Directeur de publication :
Dr Toàn Khúc
Comité de rédaction :
Dr Boris Bastens, Dr Denis Brisbois,
Dr Bénédicte Daenen, Dr Toàn Khúc, Dr Jean-Pierre Lambert,
Marianne Lebrun, Dr Christian Mossay,
Dr Alain Nchimi, Dr Philippe Olivier, Dr Martine Smeekens
Secrétariat : Anne-Marie Mandic 04.224.80.98
Contact rédaction : Marianne Lebrun
tél. 04.224.85.62 - fax. 04.224.80.93
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blueprint est le périodique de l’association des médecins exerçant aux Cliniques Saint-Joseph, membres du Centre Hospitalier Chrétien (CHC)
Trimestriel - N°85 – Décembre 2007 Ed. resp.: Association des médecins exerçant aux Cliniques Saint-Joseph
blueprint
85
Port payé
tarif postal
préférentiel
DANS CE NUMERO
Le point sur...
Actualités thérapeutiques
sur les MICI ��������������������������pages 2-3
Comment je traite, comment
j’explore
Comment traiter un cancer du rein
en 2007 ���������������������������������pages 3-4
Clinique et thérapeutique
Douleur chronique
et résilience ��������������������������pages 5-6
Du côté du généraliste
Maison de garde de médecine
générale �������������������������������������page 6
Vie des cliniques
Bébé prématuré: une consultation
de follow-up ������������������������������page 7
Sénologie: compétence reconnue
extra-muros et équipe
renforcée �����������������������������������page 7
Nouvelles têtes
���������������������������������������������������page 8
Editorial
Nous préparons la saison 2008 des
rencontres mensuelles avec la commis-
sion consultative des médecins généra-
listes (CCMG)� An de mieux rencontrer
vos préoccupations de praticien, nous
sommes à votre écoute pour le choix de
thèmes à développer chaque mois� N’hé-
sitez donc pas à envoyer vos suggestions
par mail à marianne�lebrun@chc�be qui se
charge d’organiser les rencontres�
Parallèlement à cela, dans la même op-
tique d’une meilleure communication, le
répertoire des consultations des 6 clini-
ques du CHC est (enn) à l’imprimerie�
Il vous permettra d’obtenir aisément les
coordonnées de chacun des médecins
du CHC dans son(ses) site(s) de travail�
Vous recevrez tout prochainement votre
exemplaire�
Répertoire, encore� Nous avons, sur no-
tre intranet, un répertoire des médecins
généralistes qui travaillent avec nos
cliniques, an de faciliter les contacts
de l’hôpital vers la médecine générale�
N’oubliez pas d’avoir le réexe de nous
envoyer tout changement dans votre
pratique (adresse, téléphones, consulta-
tions), par mail à marianne�lebrun@chc�be
ou par téléphone au 04�224�85�62
Pour celles et ceux qui n’ont pas pu parti-
ciper à notre Journée médicale d’octobre,
ou pour celles et ceux qui ont particuliè-
rement appréc l’un ou l’autre exposé,
toutes les présentations sont désormais
consultables sur notre site www�chc�be
En cette période de n d’année, je ne
manquerai pas, au nom de tous mes
confrères, de vous souhaiter de joyeuses
fêtes en famille ainsi que nos meilleurs
vœux pour l’année 2008�
Bonne lecture de ce dernier numéro
2007,
Dr Toàn Khúc |
Du change-
ment à la
pédiatrie de
l’Espérance
Le Dr Françoise Bury a
assumé les fonctions
de chef du départe-
ment de pédiatrie du
CHC depuis sa créa-
tion en 2002. Au terme d'un processus initié en
juin dernier par des élections au sein du collège
des pédiatres, le Dr Pierre Philippet vient d'être
nommé par le conseil d'administration du CHC
pour lui succéder.
Le département de pédiatrie du CHC regroupe
maintenant en une entité homogène 44 pédiatres
répartis sur:
- 2 sites d'hospitalisation: les cliniques de l’Es-
pérance et Saint-Vincent
- 2 services d'urgences: Espérance et Sainte-
Elisabeth Heusy
- 3 maternités: Sainte-Elisabeth Heusy, Saint–
Joseph et Saint-Vincent
- et 6 lieux de consultations: Espérance, Sainte-
Elisabeth Heusy, Saint-Joseph, Saint-Vincent,
Notre-Dame Hermalle et le cabinet pédiatrique
d'Ans
Cette équipe a le souci d'offrir aux patients et à
leurs familles une médecine à la pointe de la qualité
scientique et humaine. Elle travaille en contact
étroit avec les médecins des familles, généralistes
ou pédiatres, et entretient des relations privilé-
giées avec de nombreux secteurs ayant déve-
loppé une expertise dans le domaine des soins
à l'enfant (chirurgiens, radiologues, biologistes,
gynécologues, …) et avec de nombreux centres
pédiatriques nationaux et internationaux.
