FIMFA 2007-2008-TD d’algèbre I Rachel Ollivier TD 4. Représentations linéaires des groupes finis. Rappel Soit G un groupe fini. Une représentation linéaire de dimension finie de G sur le corps K est la donnée un K-espace vectoriel V de dimension finie et d’un morphisme de groupes ρ : G → GL(V ) : le groupe G agit sur V par automorphismes linéaires via (g, v) 7→ ρ(g)v. On appelle degré ou dimension de la représentation la dimension de l’espace vectoriel V . La représentation sera dite irréductible si les seuls sous-espaces de V stables sous l’action de G sont {0} et V lui-même. Soit (V ′ , ρ′ ) une autre représentation de G. On dit que (V, ρ) et (V ′ , ρ′ ) sont isomorphes s’il existe un isomorphisme linéaire V → V ′ qui commute à l’action de G. En cours, le cas des représentations à coefficients dans le corps des complexes C a été traité grâce à la fructueuse théorie des caractères. Remarquons que si G agit sur un ensemble fini X, on peut considérer cette action comme une représentation linéaire en construisant un C-espace vectoriel V de base {ex , x ∈ X} indexée par les éléments de X. L’action de g ∈ G sur l’élément ex est donnée par eg.x . C’est une représentation complexe de dimension finie ! Exercice 1. Pour le groupe des quaternions H8 et le groupe D4 , déterminer le groupe des commutateurs et en déduire les caractères de degré 1. Comparer les tables des caractères de ces deux groupes. Exercice 2. Soient G un groupe fini et A un sous-groupe abélien de G. Montrer que les degrés des caractères irréductibles de G sont inférieurs ou égaux à [G : A] l’indice de A dans G. Retrouver le fait que les caractères d’un groupe abélien sont de degré 1. Exercice 3 (Toujours GL2 (Fp )...). Soit p un nombre premier impair et G = GL2 (Fp ). 1. Soit ǫ un générateur du groupe cyclique F∗p . On considère la Fp -algèbre quotient Fp [X]/(X 2 − ǫ) où (X 2 −ǫ) désigne l’idéal de Fp [X] engendré par X 2 −ǫ c’est à dire l’ensemble des polynômes multiples de X 2 − ǫ. Montrer que cette algèbre est un Fp -espace vectoriel de dimension 2. En décrire une base. Après avoir remarqué que X 2 − ǫ est irréductible sur Fp , montrer que cette algèbre est un corps. Quel est son cardinal ? Nous allons la noter Fp2 . x ǫy 2. Montrer que le sous-groupe K = , (x, y) 6= (0, 0) de G est isomorphe au groupe y x ∗ multiplicatif (Fp2 ) . 3. Se convaincre que les classes de conjugaisons de G sont les suivantes : Représentant Nombre d’éléments Nombre de telles classes x 0 ax = 1 p−1 0 x x 1 bx = p2 − 1 p−1 0 x x 0 (p−1)(p−2) cx,y = avec x 6= y p2 + p 2 0 y x ǫy (p−1)p dx,y = avec y 6= 0 p2 − p 2 y x 4. Combien y a-t-il de caractères irréductibles de G ? 5. Remarquer que pour chacun des morphismes φ : F∗p → C∗ , on a un caractère de degré 1 de G correspondant à la composition de φ avec le déterminant. Combien y a-t-il de tels caractères ? 6. Le groupe G agit par homographies sur la droite projective P1 (Fp ) (cf TD2 Exercice 6). Décrire le caractère de cette représentation. Est-il irréductible ? Le décomposer en somme directe de caractères irréductibles. 1 Exercice 4 (Lemme de Schur.). Soit G un groupe fini et (ρ, V ) une représentation de dimension finie de G à coefficients dans K. On note EndK[G] (V ) l’algèbre des endomorphismes de l’espace vectoriel V qui commutent à l’action de G sur V . 1. On suppose que (ρ, V ) est irréductible. Montrer que EndK[G] (V ) est une algèbre à division (c’est-à-dire un corps non nécessairement commutatif). Dans le cas où K est algébriquement clos montrer que EndK[G] (V ) ≃ K. Décrire l’algèbre EndK[G] (V ⊕ V ). 2. Si (ρ, V ) et (ρ′ , V ′ ) sont deux représentations irréductibles non isomorphes de G, montrer que l’algèbre des endomorphismes EndK[G] (V, V ′ ) qui commutent à l’action de G est nulle. 