Démolition et remplacement – École Saint-Gérard

*Règlement de la Ville de Montréal 02-136 et Édifice Chaussegros-de-Léry
Règlement de la Ville de Montréal 12-022 303, rue Notre-Dame Est, 6e étage
Montréal (Québec) H2Y 3Y8
514 872-4055
ville.montreal.qc.ca/cpm
AVIS DU CONSEIL DU PATRIMOINE DE MONTRÉAL ET DU COMITÉ JACQUES-VIGER
Suite à son assemblée du 16 mai 2014
Les deux organismes sont des instances consultatives de la Ville de Montréal*.
Démolition et remplacement – École Saint-Gérard
AC14-VSTM-01
Localisation : 8525-8527, rue Berri
Arrondissement de Villeray – Saint-Michel – Parc-Extension
Reconnaissance municipale : Bâtiment d’intérêt patrimonial et architectural hors secteur de valeur exceptionnelle
inscrit au Plan d’urbanisme
Reconnaissance provinciale : aucune
Reconnaissance fédérale : aucune
Le Conseil du patrimoine de Montréal (CPM) et le Comité Jacques-Viger (CJV) émettent un avis à la demande de
l’arrondissement de Villeray – Saint-Michel – Parc-Extension. Les deux instances sont consultées sur la proposition de
démolition du bâtiment existant et le projet de remplacement, qui requièrent une modification au Plan d’urbanisme
pour le retrait de l’école de la liste des bâtiments d’intérêt patrimonial et architectural hors secteur de valeur
exceptionnelle.
NATURE DES TRAVAUX
Depuis un dégât d’eau survenu en novembre 2010, l’école Saint-Gérard a fait l’objet d’une série de travaux de
réhabilitation de certains de ses locaux ainsi que d’inspections et d’analyses sanitaires. Un problème de contamination
fongique a été identifié en 2011 et plusieurs expertises visant à évaluer la qualité de l’air intérieur et l’étendue de la
contamination ont été réalisées depuis. Leurs conclusions diffèrent quant à l’étendue et à la gravité de cette
contamination dans le bâtiment et plusieurs scénarios d’intervention ont donc été étudiés, allant de la réhabilitation de
la structure à son remplacement complet, et c’est cette dernière option qui a finalement été retenue par la Commission
scolaire de Montréal (CSDM). Le projet de remplacement de l’école envisage la construction d’un bâtiment de trois
étages situé en tête d’ilot, organisé autour d’un atrium central et dont l’entrée principale (administrative) serait placée
sur la rue de Liège. Le programme fonctionnel a été revu afin d’augmenter la capacité d’accueil, qui passerait de 428 à
642 élèves, et de se conformer aux exigences actuelles du ministère de l’Éducation.
Le dossier présenté pour cet avis comprend trois volets : les expertises qui ont mené à la décision de démolir, la
proposition de remplacement de l’école sur le même site, ainsi que les modifications aux règlements de zonage et au
PIIA en vue de permettre ce projet.
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Avis du CPM et CJV 2 École Saint-Gérard
AUTRES INSTANCES CONSULTÉES
La démolition et le remplacement de l’école Saint-Gérard ont reçu l’aval du ministère de l’Éducation, du Loisir et des
Sports.
Le CCU de l’arrondissement sera appelé à se prononcer et des consultations publiques devront également être menées
à l’échelle de l’arrondissement afin de valider une éventuelle modification au Plan d’urbanisme.
HISTORIQUE DES LIEUX 1
L’école Saint-Gérard est associée à la création et à la consolidation du noyau institutionnel de la paroisse de Saint-
Alphonse-d’Youville, autour duquel s’est développée la « Cité du Nord » dans les années 1920-1930. Elle a été
construite en deux phases très rapprochées. Une première partie, située en tête d’îlot et conçue par l’architecte Irénée
Vautrin, a été érigée en 1924-1925. Elle a été répliquée par un ajout symétrique en 1929-1930, doublant le volume de
l’école. Au fil du temps, le bâtiment a fait l’objet de quelques transformations, dont le remplacement des fenêtres et
des travaux de réfection de la maçonnerie au niveau du couronnement. L’école est restée en utilisation continue
jusqu’à sa fermeture pour cause de contamination, ordonnée en janvier 2012.
