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trole dans le Golfe du Mexique, mais, bien au contraire,
du nord, pour la plupart du Canada. A cela s'ajoute
d'autre part une quantité en hausse constante de pétro-
le exploité par fracking, qui provient également du nord
de Cushing, à savoir de la Formation de Bakken située
dans le Dakota du Nord et le Montana. La circulation
des flux à l'intérieur des pipelines n'étant pas modifiable
ou seulement au prix de grands efforts financiers et
techniques, cette nouvelle donne a transformé Cushing
en un véritable goulot d'étranglement: la quantité qui
arrivait à Cushing, et y arrive encore, en provenance du
nord, est largement plus importante que celle pouvant
être transférée aux raffineries. Résultat: la constitution
de stocks immenses à Cushing et dans les environs.
Etant donné toutefois que Cushing est le point de livrai-
son des contrats de pétrole brut WTI, cet énorme stock
a, conformément à la loi de l'offre et de la demande,
exercé une pression parfois considérable sur les prix du
WTI, entraînant ainsi le début du découplage du prix du
Brent.
La construction prévue du pipeline
Keystone XL
permet-
trait d'apaiser dans une large mesure la situation. Celui-
ci transporterait le pétrole canadien depuis les zones
d'extraction directement jusqu'au site de raffinerie à
Port Arthur dans le Golfe du Mexique en contournant
Cushing, délestant ainsi largement les zones de stocka-
ge de Cushing. Toutefois, la réalisation de ce projet se
heurte, à ce jour encore, à des obstacles de nature
politique (environnementale). Etant donné qu'il s'agit là
d'un projet transfrontalier, la décision finale est,
conformément au droit américain, du seul ressort du
président des Etats-Unis. Et jusqu'à ce jour, Barack
Obama ne s'est prononcé sur aucun calendrier concret.
En raison de la complexité des processus impliqués dans
la réalisation de projets de pipelines, les difficultés de
livraison ne sont supprimées que petit à petit, comme
cela a été le cas récemment, en janvier dernier, lorsque
la portion du pipeline conduisant au Golfe du Mexique
(une portion politiquement «non problématique» du
pipeline
Keystone XL
) a été mise en service. Si d'autres
pipelines sont prévus, et pour certains déjà en cours de
construction, afin de délester Cushing, la situation de
stockage à Cushing ne devrait se détendre que légère-
ment dans un premier temps. Par conséquent, le WTI
ne peut que lentement regagner du terrain par rapport
au Brent, sachant aussi qu'il est à supposer que le WTI
subira, au second semestre, une nouvelle pression liée
au fait que plusieurs raffineries dans le Golfe du Mexi-
que devront, pendant l'été, suspendre leur activité par-
tiellement, voire intégralement, et pour un long mo-
ment, en raison de travaux de maintenance.
... les prix des produits pétroliers restent inchan-
gés
Le pétrole brut tel quel ne revêt, pour l'économie réelle,
pratiquement aucun intérêt. Ce sont bien plus les diffé-
rents produits fabriqués à partir de la matière première
par le biais de procédés de raffinage qui comptent. La
majeure partie du pétrole brut (environ 85%) est trans-
formée en carburants destinés aux moteurs à essence
(environ 45%), en carburants diesel et mazout (environ
30%) ainsi qu'en kérosène utilisé pour les moteurs
d'avions jets et turbopropulseurs (environ 10%). La
question essentielle est de savoir dans quelle mesure le
prix pour le carburant et le mazout est en corrélation
avec celui du pétrole brut: en l'absence de corrélation,
ou en présence d'une corrélation minime, les répercus-
sions de l'écart de prix décrit ci-dessus entre le WTI et le
Brent ne revêtiraient pour l'économie réelle qu'une
importance minime. Il est donc d'autant plus surprenant
de constater que, aux Etats-Unis, le prix des principaux
produits raffinés s'oriente clairement sur celui du pétro-
le brut, cependant pas sur le WTI, déterminant pour les
Etats-Unis, mais bien plus sur le Brent, pertinent pour
l'Europe, comme l'illustre le graphique ci-dessous.
En y regardant de plus près, toutefois, on comprend
mieux la corrélation avec le Brent. En effet, bien que les
Etats-Unis développent continuellement leur production
de pétrole brut depuis le début du fracking, la part de
pétrole brut importé reste encore très importante. Fin
2013, le rapport entre les importations et la production
nationale de pétrole brut se situait à environ 1:1, alors
qu'au début de la période de découplage du prix du
WTI de celui du Brent, le pétrole brut importé corres-
pondait à environ deux tiers des quantités de pétrole
brut transformées dans les raffineries américaines. Dans
cette mesure, il n'est pas étonnant que le prix des pro-
duits raffinés soit plutôt en corrélation avec le Brent et
moins avec le WTI. On peut toutefois supposer que, la
baisse de la dépendance en pétrole brut des Etats-Unis
aidant, les prix des carburants et du mazout s'oriente-
ront à l'avenir de plus en plus sur le WTI, une tendance
d'ores et déjà reconnaissable par endroit pour le prix du
carburant destiné aux véhicules normaux.
Ill. 5: Les prix spot des produits distillés sont plutôt en corréla-
tion avec le Brent qu'avec le WTI
Source: EIA, Raiffeisen Research
On remarque que les écarts de prix entre les produits
raffinés décrits ci-dessus et le WTI se sont encore accen-
tués depuis l'essor du fracking: Bien que, ces dernières
années, le prix spot du WTI ait fortement chuté, les prix
du mazout, de l'essence normale, du diesel et du kéro-
sène ont enregistré une augmentation constante. Cette
évolution contraire aux attentes est sans doute due,
d'une part, à l'exploitation des capacités au sein de
l'industrie sous-traitante du pétrole brut. En effet, plus
les raffineries tournent à un taux proche de l'exploita-
80
90
100
110
120
130
2.00
2.50
3.00
3.50
4.00
2011 2012 2013 2014
Normalbenzin (USD/G) Heizöl (USD/G)
Jet-Treibstoff (USD/G) Niedrig-Schwefel Diesel (USD/G)
WTI (USD/F; r.S.) Brent (USD/F; r.S.)
Essence normale (USD/G)
Carburant pour jets (USD/G)
WTI (USD/B, éch.dr.)
Mazout (USD/G)
Diesel à basse teneur en soufre (USD/G)
Brent (USD/B; éch.dr.)