ETUDE DE LA GESTION DES PROMOTIONS INTERNES AU SEIN

ETUDE DE LA GESTION DES PROMOTIONS INTERNES AU
SEIN D’UNE ENTREPRISE PUBLIQUE : LA SNCB
Anne Goujon Belghit,
Doctorante OREM, enseignante à l’université de Lorient
Adresse : 9 rue du docteur Bonain
29200 Brest
Tel : 06 85 65 68 12
E-mail : anne.[email protected]
Alain Roger,
Directeur de thèse. Professeur à l’université de Lyon 3, Directeur du centre de recherche
Magellan, Responsable Scientifique de l’Equipe de Recherche OREM
Adresse : Institut d’Administration des Entreprises de Lyon
6 cours Albert Thomas
BP 8242
69355 Lyon Cedex 08
Tel : 04 78 78 76 41
E-mail : roger@univ-lyon3.fr
RESUME
Les entreprises publiques sont aujourd’hui confrontées à un environnement changeant, la
législation européenne évolue et contraint ces organisations à ouvrir leur marché national, sur lesquelles
elles se situent généralement en position de monopole, aux concurrents étrangers.
Ces nouvelles exigences bousculent les habitudes de gestion ainsi que les salariés car le
sentiment de sécurité tend à s’évaporer. A la veille d’une transformation structurelle majeure annoncée à
la SNCB, nous analysons le processus de promotion interne afin de comprendre si les salariés se sentent
menacés vis-à-vis de leur carrière professionnelle au sein de cette entreprise.
La configuration classique des entreprises publiques repose sur une structure de type
bureaucratique, caractérisée par une gestion du travail fortement divisée, par une coordination entre les
services et les individus basée sur des mécanismes très formalisés. La SNCB est une entreprise ancienne,
de grande taille, répondant à ces critères.
La carrière des salariés dans une même structure repose sur des procédures formelles, entretiens de
progrès ou encore concours internes, ou sur des procédures de nature plus informelles, reposant sur la
constitution d’un réseau interpersonnel. En fonction de leurs réseaux, les individus peuvent mobiliser
diverses ressources nécessaires dans leurs possibilités de négociation avec l’entreprise. Ils restent
vigilants sur les ouvertures de postes, sur les procédures et contacts à établir pour bénéficier d’une
promotion.
Les relations interpersonnelles favorisent la constitution d’un capital social. Trois formes distinctes
de capital social peuvent être répertoriées : la confiance, les normes et les réseaux. Il peut être mesuré en
fonction du nombre de contacts qu’une personne possède. Les réseaux constitués de « liens forts »,
membres de la famille ou amis proches, favorisent les relations de confiance mais pas la richesse d’accès
à l’information. L’établissement et le maintien d’un réseau de connaissances sont également propices à
la promotion, les « amis » ont tendance à être sélectionnés en premier. La constitution d’un réseau de
« liens faibles », réseau constitué de connaissances, amis éloignés, permet l’obtention d’une information
non redondante concernant l’ouverture des postes en promotion interne.
La SNCB, entreprise publique performante assurant à ses salariés des conditions d’emplois
favorables notamment en ce qui concerne la sécurité de l’emploi, propose à ses employés deux types
distincts de promotions selon leur degré de qualification. Deux processus s’opposent selon la
formalisation des procédures de promotions internes. Les techniciens s’inscrivent à des concours
internes tandis que les managers instaurent des relations interpersonnelles essentielles pour leur parcours
professionnel interne.
MOTS CLES
Entreprise Publique, Carrière, Promotions Internes, Capital Social, Réseaux Sociaux
ETUDE DE LA GESTION DES PROMOTIONS INTERNES AU
SEIN D’UNE ENTREPRISE PUBLIQUE : LA SNCB
Les entreprises publiques sont souvent caractérisées par une certaine longévité, une grande taille
et une réglementation des procédures de gestion interne. De nature bureaucratique, souvent influencées
par la présence de syndicats pour représenter les salariés, le travail est fortement divisé et la coordination
entre les différents services est assurée par des mécanismes formalisés, procéduraux.
La gestion des ressources internes dépend de procédés standardisés, planifiés, issus de
négociations entre les dirigeants et les syndicats, facilement identifiables puisqu’ils sont érigés pour être
lisibles et équitables.
Toute organisation comprend une composante formelle, représentée par la réglementation
interne, et une composante informelle, observable grâce aux réseaux interpersonnels. Le salarié n’agit
pas de manière isolée dans cette structure, aussi formalisée soit elle, mais est encastré malgré lui dans un
réseau social, constitué de liens plus ou moins forts. La constitution de ces réseaux va favoriser la
création d’un capital social, la possibilité de bénéficier de ressources pour agir sur l’environnement. Les
ressources dont dispose un salarié génèrent un levier d’action sur la structure, sur sa carrière interne,
donc sur ses possibilités de promotions internes.
La législation européenne entraîne des modifications majeures dans le paysage organisationnel,
certaines entreprises publiques doivent ouvrir leur marché national, sur lequel elles se trouvent en
position de monopole, aux concurrents étrangers.
La problématique de notre étude est : quelles sont les possibilités d’action des salariés dans une
entreprise publique, confrontée à des changements organisationnels importants afin de se conformer à la
législation européenne, en termes de carrière professionnelle à travers l’étude des processus de
promotions internes ?
