Mise au point Mise au point Interférences médicamenteuses et dosages hormonaux en endocrinologie Drug interferences and hormone assays B. Godouet-Getti, D. Loeber* points FORTS ▲ De nombreux traitements médicamenteux sont susceptibles d’influer sur l’interprétation des dosages biologiques fréquemment utilisés en endocrinologie, et sont donc à prendre en compte pour la prise en charge diagnostique et thérapeutique du patient. ▲ Il est impératif de recenser l’ensemble des traitements pris par un patient au moment où un dosage est pratiqué afin de pouvoir s’y référer en cas de résultat aberrant. ▲ Deux grands types d’interférences médicamenteuses peuvent être envisagés : les interférences pharmacologiques et les interférences analytiques. ▲ Des mécanismes variés sont impliqués dans les interférences pharmacologiques : effet direct de la molécule exogène sur le taux de protéine porteuse, la synthèse ou encore le catabolisme des hormones. ▲ À côté des interférences d’ordre pharmacologique, différentes molécules peuvent mettre en échec la technique de dosage elle-même. Selon la méthode et les réactifs mis en œuvre au laboratoire, le niveau d’interférence avec une molécule donnée est variable. Mots-clés : Dosages hormonaux – Interférences médicamenteuses – Interférences pharmacologiques – Interférences analytiques. Keywords: Hormone assays – Drug interferences – Pharmacological interferences – Analytical interferences. L e diagnostic et le suivi des pathologies endocriniennes reposent notamment sur les dosages hormonaux, qui viennent compléter les données cliniques. L’interprétation de ces dosages conditionne l’ensemble de la prise en charge diagnostique et théra- * Service d’endocrinologie, CHU de Rouen. 52 diabète et maladies métaboliques, Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (XI), n° 2, mars-avril 2007 peutique. Or, de nombreux traitements médicamenteux peuvent être responsables de modifications des résultats des dosages biologiques, et donc fausser leur interprétation. Il est par conséquent indispensable de connaître les molécules potentiellement impliquées et les dosages concernés (1). Après exclusion de toute administration d’hormone exogène susceptible d’être prise en compte dans le dosage et de conduire faussement au diagnostic d’hypersécrétion de l’hormone endogène, les mécanismes d’interférence restent nombreux (2). En premier lieu, les perturbations des dosages hormonaux peuvent résulter d’un effet pharmacologique direct de la molécule exogène sur l’axe hormonal. Le médicament peut influencer la fraction libre de l’hormone dosée en modifiant le taux de sa protéine porteuse ou en déplaçant l’hormone liée par un mécanisme de compétition sur le site de liaison. En outre, certains agents pharmacologiques peuvent accélérer le catabolisme hormonal, notamment par induction des cytochromes P450 hépatiques. À côté des interférences d’ordre pharmacologique, différentes molécules peuvent mettre en échec la technique de dosage elle-même. Selon la méthode et les réactifs mis en œuvre au laboratoire, le niveau d’interférence avec une molécule donnée est variable. Les techniques en une seule étape, sans phase d’extraction ou de séparation, ou les techniques basées sur une détection peu spécifique sont les plus sensibles à ces interférences. Celles-ci sont de plus en plus limitées en raison de l’évolution des techniques de dosage. Cependant, les interférences analytiques persistent même avec les immunodosages utilisant des anticorps monoclonaux. La parenté structurale entre molécules exogènes et endogènes reste une source d’interférences difficilement contournable. Dans cet article, nous n’évoquerons pas les conséquences endocriniennes attendues de certains médicaments, souvent prescrits dans ce but par l’endocrinologue lui-même. Nous n’aborderons pas non plus les endocrinopathies iatrogènes. Seront successivement envisagés les pièges d’interprétation des dosages hormonaux en lien avec des prises médicamenteuses au cours de l’exploration des axes thyréotrope, corticotrope, gonadotrope, lactotrope et somatotrope, ainsi que lors de l’exploration des métabolismes phospho- Mise au pointM Influences médicamenteuses sur les paramètres d’exploration de l’axe thyréotrope (tableau I, figure 1) Tableau I. Interférences pharmacologiques au cours de l’exploration de l'axe thyréotrope : mécanismes impliqués et variations des taux hormonaux. Les chiffres encadrés correspondent aux niveaux d’impact des molécules et sont repris dans la figure 1. Action sur la synthèse ou la libération de TSH • Augmentation de la synthèse ou de la libération de TSH : antidopaminergiques (neuroleptiques, métoclopramide, dompéridone) • Diminution de la synthèse ou de la libération de TSH : agonistes dopaminergiques (dopamine, antiparkinsoniens), antisérotoninergiques (méthysergide, méthergolide), carbamazépine, glucocorticoïdes, metformine, octréotide, somatostatine 1 Perturbations de l’hormonogenèse thyroïdienne • Augmentation des taux de T3L et de T4L : amiodarone et médicaments iodés, aminoglutéthimide, cytokines (interféron-alfa, interleukine-2), lithium (rarement) • Réduction des taux T3L et de T4L : amiodarone et médicaments iodés, aminoglutéthimide, cytokines (interféron-alfa, interleukine-2), lithium 2 ise au point calcique et glucidique. Pour