février-mars 2010 •recherche@hec III
dans leur consommation ? Ce n’est pas aussi sim-
ple, répondent les auteurs, qui observent une
certaine hétérogénéité dans chaque catégorie
d’âge : certaines jeunes femmes sont extrême-
ment fidèles à un parfum, tandis que des femmes
plus âgées en changent régulièrement. “D’autant
que les femmes, à mesure qu’elles vieillissent, ont
davantage tendance à se tourner vers des parfums
plus anciens quand elles changent de parfum”,
souligne Gilles Laurent. Ce phénomène explique
notamment le succès constant de grands parfums
lancés sur le marché il y a plus de 50 ans (le Nº 5
de Chanel, par exemple).
RECRUTEMENT FIABLE : CELUI DES
CONSOMMATRICES LES PLUS ÂGÉES
“Les publicités pour les parfums mettent constam-
ment en scène de jeunes individus, y compris pour
les produits qui ont des clientèles plus âgées”,
rappelle Gilles Laurent. À tort ou à raison ? Les
chercheurs expliquent par leur analyse que le lan-
cement d’un nouveau parfum ciblant une popula-
tion relativement jeune reste très risqué. En effet,
la propension des jeunes consommatrices à
changer de marque rend les succès généralement
éphémères. En revanche, la conquête de consom-
matrices plus âgées, comme les 40-60 ans, est
probablement plus rentable car celles-ci resteront
plus longtemps fidèles. Mais est-il possible de
séduire des consommatrices matures avec de nou-
veaux parfums alors qu’elles sont en moyenne plus
fidèles à une marque ? Absolument, répondent
Gilles Laurent et Raphaëlle Lambert-Pandraud.
En effet, leur étude en magasin du comportement
de 260 femmes leur permet d’évaluer les durées
d’utilisation moyenne du parfum favori en fonction
des différentes catégories d’âge. Celles-ci sont de
2,4 ans pour les moins de 30 ans, 6,8 ans pour les
31-49 ans, 12 ans pour les 50-64 ans, et 23 ans
pour les plus de 65 ans. Conclusion : les plus âgées
n’ont pas toutes adopté leur parfum avant 30 ans
et les recruter à un âge mature est possible ! “Par
exemple, si vous parvenez à recruter une consom-
matrice de 48 ans, elle utilisera votre parfum pour
une durée de 12 ans en moyenne, alors que gagner
une cliente de 25 ans garantira statistiquement
des ventes sur une durée moindre, 2 ans et demi!”,
explique Gilles Laurent. ■
D’après un entretien avec Gilles Laurent et l’article “Why Do Older
Consumers Buy Older Brands? The Role Of Attachement And
Declining Innovativeness” (à paraître dans Journal of Marketing),
co-écrit avec Raphaëlle Lambert-Pandraud.
APPLICATIONS POUR LES RESPONSABLES MARKETING
Dans un contexte global de vieillissement de la population, les résultats de cet article peuvent aider
à recadrer les politiques marketing en parfumerie, ainsi que dans d’autres secteurs de produits ou
de services. Les auteurs attirent l’attention des marketeurs sur l’importance d’intégrer l’âge des
consommateurs dans leur stratégie. Gilles Laurent souligne d’une part la nécessité d’avoir un portefeuille
de produits ou de marques bien équilibré en termes de catégories d’âge, et d’autre part l’intérêt de viser
des cibles d’âge moyen ou mature, pour entretenir la fidélité de la clientèle actuelle mais aussi pour
s’attacher une nouvelle clientèle dont on sait qu’une fois conquise elle aura une forte propension
à rester fidèle.
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