Lecture analytique 2
Victor Hugo, «Un jour Je vis...», Poème liminaire des Contemplations, 1856
Introduction
Le romantisme naît en France en 1801 dans le Roman, avec René de Chateaubriand ; et 1820 en
poésie avec Les Méditations Poétiques de Lamartine. Ce mouvement revendique une sensibilité
nouvelle reposant sur l’exaltation du sentiment, le goût pour le passé, le rêve et la nature, la
défense des opprimés au nom de la liberté. Il s’oppose ainsi au goût et à la tradition classique.
Le recueil des Contemplations a été publié en 1856 : V. Hugo a! 54 ans. Il est alors un poète célèbre
depuis! sa jeunesse. Le recueil est marqué surtout par la mort d’une de ses filles, Léopoldine en
1843 : il s’organise en deux parties : I. Autrefois, et II. Aujourd’hui.
!Le titre, les Contemplations, au pluriel, a une dimension philosophique et religieuse. La
contemplation a même souvent une dimension mystique, comme les «Mémoires d’une âme” dans
laquelle le lecteur est sûr de se reconnaître comme en un miroir. «Un jour, je vis» est le premier
poème du recueil.
Comment Hugo exprime-t-il sa vision de la fonction du poète ?
I. Une situation privilégiée et symbolique
!1. Un poème liminaire
Ce texte, assez bref, est le poème liminaire de ce long recueil. C’est dire son importance, sa valeur
symbolique, son rôle préfacier au seuil de six livres, séparés en deux (AUTREFOIS, AUJOURD'HUI!
distingués par la page ne contenant que la date du 4 septembre 1843): le premier livre est intitulé
AURORE et le dernier, AU BORD DE L'INFINI.
Ce poème ne! relève pas d’une forme fixe : il se compose de quatre quatrains alternant alexandrins
et hexasyllabes, aux rimes croisées. Il se divise en deux temps : le! récit puis le discours, dans une
progression simple et pédagogique. Les deux premiers quatrains sont construits sur un
parallélisme, avec le lien de la conjonction de coordination (et), la présence du pronom personnel
JE, le verbe au passé simple et une indication spatiale ; avec aussi le même retard (syntaxique)
dans l'apparition COD : le «navire», puis la «voix».
"2. Une apparente anecdote
Le premier quatrain se présente comme l'amorce! d'un récit traditionnel avec un verbe au passé
simple à valeur accomplie et ponctuelle. Ainsi c’est une notation de temps imprécise qui ouvre le
poème. Imprécise elle le restera de même que la notation de lieu..Où est-il exactement?
Localisation jugée sans intérêt.
L'expérience est! personnelle : le texte est écrit à la première personne! avec le je qui se manifeste!
très tôt, mais pour s’effacer aussitôt et laisser la place au complément dans les trois vers suivants.
Hugo n’évoque guère que sa position, à la fois altière (debout), et intermédiaire : il est “au bord des
flots mouvants”, à la limite de la terre et de la mer. ENTRE deux éléments. Cette position sera
redoublée par d'autres notations dans la suite du poème.
A priori le récit rapporte un événement! d'intérêt limité! : il voit un navire, «gonflant ses voiles»:
expérience banale, mais qui prend! vite un tour symbolique. La dernière strophe en effet développe
le 3ème quatrain tout en revenant à la première strophe! dont elle donne l’explication dans un ordre
symétriquement inversé! : on mesure alors toute la portée allégorique de cette scène MODESTE AU
DÉPART.