En perpétuelle évolution, elle reste un pôle d’ex-
cellence dans le domaine des soins à l’enfant, à
la disposition de la communauté médicale de la
région liégeoise et plus largement des régions
environnantes, tant francophones que néerlando-
phones.
Clinique Saint-Joseph
Rue de Hesbaye 75
4000 Liège
tél� 04�224�81�11
fax� 04�224�87�70
Clinique de l’Espérance
Rue Saint-Nicolas
447- 449
4420 Montegnée
tél� 04�224�91�11
fax� 04�224�90�02
Clinique Notre-Dame
Rue Sélys-Long-
champs 47
4300 Waremme
tél� 019�33�94�11
fax� 019�33�96�55
Clinique Notre-Dame
Rue Basse Hermalle 4
4681 Hermalle /s
Argenteau
tél� 04�374�70�00
fax� 04�374�70�02
a
Les maladies inammatoires
chroniques de l’intestin (MICI),
en pratique la maladie de
Crohn (MC) et la rectocolite
hémorragique (RCH), sont
des inammations chroniques
du tube digestif atteignant
exclusivement le rectum et
le côlon pour la RCH et tout
le tube digestif avec une
prédilection iléocaecale pour
la MC�
L’incidence de ces maladies a nettement augmenté ces dernières années et particulièrement
celle de la MC. De nos jours, ces pathologies sont devenues courantes et les médecins, généra-
listes et spécialistes, sont fréquemment amenés à gérer ensemble ce type de cas. Les avancées
dans le traitement de ces maladies ont été déterminantes ces dernières années, et l’apparition
des anticorps anti-TNFα (anti-tumor necrosis factor) a transformé la prise en charge de nos
malades. Le TNFα est une cytokine qui joue un rôle primordial dans la pathogenèse des lésions
inammatoires intestinales.
L’iniximab (Remicade®) est un anticorps anti-TNFα chimérique comportant une partie murine (à
75% humain, 25% murin). Il est le premier à avoir obtenu le remboursement sous conditions pour
la MC et plus récemment pour la RCH. Pour cette dernière, l’iniximab est actuellement la seule
biothérapie qui a clairement montré son efcacité dans cette indication.
L’iniximab est indiqué dans le traitement de la maladie de Crohn active, sévère, chez les patients
qui ne répondent pas à une thérapeutique bien conduite par corticoïdes et/ou un immunosup-
presseur (minimum 3 mois) ou lorsqu’il y a une intolérance ou une contre-indication à ces traite-
ments. Il est encore indiqué dans les maladies de Crohn actives et stulisées n’ayant pas répondu
à une prise en charge conventionnelle et bien menée (antibiotiques, drainage et immunosuppres-
seur). Dans la rectocolite hémorragique active et sévère, l’iniximab est indiqué chez les patients
qui n’ont pas répondu de manière optimale à un traitement adéquat à base d’aminosalicylates
(5-ASA), corticoïdes et/ou immunosuppresseur.
Les différentes grandes études réalisées sur l’iniximab (ACCENT 1 et 2 pour la MC, ACT 1 et 2
pour la RCH) ont clairement démontré sa supériorité par rapport au placebo chez les patients en
échec d’une thérapeutique classique.
La perfusion d’iniximab est le plus souvent très bien tolérée. Elle se fait en clinique de jour,
sous surveillance médicalisée, avec un monitoring de la pression artérielle et de la fréquence
cardiaque. L’équipe inrmière assure une prise en charge optimale à tous niveaux. Malgré une
injection intraveineuse de corticoïdes au préalable, la perfusion peut provoquer exceptionnelle-
ment des réactions immédiates de type anaphylactoïde. Il existe un plus grand risque d’immuni-
sation avec des anticorps chimériques qu’avec des anticorps humanisés. Au cours du traitement,
on peut observer l’apparition d’anticorps anti-iniximab (ATI). Ces ATI favorisent les réactions à la
perfusion et des concentrations élevées de ceux-ci mènent à la perte de réponse à l’iniximab.
On utilise habituellement un immunosuppresseur en complément de l’iniximab pour limiter la
formation de ces ATI, même si le traitement par immunosuppresseur seul s’était soldé par un
échec.
