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Quadrimed 2011
L. Loutan
M. Hug
Pr Louis Loutan
Service de médecine internationale
et humanitaire
Département de médecine communautaire et de premier recours
HUG, 1211 Genève 14
[email protected]
Dr Markus Hug
Préfecture 1
2800 Delémont
[email protected]
Rev Med Suisse 2011 ; 7 : 224
Les signes digestifs principaux sont la
nausée, les vomissements, les dou­
leurs abdominales, la diarrhée, voire
un arrêt du transit ou une constipa­
tion. Bien souvent, ils peuvent être liés
ou se succéder. Par exemple, la nausée et
les vomissements causés par une intoxica­
tion alimentaire peuvent précéder l’appa­
rition de la diarrhée, accompagnée ou non
de fièvre. Il en va de même des gastro-entérites d’origine virale qui combinent nau­
sées, vomissements, douleurs abdomina­les,
diar­rhées, myalgies, céphalées, malaise et
fièvre. Dans ces situations, la fièvre est
géné­ralement peu élevée. Elles sont dues
aux rotavirus, norovirus, adénovirus ou astro­
virus. Chez l’enfant, les gastro-entérites à
rotavirus peuvent être sévères et causer
une déshydratation marquée. Chaque an­
née, elles cau­sent près d’un million de dé­
cès dans les pays en développement. Chez
l’adulte, on observe des épidémies dues aux
norovirus (norwalk-like virus), causant des
symptô­mes plus ou moins importants. L’in­
cubation est brève, de 24 à 48 heures, et
les symptô­mes digestifs s’amendent spon­
tanément dans les 24 à 48 heures. La con­
tamination est féco-orale, le virus persistant
longtemps sur les surfaces contaminées.
Plusieurs épidémies ont été décrites sur des
bateaux de croisière.
La fièvre, lorsqu’elle accompagne une
dou­leur abdominale ou des diarrhées, est
considérée comme un signe de gravité. Im­
médiatement, elle va faire penser à une in­
fection.
douleurs abdominales
et fièvre
La localisation de la douleur, son intensité,
son mode d’installation et l’existence d’anté­
224
Tube digestif et fièvre :
à quoi penser ?
cédents chirurgicaux vont orienter le prati­
cien vers le chirurgien et le guider dans la
sélection des examens complémentaires à
pratiquer. La liste des diagnostics possi­bles
est longue. Des patients qui se présentent
aux urgences avec une douleur abdominale,
un tiers n’a jamais de diagnostic définitif
établi, un tiers présente une appendicite et
un tiers une pathologie telle qu’une cholé­
cystite aiguë, une obstruction intestinale,
une pancréatite, une colite néphrétique, un
ulcère peptique perforé ou un cancer. Lors­
que la fièvre accompagne la douleur, il faut
penser à une atteinte hépatobiliaire ou pan­
créatite compliquée, une perforation ou une
inflammation intestinale comme une maladie
de Crohn, un abcès, une obstruction ou une
ischémie intestinale ou une diverticulite. Il
ne faut bien sûr pas oublier les affections
gynécologiques comme une salpingite, une
grossesse extra-utérine, une torsion ou la
rupture d’un kyste de l’ovaire.
Au retour d’un voyage, une fièvre accom­
pagnée d’une douleur abdominale en l’ab­
sence de diarrhée fera rechercher la pré­
sence d’un «abcès» amibien du foie. L’ultra­
sonograhie abdominale et la sérologie sont
à la base du diagnostic.
diarrhée et fièvre
Les causes de diarrhées sont multiples,
les plus fréquentes étant les gastro-enté­
rites, qu’elles soient d’origine virale ou bac­
térien­ne. La fièvre et la présence de sang
dans les selles sont deux signes de gravité
à prendre au sérieux. Au retour d’un voyage,
on effectuera un examen direct des selles à
la recherche de leucocytes et de globules
rou­ges et une coproculture. Une seule cul­
ture est en général suffisante pour identifier
une salmonelle, une shigelle ou un Campylobacter. Avec les Escherichia coli entéro­
toxigéniques, ce sont les pathogènes les
plus fréquemment à l’origine d’une diarrhée
au retour d’un voyage. L’incubation étant
brève, de l’ordre d’un à trois jours, les symp­
tômes débutent très peu de temps après le
retour. Comme le résultat de la culture peut
se faire attendre plusieurs jours, la décision
de donner un antibiotique précède souvent
la confirmation du diagnostic. La diminution
rapide de la sensibilité aux quinolones du
Campylobacter, mais aussi des salmonel­
Revue Médicale Suisse – www.revmed.ch – 26 janvier 2011
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les, particulièrement celles rap­por­tées de
l’Asie, fait de plus en plus préférer l’azithro­
mycine comme traitement de choix.
Les diarrhées causées par des proto­
zoaires sont relativement rares pendant le
voyage, où les bactéries dominent. Dans la
diarrhée observée après un voyage, particu­
lièrement si elle a tendance à se prolonger, il
faut rechercher les parasites comme Giar­dia,
Entamoeba histolytica ou Cyclospora.
Au retour d’Asie, particulièrement après un
séjour en Asie du Sud, la possibilité d’une
fièvre typhoïde ou paratyphoïde doit être
sérieusement évoquée. Si, dans les années
1990, une trentaine de cas de typhoïde
confirmée étaient rapportés chaque année
en Suisse, depuis 2001 on n’en dénombre
plus qu’une quinzaine par an. Les pays visi­
tés à plus haut risque sont le Pakistan, le
Cambodge, le Népal, l’Inde et le Sri Lanka.1
Vu la sévérité potentielle de la maladie, ce
diagnostic doit être recherché activement,
voire un traitement antibiotique présomptif
instauré rapidement après prélèvement pour
hémoculture et coproculture. On se rappel­
lera que près de 20% des cas n’ont pas de
diarrhée, mais présentent une constipation.
Diverses affections tropicales systémi­
ques peuvent provoquer de la fièvre et des
diarrhées. C’est le cas du paludisme, de la
fièvre dengue et d’autres arboviroses sur­
tout lors­qu’elles se compliquent. Des intoxi­
cations après consommation de poisson
contaminé (ciguatera ou scromboïde) et la
trichinose sont des pathologies qui peu­
vent causer des diarrhées aiguës, accom­
pagnées ou non de fièvre. La schistoso­
miase ou bilhar­ziose, contractée lors d’une
baignade en eau con­taminée par les for­
mes larvaires du parasite (cercaires), peut
causer une forte fièvre accompagnée d’une
éosino­philie. Cet­te fièvre de Katayama ap­
paraît relativement tardivement, en général
six semai­nes après la contamination. Elle
correspond au début de la ponte des œufs
des helminthes dans les plexus veineux
mésentériques.
Bibliographie
1 Keller A, Frey M, Schmid H, et al. Imported typhoid
fever in Switzerland, 1993 to 2004. J Travel Med 2008;
15:248-51.
Revue Médicale Suisse – www.revmed.ch – 26 janvier 2011
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