiateur ultime contrôlant les ostéoclastes représente une
avancée majeure dans la compréhension de la biologie du remodelage osseux.
Remodelage Osseux / Ostéoclastes / Ostéoblastes / Hormones systémiques / Facteurs de croissance /
Cytokines / RANK-L, RANK, OPG
Correspondance : Isabelle Couret
Service de Médecine Nucléaire - Hôpital Lapeyronie - Avenue du Doyen Giraud - 34295 Montpellier Cedex 5
Tél. : 04 67 33 84 23 (secret : 04 67 33 97 15) - E-mail : i-couret@chu-montpellier.fr
BiologBiolog
BiologBiolog
Biologie du rie du r
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e osseux
Isabelle Couret Service de Médecine Nucléaire - Hôpital Lapeyronie - CHU
- Montpellier -
Biologie du remodelage osseux
58 Médecine Nucléaire - Imagerie fonctionnelle et métabolique - 2004 - vol.28 - n°2
INTRODUCTION
!L’os adulte se renouvelle en perma-
nence, de l’os ancien est détruit et
remplacé par de l’os neuf dans des
unités multicellulaires régulées dans
le temps et l’espace. Ce processus de
remodelage osseux est nécessaire au
maintien de l’homéostasie calcique
et à la conservation de l’intégrité du
squelette. Les ostéoclastes et les os-
téoblastes doivent se différencier, agir,
et entrer en apoptose de façon exac-
tement concertée pour maintenir
l’équilibre entre destruction et forma-
tion. Le remodelage osseux est or-
chestré par ces deux types cellulai-
res, des facteurs locaux du
microenvironnement, cytokines et
facteurs de croissance, et des hormo-
nes systémiques dans un réseau com-
plexe d’interactions. Le système
RANK-L, RANK, Ostéoprotégérine re-
présente le facteur ultime de régula-
tion des ostéoclastes.
STRUCTURE DE L’OS
!L’os est un tissu complexe qui pos-
sède trois principales fonctions :
1) la formation du squelette et le main-
tien de son intégrité, 2) être une ré-
serve de calcium et 3) servir de con-
tenant à la moëlle osseuse. L’os adulte
est principalement de deux types :
l’os cortical compact et l’os spon-
gieux ou trabéculaire. L’os cortical,
situé essentiellement dans les os
longs, est constitué d’ostéones. Un
ostéone est formé par des lames os-
seuses concentriques disposées
autour d’un canal haversien par où
passent des capillaires sanguins et
des filets nerveux. Ces canaux
haversiens sont reliés entre eux, avec
la surface de l’os et avec la moëlle
osseuse par des canaux transversaux
ou obliques. Chaque ostéone est ali-
gné parallèlement à l’axe de la
diaphyse avec un trajet légèrement
hélicoïdal. Entre les ostéones, se trou-
vent des lamelles osseuses provenant
d’ostéones plus anciens résorbés. L’os
spongieux est formé d’un réseau en
trois dimensions de trabécules de
tissu osseux, ramifiées et anastomo-
sées. C’est dans ce réseau que prend
place la moëlle osseuse et des vais-
seaux.
L’os est une matrice extracellulaire
hautement spécialisée et étroitement
associée à une substance minérale
solide. La partie organique de la ma-
trice extracellulaire osseuse est cons-
tituée principalement de fibres de
collagène de type I mais aussi de
protéines non collagéniques:
l’ostéocalcine, l’ostéonectine, la
thrombospondine, la fibronectine, la
vitronectine l’ostéopontine et de
protéoglycanes. Des cytokines et des
facteurs de croissance sont aussi con-
tenus dans la matrice extacellulaire
osseuse. Le collagène de type I est
formé par des triples hélices de mo-
lécules de collagène qui se lient
entre elles pour donner des
microfibrilles qui se regroupent en
faisceaux pour donner les fibres de
collagène I. La partie minérale de la
matrice extracellulaire osseuse est
constituée de cristaux d’hydroxy-
apatite : Ca10(PO4)6 (OH)2. La minéra-
lisation débute à partir des fibres de
collagène [1].
