Analyse Fonctionnelle Version Alpha 1 année 2015-16

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Analyse Fonctionnelle
année 2015-16
Version Alpha 1
DEUX THÉORÈMES
On présente ici le théorème de densité de Stone-Weierstrass et le théorème de compacité (dans l’espace des fonctions continues) d’AscoliArzelà.
1. W EIERSTRASS , S TONE -W EIERSTRASS
Le point de départ est le théorème de Weierstrass qui affirme que toute fonction continue
sur [a, b] est limite uniforme d’une suite de polynômes. Il y a plusieurs démonstrations possibles, avec les polynômes de Bernstein notamment. Ici on utilise la version « originale » liée
à la convolution (la convolution sert aussi pour la densité des fonctions continues dans les
L p ou encore pour obtenir un critère de compacité dans L p (1 ≤ p < +∞)).
Théorème 1 (Weierstrass). Soit f une fonction à valeurs complexes et continue sur [a, b].
Alors il existe une suite de polynômes qui converge uniformément vers f sur [a, b]. Si f est
à valeurs réelles les polynômes peuvent être choisis à coefficients réels.
Démonstration. On se ramène aisément au cas où [a, b] = [0, 1] (par transformation affine)
et au cas où f (0) = f (1) = 0 (il suffit de poser f (x) − f (0) − x( f (1) − f (0))).
Comme il s’agit d’une convolution, il faut tout d’abord étendre f en dehors de [0, 1] par 0.
La fonction, notée toujours abusivement f , est uniformément continue sur R. On pose
Z 1
1
(1 − x 2 )n d x.
(1 − x 2 )n où αn =
Q n (x) =
αn
−1
On peut minorer αn par
1
2
n +1
0
et en déduire que pour tout δ > 0 la suite Q n → 0 converge uniformément sur [−1, −δ]∪[δ, 1].
R1
Posons P n (x) = −1 f (x + y)Q n (y)d y pour tout x ∈ [0, 1] et montrons que cette suite convient.
Remarquons que si f est à valeurs réelles alors P n l’est aussi.
Comme f est nulle en dehors de [0, 1] on a
Z 1−x
Z 1
P n (x) =
f (x + y)Q n (y)d y =
f (y)Q n (x − y)d y
αn ≥ 2
Z
(1 − x)n d x =
0
−x
qui est bien un polynôme en la variable x.
Soit ε > 0 et soit η > 0 la constante d’uniforme continuité (|x − x 0 | < η entraîne | f (x) −
f (x 0 )| < ε). L’idée est de décomposer l’intervalle d’intégration en deux ou trois parties, autour de 0 et pour laquelle on utilise l’uniforme continuité et suffisamment loin de 0 pour
R1
lesquelles on utilise la convergence uniforme de Q n . Comme −1 Q n (y)d y = 1 on a
¯Z 1
¯ Z 1
¯
¯
| f (x + y) − f (x)|Q n (y)d y
|P n (x) − f (x)| = ¯
( f (x + y) − f (x))Q n (y)d y ¯ ≤
−1
−1
Z −η
Z η
Z 1
≤ 2 sup | f |
Q n (y)d y + ε
Q n (y)d y + 2 sup | f |
Q n (y)d y
−1
−η
n +1
(1 − η2 )n .
≤ ε + 4 sup | f |
2
1
η
2
DEUX THÉORÈMES
Pour n ≥ N suffisamment grand et indépendant de x on obtient, pour tout x ∈ [0, 1]
|P n (x) − f (x)| < 2ε.
Corollaire 2. L’ensemble des polynômes est dense dans l’ensemble des fonctions continues
définies de [a, b] dans R (ou C) muni de la norme de la convergence uniforme.
Corollaire 3. L’espace vectoriel normé complet (C ([a, b]), k · k∞ ) est séparable.
Démonstration. Exercice (il suffit de considérer les polynômes à coefficients rationnels). Remarque 4. Pour étendre ce théorème dans un compact de RN il y a une difficulté supplémentaire, celle d’étendre correctement f sur tout RN et garder l’uniforme continuité.
Le but est d’étendre ce résultat dans un cadre topologique plus général. Dans la suite X est
un espace topologique séparé et compact. Comme d’habitude C (X , R) désigne l’ensemble
des fonctions continues à valeurs réelles muni de la distance
d ( f , g ) = sup | f (x) − g (x)|
x∈X
qui rend complet cet espace. De plus C (X , R) est une algèbre, c’est à dire, stable par addition
et par produit et par multiplication par un scalaire.
Soit A une algèbre incluse dans C (X , R). On rappelle que
— A sépare les points de X si pour tout x, y ∈ X avec x 6= y il existe f dans A tel que
f (x) 6= f (y).
— A ne s’annule en aucun point de X si pour tout x dans X il existe f ∈ A vérifiant f (x) 6=
0
— A désigne la fermeture de A dans C (X , R) pour la distance d .
Proposition 5. Soit A une algèbre de C (X , R). Alors
(1) A est une algèbre.
