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CAMPAGNE D’ECHANGES CONFRATERNELS DES MEDECINS GENERALISTES
DEPISTAGE DU CANCER DE LA PROSTATE CHEZ UN HOMME ASYMPTOMATIQUE
PAR UN PREMIER DOSAGE DU PSA
FICHE PRODUIT
Mars 2016
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Toute l’action a été co-construite et co-réalisée avec l’Institut National du Cancer (INCa), en
concertation avec le Collège de la Médecine Générale (CMG).
Tout le long de ce document, les termes hommes asymptomatiques et hommes sans cancer sont utilisés. Leur
signification n’est pas la même :
- Hommes sans cancer = hommes sans cancer de la prostate repéré dans les bases de l’Assurance Maladie
- Hommes asymptomatique = notion générale comprenant les hommes sans symptômes liés à la prostate
OBJECTIFS
Inviter à des pratiques conformes aux recommandations en délivrant une information équilibrée :
- Sensibiliser les médecins généralistes au fait que ce dépistage n’est pas recommandé de façon
systématique ;
- Délivrer aux hommes de 40 ans et plus une information équilibrée sur les avantages et les inconvénients de
ce « dépistage » pour leur permettre de prendre une décision éclairée et notamment chez les hommes de plus
de75 ans;
- Créer une prise de conscience sur cette pratique quasi systématique en France alors qu’elle n’est pas
recommandée.
=> en renforçant l’information des médecins et des patients en cas de prescription du 1er dosage du PSA,
chez un homme asymptomatique, et permettre une décision éclairée et partagée entre le patient et le
médecin.
Dans un objectif de diminuer le nombre de dosages du PSA réalisés de manière « automatique » sans un
consentement ou accord réel du patient.
ETAT DES LIEUX ET RECOMMANDATIONS
Données épidémiologiques
Le cancer de la prostate n’est pas un « cancer comme les autres » :
De tous les cancers, il est le plus fréquent chez l’homme : 56 840 nouveaux cas estimés en 20121 -> 28 % des
cancers.
Mais le cancer de la prostate est majoritairement un cancer à évolution lente : la durée d'évolution est de 10 à
15 ans en moyenne avant que n'apparaissent des symptômes et le plus souvent n’engageant pas le pronostic
vital.
Cependant, certaines formes sont agressives et létales. L’histoire naturelle de la maladie est mal connue. On
ne sait pas reconnaître, parmi les cancers asymptomatiques, ceux qui resteront latents et ceux qui
évolueront.1
C’est un cancer de survenue tardive : il est rare avant 50 ans et son incidence augmente progressivement
avec l’âge. C’est autour de 70 ans que l’incidence est la plus élevée.
Il se place au troisième rang en termes de mortalité par cancer chez l’homme (à l’origine de 8 876 décès, soit
10 % des décès par cancer et 3% des décès masculins toutes causes confondues).
Compte tenu de ce temps de progression lent, plus de 3 décès par cancer de la prostate sur 4 surviennent
après 75 ans. Chez l’homme, en 2009, l’âge médian au décès par cancer de la prostate est estimé à 83 ans.1
La comparaison avec d’autres pays positionne la France parmi les pays où l’incidence (standardisée par âge)
est la plus élevée : 98/100 000 contre 70/100 000 dans l’ensemble de l’union européenne2.
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1LescancersenFrance,LesDonnées,INCa,janvier2014.(CollectionLesDonnées,ouvragecollectiféditéparl’INCa,BoulogneBillancourt,janvier2015).L’estimation2012
pourl’incidenceducancerdelaprostatereposesurunehypothèsedestabilitédestauxd’incidenceentre2009et2012
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L’incidence du cancer de la prostate est en très forte augmentation, par effet combiné du vieillissement de la
population, de l’amélioration des moyens diagnostiques et de la diffusion de la technique de dépistage par
dosage du PSA3.