LE REMODELAGE OSSEUX
!Le tissu osseux doit permettre la
formation adaptée du squelette du-
rant la croissance, la conservation de
ses propriétés mécaniques et leur
adaptation aux contraintes, la répara-
tion des fractures et la mise à dispo-
sition du calcium qu’il stocke. Pour
assurer ces propriétés, l’os est en per-
pétuel renouvellement : le remode-
lage osseux. Au cours du remodelage
osseux, l’os ancien est détruit ou ré-
sorbé par les ostéoclastes et remplacé
par de l’os nouveaux par les ostéo-
blastes [1]. A l’âge adulte, c’est l’équi-
libre entre ces deux processus qui
permet le maintien de l’intégrité de
la masse osseuse et le maintien de
l’homéostasie calcique. Par an, dix
pour cent de l’os du squelette adulte
est renouvelé. Le remodelage a lieu
dans une structure définie appelée
unité multicellulaire de base (BMU)
qui a pour dimensions 1 à 2 mm de
long et 0,2 à 0,4mm de large. Chez
l’adulte, à tout moment, environ un
million de BMUs sont actives. Dans
l’os cortical, les BMUs progressent à
la façon d’un tunnellier creusant l’os
en front et resynthétisant de l’os neuf
à l’arrière [2]. Dans l’os trabéculaire,
les BMUs traversent de part en part
l’os et forment une tranche neuve.
Les acteurs principaux du remode-
lage osseux, les ostéoclastes et les
ostéoblastes, agissent de façon exac-
tement orchestrée dans l’espace et
dans le temps. La durée de vie d’une
BMU est de 6 à 9 mois, période du-
rant laquelle les ostéoclastes et les
ostéoblastes doivent être recrutés en
permanence. Le cycle débute par l’ac-
tivation des précurseurs des
ostéoclastes et leur différenciation.
Ceux-ci détruisent la matrice osseuse
puis entrent en apoptose. Parallèle-
ment les précurseurs ostéoblastiques
sont activés et les ostéoblastes se dif-
férencient [1]. Ils synthétisent, en ar-
rière du front des ostéoclastes, l’os
neuf et remplissent d’abord la cavité
de matrice extracellulaire organique,
la matrice ostéoïde, qui ensuite se
minéralise. Une partie des ostéoblas-
tes meurt par apoptose ; l’autre par-
tie devient des ostéocytes inclus dans
la matrice osseuse et des cellules
bordantes qui recouvrent la surface
de l’os à l’état quiéscent.
LES CELLULES OSSEUSES
!Les ostéoblastes et les ostéoclastes,
sont originaires de la moëlle osseuse.
L’activation de leurs précurseurs, leur
différenciation et leur recrutement
sont contrôlés par des processus
complexes où interviennent des fac-
teurs de croissance, des cytokines, les
interactions de cellule à cellule, les
interactions entre cellules et matrice
extracellulaire mais aussi des hormo-
nes systémiques.
Les ostéoclastes
!Les précurseurs des ostéoclastes
sont des cellules souches hémato-
poïétiques de la lignée monocyte/
I. Couret
Médecine Nucléaire - Imagerie fonctionnelle et métabolique - 2004 - vol.28 - n°2 59
macrophage avec le CFU-GM (granu-
locyte and macrophages colony-
forming cells) comme premier pré-
curseur identifié. La différenciation
des précurseurs en ostéoclastes est
initiée puis reste sous le contrôle des
cellules préostéoblastiques du stro-
ma médullaire. Les préostéoblastes sti-
mulent la différentiation et la prolifé-
ration des ostéoclastes par des con-
tacts de cellule à cellule et en sécré-
tant du M-CSF (macrophage colony-
stimulating factor) et du RANK-L [3].