chaque axe, nous nous attacherons à distinguer les interférences pharmacologiques des interférences analytiques. La TSH, de par sa fonction de stimulation de l’hormonogenèse thyroïdienne et en tant que cible du Diminution de la conversion de T4L en T3L, (réduction du taux de T3L) : rétrocontrôle hormonal, est soumise à amiodarone, bêtabloquants (propranolol, alprénolol, métoprolol), gluco3 de nombreuses interférences médicacorticoïdes, propylthiouracile menteuses (3-5). Une action directe Déplacement de la liaison aux protéines porteuses : TBG, TBPA, albumine, d’un traitement sur l’hypothalamus (augmentation transitoire des taux de T4L et T3L, possible diminution 4 et/ou l’hypophyse peut induire une transitoire du taux de TSH) : AINS (fenclofénac), diazépam, furosémide, variation de ses taux circulants. C’est héparine, HBPM, salicylés, sulfonylurées le cas des antagonistes dopaminergiAugmentation du métabolisme hépatique de T4L et T3L par les inducteurs ques, qui peuvent être responsables des cytochromes P450 (réduction des taux de T4L et de T3L) : carbamazé5 d’une augmentation de la sécrétion de pine, phénobarbital, phénytoïne, primidone, rifampicine TSH en s’opposant à l’action inhibiDiminution de l’absorption intestinale de T4L et/ou de T3L (réduction des trice de la dopamine hypothalamique. taux de T3L et T4L) : cholestyramine, carbonate de calcium, hydroxyde 6 À l’inverse, les agonistes dopamid’aluminium, kayexalate, sucralfate, IPP nergiques (dopamine, voire certains antiparkinsoniens), tout comme les “effet cordarone”. Dans ce dernier cas, le taux de T4 antisérotoninergiques, les glucocorticoïdes, la somalibre est élevé. L’inhibition de la conversion périphérique tostatine et ses analogues ou encore la carbamazépine, de T4 en T3 est également observée avec d’autres traipeuvent induire une diminution de la sécrétion de TSH. tements iodés ou non (bêtabloquants, glucocorticoïdes). L’ensemble de ces interférences, qu’elles entraînent une On relève une augmentation des taux de T4 libre, qui se élévation ou une réduction du taux plasmatique de TSH, situe généralement à la limite haute de la normale, une reste généralement infraclinique et transitoire (tableau I, figure 1). Notons qu’une diminution de la TSH liée à diminution de celui de T3 libre et une TSH plasmatique l’introduction d’un traitement par metformine a récemnormale (tableau I, figure 1). Cette dernière peut également été décrite chez des patients hypothyroïdiens ment être augmentée, en particulier lors de l’initiation correctement substitués, sans que ce mécanisme d’interdu traitement. Les inducteurs enzymatiques, tels que le férence soit encore parfaitement expliqué (6). phénobarbital, la rifampicine, la phénytoïne ou la carbaIl n’a pas été retrouvé dans la littérature d’interférence mazépine, tendent à augmenter le catabolisme de la T4 d’ordre analytique avec le dosage de TSH. et de la T3. Cette interférence est non significative en De nombreux traitements induisent des dysthyroïdies raison du rétablissement de l’équilibre hormonal chez iatrogènes, qu’il faudra éliminer rapidement au cours de le sujet euthyroïdien, grâce à l’augmentation réactionl’enquête étiologique initiale. Le traitement par amionelle de la sécrétion de TSH. Elle peut néanmoins poser darone est un cas bien particulier qui fait intervenir des problèmes chez le malade hypothyroïdien substitué, plusieurs mécanismes physiopathologiques (7). Il faut rendant nécessaire l’augmentation de la posologie de distinguer les dysthyroïdies authentiques, engendrées la substitution par lévothyroxine. Une telle adaptation par la surcharge iodée, de “l’effet cordarone” lié à l’inposologique est également nécessaire en cas d’utilisahibition de la conversion de T4 en T3, d’une part, et à tion concomitante de traitements modifiant l’absorpl’action antagoniste de l’amiodarone sur les récepteurs tion intestinale des hormones thyroïdiennes, tels que la de la T3 d’autre part. Notons que seul le dosage de T4 cholestyramine, le fer, les AINS (anti-inflammatoires permet de différencier une hypothyroïdie débutante d’un non stéroïdiens), l’hydroxide d’aluminium, le sucralfate Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (XI), n° 2, mars-avril 2007 53 Mise au point Mise au point 54 pas évoqués car leur impact se traduit par une modification isolée de la T4 Hypothalamus 1 ou de la T3 totales, dont le dosage est actuellement tombé en désuétude dans la pratique quotidienne. En revanche, TRH différentes molécules peuvent se lier à la TBG ou à l’albumine, entrant alors Hypophyse 1 en compétition avec la T4 et la T3 et modifiant ainsi l’équilibre hormone libre/hormone liée. Ces effets, fugaces, TSH sont généralement en rapport avec un prélèvement sanguin pour bilan thyroïThyroïde dien pratiqué au décours immédiat de l’administration du traitement. Ils se 2 traduisent généralement par une fausse élévation de T4 libre. Différentes molécules peuvent en être responsables : les salicylés, les AINS, le 3 T4L T3L diazépam et le furosémide notamment Conversion lors de bolus i.v. Un cas particulier concerne l’héparine non fractionnée 4 4 mais également les HBPM (héparines de bas poids moléculaire). En activant T4 liée T3 liée les lipoprotéines lipases, les héparines induisent une libération d’acides gras. Ces derniers déplacent