CONTEXTE DU PROJET
Depuis l’identification du problème de contamination et le transfert des élèves vers un autre établissement à la
recommandation de la Direction de la Santé publique de Montréal (DSP), en janvier 2012, plusieurs études ont été
menées par divers bureaux de consultants externes en vue d’évaluer le degré de contamination, la nature des
moisissures et les mesures correctives possibles. C’est à la lumière de celles-ci et suivant la recommandation de la DSP
que, en janvier 2013, la CSDM a voté une résolution pour demander l’autorisation de démolir le bâtiment et de
reconstruire l’école. Cette demande a été entérinée par le ministère de l’Éducation en juin de la même année.
Outre les analyses techniques, le bâtiment a également fait l’objet d’une étude patrimoniale préalable qui retrace les
grandes lignes de son évolution. Celle-ci a appuyé l’exercice d’élaboration d’un énoncé d’intérêt patrimonial pour le
bâtiment, adopté par le comité exécutif de la Ville en octobre 2013.
En préparation pour cette réunion des comités, le président du Conseil du patrimoine de Montréal a rencontré les
représentants de l’arrondissement et de la Commission scolaire de Montréal le 18 mars 2014. Il avait entre autres été
entendu que la clarté de l’information à l’égard de la contamination pour justifier la démolition constituait un élément
clé pour l’avis du CPM et du CJV.
1 Informations tirées de « Énoncé de l’intérêt patrimonial – École Saint-Gérard », 7 octobre 2013.
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Avis du CPM et CJV 3 École Saint-Gérard
ANALYSE DU PROJET
Le CPM et le CJV ont reçu les représentants de l’arrondissement Villeray – Saint-Michel – Parc-Extension, de la CSDM
et de la firme d’architectes responsable du projet de remplacement, lors de sa réunion du 16 mai 2014.
L’arrondissement a tout d’abord présenté l’école Saint-Gérard et son contexte, une synthèse de l’énoncé d’intérêt
patrimonial et les implications du projet sur le plan réglementaire. La CSDM a également fait état de l’historique du
dossier dans le contexte plus général de la problématique de contamination fongique des édifices scolaires. Le parti
architectural pour le projet de remplacement de l’école a ensuite été présenté. La période de questions et de
discussion qui a suivi a surtout porté sur les expertises techniques réalisées, leurs conclusions et recommandations
respectives et les motifs qui justifient la démolition complète de l’école aux yeux de la CSDM.
La problématique de contamination par moisissures des édifices scolaires a fait l’objet d’une grande couverture
médiatique depuis les dernières années, révélant l’étendue du défi auquel se voit confrontée la CSDM dans la gestion
du son portefeuille immobilier. C’est par le biais du cas de l’école Saint-Gérard que le CPM et le CJV sont appelés pour
une première fois à se prononcer sur cet enjeu qui affecte plusieurs autres édifices patrimoniaux appartenant à la
CSDM. Les comités en reconnaissent la nature extrêmement complexe et sensible. Il reconnaît par ailleurs qu’étant
donné ses implications pour le bien-être des occupants, et en particulier des enfants, l’enjeu de la contamination
fongique et de la meilleure réponse à privilégier ont soulevé un débat très chargé sur le plan émotif et politique. Les
comités sont aussi sensibles au sentiment d’urgence que certains ressentent en lien avec le retour des enfants dans
leur milieu.Bien qu’ils admettent la gravité du problème et la nécessité de lui trouver rapidement des solutions sûres
et durables, plusieurs considérations l’empêchent néanmoins d’appuyer la démolition de l’école Saint-Gérard, dont la
décision lui paraît prématurée.
D’une part, comme l’a souligné elle-même la CSDM, les connaissances relatives à la contamination fongique des
bâtiments constituent encore pour l’instant une science inexacte et en évolution, dont témoigne la grande variation
dans les méthodologies d’analyse, l’interprétation dessultats et les traitements recommandés par les études
réalisées à ce jour pour l’école Saint-Gérard. Contrairement au traitement de l’amiante, il n’existe à l’heure actuelle
aucun protocole précis (autre que le
Protocole de New York
), ni de balises établies, ni seuil de tolérance clair quant
aux niveaux de contamination fongique qui peuvent être tolérés.