D’autres facteurs interviennent sur la
différenciation des ostéoclastes : des
cytokines, des hormones systémiques
ou des facteurs de croissance. Les
préostéoclastes fusionnent pour don-
ner les ostéoclastes qui parviennent
sur le site de la BMU par la circula-
tion. Les ostéoclastes matures sont
des cellules géantes multinucléées de
50 à 100 µm de diamètre, avec de
nombreux lysosomes, et qui contien-
nent de grandes quantités de
phosphatase acide tartrate résistante.
La morphologie des ostéoclastes se
caractérise par une bordure en brosse
formée par des extensions "en doigts"
de la membrane cytoplasmique. La
fonction de la bordure en brosse est
la destruction de l’os. Elle est entou-
rée par "la zone claire", zone de la
membrane par où l’ostéoclaste se
scelle étroitement par des intégrines
aux protéines de la matrice osseuse
(fibronectine, ostéopontine, collagène
I, sialoprotéine). Cet ancrage de la
zone claire sur la surface osseuse
délimite un micro-environnement
nécessaire à la résorption. La partie
minérale de l’os est dissoute par des
ions H+ sécrétés par des pompes H+-
ATPase situées au niveau de la bor-
dure en brosse. La partie organique
de la matrice extracellulaire est dé-
gradée par des phosphatases acides,
des métalloprotéinases et des cathep-
sines [4]. La durée de vie des ostéo-
clastes est de 15 jours en moyenne,
ils meurent ensuite par apoptose.
Les ostéoblastes
!Les précurseurs des ostéoblastes
proviennent majoritairement de cel-
lules souches mésenchymateuses du
stroma médullaire. Les précurseurs
ostéoblastiques du stroma médullaire,
ou cellules ostéoprogénitrices, pro-
viennent de la prolifération de clo-
nes de cellules pluripotentes qui peu-
vent se différencier, en adipocytes, en
chondrocytes ou en myoblastes, se-
lon l’expression de facteurs de trans-
cription spécifiques. L’ostéogénèse
débute par la prolifération des cellu-
les ostéoprogénitrices [5]. Après ar-
rêt de la multiplication cellulaire la
différentiation en ostéoblastes est
conduite par des processus comple-
xes orchestrés par des interactions
entre cellules, entre cellules et ma-
trice, et par des facteurs hormonaux
ou locaux. Les préostéoblastes par-
viennent à la matrice osseuse par
migration.
Tout au long de leur maturation, les
ostéoblastes expriment progressive-
ment les gênes de la cellule fonction-
nelle différenciée [6]. La fonction des
ostéoblastes est de synthétiser la
matrice osseuse et d’en contrôler la
minéralisation. La principale molécule
synthétisée est le collagène de type I.
Cette protéine est d’abord sécrétée
sous forme d’un précurseur, le
procollagène, qui possède des pepti-
des d’extension N et C-terminaux cli-
vés par protéolyse dans le milieu
extracellulaire. Les molécules de col-
lagène de type I forment des triples
hélices qui liées entre elles par des
ponts pyridinolines s’assemblent en
fibrilles. Ces fibrilles s’agencent en
faisceaux. De nombreuses autres pro-
téines incluses dans la matrice os-
seuse sont synthétisées par les ostéo-
blastes : l’ostéocalcine et l’ostéopon-
tine qui représentent 50 % des pro-
téines non collagéniques de l’os, des
molécules d’adhésion qui interagis-
sent avec les intégrines, des protéo-
glycanes et des facteurs de croissance.
Les ostéoblastes sécrètent d’abord la
matrice organique, ou matrice
ostéoïde, structurée par les fibres de
collagène où les protéines non
collagéniques sont intriquées. Les
ostéoblastes matures contrôlent en-
suite la minéralisation de la matrice
par dépôts de cristaux d’hydroxy-
apatite en régulant les concentrations
locales en calcium et en phosphate
[7]. Le calcium et les phosphates du
milieu extracellulaire sont transférés
au site de minéralisation par transport
actif ou passif dans l’ostéoblaste [6].