Deux nouveaux anti-TNFα ont fait leur apparition dans l’arsenal thérapeutique des MICI. Actuel-
lement, selon les études réalisées, ils concernent plus particulièrement la maladie de Crohn. Il
s’agit de l’adalimumab (Humira®), un anticorps recombinant monoclonal humanisé et du certo-
lizumab pegol (Cimzia®), un fragment pegylé d’anticorps anti-TNFα 95% humanisé. Des essais
de phase III ont validé l’efcacité de ces 2 molécules pour induire et maintenir une réponse
ainsi qu’une rémission au cours des formes sévères réfractaires ou stulisantes de la maladie de
Crohn.
Le mode d’administration de ces traitements est sous-cutané, au contraire de l’iniximab qui
est intraveineux. Cela permet aux patients, à certaines conditions et après une période d’essai
sous surveillance, de se traiter au domicile. Les indications sont identiques à celles de l’iniximab
et on étudie actuellement leur intérêt chez les patients intolérants ou chez ceux qui perdent la
réponse à l’iniximab. L’apparition d’anticorps anti-adalimumab et anti-certolizumab est décrite,
mais semble sans conséquence sur l’efcacité du médicament.
La tolérance globale de ces nouveaux traitements semble bonne, un effet indésirable fréquent
est la réaction locale au point d’injection. Le risque d’infection sévère reste présent, surtout lors
d’administration de fortes doses. Enn, la prescription concomitante d’un immunosuppresseur
ne semble pas modier la réponse au traitement ni modier l’apparition d’effets secondaires ou
d’anticorps anti-adalimumab ou anti-certolizumab.
En conclusion, les anti-TNFα ont bouleversé la prise en charge des patients atteints d’une MICI
sévère. Ces molécules ont clairement permis d’améliorer la qualité de vie de ces malades et
pourraient même modier l’histoire naturelle de leur maladie.
L’apparition prochaine sur le marché de l’adalimumab (Humira®) (prévue début 2008) et du certi-
lizumab pegol (Cimzia®) va élargir nos possibilités thérapeutiques. Ces médicaments sont déjà
disponibles dans notre service à titre compassionnel ou à titre scientique. Les premiers résultats
Maladie de Crohn colique en poussée
Aspect de la paroi colique après un
traitement d’induction par anti-TNFα
2
Actualités thérapeutiques sur les MICI
lepointsur...
Contact
Clinique Saint-Joseph
Service de
gastroentérologie
04�224�89�59
dans notre pratique quotidienne sont également très encourageants. Mais il ne faut certaine-
ment pas oublier l’iniximab qui bénécie d’une excellente expérience d’utilisation, doublée d’une
quantité importante de publications concernant de nombreux patients. Seules les études à venir
permettront d’identier d’éventuelles indications spéciques pour chaque anti-TNFα. Les biothé-
rapies sont en pleine expansion et, très certainement, de nouvelles molécules feront encore leur
apparition en pratique courante.
Drs Arnaud Colard, Marc Delforge, Fernand Fontaine, | gastroentérologie
3
Plus de 46�000 nouveaux
cas de carcinomes rénaux
sont découverts chaque
année en Europe� Ils sont à
l’origine de plus de 22�000
décès� L’incidence annuelle
et le taux de mortalité
pour la Belgique sont
respectivement d’environ
1�200 nouveaux cas et plus
de 600 décès par an� Son
incidence augmente de 2%
par an�
comment jetraite comment j’explore
Le cancer du rein représente 3% des cancers de l’adulte. Sur toutes les masses rénales, 15%
sont tumorales. Les patients avec ce type de tumeur sont généralement curables si la maladie
est localisée et de stade débutant. Dans ces cas, une néphrectomie partielle ou complète (en
fonction de la taille de la tumeur) peut espérer donner le meilleur taux de survie sans récidive. Par
contre, les tumeurs rénales avancées ou métastatiques se révèlent résistantes à la plupart des
thérapies systémiques. Cependant, des résultats récents utilisant des thérapies ciblées sur des
récepteurs au VEGF et au PDGF ont montré une amélioration signicative sur le taux de réponse
au traitement, sur la survie sans progression, et dans certains cas, sur la survie globale.
Maladie hétérogène
Le cancer du rein est une entité hétérogène d’un point de vue histologique et génétique. Le
carcinome à cellules claires est la tumeur rénale la plus fréquente (80% des tumeurs épithéliales
rénales) devant le carcinome papillaire (10 à 15%).