la T4 libre de ses sites de liaison de la TBG, élevant ainsi la T4 libre (tableau I, figure 1). Catabolisme Si cette interférence n’a pas de traduction clinique, elle interpelle néanmoins 5 Cycle en raison de l’augmentation du taux de Foie entérohépatique T4 libre, lequel contraste avec celui de 6 TSH, qui reste normal. T4/T3 exogène Il n’a pas été retrouvé dans la littéraIntestin ture d’interférence d’ordre analytique avec le dosage de TBG. Élimination Enfin, le dépistage des cancers médullaires de la thyroïde repose Figure 1. Interférences pharmacologiques au cours de l’exploration de l’axe thyréotrope : sur le dosage de la thyrocalcitoles différents points d’impact des médicaments figurent sous forme de chiffres encadrés se nine. Une interférence liée à l’usage rapportant au tableau I. d’inhibiteurs des pompes à protons est possible, et peut conduire à une hypercalcitoninémie en rapport avec l’augmentation de et même les inhibiteurs de la pompe à protons. Ces effets la sécrétion de gastrine induite par ces traitements. sont plus à considérer comme des interactions médicamenteuses, car ils ne sont significatifs que sur l’hormone Il n’a pas été retrouvé dans la littérature d’interférence de substitution (tableau I, figure 1). d’ordre analytique avec le dosage de la thyrocalcitonine. Il n’a pas été retrouvé dans la littérature d’interférence d’ordre analytique avec le dosage des hormones thyroïdiennes libres. Influences médicamenteuses sur les La modification de la liaison des hormones thyroïdiennes aux protéines de transport représente un autre type d’interparamètres d’exploration des fonctions férence pharmacologique. Ces interactions n’induisent pas surrénaliennes (tableaux II, III et IV, figures 2, 3 et 4) de dysthyroïdie mais engendrent des modifications des taux circulants d’hormone libre, ce qui peut compliquer l’interLes fonctions corticosurrénalienne et médullosurrénaprétation du bilan. Les traitements modifiant les concenlienne se singularisent par la diversité des hormones libétrations de TBG (thyroxine-binding globulin) ne seront Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (XI), n° 2, mars-avril 2007 Mise au pointM Perturbations de la fonction corticosurrénalienne Nous pouvons d’ores et déjà souligner que les seuls traitements capables de perturber l’ensemble des sécrétions corticosurrénaliennes sont les inhibiteurs de la stéroïdogenèse. Utilisées dans le traitement des syndromes de Cushing ou des récidives et localisations secondaires de corticosurrénalomes, ces molécules sont d’utilisation peu courante et les perturbations hormonales attendues sont prises en charge par l’endocrinologue. Les deux molécules utilisées sont l’Op’DDD et le kétoconazole (à des doses supérieures à celles utilisées pour l’effet antifongique). L’aminoglutéthimide et l’étomidate peuvent également inhiber l’hormonogenèse corticosurrénalienne. À l’inverse, d’autres médications influent sur l’une ou l’autre des sécrétions surrénaliennes. ◆ Influences médicamenteuses sur les dosages d’ACTH (adrenocorticotropic hormone) et du cortisol (tableau II, figure 2) Tableau II. Interférences pharmacologiques au cours de l’exploration de l’axe corticotrope et des androgènes surrénaliens : mécanismes impliqués et variations des taux hormonaux. Les chiffres encadrés correspondent aux niveaux d’impact des molécules et sont repris dans la figure 2. Mise au repos de l’axe corticosurrénalien (réduction des taux de cortisol et d'ACTH endogènes suite au rétrocontrôle inhibiteur sur l’axe corticotrope) : corticoïdes de synthèse, autres stéroïdes à action glucocorticoïde (médroxyprogestérone) 1 Action sur la synthèse ou la libération d’ACTH • Augmentation de la synthèse ou de la libération d’ACTH : agonistes dopaminergiques, agonistes sérotoninergiques, clomipramine, glucagon, insuline, interleukine-2 • Diminution de la synthèse ou de la libération d’ACTH : acide valproïque, cyproheptadine, lopéramide, opiacés, oxazépam, somatostatine 1 Inhibition de l’hormonogenèse corticosurrénalienne : chute des taux de stéroïdes : aminoglutéthimide, étomidate, kétoconazole, Op’DDD 2 Action sur la synthèse d’androgènes surrénaliens • Augmentation de la synthèse de DHEA et S-DHEA : amlodipine, clomifène, nitrendipine, propranolol • Inhibition de la synthèse d’androgènes surrénaliens (diminution des taux de DHEA) : fénofibrate 2 Action sur le taux de la protéine porteuse du cortisol (CBG) • Augmentation de la CBG (augmentation du taux de cortisol sérique total) : estrogènes • Diminution de la CBG (diminution du taux de cortisol sérique total) : androgènes, progestatifs 3 Blocage de l’effet du cortisol sur ses récepteurs (augmentation d’ACTH, du cortisol sérique et du CLU) : mifépristone 4 Diminution de la conversion de DHEA en S-DHEA (diminution des taux de S-DHEA) : danazol 5 Augmentation de la clairance métabolique par induction des cytochromes P450 (diminution des taux plasmatiques de cortisol et d’androgènes surrénaliens, perturbations des tests dynamiques utilisant des stéroïdes de synthèse) : carbamazépine, phénytoïne, rifampicine, phénobarbital, primidone 6 Le retentissement sur l’axe corticotrope d’un traitement par des corticoïdes de synthèse ou des stéroïdes à action glucocorticoïde, telle la médroxyprogestérone, se traduit par une inhibition de la sécrétion