Il est probable aussi que la minérali-
sation soit gouvernée par les fibres
de macromolécules de la matrice os-
seuse puisque des protéines comme
l’ostéopontine, la sialoprotéine os-
seuse et l’ostéonectine possèdent des
sites de liaison au calcium [2]. Les os-
téoblastes expriment de grandes
quantités de phosphatase alcaline
osseuse qui est un facteur important
pour la minéralisation. Une défi-
cience génétique en phosphatase al-
caline chez la souris induit, en effet,
un défaut de minéralisation osseuse
[8]. Le volume de l’os est déterminé
uniquement par la sécrétion de la
matrice ostéoïde et la densité os-
seuse par la minéralisation.
Les ostéocytes
!Certains ostéoblastes, qui ne meu-
rent pas par apoptose, se transforment
en ostéocytes. Ces cellules sont in-
cluses dans la matrice osseuse et re-
liées entre elles et avec les cellules
de la surface osseuse par des exten-
sions de la membrane cytoplasmique.
Les ostéocytes sont les cellules les
plus abondantes de l’os, espacées ré-
gulièrement dans la matrice en for-
mant un réseau de communication.
Ce sont des cellules sensibles aux
stimulus mécaniques qui détectent le
besoin d’une augmentation ou d’une
diminution de la formation osseuse
dans le processus d’adaptation fonc-
tionnelle ou en cas de micro fractu-
res [2].
Les cellules bordantes
!Une autre partie des ostéoblastes
qui ont accompli leur fonction
d’ostéogénèse se transforme en cel-
lules bordantes. Ce sont des cellules
plates et allongées qui se trouvent à
la surface de l’os à l’état quiescent.
Les cellules bordantes sont alignées
sur une couche de matrice osseuse
non minéralisée. Il a été proposé l’hy-
Biologie du remodelage osseux
60 Médecine Nucléaire - Imagerie fonctionnelle et métabolique - 2004 - vol.28 - n°2
pothèse que ce sont les cellules
bordantes qui envoient un signal aux
préostéoclastes pour leur localisation
dans l’os. Les cellules bordantes agis-
sant sur un signal des ostéocytes, se-
raient capables de déterminer le be-
soin de remodelage en un lieu et un
temps spécifiques [2,9].
RÉGULATION DU REMODELAGE
OSSEUX
Les hormones systémiques
Vitamine DVitamine D
Vitamine DVitamine D
Vitamine D
La vitamine D a deux sources : sous
la forme Vitamine D3, elle est formée
à partir de l’action des UV (270 – 300
nm) sur le 7-dehydrocholesterol de
la peau ; l’autre source de Vitamine
D est alimentaire sous la forme de
vitamine D2. La vitamine D2 se diffé-
rencie de la vitamine D3 par un reste
méthyl en position 24. Les deux for-
mes ont des devenirs biologiques
quasiment identiques. La vitamine D
reste peu circulante, elle est rapide-
ment stockée dans les tissus adipeux
(réserve mobilisable pendant plu-
sieurs mois) ou est métabolisée. La
métabolisation de la vitamine D s’ef-
fectue en deux étapes. Tout d’abord
dans le foie où elle subit une
hydroxylation en position 25 par une
25 hydroxylase. Ce métabolite, 25-
hydroxy vitamine D (25-(OH)D) est
présent dans la circulation sanguine
lié à 99 % à la DBP (D binding protein).
Dans le rein, la 25-(OH)D est
hydroxylée en position 1a par une 1a
hydroxylase pour donner le métabo-
lite actif : la 1a, 25-dihydroxy vitamine
D (1,25-(OH)2D). Le complexe DBP-
25-(OH)D est filtré au niveau
glomérulaire puis réabsorbé au ni-
veau des tubules rénaux pour mettre
à disposition la 25-(OH)D comme
substrat pour la 1a hydroxylase. La
DBP est indispensable à ce proces-
sus de métabolisation rénale, ainsi des
souris déficientes en DBP meurent
par insuffisance en vitamine. D’autre
part, la liaison à la DBP de la 25-(OH)D
la protège d’une dégradation hépati-
que et constitue une forme de réserve
en 25-(OH)D (10). Les taux de 1,25-
(OH)2D sont maintenus stables par le
contrôle de l’activité 1a hydroxylase.
