les caractéristiques distinctives de la musique haute

YANNICK LAPOINTE
LES CARACTÉRISTIQUES DISTINCTIVES
DE LA MUSIQUE HAUTE-FIDÉLITÉ
Mémoire présenté
à la Faculté des études supérieures et postdoctorales de lUniversité Laval
dans le cadre du programme de maîtrise en musique
pour lobtention du grade de Maître en musique (M. Mus.)
FACULTÉ DE MUSIQUE
UNIVERSITÉ LAVAL
QUÉBEC
2012
© Yannick Lapointe, 2012
Résumé
Lorsquil a commencé à être plus communément utilisé au début des années 1930, le terme « haute-
fidélité », appliqué à lenregistrement sonore, faisait référence à la transparence des technologies
denregistrement, à leur habileté à reproduire aussi fidèlement que possible une réalité sonore préalable à
lacte denregistrer. Ensuite, à mesure que les technologies de production et de reproduction en
enregistrement sonore ont progressé et que de nouvelles idéologies ont émergé, la définition du terme est
devenue de plus en plus floue, tout comme les caractéristiques distinctives des systèmes de reproduction
haute-fidélité, des phonogrammes haute-fidélité, et de la musique haute-fidélité. Cette étude vise à
déterminer quelles sont, en 2012 et selon la perspective des membres de la communauté haute-fidéli,
ces caractéristiques qui distinguent la musique « haute-fidélité » de toute autre forme de musique. Pour
répondre à cette problématique, les principaux concepts fondamentaux et idéologies de la haute-fidélité
seront explorés et discutés.
Abstract
When it started being commonly used at the beginning of the 1930s, -applied to
recorded sound, referred to the transparency of recording technologies, to their ability to reproduce as
faithfully as possible an external reality that existed a priori to the act of recording. In the following
decades, as the technologies of production and reproduction in phonography evolved and new recording
ideologies emerged, the definition of the term became more and more blurred, as did the distinctive
characteristics of high-fidelity systems, phonograms, and music. This paper aims to determine what are,
in 2012 and from the perspective of the hi-fi enthusiasts, the distinctive characteristics of high-fidelity
music, when compared to any other form of music which would not qualify as such. To answer this
central question, todays main high-fidelity concepts and ideologies will be explored and discussed.
Avant-propos et remerciements
Introduction
Dans la présente étude, je tente de rendre compte aussi objectivement que possible dun grand
nombre didées qui circulent au sein dune communauté particulière de consommateurs de
musique enregistrée : la communauté haute-fidélité. Cela dit, ayant moi-même des valeurs assez
définies par rapport à lenregistrement sonore et me considérant comme un membre à part
entière de cette communauté haute-fidélité, il est clair que, malgré que je tente de rester aussi
objectif que possible, létude sera marquée de ma propre idéologie. Cest dautant plus vrai
lorsquon considère que létude a pour point de départ diverses hypothèses basées, au moins en
partie, sur ma propre conception de la haute-fidélité, sur mon expérience personnelle au sein de
la communauté haute-fidélité, ainsi que sur mes expériences professionnelles en tant que
réalisateur et ingénieur sonore.
Sachant donc quil est impossible en tant que chercheur dêtre totalement objectif et de
faire complètement abstraction de mes propres valeurs, jespère quen mettant le lecteur au
courant de mes préconceptions, il sera mieux outillé pour comprendre mon discours, ses origines
et ses conclusions. Cest pourquoi je compte consacrer cet avant-propos, dune part, à dresser un
court portrait de mon parcours, incluant comment jen suis venu à mintéresser à létude de la
musique haute-fidélité; et dautre part, à exposer sommairement mes conceptions personnelles de
la musique enregistrée et de la haute-fidélité.