d’ACTH et, secondairement, du cortisol sanguin et urinaire (4, 5, 8). Notons que la médroxyprogestérone ne bloque pas la réponse du cortisol en réponse à la stimulation par la CRH (corticotropin-releasing hormone). Les traitements qui modifient la sécrétion d’ACTH en agissant sur le fonctionnement hypophysaire ou hypothalamique ont les mêmes conséquences. C’est le cas des opiacés (y compris le lopéramide), de la cyproheptadine, de l’acide valproïque et de l’oxazépam, qui peuvent diminuer transitoirement le taux d’ACTH et, secondairement, de cortisol. À l’inverse, les agonistes dopaminergiques et sérotoninergiques, la clomipramine et l’interleukine-2 stimulent transitoirement la sécrétion d’ACTH (tableau II, figure 2). ise au point rées et donc des dosages biologiques nécessaires à leur exploration. Ceuxci seront passés successivement en revue dans ce chapitre en considérant pour chacun les difficultés d’interprétation liées aux interférences pharmacologiques puis analytiques. Il n’a pas été retrouvé dans la littérature d’interférences analytiques avec le dosage d’ACTH. La valeur de la cortisolémie est perturbée par les traitements modifiant la synthèse de la CBG (corticosteroidbinding globulin) [4, 5]. En effet, les dosages utilisés en pratique courante prennent en compte à la fois les fractions libre et liée du cortisol. La production hépatique de CBG est stimulée par les estrogènes, ce qui entraîne une augmentation du cortisol sérique total (reflet de l’augmentation du cortisol lié à la CBG), sans modification du cortisol libre sanguin ou urinaire. À l’inverse, les androgènes et les progestatifs diminuent la synthèse de CBG (tableau II, figure 2). Les traitements inducteurs enzymatiques tels que la carbamazépine, la phénytoïne, la rifampicine et le phénobarbital doivent être pris en considération lors de l’interprétation de tests de freination ou de stimulation de l’axe corticotrope. En effet, Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (XI), n° 2, mars-avril 2007 55 Mise au point Mise au point 56 1 Hypothalamus CRH Hypophyse 1 ACTH par spectrométrie de masse, limitent au maximum les risques d’interférence. Cette méthodologie lourde reste cependant réservée aux laboratoires hautement spécialisés ; elle est actuellement peu utilisée pour les dosages de routine. ◆ Influences médicamenteuses sur les dosages des androgènes surrénaliens (tableau II, figure 2) Des interférences touchant sélectivement le dosage des androgènes surrénaliens ont été décrites (11) 2 [tableau II, figure 2]. Une étude récente (12) montre une diminution significative du taux de DHEA (déhydroépiandrostérone) sous fénoCortisol libre DHEA fibrate, l’hypolipémiant semblant capable d’inhiber la synthèse des 5 Δ-4A 3 androgènes surrénaliens. Le clomifène augmente les taux de DHEA Cortisol lié à la CBG S-DHEA et le S-DHEA (sulfate de déhydroépiandrostérone), tout comme 4 l’amlodipine, la nitrendipine et Effets tissulaires Effets tissulaires le propranolol. La conversion du S-DHEA en DHEA est diminuée par Catabolisme le danazol. Les taux de DHEA et de S-DHEA sont diminués lors de l’utilisation d’inducteurs enzymatiques 6 tels que la carbamazépine, la phénytoïne ou la rifampicine du fait d’une Foie augmentation de la clairance métabolique de ces stéroïdes sous contrôle Élimination du cytochrome P450. Les taux d’androgènes surrénaliens semblent Figure 2. Interférences pharmacologiques au cours de l’exploration de l’axe corticotrope et également modifiés par les variations des androgènes surrénaliens : les différents points d’impact des médicamens figurent sous de la prolactinémie. Ce phénomène forme de chiffres encadrés se rapportant au tableau II. s’expliquerait par la présence de récepteurs à la prolactine au sein du la dexaméthasone et la métopirone utilisées dans ces cortex surrénalien (13). Les traitement hypo- et hyperépreuves subissent en cas d’association aux traitements prolactinémiants pourraient ainsi avoir un impact sur la précédents une accélération de leur métabolisme qui peut fonction androgénique surrénalienne. Toutes ces interfémodifier les résultats des tests (tableau II, figure 2). rences sont biologiquement significatives, sans traducLe dosage du cortisol, notamment de la fraction libre tion clinique évidente. urinaire, est sujet à des interférences analytiques (9). Il n’a pas été retrouvé dans la littérature d’interférences Celles-ci peuvent se produire avec tous les stéroïdes analytiques avec le dosage des androgènes surrénaliens. endogènes et exogènes mais également avec d’autres ◆ Influences médicamenteuses sur les dosages de traitements tels que le fénofibrate (10). Elles sont de moins en moins fréquentes en raison de l’utilisation rénine et d’aldostérone (tableau III, figure 3) d’immunodosages, lesquels conservent cependant un De nombreux médicaments ont un impact important risque de réactions croisées plus ou moins significatives sur le système rénine-angiotensine-aldostérone et qu’il est difficile de quantifier. Les méthodes de dosage induisent fréquemment des perturbations des taux de avec extraction préalable et l’utilisation de techniques rénine et d’aldostérone (4, 5). Des précautions doivent séparatives comme la CLHP (chromatographie liquide être prises avant tout dosage d’aldostérone ou de rénine haute performance), au