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Berne, où les corporations ne jouaient aucun rôle politique, qui alla le plus loin dans cette voie. Le
gouvernement bernois tenta de prohiber sur son territoire toute espèce d'oisiveté et décida dès les années
1680 de soutenir le commerce et l'industrie. Il institua en 1687, d'après un modèle français, un Conseil de
commerce, qui se montra actif notamment en Haute-Argovie, en y faisant pratiquer un commerce encouragé
et surveillé par l'Etat, pour le profit de la République. Comme les corporations de Berne, contrairement à
celles de Genève, Zurich ou Bâle, n'interdisaient pas l'artisanat rural, le canton réussit à élargir peu à peu le
cadre de son économie, d'abord étroitement urbaine. En outre, les autorités fondèrent des maisons de travail
pour indigents et orphelins, attribuèrent des monopoles de fabrication, promulguèrent en 1719 un mandat sur
les manufactures, créèrent un tribunal du commerce et mirent sur pied un vaste programme de constructions
routières. A ses débuts, la Société économique de Berne souscrivit aussi aux thèses mercantilistes. Des
mesures semblables furent prises à Lucerne, où les autorités créèrent une Chambre de commerce,
attribuèrent des monopoles, introduisirent l'industrie de la schappe et multiplièrent les postes de douane. A
Neuchâtel et dans l'évêché de Bâle, le mercantilisme inspira également des ébauches d'action.
Il eut moins de succès dans les cantons à régime corporatif. A Zurich, Schaffhouse, Bâle et Saint-Gall, les
corporations urbaines veillaient à empêcher le développement de l'artisanat à la campagne. Néanmoins, les
mesures de Zurich pour l'encouragement et la protection des fabriques (dernier tiers du XVIIe s.) rappellent la
politique de Colbert (Protoindustrialisation); les maîtrises genevoises essayèrent aussi d'élever des barrières
douanières. Dans les cantons campagnards enfin, l'Etat ne jouait guère de rôle régulateur et la liberté de
commerce (ou plutôt l'indépendance de celui-ci vu l'absence d'une politique économique étatique) qui régnait
dans la plupart des cantons de la Confédération, y était encore plus marquée qu'ailleurs.
Les succès relativement limités du mercantilisme dans la Confédération furent l'une des causes du
développement industriel du pays; la Suisse devint la nation la plus fortement industrialisée du continent,
capable même, à la fin du XVIIIe s., de concurrencer l'Angleterre. On estime qu'à ce moment-là l'industrie
occupait environ 12% de la population suisse. Etablie dans les campagnes, dans les Préalpes et dans le Jura,
elle progressait en s'intéressant à de nouveaux produits d'exportation et en investissant dans de nouvelles
formes d'exploitation gourmandes en capitaux. Les conceptions mercantilistes apparurent dès lors comme
dépassées dans toute l'Europe; elles ne résistèrent pas aux critiques des partisans des Lumières, fondées au
début principalement sur la philosophie morale.
Bibliographie
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Auteur(e): Urs Hafner / PM