Compte rendu congrès n°3-2013 :nouvelles AFIC n°1vol5 19/11/13 18:52 Page91 Compte rendu de congrès Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. La clinique de l’incertitude « Faire pour les autres, sans les autres, c’est faire contre les autres » Daniel Mermet Sylvie Persem Infirmière libérale à Pau < [email protected] > L e 28 mars 2013 s’est déroulé le 2e colloque intersociétés savantes (Association francophone pour les soins oncologiques de support [AFSOS], Société française d’étude et de traitement de la douleur [SFETD], Société française d’accompagnement et de soins palliatifs [SFAP], Société française de psycho-oncologie [SFPO]) de la clinique de l’incertitude à l’auditorium de l’hôpital européen Georges Pompidou à Paris, regroupant environ 150 personnes. L’incertitude peut se définir comme la limite de la certitude des sciences. La science diminue la zone de l’ignorance mais lorsqu’il y a échec thérapeutique, il faut retrouver un équilibre, accepter l’incertitude et rétablir la confiance. Malheureusement, dans notre société, l’incertitude est perçue de façon négative. Pourtant, un des moteurs de la médecine est le doute et il est créatif. Un premier colloque a eu lieu en 2011 ; le but de cette clinique est de s’orienter vers une compétence de l’incertitude, de faire émerger la conscience et d’être en relation avec l’autre. Les thèmes suivants ont été abordés, mais il est posBulletin Infirmier du Cancer sible de retrouver le compte-rendu détaillé de cette journée sur le site : « cliniquedelincertitude.fr » Interdisciplinarité Le Dr Derniaux, vice-président de la SFAP a ensuite abordé l’interdisciplinarité, où le rôle de chacun est délimité dans son savoir et sa compétence qui ne sont pas interchangeables. Mais cela nécessite de prendre en compte différentes problématiques : — le trio patient-maladie-soignant, — comment faire pour inclure la famille et les proches ? — la réalité financière, et de redéfinir les soins comme une association du savoir, de l’échange, et de l’accompagnement dont l’écoute est le garant du lien. Il est nécessaire de se comprendre, de travailler ensemble et d’accepter de « perdre » (échec des traitements). Une phrase de Daniel Mermet devrait être une évidence pour tout soignant : « Faire pour les autres, sans les autres, c’est faire contre les autres ». 91 Vol.13-n°3-juillet-août-septembre 2013 Compte rendu congrès n°3-2013 :nouvelles AFIC n°1vol5 19/11/13 18:52 Page92 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. Compte rendu de congrès Les dispositifs traitant de l’incertitude Dans les secteurs où la mort est proche, il est conseillé de ne pas banaliser, ni de mystifier, mais de s’adapter à la réalité de l’autre et non à ses propres convictions. Notre pratique est axée sur les protocoles et nous avons un problème de rentabilité : il arrive même qu’une infirmière qui reste longtemps dans une chambre de patient, puisse être considérée comme « inactive » même par ses propres collègues… L’interdisciplinarité nous permet de « tenir » ensemble et de poursuivre des actions de soins jusqu’au bout, mais elle demande énergie et temps. Les réunions de mortalité et de morbidité (RMM) Elles se définissent comme une analyse collective rétrospective et systémique de cas marqués par la survenue d’un décès, d’une complication ou d’un événement qui aurait pu causer un dommage à un patient. Ces réunions sont bien-sûr soumises au secret professionnel et abordent entre autres les différences entre les effets secondaires qui sont pris en compte par les médecins et les effets indésirables qui sont ressentis par les patients. Les malentendus transculturels de l’incertitude Les comités de retour d’expérience (CREX) Mme Moro, professeur en pédopsychiatrie et ethnopsychiatrie, a abordé cette clinique par l’approche des différences culturelles et de langages. L’incertitude est un processus intellectuel qui est différent de l’insécurité qui est du domaine de l’émotionnel. L’incertitude peut être due à un problème de langue qui même avec l’intermédiaire d’un traducteur, peut entraîner un malentendu. Deux thèmes sont très difficiles à la traduction : le rapport au sacré, à la religion, et le rapport à la sexualité. Mme Moro suggère de sortir de la dimension négative de la différence et de ne pas considérer que notre théorie est la seule possible. Il est nécessaire de tolérer l’incertitude et cette incertitude devient créative. Bulletin Infirmier du Cancer C’est l’analyse collective et systémique d’événements sources de dysfonctionnement, sans nécessairement de conséquence sur le patient. Les réunions de concertation pluridisciplinaire (RCP) Elles permettent la concertation pluriprofessionnelle et pluridisciplinaire autour des dossiers difficiles de patients atteints de maladies graves quel que soit le stade évolutif. Leur but est de travailler ensemble avec chacun ses spécialités et ses compétences. Tous ces dispositifs sont des lieux de débats sur l’incertitude. Le début d’après-midi a été agrémenté d’une intervention théâtrale sur les réunions pluridisciplinaires par la Compagnie « Inédit Théâtre de Strasbourg » qui a fait sourire et rire, et chacun y a retrouvé du vécu ! La dernière partie s’intitulait « Jeu nécessaire entre théorie et pratique » et faisait constater qu’il existe une importante disparité entre les recommandations de bonnes pratiques et le terrain. L’incertitude est liée au passage de la réflexion à l’action. Le progrès crée de nouveaux problèmes. Au XIXe siècle, il y a eu de nombreuses découvertes qui ont donné des certitudes. Au XXe, il y a eu des doutes et au XXIe siècle apparaît l’incertitude. En conclusion, il apparaît que l’incertitude est une donnée fondamentale. 92 Vol.13-n°3-juillet-août-septembre 2013