mieux couplée à une détection plasmatique. La kaliémie ayant un impact essentiel sur Surrénales Stéroïdogenèse Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (XI), n° 2, mars-avril 2007 Mise au pointM Tableau III. Interférences pharmacologiques au cours des dosages de rénine et d’aldostérone : mécanismes impliqués et variations des taux hormonaux. Les chiffres encadrés correspondent aux niveaux d’impact des molécules et sont repris dans la figure 3. Inhibiteur de la stéroïdogenèse surrénalienne (diminution des taux d’aldostérone et élévation de la réninémie) : aminoglutéthimide, étomidate, kétoconazole, Op’DDD 1 Action sur la sécrétion d’aldostérone • Augmentation de la sécrétion d’aldostérone (augmentation transitoire des taux d’aldostérone) : métoclopramide, cisapride • Diminution de la sécrétion d’aldostérone (diminution des taux d’aldostérone) : IEC, sartans – antisérotoninergiques, héparine 1 Action sur l’activité de l’axe rénine-angiotensine • Augmentation de l’activité de l’axe rénine-angiotensine (augmentation des taux de rénine et d’aldostérone) : diurétiques de l’anse, thiazidiques, spironolactone, corticoïdes, estrogènes • Diminution de l’activité de l’axe rénine-angiotensine (diminution des taux de rénine et d’aldostérone) : AINS, salicylés, β-bloquants 2 ise au point les sécrétions de ces deux hormones, l’exploration devra s’effectuer dans des conditions de normokaliémie. La stimulation de l’activité rénineangiotensine, consécutive à l’utilisation de diurétiques de l’anse et de diurétiques thiazidiques, ainsi que l’hypoaldostéronisme induit en début de traitement par les IEC (inhibiteurs de l’enzyme de conversion), les antagonistes du récepteur AT1 de l’angiotensine II (sartans) et la spironolactone imposent l’arrêt de ces thérapeutiques avant toute exploration biologique (6 semaines pour la spironolactone, 2 semaines pour les diurétiques et les IEC). De même, les bêtabloquants, du fait de leur effet freinateur sur la rénine, sont à proscrire lors du bilan (arrêt d’une semaine au moins avant le dosage) [tableau III, figure 3]. Seuls les antihypertenseurs centraux et les inhibiteurs calciques n’ont pas d’influence sur ces dosages. Les IEC et les sartans pourront toutefois être maintenus lors de la recherche d’un hyperaldostéronisme primaire dans la mesure où ils n’augmentent pas le taux de rénine. D’autres classes médicamenteuses peuvent également exercer une influence dont il faut tenir compte. Les salicylés et les AINS réduisent la synthèse des prostaglandines et entraînent ainsi une vasodilatation des artères rénales, avec secondairement une diminution de la réninémie et de l’aldostéronémie. Ils doivent donc être arrêtés 2 semaines avant les dosages. L’héparine et les drogues antisérotoninergiques se comportent comme des inhibiteurs de la synthèse d’aldostérone. À l’inverse, le métoclopramide et le cisapride l’augmentent transitoirement. Enfin, une interférence liée à l’utilisation des corticoïdes et/ ou des estrogènes a été décrite : ces traitements sembleraient augmenter la synthèse d’angiotensinogène, ce qui conduit à une majoration de l’activité rénine-angiotensine II (tableau III, figure 3). Il n’a pas été retrouvé dans la littérature d’interférences analytiques avec les dosages de rénine et d’aldostérone. Hypothalamus CRH Angiotensine II Hypophyse + ACTH Enzyme de conversion Surrénale Zone glomérulée 1 Cortisol Angiotensine I Aldostérone 2 Rénine Angiotensinogène 앖Réabsorption tubulaire de Na+ Catabolisme 앖Pression artérielle Foie Élimination Figure 3. Interférences pharmacologiques au cours des dosages de rénine et d’aldostérone : les différents points d’impact des médicaments figurent sous forme de chiffres encadrés se rapportant au tableau III. Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (XI), n° 2, mars-avril 2007 57 Mise au point Mise au point Perturbations de la fonction médullosurrénalienne : influences médicamenteuses sur le dosage des catécholamines mandélique : ils sont utilisés dans la thérapeutique de la dépression et sont aujourd’hui le plus souvent considérés comme sélectifs de l’isoenzyme A ou B de la MAO. Toutefois, la sélectivité des molécules vis-à-vis de l’une ou l’autre (tableau IV, figure 4) des isoenzymes n’est que partielle et ne permet donc pas d’abolir totalement le risque d’hyperadrénergie iatrogène, Un tableau clinique associant une hypertension artérielle et notamment en cas d’association à toute autre drogue susdes signes d’hyperadrénergie doit faire systématiquement ceptible d’augmenter la production de catécholamines ; évoquer la possibilité d’un phéochromocytome. Toute✓ les inhibiteurs de la COMT (catéchol-O-méthyl-transféfois, sur l’ensemble des patients explorés, le diagnostic rase) : ils bloquent l’action d’une enzyme qui catabolise les est rarement retenu. Il faut donc alors chercher d’autres catécholamines en métanéphrines. La molécule concernée étiologies à ces manifestations cliniques. Diverses moléest l’entacapone, antiparkinsonien permettant d’augmenter cules peuvent être responsables de pseudo-phéochromola L-dopa disponible pour être transformée en dopamine au cytomes médicamenteux. On peut les classer en plusieurs niveau central ; catégories en fonction du mécanisme physiopathologique ✓ les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine et des impliqué (14) [tableau IV, figure 4] : catécholamines : ils ont pu être impliqués, comme certains ✓ les sympathomimétiques indirects : ce sont des subsantidépresseurs tricycliques, dans des tableaux de pseudotances capables d’activer le système nerveux sympathiphéochromocytomes médicamenteux. que à la fois au niveau central et périphérique et, à des Notons également le rebond de sécrétions des catédegrés divers, d’inhiber la recapture et/ou le catabocholamines fréquemment observé dans les jours qui lisme des catécholamines ; suivent l’arrêt d’un traitement par bêtabloquants ou ✓ les sympathomimétiques directs, agonistes des récepα2-agonistes. teurs adrénergiques périphériques : ils peuvent engenLe dosage des cathécholamines urinaires et de leurs dérivés drer un tableau d’hyperactivité sympathique avec hyperreste la base du bilan biologique du diagnostic des phéotension artérielle majeure par mimétisme de l’action des chromocytomes. Le diagnostic biologique de pseudo-phéocatécholamines ; chromocytome médicamenteux repose sur l’augmentation ✓ les inhibiteurs de la monoamine-oxydase (IMAO), prépondérante de la noradrénaline plasmatique et urinaire, enzyme catabolisant les catécholamines en acide vanylcontrastant avec des taux normaux ou faiblement augmentés d’adrénaline (rapport adrénaline/noradrénaline < 0,25). Un tel Tableau IV. Interférences pharmacologiques au cours du dosage des catécholamines : classes thérapeutiques impliquées dans l’augmentation des taux de catécholamines. profil biologique témoigne de l’origine Les chiffres encadrés correspondent aux points d’impact des molécules et sont repris sympathique et non médullosurrénadans la figure 4. lienne des catécholamines circulantes. Classe pharmacologique Molécules Longtemps sujettes à de nombreuses interférences, les techniques de Sympathomimétiques indirects Cocaïne dosage colorimétriques sont généraAmphétamines, anorexigènes 1 lement abandonnées au profit de la β-agonistes (terbutaline, salmétérol, CLHP à détection électrochimique salbutamol, éphédrine, pseudo-éphédrine) (5-14), dont la bonne maîtrise limite Sympathomimétiques directs Ecstasy considérablement le risque d’interféVasoconstricteurs : phényléthanolamine, rences analytiques. 2 phénylpropanolamine, phényléphrine, éphédrine, pseudo-éphédrine 3 Inhibiteurs de la monoamine-oxydase (IMAO) – non sélectifs : iproniazide – IMAO-A : toloxatone, moclobémide – IMAO-B : sélégiline Inhibiteurs de la COMT (catéchol-O-méthyltransférase) : entacapone Influences médicamenteuses sur les paramètres d’exploration de l’axe gonadotrope Inhibiteurs de la recapture des catécholamines Antidépresseurs tricycliques, amphétamines, anorexigènes (tableau V, figure 5) Inhibiteurs du catabolisme des catécholamines 4 Catécholamines exogènes 58 Adrénaline, noradrénaline Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (XI), n° 2, mars-avril 2007 De nombreuses molécules, dont les contraceptifs estroprogestatifs et progestatifs de synthèse, sont prescrites précisément dans le but Mise au pointM 1 Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (XI), n° 2, mars-avril 2007 ise au point testostérone. Le système dopaminergique abaisse quant à lui les taux de FSH et de LH, mais sans supprimer la pulsatilité, ce qui suggère une diminution de la sensibilité de la cellule 4 hypophysaire à la LH-RH (luteinizing hormone-releasing hormone). En revanche, les antidopaminergiques n’augmentent pas les taux de gonadoDopamine - Adrénaline - Noradrénaline trophines. Les taux circulants de stéroïdes sexuels sont également influencés par diverses molécules (tableau V, Catabolisme figure 5). La dihydrotestostérone 3 MAO - COMT (DHT) est un puissant métabolite de la testostérone utilisé notamment dans la prise en charge des gynécomasties. 2 Il a été observé sous ce traitement une décroissance significative des taux Effets tissulaires plasmatiques de testostérone, d’estradiol et de LH, témoignant d’un effet Métanéphrines - Normétanéphrines inhibiteur sur l’axe hypothalamoVMA - HVA hypophyso-testiculaire. Les inducteurs enzymatiques, tels que le phénobarÉlimination bital, la rifampicine, la phénytoïne et la carbamazépine, tendent à augmenter le catabolisme des stéroïdes sexuels Figure 4. Interférences pharmacologiques au cours du dosage des catécholamines : les et donc à réduire leur concentration différents points d’impact des médicaments figurent sous forme de chiffres encadrés se rapportant au tableau IV. plasmatique. On peut secondairement constater une augmentation réactionnelle de la sécrétion de LH. La ciméde modifier la fonction de l’axe gonadotrope. Elles ne tidine et la spironolactone se comportent comme des constituent donc pas à proprement parler des sources de antiandrogènes, grands pourvoyeurs de gynécomasties. piège diagnostique. En revanche, certains médicaments La cimétidine, puissant inhibiteur des cytochromes P450 couramment utilisés sont, de façon inattendue, capables hépatiques, réduit en outre l’hydroxylation de l’E2, ce qui d’influencer le fonctionnement de l’axe gonadotrope et/ou majore ainsi sa concentration plasmatique. Lors d’un traid’interférer avec les dosages utilisés pour son exploration. tement par spironolactone, la testostéronémie reste le plus Les mécanismes mis en jeu sont variés et parfois imparsouvent