Plus de 60% des tumeurs à cellules claires sporadiques sont associés à une anomalie du gène
von Hippel Lindeau (VHL). Un décit en protéine VHL est associé à une surexpression du VEGF et
du PDGF, ce qui laisse entrevoir des perspectives thérapeutiques spéciques. Ces deux facteurs
de croissance surexprimés se lient spéciquement à leurs récepteurs, récepteurs transmembra-
naires à activité tyrosine kinase exprimés à la surface des cellules. Une fois activés, ces récep-
teurs déclenchent une cascade enzymatique au départ de l’activité tyrosine kinase amenant la
cellule à devenir insensible aux signaux anti-prolifératifs, à acquérir une résistance à l’apoptose,
à se répliquer de manière illimitée, à développer la capacité de stimuler l’angiogenèse, à déve-
lopper des métastases.
Pronostic
Le pronostic du cancer du rein est actuellement limité puisque 1 patient sur 2, tous stades
confondus, décède de sa maladie. Un tiers des patients présente déjà au moment du diagnostic
une extension locale de la tumeur ou un stade IV.
Dans les stades précoces, le traitement repose sur la néphrectomie partielle ou radicale en fonc-
tion de la taille de la tumeur. Toutefois, 20 à 40% des patients atteints d’un cancer rénal dévelop-
peront des métastases à distance au cours de leur maladie. La survie à 5 ans est de 75% pour
les stades I et II, 40% pour les stades III et moins de 10% pour les stades IV.
Comment traiter un cancer du rein en 2007
4
Traitements
Le carcinome du rein métastatique fait partie des cancers les plus
difciles à traiter, en raison de sa résistance quasi-universelle à
l’ensemble des agents chimiothérapeutiques et de sa sensibilité
limitée aux effets de la radiothérapie. Après des résultats décevants
obtenus avec l’hormonothérapie ou la chimiothérapie convention-
nelle, ressort l’idée que des rémissions spontanées pourraient être
médiées par le système immunitaire. Des essais thérapeutiques ont
été menés avec les cytokines au début des années 1980 jusqu’à ce
jour. Cependant, les résultats obtenus ont été décevants. Les traite-
ments avec l’IFNa et/ou l’IL2 montrent des taux de réponse de 10 à
20% et des survies de l’ordre de 10 à 13 mois, allant jusque 6 mois
pour les patients présentant un facteur pronostique défavorable.
Et tout ceci au détriment d’effets secondaires importants comme
température, syndrome grippal, dépression, …
Nouveaux traitements
De nouvelles thérapies ciblées ont pu être proposées grâce aux
progrès dans la compréhension de la carcinogenèse des tumeurs
rénales (cf. supra), en inhibant l’activité tyrosine kinase du VEGF et
du PDGF.
Le sunitinib (Sutent®) et le sorafenib (Nexavar®) sont des inhibiteurs
oraux multicibles, hautement sélectifs, des récepteurs tyrosine
kinase du VEGF et du PDGF.
Des études comparatives, randomisées, multicentriques de phase III
menées chez des patients atteints de cancer rénal métastatique ont
montré la supériorité de ces nouvelles thérapeutiques par rapport
aux cytokines, avec un prol de tolérance bien plus acceptable.
Sur 375 patients traités par Sutent®, par rapport à 375 patients rece-
vant de l’IFNa, différents paramètres ont été analysés:
- la survie sans progression est prolongée de 6 mois (diminution
du risque de progression tumorale de 58,5%)
- le taux de réponse objective passe de 6% à 31% avec le Sutent®
(de plus, une stabilité tumorale est acquise chez 48% des
patients)
- la qualité de vie des patients traités par Sutent® est signicative-
ment meilleure que celle des patients traités par IFNa
Le prol de sécurité de ces traitements est facilement gérable. Ce
sont des traitements oraux qui ne nécessitent pas d’hospitalisa-
tion. Les principaux effets secondaires sont la diarrhée, la fatigue,
les nausées, l’hypertension, les signes cutanés, les stomatites, une
rare toxicité hématologique, mais tout ceci dans une nettement
moindre mesure qu’avec des traitements tels les cytokines ou les
chimiothérapies traditionnelles.
Conclusions
Le cancer rénal métastatique est une tumeur de pronostic très
défavorable avec peu de traitements palliatifs efcaces. Toutefois,
l’apport des thérapies ciblées permet d’entrevoir de nouvelles pers-
pectives thérapeutiques possédant un excellent index thérapeutique
(rapport efcacité/toxicité).
