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Le risque d’exposition traumatique serait renforcé
par certaines caractéristiques des sujets vieillissants :
perte d’autonomie à l’origine de plus grandes difficul-
tés à évacuer leur domicile en cas de catastrophe natu-
relle, plus grande résistance à quitter un lieu de vie
particulièrement investi et moindre accès aux informa-
tions d’évacuation [13]. Si l’on prend l’exemple du
tremblement de terre de Kobe en 1996, les personnes
de plus de 60 ans ont présenté de plus importantes
difficultés d’évacuation et une plus grande précarité
que le reste de la population exposée à cette catastro-
phe [16]. Selon Santé Canada, certaines variables ren-
dent le sujet âgé plus vulnérable lors d’une catastro-
phe : âge supérieur à 75 ans, perte d’autonomie, décès
récent d’un proche, hospitalisation ou déménagement
récent, confusion ou incontinence, isolement, per-
sonne vivant dans un lieu à forte concentration de
personnes âgées [13].
Évidemment, les conséquences de ce type d’événe-
ments ne se limitent pas à l’ESPT et l’on retrouve,
pêle-mêle, une baisse durable de la qualité de vie, une
détresse psychique (trouble du sommeil, asthénie,
troubles cognitifs, anxiété, dépression), une plus mau-
vaise perception de leur état de santé conduisant à une
surconsommation médicamenteuse ou encore une
perturbation importante de la vie sociale de ces sujets
âgés [13]. Tous ces facteurs associés sont d’ailleurs
susceptibles de favoriser la résurgence traumatique et
ne doivent en aucun cas être négligés.
D’autres événements négatifs comme la mal-
traitance, des situations de négligence ou les vols à la
tire semblent avoir vu leur fréquence augmenter ces
dernières années chez les sujets âgés [17]. Ces situa-
tions, particulièrement bouleversantes dans cette tran-
che d’âge, peuvent être assimilées à un traumatisme
psychique comme tend à le montrer l’étude de Simp-
son et al. [18] qui a constaté que, sur un groupe de
sujets âgés victimes d’actes de délinquance (crime, vol,
agression, cambriolage) qui avait été pris en charge
dans un service de psychiatrie, 5 % présentaient un
authentique ESPT. Une chute ou certaines pathologies
organiques menaçant directement le pronostic vital
(infarctus, AVC, œdème aigu du poumon...), peuvent
également conduire à un ESPT chez les sujets
âgés [19].
Il ne fait donc aucun doute qu’une expérience trau-
matique extrême puisse être à l’origine d’un ESPT, quel
que soit l’âge de survenue, les personnes âgées étant
susceptibles d’être exposées à l’ensemble des situa-
tions traumatiques décrites chez l’adulte. Le risque
d’être confronté à ce type d’événements potentielle-
ment traumatiques serait même majoré dans cette
tranche d’âge du fait que certains événements de vie
deviennent traumatogènes chez ces sujets fragilisés, et
que les conséquences du vieillissement sont elles-
mêmes susceptibles d’accroître ce risque.
Traumatismes psychiques anciens
chez un sujet âgé présentant un ESPT
Les premières descriptions de l’ESPT étaient basées
sur des traumatismes de guerre [20]. Ainsi, de nom-
breux auteurs se sont intéressés aux hommes exposés
à des situations extrêmes : combattants, prisonniers de
guerre, soldats victimes de tortures et, paradigme de
l’horreur, les rescapés de camps de concentration. Il est
donc naturel que l’on s’intéresse aujourd’hui au deve-
nir de tous ces sujets jadis exposés à une situation de
guerre [12].
La majorité des vétérans de la Seconde Guerre
mondiale considère, plus de 40 ans après la fin de la
guerre, que celle-ci représente l’expérience la plus
stressante de leur vie. L’existence d’un ESPT chez ces
vétérans ou chez ceux de la guerre de Corée a été
confirmée par plusieurs travaux [21-24]. Un quart de
ces anciens combattants présenterait un ESPT près de
quarante-cinq ans après l’issue du conflit [19]. Aux
États-Unis, depuis que ces vétérans souffrant de
séquelles psychiques et particulièrement d’ESPT sont
susceptibles de bénéficier d’aides financières, un nom-
bre croissant d’entre eux se présentent pour une prise
en charge psychiatrique [25]. Il se pourrait que nous
soyons confrontés également à des difficultés de ce
type en France.
Chez d’anciens prisonniers de guerre âgés, les taux
d’ESPT oscilleraient entre 29 et 50 % plus de 40 ans
après la fin de la Seconde Guerre mondiale [12]. Plus
impressionnant encore, 59 % d’anciens soldats améri-
cains capturés par les japonais présentaient un ESPT
plus de 50 ans après leur libération [26]. Les principaux
facteurs prédictifs de développement et de chronicisa-
tion d’un ESPT chez ces patients âgés seraient repré-
sentés par une longue période d’emprisonnement, des
sensations de stress subjectif plus sévères durant cette
période [27], une sévérité du traumatisme initial et le
grade au moment de la capture [28]. Il semblerait éga-
lement que la prévalence de l’ESPT soit plus élevé en
cas de guerres dites « oubliées », par rapport à des
guerres qui restent médiatisées et très présentes dans
nos consciences [17, 24].
L’holocauste est également un grand pourvoyeur
d’ESPT chez les sujets âgés, y compris chez ceux de
plus de 75 ans [29] et chez ceux qui ont vécu l’Holo-
causte pendant leur enfance [30]. Kuch et Cox ont ainsi
Stress post-traumatique
Psychol NeuroPsychiatr Vieil, vol. 3, n° 4, décembre 2005 293
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