Notre analyse se base sur une configuration tripolaire :
L’entreprise : elle doit gérer sa main-d’œuvre en orientant ses salariés vers les secteurs porteurs,
afin de rester performante. Elle peut s’adresser directement aux salariés ou choisir de changer les
règles internes.
Le salarié : il doit s’adapter aux règles imposées par l’entreprise ou tenter de les modifier afin
d’envisager l’évolution de sa carrière.
Les règles du jeu : elles changent selon les besoins exprimés par l’entreprise ou l’action des
salariés.
Ces trois pôles étant interdépendants, nous étudions leurs relations à travers un processus : le système de
promotion interne. 1
Nous débattons sur les perspectives de carrière des salariés, que ce soit dans des organisations privées ou
publiques, en précisant le rôle du capital social et des réseaux sur les promotions internes. Puis nous
présentons notre enquête, fondée sur 30 entretiens conduits à la SNCB, Entreprise Nationale des
Chemins de Fer Belge. Par la suite, nous analysons les différentes solutions proposées par la SNCB à ses
salariés en termes de promotion. Finalement, nous identifions les moyens d’action des salariés sur leur
carrière dans cette entreprise publique.
1. Les salariés face à leur carrière
1.1. Pourquoi faire carrière ?
En termes de carrière, diverses opportunités soffrent aux salariés : ils peuvent opter pour la fidélité à
une structure ou au contraire préférer un changement d’environnement régulier en se dirigeant vers les
offres disponibles sur le marché professionnel.
La carrière, définie comme « l’évolution professionnelle dans une organisation donnée ou de manière
plus large, comme un ensemble d’expériences diverses tout au long de la vie » indique qu’un salarié peut
rester fidèle à une entreprise ou au contraire opter pour une vie plus « nomade ». (Livian in Guerrero et
ali, 2004).
Divers facteurs influencent le choix des individus à s’orienter soit vers une carrière professionnelle
axée sur un métier soit vers une ascension hiérarchique liée à l’entreprise dans laquelle ils évoluent.
Deux types de carrière peuvent être répertoriées : les carrières professionnelles et les carrières
traditionnelles. (Roger in Peretti et al., 2001).
CARRIERE
Professionnelle Traditionnelle
Référence principale
communauté professionnelle Entreprise
Valeurs, orientations Diplômes, Progrès des Expérience
Connaissances, compétence Hiérarchie de l’organisation
Professionnelle, élitisme Loyauté, résultats, pouvoir.
Evaluateurs principaux Collègues, pairs. Supérieurs hiérarchiques
Figure n°1 : Principales caractéristiques d’une orientation de carrière professionnelle ou traditionnelle. (Figure
extraite de Roger in Peretti et ali, 2001, P 188).
La motivation des salariés pour une carrière peut être définie comme concernant « tout ce qui pousse les
individus à agir indépendamment du contexte, c'est-à-dire en fonction de leurs besoins » (P. Bernoux,
1985). Pourtant, ces besoins vont naître des normes qu’ils auront intégrées au cours de leur parcours
social : l’école, l’Etat et bien entendu, l’entreprise dans laquelle ils évoluent. L’individu diplômé aura le
choix de se concentrer sur sa profession et éprouvera moins d’attachement à une structure, son sentiment
2
d’appartenance à une communauté professionnelle désigne ses pairs comme juges. Au contraire, le
salarié qui a travaillé jeune a acquis ses compétences par l’intermédiaire de son environnement
professionnel et non par l’école. Il éprouve plus facilement un sentiment de loyauté envers
l’organisation: sa hiérarchie est alors sa référence.
Roger (Peretti et ali, 2001) analyse les perspectives de carrière des individus en fonction des stratégies
observées dans leur entreprise. La figure suivante montre les critères d’évolution par type de stratégie, la
manière dont la mobilité s’opère ainsi que les moyens alloués aux salariés pour prétendre à une carrière
professionnelle. Quatre types de stratégies d’entreprises sont présentées selon les intérêts suivants : les
résultats, les procédures, l’ambiance ou bien le développement individuel.
Entreprise centrée sur Critère d’évolution Mobilité Moyens
- Les résultats Réalisation d’objectifs Interne ou Autonomie
externe Délégation
- Les procédures Respect des règles Interne Règles formalisées,
Réussite aux Grilles, examens,
Examens, concours.
Ancienneté
- L’ambiance Loyauté, Interne Parrains, mentors
esprit d’équipe Information interne
- Le développement Potentiel Interne et Entretiens
individuel externe d’orientation
Bilans
Professionnels
De compétences
Formation.
Figure n°2 : La gestion des carrières dans différents types d’entreprise. (Figure extraite de Roger in Peretti et ali,
2001 P185).
Les salariés optant pour une carrière traditionnelle dépendent des choix stratégiques de leur organisation,
ils ne souhaitent pas changer de structure. La première entreprise laisse beaucoup d’autonomie à ses
salariés, leur promotion dépend de leurs performances, de l’atteinte de leurs objectifs. Dans la deuxième,
la promotion est basée sur la réussite de concours internes : les salariés sont responsables de leur
carrière. Dans la troisième catégorie, les relations interpersonnelles sont encouragées, les collaborateurs
travaillent en équipe et s’évaluent mutuellement. Finalement, dans la dernière configuration, la carrière
dépend du potentiel des individus, la hiérarchie détecte les salariés compétents pour les accompagner
dans leur évolution et les guider sur de nouveaux postes.
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