Etat des lieux du dépistage du cancer de la prostate4
Le « dépistage » du cancer de la prostate par dosage sérique de l’antigène spécifique de la prostate (PSA)
connait une diffusion importante depuis la fin des années 1980. L’évolution des modalités diagnostiques
(diffusion du dosage du PSA5 associé à une standardisation des techniques de biopsies prostatiques) a conduit à
une augmentation majeure de l’incidence du cancer de la prostate par la détection de tumeurs de petite taille, le
plus souvent de moindre agressivité.
Bien qu’il n’y ait pas de programme de dépistage organisé du cancer de la prostate en France :
en 2014 : 3,1 millions d’hommes ont eu au moins 1 dosage de PSA sans Cancer de la Prostate (CPr) connu.
Cela représente 3,7 millions de dosages du PSA.
entre 2012 et 2014 : 62% des hommes âgés de 50 à 69 ans avaient réalisé au moins un dosage de PSA
(sans cancer déclaré au moment du dosage). Pour les hommes de plus de 75 ans, le taux est de 68%.
Sur la période 2012-2014, les hommes de plus de 40 ans et sans cancer de la prostate ont en moyenne 1,9
dosages du PSA total. Pour les hommes de 75 à 84 ans, la moyenne est de 2 dosages du PSA total remboursés.
Un tableau détaillé est disponible dans l’Argumentaire (annexe 1) dans la partie PSA libre
En 2014, 33 millions € ont été remboursés par l’Assurance Maladie pour les dosages du PSA :
- PSA total : 23 millions €
- PSA libre : 10 millions € (ce dosage du PSA libre n’est pas recommandé en première intention)
La quasi-totalité (88%) des PSA sont prescrits par un médecin généraliste et 6% par un urologue.
95% des dosages du PSA total prescrits par des médecins généralistes (à des hommes sans cancer) sont associés
à d’autres dosages.
En moyenne un dosage du PSA est associé à 9 autres dosages (2 dosages si le prescripteur est urologue).
Les dosages associés le plus fréquemment sont : NFS, glycémie, exploration anomalie lipidique, transaminases,
créatininémie, gamma GT, HbA1C, …
La majorité des dosages du PSA sont donc réalisés dans le cadre d'un « bilan de santé ».
Les questions que soulèvent le dépistage par dosage du PSA
• Le bénéfice du dépistage du cancer de la prostate n’est pas clairement démontré : il n’est pas certain que ce
dépistage permette d’éviter des décès liés au cancer de la prostate.
Les deux plus importantes études scientifiques internationales portant sur des essais randomisées (l’étude
européenne ERSPC6 et l’étude américaine PLCO7), qui avaient notamment pour objectif d’évaluer l’effet
d’un programme de dépistage systématique du cancer de la prostate par le PSA sur la mortalité spécifique de ce
cancer, ont des résultats contradictoires sur ce point.
Ces deux études, critiquées au regard de leur qualité inégale et de biais méthodologiques, notamment par la
HAS, ne permettent pas de conclure sur les bénéfices du dosage du PSA, ni sur l’impact d’un dépistage ponctuel
ou régulier sur la mortalité.
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2GLOBOCAN2012.TheInternationalAgencyforResearchonCancer(IARC):Estimatedcancerincidence,Mortalityandprevalenceworldwidein2012.
3Institutnationaldeveillesanitaire,Réseaufrançaisdesregistresdecancer,Institutnationalducancer,Institutnationaldelasantéetdelarecherchemédicale,Hôpitauxde
Lyon,Belot,A,etal.Estimationnationaledel’incidenceetdelamortalitéparcancerenFranceentre1980et2005.SaintMaurice:INVS;2008.
4Sniiram‐Régimenéral,2014.
5StameyTA,YangN,HayAR,McNealJE,FreihaFS,andRedwineE.Prostatespecificantigenasaserummarkerforadenocarcinomaoftheprostate.NEJM317:909916,
1987.
6‐Schroder,F.H.,J.Hugosson,etal.(2012).«Prostatecancermortalityat11yearsoffollowup.»NEnglJMed366(11):98190.