D’autre part, l’interprétation architecturale des résultats scientifiques paraît encore défaillante à bien des égards, et on
n’a pas fait de démonstration convaincante aux comités que l’ensemble des traitements possibles avait été exploré et
invalidé. Quelle serait la performance d’alternatives telles que l’encapsulation des murs, une ventilation mécanique ou
le traitement de l’air ambiant de l’école Saint-Gérard ? La CSDM a pourtant entamé plusieurs démarches exploratoires
prometteuses dont elle lui a fait part, en collaboration avec l’Université Laval, dont une consultation d’experts
internationaux en matière de qualité de l’air et un examen des approches et solutions mises en œuvre dans d’autres
pays confrontés à l’enjeu de contamination fongique d’édifices patrimoniaux. Les comités souhaitent exprimer son
appui à la CSDM en vue de poursuivre ces démarches, dont il sera intéressé à connaître les résultats.
Par ailleurs, la CSDM a fait référence à la publication imminente d’un dossier par le comité national constitué pour
examiner cette problématique (celui-ci devait être déposé en janvier 2014). Elle a également évoqué un audit récent
de la Direction de la Santé publique par des experts internationaux, dont les résultats ne sont pas encore connus de la
CSDM. Ces exercices contribueront certainement à étayer les connaissances en matière de contamination et
d’assainissement des bâtiments et à permettre une prise de décision plus solide quant aux approches à privilégier pour
réagir à cette problématique.
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Avis du CPM et CJV 4 École Saint-Gérard
Enfin, bien que chaque cas soit unique de par la nature et l’étendue de la contamination et les spécificités du bâtiment
en cause, l’école Saint-Gérard fera vraisemblablement figure de précédent dans le traitement réservé aux cas
semblables d’édifices scolaires atteints d’une contamination fongique. Les comités souhaitent donc que toutes les
pistes de solutions autres que la démolition soient examinées en détail avant d’entériner celle-ci. Il leur semblerait
donc nécessaire de faire des essais et du monitorage à l’échelle du bâtiment, en se servant de l’école Saint-Gérard ou
l’un des autres édifices vacants de la CSDM comme laboratoire pour tester différentes solutions architecturales,
techniques et/ou mécaniques.
En regard de toutes ces considérations, du caractère irrévocable d’une démolition et de la perte considérable que
représente la disparition d’édifices scolaires tel que l’école Saint-Gérard pour le patrimoine collectif montréalais, le CPM
et le CJV recommandent un sursis à la démolition des écoles contaminées, dans l’attente de données complètes quant
aux mesures d’assainissement possibles et à leur performance. Ils recommandent également la mise en place de
mécanismes pour assurer un entretien régulier du patrimoine scolaire, qui lui paraît être la première ligne de défense
pour limiter le problème de contamination fongique.
Projet de remplacement
Lors de la présentation, les comités ont pu apprécier les qualités du projet de remplacement de l’école Saint-Gérard
maisa soulevé plusieurs questions et préoccupations par rapport à certains aspects du projet de remplacement de
l’école Saint-Gérard : déplacement de l’entrée principale en tête d’îlot sur la rue de Liège, utilisation de la brique
couleur anthracite, aménagement de la cour de récréation en dur, abattage d’un nombre important d’arbres matures
(en raison d’une implantation rapprochée des limites de terrain) dont la présence est une des caractéristiques du
noyau institutionnel et absence d’intégration de mesures écoresponsables au projet. En raison de ses réserves par
rapport à la démolition, ils n’émettront pas de commentaires plus détaillés quant à ce projet.
AVIS DU CJV ET DU CPM
Le CPM et le CJV sont défavorables au projet de démolition de l’école Saint-Gérard qu’ils jugent prématuré étant donné
les lacunes dans les connaissances et la nature encore préliminaire des enquêtes menées par rapport aux méthodes
d’assainissement. Ses recommandations sont les suivantes :
- Attendre de disposer de données scientifiques probantes quant aux traitements possibles et à leur
performance avant d’envisager la démolition des édifices scolaires de la CSDM.
- Mettre en place des mécanismes et des moyens financiers adéquats pour assurer l’entretien régulier des
édifices scolaires d’intérêt patrimonial, afin de limiter l’expansion du problème de contamination fongique.
La vice-présidente du CJV, Le président du CPM,
Original signé Original signé
Josée Bérubé Jacques Lachapelle
Le 3 juin 2014 Le 3 juin 2014
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