La PTH régule étroitement la 1a
hydroxylase en induisant son expres-
sion par la voie AMPc/ phosphatidy-
nilinositol 4,5 biphosphonate. Et un
rétrocontrole négatif du taux de 1,25-
(OH)2 D s’exerce sur la 1a hydroxy-
lase, inactivée lorsque ce taux s’élève.
Le catabolisme de la 1,25-(OH)2D se
fait par une 24 hydroxylase qui donne
les métabolites : 24,25-(OH)2D ou
1,24,25-(OH)3D, éliminés après
métabolisation et dégradation. Ce ca-
tabolisme est aussi régulé par la 1,25-
(OH)2 D qui active la 24 hydroxylase
lorsque son taux s’élève [11,12].
La 1,25-(OH)2D est une hormone im-
pliquée dans l’homéostasie du cal-
cium et du phosphate et le maintien
de l’intégrité du squelette. La princi-
pale action de la 1,25-(OH)2D est de
stimuler l’absorption intestinale du
calcium et du phosphate. Au niveau
de l’os, la 1,25-(OH)2D active la diffé-
renciation et la maturation des ostéo-
blastes, en présence de PTH. A doses
physiologiques, l’effet est anabolique
et les ostéoblastes sécrètent la ma-
trice osseuse. A doses plus importan-
tes, l’effet est inverse : les ostéoblas-
tes activent la différenciation et la
prolifération des ostéoclastes qui
vont détruire l’os et permettre la
mobilisation du calcium [13]. La 1,25-
(OH)2D régule aussi l’homéostasie
calcique par son action sur la para-
thyroïde : elle exerce un effet
suppressif sur la prolifération des
cellules de la parathyroïde et sur leur
sécrétion de PTH [11].
La 1,25-(OH)2D agit par l’intermé-
diaire du vitamin D receptor (VDR)
qui est un récepteur nucléaire. Ce
récepteur est ubiquitaire, ce qui sug-
gère que la 1,25-(OH)2D joue un rôle
dans de nombreux processus physio-
logiques. Mais le VDR est surtout pré-
sent en forte concentration au niveau
des reins, du tissu osseux, de l’intes-
tin et des parathyroïdes. Des travaux
ont montré que des souris déficien-
tes en VDR mais largement supplé-
mentées en calcium et en phosphore
dans leur alimentation ont un déve-
loppement normal de leur squelette.
Il existerait donc des mécanismes
compensatoires à l’action de la 1,25-
(OH)2D sur les ostéoblastes [12].
ParathormoneParathormone
ParathormoneParathormone
Parathormone
La parathormone (PTH), sécrétée par
les parathyroïdes, régule la calcémie
et le métabolisme osseux. La forme
active de la PTH est un peptide de 84
acides aminés dont le fragment N-ter-
minal (1-34) est porteur de l’activité
biologique. Les six premiers acides
aminés, et surtout les deux premiers
résidus sont indispensables à l’acti-
vité biologique de la PTH [14]. L’hor-
mone se lie par son extrémité N-ter-
minale à son récepteur : le récepteur
de la parathormone de type I, présent
sur ses cellules cibles et active la voie
de l’adénylate cyclase, et les protéi-
nes kinases A (PKA) et C (PKC) [15].
Le rôle principal de la PTH est de
maintenir l’homéostasie du calcium
en mobilisant le calcium osseux et
augmentant son absorption. Son ac-
tion s’exerce sur les os, les reins et
indirectement sur l’intestin. La sécré-
tion de la PTH est étroitement régu-
lée par la concentration sérique en
calcium ionisé qui agit sur un récep-
teur transmembranaire "sensible au
calcium" des cellules des parathyroï-
des. Une diminution de la calcémie
provoque la sécrétion de PTH(1-84)
en quelques secondes ; et inverse-
ment, en cas d’augmentation de la
calcémie, la sécrétion de PTH est ra-
pidement freinée. Il existe une régu-
lation plus lente des parathyroïdes,
sur plusieurs heures, par le métabo-
lite actif de la vitamine D (1,25-
dihydroxyvitamine D) qui diminue le
taux de mRNA de la PTH exprimé par
les cellules parathyroïdiennes. A l’in-
verse, l’hypocalcémie prolongée aug-
mente l’expression du mRNA de la
PTH [16]. La PTH (1-84) sécrétée est
rapidement dégradée sous forme de
nombreux fragments dans les glan-
des parathyroïdes et le foie avec une
demi-vie sérique de l’ordre de quel-
ques minutes. Les produits de dégra-
dation sont éliminés par voie rénale ;
le principal fragment, PTH-(7-84), s’ac-
cumule en large quantité chez l’in-
suffisant rénal [17].