normale. La gynécomastie peut alors être explifaitement compris (4-16). quée par le blocage de la liaison de la DHT à ses récepteurs La synthèse et/ou la libération de gonadotrophines (FSH : cytosoliques, ou encore par une compétition au niveau follicle-stimulating hormone, et LH : luteinizing hormone) des sites de fixation de la testostérone sur sa protéine de peuvent être modulées par différentes classes médicamenliaison (16). Toutefois, la spironolactone peut également teuses (tableau V, figure 5). Les glucocorticoïdes ont une réduire directement la synthèse de testostérone et donc ses action gonadique directe (réduction des taux de testostétaux circulants (16). Enfin, quelques cas de gynécomastie rone et de la réponse à l’HCG [human chorionic gonadoont été décrits avec le diazépam, qui semblerait pouvoir tropin] ; chez l’homme, blocage de la synthèse ovarienne engendrer une augmentation des taux d’E2 circulants avec d’estradiol [E2] et de progestérone), mais aussi une action testostéronémie normale, peut-être en raison d’une interacinhibitrice hypophysaire, diminuant la FSH et la LH de tion avec la TeBG (testosterone-estradiol-binding globulin) base et sous stimulation. Divers neuromédiateurs, dont les [tableau V, figure 5]. peptides opioïdes et la dopamine, sont également capables La TeBG est la protéine porteuse des estrogènes et de la d’influencer la sécrétion de gonadotrophines. Le système testostérone dans le plasma. La synthèse hépatique de opioïdergique exerce un tonus inhibiteur permanent sur TeBG est favorisée par les estrogènes et les hormones la sécrétion de LH avec suppression de la pulsatilité. Les thyroïdiennes, et diminuée par les androgènes et les femmes toxicomanes présentent d’ailleurs très souvent progestatifs. Les inducteurs enzymatiques, tout en accédes tableaux d’anovulation. Chez les hommes traités lérant la clairance métabolique des stéroïdes gonadiques, par méthadone, on observe une baisse de la LH et de la augmentent la synthèse de TeBG, ce qui diminue encore Terminaison sympathique 59 Mise au point Mise au point la fraction libre active de testostérone (tableau V, figure 5). Comme le dosage du cortisol, celui des stéroïdes sexuels est soumis à des interférences d’ordre analytique avec les stéroïdes endogènes et exogènes. Il est difficile d’estimer précisément le pourcentage de croisement dans la mesure où celui-ci dépend énormément de la technique utilisée. En revanche, il n’a pas été retrouvé dans la littérature d’interférences analytiques avec les dosages de gonadotrophines ni de TeBG. Influences médicamenteuses sur les paramètres d’exploration de l’axe lactotrope (tableau VI) Tableau V. Interférences pharmacologiques au cours de l’exploration de l’axe gonadotrope : mécanismes impliqués et variations des taux hormonaux. Les chiffres encadrés correspondent aux niveaux d’impact des molécules et sont repris dans la figure 5. Mise au repos de l’axe gonadotrope (baisse des taux de gonadotrophines et de stéroïdes sexuels endogènes par rétrocontrôle inhibiteur sur l’axe gonadotrope) : progestatifs et estrogènes de synthèse oraux et percutanés, testostérone (chez l'homme) 1 Action sur la synthèse ou la libération de gonadotrophines • Augmentation de la synthèse ou de la libération de gonadotrophines (augmentation des taux de FSH, LH et stéroïdes sexuels) : – agonistes de la LH-RH (les trois premières semaines de traitement) – antagonistes centraux des estrogènes (tamoxifène, clomifène) – antiandrogènes, inhibiteurs de la 5-α-réductase et de l’aromatase • Diminution de la synthèse ou de la libération de gonadotrophines (diminution des taux de FSH, LH et stéroïdes sexuels) : agonistes de la LH-RH (après 3 semaines de traitement), antagonistes de la LH-RH, opiacés, dopamine, glucocorticoïdes (effet prépondérant sur la LH), DHT 1 Inhibition de l’hormonogenèse des stéroïdes sexuels – aminoglutéthimide, étomidate, kétoconazole, Op’DDD (앗stéroïdes sexuels et 앖gonadotrophines) – glucocorticoïdes (앗de la LH et de la testostérone) – spironolactone (앗testostérone et 앖gonadotrophines) – inhibiteurs de l'aromatase (앗estrogènes et 앖gonadotrophines) – inhibiteurs de la 5-α-réductase (앗DHT et 앖gonadotrophines) 2 Les hyperprolactinémies médicamenteuses sont extrêmement fréquentes Action sur le taux de TeBG et tout aussi symptomatiques clini• Augmentation de la TeBG (augmentation des taux de T ou d’E2 totaux) : quement que les authentiques hyperestrogènes, hormones thyroïdiennes, inducteurs enzymatiques 3 prolactinémies d’origine organique ; • Diminution de la TeBG (diminution des taux de T ou d’E2 totaux) : il est essentiel de savoir les identifier androgènes, progestatifs afin d’éviter la réalisation d’examens paracliniques inutiles et parfois Blocage de l’effet des stéroïdes gonadiques sur leurs récepteurs périphériques (théoriquement, augmentation de la testostérone circulante) : 4 coûteux (17). flutamide, nilutamide Les neuroleptiques figurent parmi les traitements les plus fréquemment en Augmentation de l’estradiol par des mécanismes mal élucidés : ciméticause. Les molécules les plus récentes dine, oméprazole, spironolactone, diazépam de cette classe thérapeutique, notamAugmentation de la clairance métabolique par induction des cytochroment les antipsychotiques dits “atypimes P450 (diminution des stéroïdes