7‐Andriole,G.L.,E.D.Crawford,etal.(2012).«Prostatecancerscreeningintherandomizedprostate,lung,colorectal,andovariancancerscreeningtrial:Mortalityresults
after13yearsoffollowup.»JournaloftheNationalCancerInstitute104(2):125132.
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La dernière méta-analyse de Cochrane Collaboration de janvier 20138,9 comprenant ces 2 études ne met
pas en évidence d’effet significatif en termes de réduction de la mortalité par cancer de la prostate.
• Fiabilité du test : le dosage du PSA comme test de dépistage est insuffisamment fiable (VPP = 30%, VPN =
90%).
• Surdiagnostic et surtraitement : ce dépistage expose au risque de détecter et de traiter de nombreux cancers de
la prostate qui n’auraient eu aucune conséquence pour les hommes et n’auraient donc pas nécessité de
traitement. En effet, ce cancer évoluant habituellement lentement, sur plusieurs années, de nombreux cancers de
la prostate restent « latents ».
• Les conséquences physiques (risque d’incontinence, d’impuissance, de troubles intestinaux…) et
psychologiques du diagnostic et des traitements du cancer de la prostate peuvent être importantes.
• On ne sait pas reconnaître, parmi les cancers asymptomatiques, ceux qui resteront latents et ceux qui
évolueront1. L’histoire naturelle de la maladie est mal connue.
Voir détail dans le document médecin (annexe 6) et dans l’argumentaire (annexe 1).
Recommandations françaises et internationales
Dans son avis de février 201210, la HAS rappelle que « conformément à ses précédents avis, les connaissances
actuelles ne permettent pas de recommander un dépistage systématique en population générale du cancer de la
prostate par dosage du PSA ». La HAS précise qu’il n’a pas été retrouvé d’éléments scientifiques permettant de
justifier un dépistage du cancer de la prostate par le dosage du PSA, y compris dans des populations
considérées comme plus à risque.
En France comme à l’étranger, aucune autorité sanitaire ni aucune société savante ne recommande le dépistage
systématique par dosage du PSA chez les hommes sans symptôme.
Toutes les recommandations (HAS, INCa, CMG, AFU) rappellent que les hommes qui envisagent de réaliser les
tests de dépistage du cancer de la prostate (toucher rectal et dosage du PSA) doivent être clairement informés
des avantages et des inconvénients de ce dépistage.
Voir détail dans le document médecin (annexe 6) et dans l’argumentaire (annexe 1).
Il est maintenant établi que le dosage du PSA ne doit pas être utilisé comme méthode de dépistage sans
avoir tenu, au préalable, une discussion éclairée avec le patient, idéalement guidée par des outils-
décisionnels pour faciliter la compréhension11.
PERTINENCE DE L’ACTION
Ce thème a été retenu face au constat d’un dépistage systématique du cancer de la prostate par dosage du PSA
chez les hommes sans symptôme, bien qu’il ne soit pas recommandé par les agences sanitaires, ni par les
sociétés savantes, en France et à l’étranger. Dans plusieurs pays, le dosage du PSA n’est plus remboursé dans le
cadre du dépistage pour les hommes sans symptôme.
Voir détail dans le document médecin (annexe 6) et dans l’argumentaire (annexe 1).
D’importantes variations selon les territoires laissent suspecter des disparités de pratiques médicales entre la
prescription des dosages du PSA chez les hommes sans cancer de la prostate et l’incidence de ce cancer.
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8‐InstitutNationalduCancer,Synthèsesurlesbénéficesetlesrisquesd’undépistageducancerdelaprostatepardosageduPSA,Mars2015
‐HauteAutoritédeSanté(HAS),Référentieldepratiques:Détectionprécoceducancerdelaprostate,Mai2013
9IlicD,NeubergerMM,DjulbegovicM,DahmP.Screeningforprostatecancer.CochraneDatabaseofSystematicReviews2013,Issue1.Art.No.:CD004720.DOI:
10.1002/14651858.CD004720.pub3http://www.cochrane.org/fr/CD004720/screeningforprostatecancer
10HauteAutoritédeSanté.Cancerdelaprostate:identificationdesfacteursderisqueetpertinenced’undépistagepardosagedel’antigènespécifiqueprostatique(PSA)de
populationsd’hommesàhautrisque?‐Rapportd’orientation.(HAS,février2012).
