I ÉDITORIAL I n° 139 137 I ÉCONOMIE et MANAGEMENT I est une publication du SCÉRÉN-CNDP Téléport 1 @ 4, BP 80158 86961 Futuroscope Cedex Tél. 05 49 49 78 78 Directeur de la publication Patrick Dion Rédacteur en chef Frédéric Larchevêque [email protected] Rédactrice en chef adjointe Christine Pasdeloup Comité de rédaction Sous l’égide de Claude Nava, inspecteur général d’économie-gestion Frédéric Larchevêque (« En pratique »), Laurence Garnier (« Portrait », veille juridique), Hervé Kéradec (« Perspectives »), Dominique Larue (« Noté pour vous »), Laurence Ulmann et Alain Tefaine (enseignements technologiques et professionnels), Annie Kintzig Réalisation CNDP Tél. 05 49 49 75 83 / 75 46 [email protected] Directrice de l’édition Claude Renucci Chefs de projet revues Sophie Leclercq Nathalie Roubellat Secrétariat de rédaction Sophie Roué Création graphique Jacques Zahles, Hexa Graphic Mise en page DESK – Christelle Mignot Illustration Pierre Samson Responsable vente et marketing revues Catherine Rastier Tél. : 05 49 49 78 55 [email protected] Renseignements abonnements Tél. : 03 44 62 43 98 Télécopie : 03 44 12 57 70 [email protected] Chef de publicité régie Hélène Jourdain Tél. : 05 49 49 79 24 [email protected] Impression Imprimerie Jouve 1, rue du Docteur Sauvé BP 2734 53100 Mayenne CPPAP n° 0309 B 07219 ISSN 977177184100010137 Dépôt légal 2e trimestre 2011 © CNDP 2011 1 Les paradoxes de la norme Tous les auteurs de notre dossier « normes et stratégies » le reconnaissent, nous vivons une période d’accélération de la machine à produire de la norme. Ce phénomène s’explique par les attentes de l’opinion publique, la pression exercée par les médias sur les décideurs et bien sûr l’intégration du fait que la course à la certification représente un enjeu stratégique majeur pour les acteurs concernés. Normes environnementales, normes sociales, normes techniques, normes d’hygiène et de santé, normes de sécurité, normes de comportement, normes comptables, normes prudentielles, etc., on ne compte plus les domaines sur lesquels s’exerce aujourd’hui le pouvoir de normalisation. Mais à qui appartient un tel pouvoir ? Il est bien loin le temps où le législateur détenait le monopole de la production de normes. Les « producteurs » de normes se sont à l’évidence multipliés. Au Parlement et au Gouvernement se sont ajoutées les organisations internationales, l’Union européenne, les autorités administratives indépendantes et enfin les nombreux organismes publics et privés de normalisation comme l’ISO, le Centre européen de normalisation ou encore l’AFNOR. Pour bien comprendre leur importance, considérons un seul instant ce que serait un monde sans normes. Serait-il vivable ? Il n’est pas besoin de beaucoup d’imagination pour se rendre à l’évidence, la réponse est non, tant vie en société et normes sont consubstantielles. Elles permettent de faciliter les échanges entre les hommes et les peuples, de rendre compatibles et sécuriser les produits, de simplifier les tâches, de réduire les coûts de transaction, d’obtenir un nouvel avantage concurrentiel, de renouveler un marché, etc. Pourtant, aussi nécessaires que soient les normes pour le bon fonctionnement de nos sociétés, le travail de normalisation produit aussi parfois paradoxalement son contraire : l’insécurité juridique et économique. Le paradoxe de l’insécurité juridique • Un grand quotidien du soir le rappelait encore récemment, « les lois inapplicables » sont « un mal français »1. Si la loi n’est plus la norme incontestée, elle demeure néanmoins l’expression la plus importante de la vie démocratique. Pourtant, et ce n’est pas le moindre des paradoxes, la machine à légiférer, en même temps qu’elle s’emballe, souffre d’une baisse préoccupante de la qualité de la norme produite et d’une défaillance dans son application concrète. Il en découle une insécurité juridique contre laquelle la loi est pourtant censée nous protéger. Le paradoxe de l’insécurité économique • La conjonction de l’application des nouvelles normes comptables IASB/IFRS depuis le 1er janvier 2005 et de la crise financière de 2007 a réalimenté les critiques adressées au principe de l’enregistrement des éléments d’actif à leur juste valeur. Le débat, très technique, est loin d’être tranché, mais deux arguments à charge se dégagent : le caractère procyclique de la référence à une valeur de marché dans l’évaluation des actifs de bilan et la difficulté de l’appliquer lorsque la liquidité des marchés d’actifs n’est plus assurée. Dans la période de hausse, les nouvelles normes comptables ont alimenté un sentiment, presque délirant, de toute puissance et d’invulnérabilité qui a nourri les bulles, tandis qu’en période de baisse, elles ont propagé la panique. Mais comme l’explique avec brio l’un de nos auteurs, il y aurait quelque paradoxe à normer le processus normatif ! Frédéric Larchevêque 1. Le Monde, éditorial du 13 janvier 2011. I Avril 2011 I n° 139 I ÉCONOMIE et MANAGEMENT I