www.revueavantages.ca AVANTAGES SEPTEMBRE 2007 19
pour des indications non approuvées, notamment sur la
base du fait que cette pratique est généralisée ou
rapportée dans la littérature, en prenant pour acquis que
les assurés se feront rembourser inconditionnellement
par les régimes privés.
l Quand un médicament est disponible légalement sur le
marché canadien, les patients assurés par des régimes
privés peuvent se faire prescrire ce médicament pour
une indication non approuvée, dans le cadre d’études
cliniques visant justement à obtenir l’approbation de
nouvelles indications. On sait que les patients des
régimes publics se verront systématiquement refuser le
remboursement de ces médicaments, en raison d’une
gestion plus rigoureuse des indications non
approuvées.
• Comment concilier la nécessité de restreindre le rembour-
sement aux indications officielles et le désir de réaliser les
économies substantielles résultant de l'utilisation de cer-
tains médicaments pour des indications non officielles ?
n Par exemple, Avastin approuvé au Canada dans le
traitement du cancer colorectal peut être utilisé à la place
de Lucentis, approuvé dans le traitement de la
dégénérescence maculaire. À cause de leur mécanisme
d’action similaire, les ophtalmologistes ont pensé utiliser
l’Avastin dans le traitement de la dégénérescence
maculaire, même si cette indication n’est pas approuvée.
Le manufacturier de Lucentis justifie les coûts beaucoup
plus élevés en invoquant les sommes investies dans la
recherche clinique pour obtenir son approbation dans le
traitement de la dégénérescence maculaire.
• Comment s'assurer qu'on identifie les patients dont les
caractéristiques permettent de prévoir une réponse positive
au traitement, comme dans le cas du Herceptin contre le
cancer du sein ?
Des contrôles additionnels doivent être implantés par les
régimes privés, pour limiter les augmentations de coûts :
n Vérifier que le patient est ambulatoire et n'est pas
hospitalisé.
n Contrôler le montant réclamé par le pharmacien ou
l'hôpital : les assurés des régimes publics bénéficient
d'ententes qui prévoient que seul le coût de l'ingrédient
sera facturé, c’est-à-dire exempt d'honoraires et de marge
de profit.
n Contrôler les frais d'administration des médicaments aux
patients.
Il s'agit d'un défi pour les assureurs et d'une occasion
d'affaires pour certaines firmes spécialisées dans l'administration
de ce type de médicaments, qu'on appelle communément
« specialty pharmacy » aux États-Unis. Ces fournisseurs
peuvent réduire les coûts en négociant des rabais basés sur leur
volume d'achat des médicaments injectables et proposer des
prix concurrentiels pour l'administration de ces médicaments.
Toutefois, en raison du risque de conflit d'intérêts, il faut
instaurer des mécanismes de contrôle par des autorités
compétentes et indépendantes, afin d'éviter le prolongement de
traitements coûteux et inefficaces.
Dans le but de faciliter l'accès à un médicament, de con-
trôler les coûts et de garantir une utilisation appropriée, les
manufacturiers concluent des ententes avec ces fournisseurs.
Toutefois, au Québec, les professionnels de la santé n'aiment
pas se faire imposer un fournisseur et c'est une réalité avec
laquelle assureurs et manufacturiers doivent composer,
notamment en respectant le libre choix du lieu d'adminis-
tration, mais en imposant un montant maximum admissible.
Attentes des assurés et mission
du régime d’assurance
Au Québec, il ne faut pas perdre de vue que nonobstant le
contrat d’assurance, le patient peut toujours se prévaloir de la
mesure du patient d’exception pour obtenir un remboursement.
Voilà une autre raison de bien établir le cadre de décision et de
définir clairement le rôle de l’assureur afin qu’il gère ces cas
rigoureusement, selon les critères établis par le gouvernement.
La majorité des assurés des régimes privés croient que tous
les médicaments seront remboursés, surtout si les coûts sont
très élevés et que leur survie en dépend. Certaines organisations
peuvent témoigner de l’acharnement de certains employés et
de leur famille, de l’intervention de leur ombudsman et du
déchirement entraînés par le refus de rembourser des
médicaments qui coûtent 100 000 $ pour prolonger la vie de
quelques mois, au mieux dans 40 % des cas. Ces situations
forcent les administrateurs à reconsidérer la mission du régime
qu’ils ont adoptée et communiquée à leurs membres, de façon
à créer des attentes réalistes et à maintenir la viabilité financière
à long terme du régime. L’époque où tous les médicaments
prescrits étaient remboursés semble révolue.
À juste titre, les administrateurs de régimes estiment ne pas
avoir la compétence pour gérer la liste des médicaments
admissibles et ne veulent pas être directement et même
indirectement impliqués dans la gestion de cas. C’est pourquoi
un nombre croissant d’entre eux veulent transiger avec des
assureurs qui se sont dotés de comités thérapeutiques crédibles
et compétents, capables d’assumer, à l’intérieur des paramètres
définis par le promoteur de régime, la lourde responsabilité de
gérer la couverture médicaments (évaluation, définition,
évolution), d’administrer les cas et d’en assumer pleinement
les conséquences.
La première étape dans la recherche de solutions est
d’identifier et de comprendre la nature du problème. Nous
espérons avoir contribué à cette démarche en
suscitant une réflexion au sein des organisations et
en provoquant des discussions entre les promoteurs
de régimes et leurs conseillers et assureurs, avant
d’être confrontés à de difficiles réalités… s
JOHANNE BROSSEAU est conseillère principale
chez Groupe-conseil Aon à Montréal.
PAULINE RUEL M. Sc. est conseillère pharmaceutique
pour le Groupe-conseil Aon.
MÉDICAMENTS BIOLOGIQUES