Est-ce que le logo AB veut encore dire quelque chose

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POINT
DE VUE
Est-ce que le logo AB veut
encore dire quelque chose ?
Jean-Louis SCHMITT
Alors que de plus en plus de consommateurs se tournent [et c’est heureux] vers les produits « bio », l’organisme de certification « Ecocert » jette un pavé dans la mare en
délivrant le label « Agriculture Biologique » à des steaks hachés provenant d’animaux
abattus selon le rituel « halal »…
C’est par un communiqué de presse
daté du 17 septembre
2012 que l’O.A.B.A.
[1] dévoile le pot aux
roses : se basant sur
l’imprécision du texte
européen encadrant la
production biologique
règlement stipulant
simplement que « toute
souffrance, y compris
la mutilation, est
réduite au minimum pendant toute la durée de vie
de l’animal, y compris lors de l’abattage » [2] —
Ecocert a donc décidé — à priori sans aucun état
d’âme — de certifier de la viande bovine
préalablement abattue sans étourdissement !
J’ai eu l’occasion, à diverses reprises déjà [3], de
dire ici même tout le mal que je pensais de ces
méthodes jugées par moi barbares et particulièrement cruelles ! Après une publicité déclarant
sans rire que « que la viande halal était meilleure et
sanitairement moins dangereuse que toute autre
viande provenant d’un animal étourdi » — publicité
jugée mensongère suite à un dépôt de plainte de
l’O.A.B.A. — c’est au tour d’Ecocert de franchir un
nouveau cap en donnant pour ainsi dire son blancseing à l’abattage rituel !
Contacté sitôt la chose rendue publique,
l’organisme de certification [Ecocert donc] répond
aux protestataires indignés par un communiqué
lapidaire, se défendant de respecter scrupuleusement la réglementation européenne en
vigueur… Dont acte !
Voilà cependant qui est révélateur à plus d’un
titre : tandis qu’en l’occurrence il est question
d’éthique, de compassion et d’évidentes souffrances
inutiles infligées à des bêtes, on se borne à invoquer
des textes austères, parfois ridiculement abscons et
parfaitement dénués de tout sens moral ! Voilà qui
est non seulement totalement stupide mais, à juste
titre, interpelle les consommateurs que nous sommes
sur l’utilité et la pertinence d’une quelconque
labellisation !
En effet, lorsqu’il s’agit de fruits, de légumes ou
d’autres produits alimentaires inertes, il est logique
que l’on se réfère à des textes, des cahiers de
charge drastiques dûment établis.
Concernant les animaux, il est rationnel de se
préoccuper de leur alimentation, de l’absence de
produits médicamenteux vétérinaires allopathiques
de synthèse, de proscrire hormones et antibiotiques,
de veiller aux bonnes conditions de détention et de
leur bien-être… bref, de respecter les bêtes ! Dans
l’élevage biologique, tout cela est clairement
annoncé et l’éleveur se doit d’avoir une attitude
exemplaire de la naissance de l’animal à l’abattoir,
y compris en ce qui concerne le transport jusqu’à sa
destination finale…
Curieusement, les prescriptions concernant
l’étape de l’abattage en soi sont on ne peut plus
laconiques [4]. Pourtant, ne serait-il pas
parfaitement cohérent de se soucier de la mise à
mort des bêtes et, logiquement, d’écarter les
méthodes connues pour prolonger l’agonie des
suppliciés et, ainsi, de garantir une mort « douce »
[pour autant que cela puisse être] avec, pour le
moins, un étourdissement préalable ? Cela devrait
être une exigence manifeste et minimale dans la
filière « bio » !
Mais, puisque les textes ne précisent pas
explicitement de telles dispositions, pourquoi diable
les organismes de labellisation s’embarrasseraientils de telles préoccupations ?
Eh bien, par éthique tout simplement !
Or, voilà bien une discipline philosophique qui,
si on est en droit de s’attendre à la trouver dans ce
milieu peut-être plus encore qu’ailleurs, semble faire
aussi cruellement défaut que dans les domaines
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conventionnels ! Comme ailleurs, l’attrait financier et engraisser, les capturer, les transporter, les tuer et les
commercial n’est sans doute pas étranger à ce couper en morceaux. » [5]
comportement et c’est bien évidemment tout à fait
Albert Einstein en son temps, déjà, ne disait pas
regrettable !
autre chose avec, en prime, cet argument suppléLors, le consommateur peut, à juste titre, se sentir mentaire pour ceux qui se soucient autant de leur
trahit et, raisonnablement, se détourner de ces propre santé que de la condition animale : « Rien ne
labels qui, il faut bien le reconnaître, vu le contexte, peut être aussi bénéfique à la santé humaine et
ne veulent indubitablement plus dire grand’ chose ! augmenter les chances de survie de la vie sur terre
que d'opter pour une diète végétarienne. »
Cela dit, le meilleur moyen de ne se faire piéger
d’aucune manière reste le refus total de la
En attendant de franchir ce cap important [si ce
consommation de tout aliment carné car, qu’il n’est déjà fait], soutenez massivement l’action de
s’agisse de viande, de poissons, d’œufs ou encore l’O.A.B.A. qui propose une pétition pour « le retrait
de produits laitiers, « il faut faire naître des du label Bio aux steaks provenant de bovins
animaux, sélectionner ceux qui seront utiles, égorgés à vif » [coordonnées complètes ci-dessous].
éliminer les autres, les enfermer, les mutiler, les
1. O.A.B.A. : Œuvre d’Assistance aux Bêtes d’Abattoirs - 10, place Léon Blum 75011 Paris - Tél. 01 43 79 46 46
http://www.oaba.fr/index.php
2. Article 14 1.b du règlement CE 834/2007 relative à la production biologique de viandes.
3. Voir [entre autres] : « Le vrai visage de la viande » (octobre et novembre 2009), « Ces bêtes qu'on abat » (mars 2011) ou
encore « Et toujours le scandale des abattoirs » (mai 2012)…
4. Encore une fois, la réglementation précise simplement que « les méthodes d’abattage doivent être conçues pour être aussi
rapide et indolores que possible ».
5. L214 : toujours disponible sur le site de cette association, l’excellent documentaire "Adieu veau, vache, cochon, couvée".
http://www.l214.com
Box d’immobilisation et d’abattage pour bovin - Photo : OABA
La loi autorisant la corrida jugée conforme à la constitution.
Dans une décision rendue publique le 21 septembre 2012, le Conseil constitutionnel a estimé que
l’immunité légale de l’article 521-1 du code pénal [réprimant les actes de cruauté et sévices graves sur
animaux] accordée aux courses de taureaux et combats de coqs, était conforme à la constitution…
Voilà une décision qui est évidemment pour le moins décevante ! Pour autant, fallait-il vraiment
s’attendre à autre chose d’une institution dont les membres [le président J.L. Debré en tête] sont plutôt
connus comme étant proches des milieux taurins, de la chasse etc. ?
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