(2) si f ∈ A alors | f | ∈ A.
(3) si f et g sont dans A alors max( f , g ) et min( f , g ) sont dans Ā.
Démonstration. Le premier point est évident. Pour le 2ème on utilise le théorème de Weierstrass. En supposant, ce qui est toujours possible, −1 ≤ f ≤ 1, soit P n une suite de polynômes à coefficients réels qui converge
uniformément
vers la fonction x 7→ |x| sur l’intervalle
¯
¯
[−1, 1]. Ainsi la quantité supr ∈[−1,1] ¯P n (r )−|r |¯ tend vers 0 quand n tend vers l’infini. Comme
| f (x)| ≤ 1 pour tout x ∈ X on a
¯
¯
¯
¯
sup ¯| f (x)| − P n ( f )¯ ≤ sup ¯P n (r ) − |r |¯
x∈X
r ∈[−1,1]
d’où la convergence de la suite P n ( f ) vers | f | dans C (X , R). Ainsi | f | ∈ Ā.
Pour le 3ème point, il suffit de remarquer que max( f , g ) = 21 ( f + g )+ 12 | f − g | et min( f , g ) =
1
1
2 ( f + g ) − 2 | f − g |.
Proposition 6. Soit A une algèbre de C (X , R) séparant les points et ne s’annulant en aucun
point de X . Alors pour tout x 1 et x 2 appartenant X et pour tout c 1 et c 2 dans R il existe f
dans A tel que f (x 1 ) = c 1 et f (x 2 ) = c 2 .
Démonstration. Soient g , h et k a tels que
g (x 1 ) 6= g (x 2 ),
h(x 1 ) 6= 0,
k(x 2 ) 6= 0
DEUX THÉORÈMES
3
et posons
u(x) = g (x)k(x) − g (x 1 )k(x)
v(x) = g (x)h(x) − g (x 2 )h(x).
Les fonctions u et v vérifient u(x 1 ) = v(x 2 ) = 0, u(x 2 ) 6= 0 et v(x 1 ) 6= 0. Pour conclure il suffit
de poser
v(x)
u(x)
f (x) = c 1
+ c2
.
v(x 1 )
u(x 2 )
Théorème 7 (Stone-Weierstrass). Soit A une algèbre de C (X , R) (X espace topologique séparé et compact) séparant les points de X et ne s’annulant en aucun élément de X . Alors A
est dense dans C (X , R).
Démonstration. Soit f ∈ C (X , R) et soit ε > 0. Le but est de « construire » ϕ ∈ Ā tel que
d ( f , ϕ) ≤ ε.
Pour tout ξ, y ∈ X soit ϕξy ∈ A tel que
ϕξy (ξ) = f (ξ)
ϕξy (y) = f (y).
ξ étant fixé, {ϕξy ; y ∈ X } est une famille de fonctions paramétrisées par y dans X . Comme
ϕξy et f coïncident en y et sont continues, pour tout y ∈ X soit O y un ouvert tel que
y ∈ Oy ,
∀x ∈ O y
ϕξy (x) < f (x) + ε.
La collection O y des ouverts recouvre X , compact. Soit O y 1 ,. . . ,O y n une sous recouvrement
fini de X . Posons
ϕξ = min{ϕξy 1 , . . . , ϕξy n }.
Nous avons ϕξ ∈ Ā et par construction
∀x ∈ X
ϕξ (x) ≤ f (x) + ε et ϕξ (ξ) = f (ξ).
Cette construction se fait pour tout ξ ∈ X . À nouveau les fonctions ϕξ et f sont continues et
coïncident en ξ : pour tout ξ ∈ X soit O ξ tel que
ξ ∈ Oξ,
∀x ∈ X
ϕξ (x) > f (x) − ε.
En extrayant, à nouveau, un sous recouvrement fini {O ξ1 , . . . ,O ξm } on pose
ϕ = max{ϕξ1 , . . . , ϕξm }.
Par construction ϕ ∈ A et de plus
∀x ∈ X
soit d ( f , ϕ) ≤ ε.
f (x) − ε ≤ ϕ(x) ≤ f (x) + ε
Remarque 8. On trouve dans la littérature la version où A contient les constantes (les fonctions constantes) plutôt que « A ne s’annule en aucun point de X ».
Et pour les complexes ? Commençons par l’ensemble H (D) des fonctions holomorphes sur
le disque de C. En effet H (D) semble vérifier les hypothèses du théorème précédent mais
malheureusement d’après le cours d’analyse complexe de L3, H (D) n’est pas dense dans
C (D, C). En effet la fonction z 7→ z̄ est continue mais non holomorphe. Pour avoir un résultat
de densité similaire il faut ajouter une propriété à l’algèbre : A est une algèbre conjuguée
pour la fermeture, c’est-à-dire f ∈ A entraîne f¯ ∈ A (attention, le premier ā est le complexe
conjugué tandis que le second A est la fermeture).