Dr Geoffrey Matus, | oncologie hémato-immunopathologie
Contact
Clinique Saint-Joseph
Service d’oncologie
04�224�89�90
Cancer du rein
Bilan d'extension
Maladie métastatique
Thérapie ciblée
Sutent
®
Stade avancé loco-régional
Chirurgie seule
Surveillance
Stade localisé
Algorithme simplié de la prise en charge d’une néoplasie rénale
5
Douleur chronique et résilience
cliniqueetthérapeutique
Sa volonté est de proposer une dénition originale de la douleur chronique, dans laquelle les
soignants et les patients peuvent trouver des clés pour intervenir sur les cercles vicieux qui la
constituent.
D’emblée, le Dr Bénézech nous rappelle le rôle protecteur de la douleur. Elle fait partie de notre
quotidien et nous comptons sur elle comme signal d’alarme pour appréhender de nombreux
éléments de notre santé. Cependant, nous devons être prudents quant à l’interprétation d’une
sensation douloureuse. La douleur est là, aucun doute, mais que me dit-elle ? Et cette réalité
complexe en douleur aiguë l’est encore plus en douleur chronique.
La douleur chronique est considérée comme cause de tous les désordres médicaux, psychologi-
ques et sociaux qui vont se cumuler dans le temps. Mais, pour l’orateur, globalement, cette vision
de la douleur chronique comme douleur aiguë qui dure, est un échec. Il nous faut accepter une
certaine chronicité de la maladie avec, comme d’autres pathologies chroniques, des périodes
meilleures que d’autres, mais probablement la persistance d’une douleur occupant une place
plus ou moins importante. (…) Levons immédiatement une ambiguïté qui parasite tout ce monde
de la douleur chronique, patients et médecins. L’absence d’éléments d’imagerie (radio, scanner)
montrant une lésion anatomique ne signie pas que la personne ne souffre pas. Une personne
qui dit qu’elle a mal a mal…
Le Dr Bénézech propose une dénition de la douleur chronique comme étant l’exacerbation d’une
souffrance ancienne qui, à l’occasion d’un événement traumatique (physique et/ou psychique) va
se manifester et entraîner, en cercles vicieux avec la douleur, des troubles du sommeil, une dimi-
nution ou un arrêt des activités sociales et physiques, une majoration des traits psychocomporte-
mentaux défavorables en lien avec un processus de deuil inachevé. Ces cercles vicieux risquent
de s’autonomiser, par rapport au traumatisme déclencheur, en l’absence d’autres processus de
compensation.
Et c’est qu’intervient la résilience ou extraordinaire richesse d’être qui permet, sur une souf-
france de jeunesse quasi omniprésente, de développer une énergie d’activité et de travail éton-
nante. Mais cette fuite en avant peut aboutir dans le mur de la souffrance, réactivée lors d’un
événement traumatique.
La douleur chronique s’accompagne le plus souvent de «catastrophisme». La personne exprime
son incapacité à centrer sa vie sur autre chose que sa douleur. Il n’y a pas d’autres perspectives
d’avenir. La douleur occupe toute la place et plus rien n’est et ne sera possible. A cette attitude,
le Dr Bénézech propose d’opposer « l’acceptation »: la personne prend acte de cette réalité de
la douleur et continue ses projets, malgré ou avec la douleur, autant que possible. Cette dernière
attitude est reconnue comme la plus efcace contre la douleur, le catastrophisme étant l’attitude
la plus douloureuse de toutes.
Il s’agirait donc de voir le verre à moitié plein plutôt qu’à moitié vide ? Il sufrait d’un changement
d’attitude psychique pour résoudre le problème ? Il s’agirait plutôt d’un changement de dyna-
mique ! L’homme n’est pas réductible à une machine. Un élan vital, une force vitale, un principe
vital (en référence au vitalisme montpellierain de PJ Barthez qui l'a développé au 18e siècle),
véritable organisateur de la vie, explique par son dysfonctionnement la plupart des pathologies.
Il s’agirait donc de proposer au patient une dynamique qu’il a déjà connue et qu’il est le seul à
pouvoir mettre en œuvre. Tout ce qui permettra la remise en route du processus de vie est le
bienvenu. Et l’orateur invite les personnes douloureuses chroniques à inventer en permanence
les processus actifs qui constituent nos équilibres de vie. Selon lui, le traitement de la douleur
passe par l’innovation, l’imagination, la création.
Marianne Lebrun, | service communication
Dans le cadre de son 10e
anniversaire, le centre
de la douleur chronique
du CHC a accueilli, le 5
novembre, le Dr Jean-
Pierre Bénézech pour une
conférence sur le thème «La
douleur chronique, une face
cachée de la résilience»�
L’orateur, attaché au centre
d’évaluation et de traitement
de la douleur au CHU de
Montpellier, est également
l’auteur d’un livre du même
titre, paru en 2005 aux
éditions Sauramps Médical�
1 / 8 100%