quatre fois à l’orifice seulement (pour 13 cathéters jugulaires, 9
fémoraux et 2 sous-claviers) et huit fois à l’extrémité seulement
du cathéter (3 jugulaires et 5 fémoraux), soit cent douze souches
au total. Il s’agissait de S. epidermidis dans 91% des cas, résis-
tant à la méticilline pour 55% et à la rifampicine pour 92,6%.
Un seul des trois patients ayant fait une bactériémie était
aussi porteur nasal d’un Staphylococcus aureus, résistant aux
deux antibiotiques.
Ces données peuvent être rapprochées d’une étude réalisée
au sein de notre centre hospitalier (680 lits de médecine-chirur-
gie-obstétrique et 240 lits de moyen et long séjours), comparant
les souches et les résistances des staphylocoques isolés, tous sites
de prélèvements confondus, pendant trois ans (1999 à 2001)
(tableau V). Au sein des souches identifiées ont été individuali-
sées celles qui provenaient des extrémités de tous les cathéters,
de leurs orifices d’insertion, et des narines. La résistance à la
méticilline concernait 64,7% des S. aureus et 77,5% des S. non-
aureus isolés au niveau des cathéters (de tous types) et de leurs
orifices d’insertion; celle à la rifampicine en concernait respecti-
vement 30,2 et 37,4%.
■Discussion
Ce chiffre d’une bactériémie pour 3354 jours de cathétérisme
veineux central, sans tunnellisation quel qu’en soit le site d’implan-
tation, est inférieur à nombre de taux rapportés dans la littéra-
ture.1,3,4,7,9,20,21 Il sous-estime de plus la qualité de nos résultats
puisqu’il ne porte que sur les 8,5 dernières années, fiablement
informatisées, alors que notre protocole est utilisé depuis onze ans
et que nous n’avons pas retrouvé, ni dans nos archives ni dans
celles du CLIN et du Département d’information médicale de notre
centre hospitalier, d’autres bactériémies liées à un cathéter veineux
central entre le début d’utilisation de ce protocole et la date de
début de la présente étude. Nos deux études préliminaires, dont
les chiffres ne sont pas inclus dans celles-ci, indiquaient déjà l’ab-
sence de bactériémie10,11 pendant les périodes analysées.
Dans une démarche assurance qualité, il nous paraît tout à
fait opportun de présenter tous les aspects qui nous paraissent
essentiels dans notre gestion des cathéters veineux centraux.
Tout d’abord, il faut insister sur nos conditions rigoureuses
d’implantation et d’utilisation des cathéters.4,22 Il faut en effet se
donner les moyens en temps, personnel et matériel, même si cela
représente un coût non négligeable.22 D’une part, pour la réalisa-
tion de ces gestes dans notre service, le ratio soignants/patient
qui nous a paru correct est maintenu en permanence. D’autre
part, la stabilité de notre personnel médical et paramédical est le
garant d’une formation, d’un entraînement, d’une attention et
d’une application stricte des protocoles établis, permettant de par-
ler de « spécialisation ». Cette qualification nous paraît, comme à
d’autres, un point essentiel4-6,8,23-25 mais il faut en permanence
veiller à ne pas céder aux effets pervers de la routine. Ces critères
(formation, moyens, ratio soignants/patient) devraient apparaître
dans les publications pour en étayer au mieux la comparaison des
résultats.
Par ailleurs, nous essayons, dans toute la mesure du possible,
de ne pas garder les patients hospitalisés car les résultats sont consi-
dérés comme meilleurs en ambulatoire.25 De plus, chez les hospita-
lisés, nous réservons l’utilisation des cathéters à la seule dialyse.
Très tôt, l’élaboration d’un protocole de soins locaux préven-
tifs, comme préconisé par certains,6,21,26-29 nous a paru primor-
diale. Après une période d’utilisation de la povidone iodée, nous
avons opté, dès 1990, pour le mélange rifampicine-protamine à
la suite de notre étude préliminaire; celle-ci, comparant ce
mélange à la povidone iodée (les conditions de pose, de panse-
ments et de branchements-débranchements étant par ailleurs
identiques), indiquait des résultats supérieurs.10,11 Contrairement
à notre travail initial, la présente étude ne comporte plus de
groupe témoin mais, portant sur une période beaucoup plus
longue, confirme l’efficacité de ce soin et l’absence d’inconvé-
nients chez les patients en ayant bénéficié pendant de longues
durées et/ou à plusieurs reprises.
Aucun phénomène d’irritation locale n’a nécessité l’arrêt de
ce soin et aucun cathéter n’a posé de problème de dessication,
fissuration voire rupture comme ceci a pu être décrit31,32 pour des
cathéters de dialyse péritonéale en polyuréthane avec l’utilisa-
tion locale de mupirocine, amenant certains5à la contre-indiquer
au niveau des sites d’insertion des cathéters d’hémodialyse.
La spécificité essentielle de notre protocole nous paraît rési-
der dans l’application de ce mélange dès la première séance,
c’est-à-dire après préparation aseptique de la peau et avant
toute infection. Elle est ensuite renouvelée à chaque dialyse tout
au long de la période de cathétérisme, ce qui équivaut à la fré-
quence des trois pansements par semaine qui paraît nécessaire à
de bons résultats.23 Ainsi, cette combinaison assure pleinement
son rôle préventif vis-à-vis de la cascade d’événements pouvant
mener de la colonisation staphylococcique, par voie extralumi-
nale, du site d’émergence ou de son pourtour (points d’amar-
rage du cathéter par exemple) à celle du cathéter, avec généra-
tion d’un biofilm, puis à la complication infectieuse systémique.
Ces résultats favorables plaident en faveur du rôle important
de porte d’entrée que représente l’orifice cutané d’insertion du
articles originaux
Néphrologie Vol. 24 n° 4 2003 163
Staphylococcus aureus Staphylococcus epidermidis
Total KT et orifices Nez Total KT et orifices
Centre hospitalier
• Nombre de souches
2552 222 424 563 198
• Résistance à la méticilline 38,60% 64,70% 34,90% 70,60% 77,50%
• Résistance à la rifampicine 6,90% 30,20% 6,10% 27,30% 37,40%
Extrêmes selon • méticilline 0 à 86 0 à 100 0 à 94 0 à 100 0 à 100
les services • rifampicine 0 à 50 0 à 94 0 à 24 0 à 83 0 à 100
Etude sur trois ans au sein de Centre hospitalier de Troyes.
Tableau V: Pourcentage de staphylocoques résistants à la méticilline et à la rifampicine.