11StaceyD,etal.Decisionaidsforpeoplefacinghealthtreatmentorscreeningdecisions.CochraneDatabaseofSystematicReviews.2014Jan28;1:CD001431
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Cette action s’inscrit également dans :
Le Rapport sur l'évolution des charges et des produits (2014) : dans ce rapport il est préconisé de
développer les outils d’aide à la décision afin de permettre un choix éclairé des patients, notamment en ce qui
concerne le Cancer de la prostate (CPr) dont le risque évolutif est faible.
Le Plan cancer 2014-2019 : ce document préconise également une décision éclairée des populations
concernées par les dépistages.
L’ACTION
Face à ce constat, la Cnamts a mis en place une action coréalisée avec l’INCa sur la prescription du 1er dosage
de PSA, en concertation avec le CMG.
Cette action d’accompagnement concerne les médecins généralistes. Elle a deux objectifs principaux :
- Renforcer l’information factuelle des médecins et des patients sur la prescription, chez un homme
asymptomatique, du 1er dosage du PSA pour dépister le cancer de la prostate.
- Permettre une décision éclairée et partagée entre le patient et le médecin.
Elle s’inscrit plus largement dans un plan de communication avec de manière concomitante :
Détail en annexe 2 : Plan d’action et de communication
1. la publication d’articles scientifiques pour communiquer auprès des professionnels de santé avec
un temps fort le 22 mars, avec la parution d’un article dans le Bulletin Epidémiologique
Hebdomadaire (BEH) de l’InVS « Vers une évolution des pratiques de détection et prise en charge du
cancer de la prostate chez les hommes de 40 ans et plus en France (2009-2014) ? ».
D’autres articles sont en cours de soumission pour une parution plus tard dans l’année.
2. un Point Presse pour la presse professionnelle médicale le 22 mars, le jour même de la sortie du BEH
– organisé par l’INCA, la Cnamts et le CMG.
Porte-parole : INCa / Cnamts / CMG / HAS
Cibles : titres de la presse médicale et certains journalistes de la presse Grand Public
Diffusion d’un communiqué de presse à l’issue du petit-déjeuner : rappel des enjeux et mise à
disposition des documents d’information ;
Plus de 35 articles et retombées presse (à date du 31 mars)
3. un atelier au congrès de la Médecine Générale avec une prise de parole tripartie INCa, Cnamts et
CMG
4. la diffusion, à travers une campagne d’échanges confraternels vers les médecins généralistes gros
prescripteurs de dosage du PSA chez les hommes sans cancer de la prostate, notamment chez les
hommes plus de 70 ans, d’outils d’information et d’aide à la décision pour les médecins et leurs
patients, afin de renforcer l’information des médecins généralistes et permettre un choix éclairé des
patients lorsque le premier dosage de PSA est proposé ou demandé.
Deux outils d’aide à la décision ont été conçus :
un document à destination des médecins généralistes (annexe 6) sur la pertinence et les conséquences
de ce dépistage, étayé par des données chiffrées. Ce document a pour objectif de :
Sensibiliser les médecins et leurs patients, afin que la prescription du premier dosage de PSA ne soit
plus systématique (lors de bilans sanguins, etc…) et sans information du patient.
Rappeler au médecin les recommandations françaises sur l’utilisation du PSA qui n’est pas
recommandé pour le dépistage du cancer de la prostate.
Rappeler au médecin, lorsque le patient souhaite se faire dépister ou lorsque le médecin le juge
nécessaire, que le patient doit être informé des avantages et des inconvénients des différents tests de
diagnostic, des risques de cancer de la prostate en général, des différentes options thérapeutiques
ainsi que des effets indésirables, et des complications en rapport.
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