3. Si (ρ, V ) s’écrit comme somme directe de représentations irréductibles V = V1 ⊕ V2 , décrire l’algèbre EndK[G] (V ). Exercices très optionnels... Exercice 5 (Représentations induites.). Soient G un groupe fini, H un sous-groupe propre de G. On se donne un morphisme α : H → K∗ et l’on définit la représentation induite par α comme suit : – Son espace W est l’ensemble des fonctions f : G → K qui vérifient f (hx) = α(h)f (x) pour tout h ∈ H, x ∈ G. – L’action de g ∈ G sur une telle fonction est donnée par translation à droite c’est-à-dire que g.f est la fonction qui à x ∈ G associe f (xg). On note IndG H α cette représentation. 1. Vérifier que IndG H α est bien une représentation de G. 2. Pour tout g ∈ G on définit fg l’élément de W égal à la fonction de support Hg qui à g associe 1K . Vérifier que fg = g−1 .f1 On choisit {g1 , ..., gk } un système de représentants des classes à droite H\G : G= k a Hgk . i=1 Montrer qu’une base de W est donnée par {fg1 , ..., fgk }. Ainsi, IndG H α est une représentation de G de dimension [G : H]. 3. On reprend les notations de l’exercice 4. Pour G = GL2 (Fp ), H = B le sous-groupe de Borel de G des matrices triangulaires supérieures, et α : B → C∗ le caractère trivial, comparer la représentation induite obtenue et la représentation de G donnée par son action sur la droite projective. Exercice 6 (Réciprocité de Frobenius). On se donne pour la suite un groupe fini G et une représentation de dimension finie (ρ, V ) de G à coefficients dans le corps K. Soit H un sousgroupe de G. On note V H le sous-espace des vecteurs de V qui sont fixés par l’action des éléments de H. Soit 1 : H → K∗ le caractère trivial qui à tout élément associe l’unité 1K . Nous voulons montrer que l’on a une bijection (1) H EndK[G] (IndG H 1, V ) ≃ V . 1. Soit i ∈ {1, 2, ..., k}. Montrer que la fonction fgi de l’exercice précédent est ici égale à la fonction caractéristique de Hgi (nous avons pris α = 1). H 2. Pour F ∈ EndK[G] (IndG H 1, V ), montrer que F (f1 ) est un élément de V . 3. Soit v ∈ V H fixé. Soient g ∈ G et i ∈ {1, ..., k} tels que Hg = Hgi . Montrer que ρ(g−1 )v = ρ(gi−1 )v. En déduire que l’on définit de façon univoque un élément F ∈ EndK[G] (IndG H 1, V ) en posant F (f1 ) = v. 4. Montrer la bijection (1). 5. Supposons que (ρ, V ) est une représentation telle que V H 6= {0}. Montrer que l’on a un morphisme non nul IndG H 1 → V qui commute à l’action de G. Si de plus (ρ, V ) est irréductible, montrer que ce morphisme est surjectif. On dit que la représentation (ρ, V ) est quotient de la représentation induite IndG H 1. 6. On choisit maintenant G = GLn (Fp ). On note B son sous-groupe des matrices triangulaires supérieures et U le sous-groupe de B constitué par les matrices unipotentes. Supposons que K est un corps algébriquement clos de caractérisque p. (a) Si (ρ, V ) est une représentation non-nulle de G, montrer que V U 6= {0} (voir TD2), que V U est stable sous l’action du sous-groupe T constitué par les matrices diagonales de G. En déduire qu’il existe dans V U un vecteur non nul sur lequel B agit par un caractère α : B → K∗ qui est trivial sur U . (b) Montrer que si (ρ, V ) est une représentation non nulle irréductible de G alors elle est quotient de l’induite IndG U 1. (La réciprocité de Frobenius se démontre pour l’induite d’un caractère quelconque, pas seulement pour le caractère trivial. Ainsi, on déduirait de même de (a) que V est quotient de l’induite IndG B α.) 7. Une remarque : le résultat précédent n’est pas vrai lorsque K = C. On peut déjà le vérifier pour GL2 (Fp ). En effet, si l’on calcule le nombre de quotients irréductibles non-isomorphes de IndG U 1, on en trouve moins que le nombre de classes de conjugaison dans GL2 (Fp ). Il y en a donc d’autres : on les appelle les représentations supercuspidales. Pour la liste des caractères irréductibles de GL2 (Fp ), voir par exemple Representation theory, a first course, Chapitre 5, Fulton-Harris.