Mon parcours
Après plusieurs années détudes postsecondaires en musique, jai réalisé à quel point les
enregistrements musicaux ont pu être dune importance primordiale dans ma formation et mon
éveil à la musique : nayant jamais vraiment été un grand amateur de spectacles ou de concerts,
cest par le biais des phonogrammes que la majorité de mes contacts avec la musique sest
toujours concrétisée. Dailleurs, compte tenu de lomniprésence de la musique enregistrée dans
nos sociétés occidentales actuelles (radio, lecteurs mp3, musique dambiance dans les lieux
publics, sonneries téléphoniques, musique à la télévision, dans les jeux vidéo, etc.), cest
probablement aussi le cas de la plupart de mes contemporains. Ayant donc grandi dans un
univers la musique enregistrée était omniprésente, jai naturellement développé une
préférence pour la musique enregistrée plutôt quen direct. Glenn Gould et les Beatles ont cessé
de jouer en concert à un certain moment de leur carrière pour ne se consacrer quà
lenregistrement, car ils ont su apprécier le fait que le médium en plus doffrir la possibilité
dune multitude deffets créatifs exclusifs et donc des palettes sonores considérablement plus
étendues permet dobtenir, avec lédition, un niveau de précision (certains diraient même de
perfection) impossible lors dune prestation en direct. Tout comme ces grands artistes, jai été
séduit par ces avantages de la musique enregistrée sur la musique en direct, qui en ont fait pour
moi le médium de prédilection. Évidemment, la musique en direct comporte aussi ses avantages,
et je ne vise pas à débattre ici de la valeur de lune ou lautre de ces formes de médiation, mais
plutôt dindiquer quelques-unes des raisons qui expliquent ma préférence pour la musique
v
enregistrée. Étant donné cette préférence, jai, à partir dun certain moment, graduellement
délaissé linterprétation (ma formation musicale est à la base en piano et en guitare) au profit de
la production denregistrements musicaux, particulièrement comme réalisateur et ingénieur
sonore. Cest ensuite au travers de cette passion pour la réalisation que mon intérêt pour la haute-
fidélité sest développé : à mesure que lacuité de mon écoute sest accrue, je suis devenu de plus
en plus critique envers la qualité des systèmes de reproduction sur lesquels jeffectuais cette
écoute.
Lidée détudier la musique haute-fidélité a germé dans mon esprit lorsquau tournant de
lannée 2010, loccasion ma été offerte par le Salon Son & Image (SSI), un important salon
commercial montréalais consacré à lindustrie de la haute-fidélité, dassister et dans une
moindre mesure de participer à la production de lédition 2010 de leur disque annuel de
musique haute-fidélité. Après plusieurs jours passés au studio denregistrement, je me suis rendu
compte quil y avait des différences certaines subtiles et dautres moins entre ce que le
producteur, le réalisateur, lingénieur sonore, les musiciens et moi-même considérions comme de
la musique haute-fidélité. Dans le contexte de la production dun disque de musique, la
définition quont les acteurs du genre musical produit est fondamentale, et des divergences
dopinions quant à cette définition peuvent avoir un réel impact sur la production et son produit.
Dans le cas du disque du SSI, les différences de conception que jai remarquées nont pas eu de
conséquences négatives, car personne à part moi ne semble les avoir vraiment remarquées ou en
avoir tenu compte, et tous se sont tacitement accordés à suivre la vision du réalisateur.
Néanmoins, cette expérience ma suffisamment intrigué pour que je reparte du studio avec la
ferme intention den apprendre davantage sur la nature de la musique haute-fidélité, dans le but
déventuellement en réaliser moi-même un jour. Mon raisonnement était le suivant : pour réaliser
de la musique haute-fidélité, encore faut-il savoir objectivement en quoi elle consiste et quelles
sont les caractéristiques qui la distinguent.
Ma conception de la musique enregistrée et de la haute-fidélité
Un peu comme un musicien qui aurait toujours aimé la musique de Beethoven sans trop savoir
pourquoi jusquà ce quil apprenne à lanalyser et à la comprendre, jai réalisé, à la suite de ma
formation en ingénierie sonore, que mon intérêt envers certains phonogrammes réside au moins
autant dans la qualité de leur réalisation et de leur sonorité que dans la qualité de la prestation ou
de la composition musicale abstraite qui y figurent. En fait, conséquence probable de ma
spécialisation, jaccorde généralement aujourdhui plus dimportance (ou de pertinence) à la
qualité de la production et du son dun enregistrement quà tout autre paramètre. Pour moi, un
phonogramme dont la qualité de la réalisation laisse à désirer risque dêtre très peu écouté, et ce,
même si la composition musicale et la prestation qui y figurent sont excellentes.
En haute-fidélité, bien que je sois conscient de limportance quoccupe pour plusieurs le
concept de transparence ou de fidélité à un original, ce dernier na jamais vraiment fait partie de
mes critères personnels dévaluation. Pour moi, la principale caractéristique qui distingue un
phonogramme haute-fidélité de tout autre phonogramme est la qualité exceptionnelle de sa
sonorité. Peu mimporte que cette sonorité reproduise aussi fidèlement que possible celle dun
concert, ou celle dun instrument de musique acoustique, ou quelle ne soit constituée que de
sources électriques (amplifiées) ou électroniques. Pour ce qui est du système de reproduction
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