Au niveau des reins la PTH a une tri-
ple action pour réguler la calcémie:
I. Couret
Médecine Nucléaire - Imagerie fonctionnelle et métabolique - 2004 - vol.28 - n°2 61
1) elle augmente la réabsorption du
calcium filtré ; 2) elle augmente l’ex-
crétion du phosphate ; 3) elle active,
au niveau du tubule proximal, la 1a-
hydroxylase qui transforme la vita-
mine D en son métabolite actif : 1,25-
(OH)2 D.
Sur l’os la PTH augmente la résorp-
tion osseuse par la stimulation de la
différenciation des ostéoclastes et de
leur prolifération. Dans ce processus,
la PTH agit sur les cellules
préostéoblastiques du stroma médul-
laire qui vont exprimer les facteurs
locaux de différenciation des
ostéoclastes [18]. Mais la PTH a aussi
un effet anabolique sur l’os en stimu-
lant la prolifération des ostéoblastes.
Cet effet résulte d’une triple action
de la PTH sur les ostéoblastes : 1) la
conversion des cellules bordantes en
ostéoblastes, 2) la stimulation l’ex-
pression par les ostéoblastes matures
de facteurs de croissance (IGF1 et
FGF) et 3) l’inhibition de leur
apoptose [19]. L’action de la PTH sur
l’os diffère selon son mode d’admi-
nistration. L’augmentation de la ré-
sorption s’observe in-vitro et chez
l’animal lors de la perfusion en con-
tinu de PTH-(1-34). Par contre, l’ex-
position intermittente d’ostéoblastes
à la PTH-(1-34) augmente leur diffé-
renciation (20). Chez l’homme, le trai-
tement par injection journalière de
PTH-(1-84), pendant 12 mois, aug-
mente significativement la densité
minérale osseuse du rachis [21].
CalcitonineCalcitonine
CalcitonineCalcitonine
Calcitonine
La calcitonine sécrétée par les cellu-
les C de la thyroïde est un peptide
de 32 acides aminés. C’est l’une des
rares hormones qui agit directement
sur les ostéoclastes. La calcitonine a
une action anti-résorption en inhibant
la fonctionnalité des ostéoclastes et
en accélérant leur apoptose. Cepen-
dant, le rôle physiologique exact de
cette hormone demeure mal connu
[2]. Avec la calcitonine, la résorption
est inhibée aussi par la prostaglandine
E2 qui possède des récepteurs sur les
ostéoclastes.
EstrogènesEstrogènes
EstrogènesEstrogènes
Estrogènes
Les estrogènes sont avant tout des
inhibiteurs de la résorption osseuse.
Chez la femme en post ménopause,
la perte de masse osseuse par défi-
cience en estrogènes ne serait pas due
à des altérations de la régulation de
la calcémie par la PTH et la 1,25-
(OH)2D mais à un défaut de régula-
tion de la balance entre formation et
perte osseuse. Les ostéoclastes et les
ostéoblastes ont des récepteurs
estrogéniques. Le mécanisme qui
semble le plus important est l’inhibi-
tion de la synthèse par les ostéoblas-
tes de cytokines impliquées dans l’ac-
tivation des ostéoclastes (interleu-
kine-1 et interleukine-6 et tumor
necrosis factor [22,23].