Théorème 9. Soit A une algèbre conjuguée de C (X , C). On suppose que A sépare les points
et ne s’annule en aucun point de X . Alors A est dense dans C (X , C).
4
DEUX THÉORÈMES
f + f¯
Démonstration. Il suffit de remarquer que Re( f ) = 2 . Ainsi si f est dans A alors Re( f ) ∈ A.
En posant
A R = { f ∈ Ā ; f (x) ∈ R, ∀x ∈ X }
on démontre que A R est une algèbre (fermée) qui sépare les points de X et ne s’annule en
aucun point de X . La conclusion vient de Stone-Weierstrass.
2. A SCOLI -A RZELÀ
Le but est de donner un critère de compacite dans C (E , R) où E est un ouvert de RN . Une
suite de fonctions ( f n ) définies de E dans R est dite uniformément bornée s’il existe M > 0
tel que
sup | f n | ≤ M , ∀n ∈ N.
E
La suite ( f n ) est dite équi-continue dans E s’il existe une fonction continue croissante ω :
R+ 7→ R+ tel que ω(0) = 0 et pour tout x, y dans E ,
| f n (x) − f n (y)| ≤ ω(|x − y|),
∀n ∈ N.
Cette dernière propriété revient à dire que les constantes d’uniforme continuité sont indépendantes de n.
Théorème 10 (Ascoli). Soit ( f n ) une suite de fonctions uniformément bornée et équicontinue dans E . Alors il existe une sous-suite ( f nk ) et une fonction continue f : E 7→ R telles
que
(1)
f nk (x) → f (x) ∀x ∈ E ;
(2)
| f (x) − f (y)| ≤ ω(|x − y|) ∀x, y ∈ E ;
(3)
f nk → f
uniformément sur tout compact K ⊂ E .
Démonstration. Considérons QN ∩ E qui est dense dans E . Pour x 1 ∈ QN ∩ E , la suite de réels
f n (x 1 ) est bornée. Nous pouvons alors extraire une sous-suite f n,1 (x 1 ) qui converge vers un
réel noté f (x 1 ).
Pour x 2 ∈ QN ∩ E la suite réelle f n1 (x 2 ) est bornée : il existe alors une sous-suite f n1,2 (x 2 )
telle que f n1,2 (x 2 ) converge vers f (x 2 ).
À l’aide d’extractions successives de sous-suites on obtient pour tout m ∈ N une sous-suite
f n1,...,m telle que pour tout j ∈ {1, . . . , n} on a
f n1,...,m (x j ) → f (x j ).
On utilise alors le procédé de la diagonale qui consiste à choisir comme sous-suite f nk =
f k1,...,k . On a alors pour tout m ∈ N
f nk (x m ) → f (x m ).
Nous avons défini une fonction f sur QN ∩ E , il nous reste à l’étendre sur E . Soit x ∈ E \ QN .
Soit ε > 0 et par densité soit x l ∈ QN ∩ E tel que |x − x l | < ε. Par la propriété d’équi-continuité
nous avons
| f nk (x) − f n p (x)| ≤ | f nk (x) − f nk (x l )| + | f nk (x l ) − f n p (x l )| + | f n p (x l ) − f n p (x)|
≤ 2ω(ε) + | f nk (x l ) − f n p (x l )|.
La suite f nk (x l ) étant convergente, elle est de Cauchy. Comme ω(0) = 0 et ω continue on
obtient que la suite f nk (x) est de Cauchy. On note alors f (x) cette limite et (1) est démontré.
Par passage à la limite la propriété (2) subsiste pour la fonction f .
Montrons la propriété (3). Soit K un compact de E et soit ε > 0. La collection des boules
B (x, ε), x ∈ E , recouvre K . Comme K est compact soient x 1 , . . . , x p ∈ E tels que la famille
DEUX THÉORÈMES
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(B (x j , ε))1≤ j ≤p soit un sous-recouvrement fini de K . Choisissons un indice m(p) tel que pour
tout 1 ≤ j ≤ p et pour tout n k ≥ m(p) on a
| f nk (x j ) − f (x j )| ≤ ε.
Si x est un élément de K , x appartient à une boule B (x j , ε) ce qui donne pour tout n k ≥ m(p)
| f nk (x) − f (x)| ≤ | f nk (x) − f nk (x j )| + | f nk (x j ) − f (x j )| + | f (x) − f (x j )|
≤ ε + 2ω(ε).
À une bonne rédaction près la suite f nk converge uniformément sur K .
Nous avons donné ici la version RN . Il faut savoir que ce théorème s’étend dans un cadre
topologique plus général.
Théorème 11. Soit ( f n ) une suite de fonctions continues de (E , d E ) séparable dans (F, d F ).
On suppose que la suite ( f n ) est équicontinue et equibornée (pour tout x dans E l’ensemble
{ f n (x) ; n ∈ N} est compact). Alors il existe une sous suite ( f nk )k∈N et une fonction continue f
définie de E dans F telles que
— f nk converge simplement vers f
— f nk converge uniformément sur tout compact de E .
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