Il était une fois un oiseau d’une grande beauté. Son
pelage, d’un bleu profond, restait brillant quelle que
soit la saison. Son bec jaune vif lui donnait un air
joyeux. Son chant traversait le silence comme une
étoile lante, provoquant surprise et ravissement. Il
vivait dans une forêt luxuriante et indomptée.
Un jour il remarqua que ses ailes étaient couvertes
de petites taches. Tout d’abord il n’y prêta pas
attention. Mais elles grossirent, trouant son magnique
pelage bleu de zones grises et ternes. Il observa
également que son chant jusqu’alors parfait,
contenait une fausse note qu’il ne pouvait corriger.
Enn son soufe avait perdu sa profondeur, rendant
son jeu musical timide.
Inquiet de voir ce mal étrange s’installer en lui il se
cona à son voisin de branche. Ce dernier était depuis
toujours sujet à de multiples maux qui envahissaient sa
vie et son discours. Il lui suggéra de consulter le hibou,
un guérisseur réputé, qui, à maintes reprises, l’avait
soulagé de maladies diverses comme un eczéma
tenace ou des bronchites envahissantes. Il vivait sur
une île pas loin d’ici, perché sur la plus grosse branche
d’un arbre géant, réputé pour avoir abrité dans des
temps anciens les druides les plus expérimentés. Il
avait, paraît-il, constitué une grande pharmacie et
prétendait pouvoir soigner presque tout à l’aide de
ses potions stockées dans sa caverne secrète.
L’oiseau bleu arriva dans l’île à la tombée de la nuit,
au moment où le « hibou ouvre sa consultation. La
rencontre fut brève mais dense. Le hibou lui t bonne
impression. Il savait écouter et rassurer. Il lui donna
une potion, qui disait-il, devait dans quelques jours
avoir des effets visibles comme la disparition de ces
vilaines tâches grises. Conant, l’oiseau bleu retourna
chez lui et suivit scrupuleusement le traitement prescrit
par ce soignant réputé.
Malheureusement ce traitement et ceux qui suivirent
ne rent pas l’effet espéré. La maladie qui affectait
profondément l’oiseau bleu résistait à toute
intervention extérieure. Le hibou, d’abord irrité par cet
échec, s’obstina à proposer encore et encore d’autres
remèdes. Finalement il renonça et il l’envoya chez
un confrère spécialisé dans ce genre de maladie
résistante à sa médecine : le serpent royal. Celui-ci ne
connaît pas les plantes et leurs vertus. Il a développé
un savoir faire particulier qui lui permet de soulager,
parfois, des maux profonds, incompréhensibles et
pourtant très douloureux. Certes il écoute mais surtout il
apprend, aux malades, à créer des images intérieures
bienfaisantes et à respirer profondément.
Pendant plusieurs semaines le serpent lui apprit à
« visualiser » une couleur bleue, onctueuse comme de
la crème fraîche, brillante comme un diamant rare,
chaude comme une terre exposée à un soleil d’été
et humidiée par une eau de rivière vive, limpide et
fraîche. Lentement l’oiseau bleu devint expert dans ce
genre d’exercice. Il pouvait se concentrer rapidement
et produire mentalement une quantité appréciable de
cette magnique couleur bleue qu’il étalait, toujours
mentalement, sur son pelage meurtri. Le reste suivit.
Son chant retrouva sa force et sa vigueur et la fausse
note ne fut plus qu’un mauvais souvenir.
Mais ce qu’il apprit de cette expérience, au départ
très douloureuse, et qu’il garde comme un trésor
précieux, c’est que si pour certains maux il aurait
encore besoin du hibou et de ses potions, il a en lui
des forces, une pharmacie interne sur laquelle il peut
compter pour traverser les souffrances qu’il rencontrera
tout au long de sa vie.
Martine Frères, psychologue.
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Les petites histoires...
L’oiseau bleu
Petite histoire de
Martine