Facteurs de croissance et cytokines
!Les facteurs de croissance et les cy-
tokines sont des facteurs locaux dont
l’action à lieu sur les cellules
mésenchymateuses du stroma mé-
dullaire et les précurseurs ostéo-
blastiques et au niveau du micro-en-
vironnement osseux. Les cellules de
la lignée ostéoblastique sécrètent de
nombreux facteurs de croissance.
Certains sont incorporés dans la ma-
trice osseuse qui sert ainsi de réser-
voir où les facteurs de croissance sont
protégés de la protéolyse enzymati-
que par leur liaison aux protéo-
glycanes. Ces facteurs de croissance
indispensables à la différenciation et
la survie des cellules osseuses vont
activer l’expression par les ostéoblas-
tes de plusieurs cytokines. Parmi les
facteurs de croissance les BMPs
(bone morphogenic proteins) ont
des propriétés ostéoinductives in-
vivo. Les BMPs (BMP-2 à -7) appartien-
nent à la famille des polypeptides
TGFb (transforming growth factor b)
et sont directement impliquées dans
le développement embryonnaire et
la cicatrisation des fractures osseuses
[24]. Les BMPs, en particulier BMP-2,
ont pour fonction d’induire la diffé-
renciation des ostéoblastes, ce qui
provoque l’accroissement du nom-
bre d’ostéoblastes matures et l’aug-
mentation de leur fonctionnalité.
Dans l’os, l’une des plus importantes
BMPs est la BMP-2 qui active un fac-
teur de transcription spécifique des
ostéoblastes : le Cbfa1. Ce facteur
Cbfa1 va alors activer des gênes spé-
cifiques responsables de l’expression
de protéines spécifiques de la ma-
trice osseuse telles que l’ostéo-
nectine, le collagène de type I,
l’ostéopontine et la sialoprotéine os-
seuse. La BMP-4 induit l’expression
des gênes de l’ostéocalcine de la
phosphatase alcaline et de la minéra-
lisation en activant le facteur de trans-
cription Dlx5 [2-24]. D’autres facteurs
de croissance tels que le fibroblast
growth factor (FGF), les insulin
growth factor (IGF), le transforming
growth factor (TGFb), le platelet-
derived factor (PDGF) stimulent aussi
la différenciation et la prolifération
des ostéoblastes. Les plus étudiés, les
IGFs sont stockés en grande quantité
dans la matrice osseuse. Les IGF-I et -
II stimulent la prolifération des ostéo-
blastes et augmentent leur synthèse
de collagène de type I. La teneur en
IGF-I et IGF-II de l’os cortical dimi-
nue avec l’âge sans lien avec la perte
osseuse. Par contre, les concentra-
tions locales en IGF-I et –II sont
corrélées avec le nombre d’unités
osseuses en remodelage et l’augmen-
tation du remodelage osseux [25]. Les
effets des IGFs sur les ostéoblastes
sont modulés par des protéines por-
teuses (IGF-BPs) synthétisées par les
ostéoblastes. IGF-BP5 qui lie princi-
palement les IGFs dans l’os, stimule
l’action d’IGF sur les ostéoblastes, au
contraire, IGF-BP4 bloque l’action
d’IGF [2]. La production des facteurs
de croissance par les ostéoblastes est
régulée par les hormones systémi-
ques. Ainsi, la PTH et les estrogènes
stimulent la production d’IGF-I et de
TGFb. Les facteurs de croissance qui
sont présents aussi dans la matrice
osseuse, en réserve, pourraient être
des facteurs de couplage entre des-
truction et formation osseuse. Parmi
les nombreuses cytokines, celles qui
activent la protéine transmembranaire
gp130, ont une action déterminante
sur les cellules osseuses. Les interleu-
kines 6 (IL-6) et -11 (IL-11) se lient à
gp130 et à une sous unité de leur ré-
cepteur pour activer leur signal. IL-6,
IL-11 et gp130 sont exprimés par les
cellules de la lignée ostéoblastique.
Les ostéoclastes expriment aussi
gp130 et les sous unités spécifiques
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