sexuels, augmentation des gona5 ques”, sont toutefois dépourvus d’effet dotrophines) : carbamazépine, phénytoïne, rifampicine, phénobarbital, hyperprolactinémiant. Les autres classes primidone thérapeutiques impliquées sont les antidépresseurs, certains antihypertenseurs, pourrait expliquer leur effet hyperprolactinémiant moins les molécules stimulant la motilité prononcé. gastrique, les estrogènes, etc. (tableau VI). Les mécanismes en cause sont extrêmement variés. Plusieurs classes d’antidépresseurs sont également impliLa dopamine d’origine hypothalamique exerce physiologiquées dans la genèse des hyperprolactinémies. L’impact quement et de façon prédominante un tonus freinateur sur constaté est toutefois extrêmement variable en fonction des la sécrétion de prolactine. De nombreuses molécules, en études et des classes thérapeutiques. Les mécanismes physioparticulier les neuroleptiques, sont capables de bloquer les pathologiques en cause ne sont pas non plus élucidés. récepteurs dopaminergiques et notamment les récepteurs La prise de morphine ou de ses dérivés accroît les taux de D2 au niveau de l’hypothalamus et des cellules lactotropes, prolactine à court et long termes. Par exemple, les utililevant ainsi le tonus dopaminergique inhibiteur endogène sateurs de méthadone peuvent avoir un taux de prolac(tableau VI). Les antipsychotiques atypiques semblent tine moyen de base normal mais des pics transitoires 2 se lier plus faiblement aux récepteurs D2 et pouvoir à 4 heures après leur prise quotidienne de méthadone. combiner un effet à la fois agoniste et antagoniste, ce qui Certaines études suggèrent que les récepteurs aux opioïdes 60 Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (XI), n° 2, mars-avril 2007 Mise au pointM E2 DHT LH-RH 1 Hypophyse E2 DHT FSH LH Gonades Stéroïdogenèse 2 2 2 DHT Aromatisation Estrogènes libres Testostérone libre 3 3 Estrogènes liés à la TeBG Testostérone liée à la TeBG 4 4 Catabolisme Effets tissulaires Effets tissulaires 5 Foie Élimination Figure 5. Interférences pharmacologiques au cours de l’exploration de l’axe gonadotrope : les différents points d’impact des médicaments figurent sous forme de chiffres encadrés se rapportant au tableau V. Tableau VI. Principales molécules impliquées dans les hyperprolactinémies. Antipsychotiques (neuroleptiques) Phénothiazine, thioxanthènes, butyrophénones, antipsychotiques atypiques Antidépresseurs Tri- et tétracycliques, inhibiteurs de la monoamine oxydase, inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine, autres Opiacés et cocaïne Antihypertenseurs Vérapamil, méthyldopa, réserpine Thérapeutiques à visée gastro-intestinale Métoclopramide, dompéridone, antihistaminiques Antiprotéases Estrogènes Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (XI), n° 2, mars-avril 2007 ise au point 1 Hypothalamus de type μ seraient impliqués, alors que d’autres travaux font évoquer une action antidopaminergique des morphiniques. La prise de cocaïne est également associée à des hyperprolactinémies chroniques modérées (tableau VI). Parmi les antihypertenseurs, le vérapamil est le seul inhibiteur calcique susceptible de générer une hyperprolactinémie, par un probable effet antidopaminergique. Quant à l’alphaméthyldopa, elle inhibe la décarboxylase qui transforme la L-dopa en dopamine. La réserpine empêche, quant à elle, le stockage de la dopamine. Parmi les molécules couramment utilisées pour accélérer la motilité gastro-intestinale, le métoclopramide et la dompéridone, qui sont des antagonistes des récepteurs dopaminergiques, sont à ce titre responsables d’hyperprolactinémie chez 50 % des patients traités. Enfin, le rôle hyperprolactinémiant des estrogènes, notamment de ceux contenus dans les contraceptifs oraux, est assez controversé. Certaines études ont toutefois mis en évidence une hyperprolactinémie chez 12 à 30 % des femmes traitées, sans que l’on ait pu montrer une réelle influence de la dose d’estrogènes contenue dans ces contraceptifs. Cet effet pourrait être expliqué par une activation de la transcription du gène de la prolactine par les estrogènes, au sein même des cellules hypophysaires lactotropes (17). Quel que soit le traitement, il existe une grande variabilité interindividuelle de la réponse de la prolactine à la molécule administrée. De manière générale, les taux de prolactine augmentent progressivement au cours de la première semaine avant d’atteindre un plateau. La prolactinémie est généralement inférieure à 100 ng/ml, mais des chiffres supérieurs à 350 ng/l ont pu être rapportés, notamment avec les neuroleptiques. Ces taux décroissent progressivement jusqu’à normalisation dans les jours qui suivent l’arrêt du traitement. À l’inverse, certaines molécules utilisées dans le cadre du traitement de 61 Mise au point Mise au point pathologies non endocriniennes sont capables de réduire modérément les taux de prolactine. Il s’agit essentiellement de la lévodopa, du piribédil et de la dihydroergocryptine. Enfin, en dehors des agonistes dopaminergiques, les glucocorticoïdes semblent pouvoir abaisser la réponse de la prolactine à ses stimuli physiologiques ou pharmacologiques (18). Il n’a pas été retrouvé dans la littérature d’interférences analytiques avec le dosage de la prolactine. Influences médicamenteuses sur les paramètres d’exploration de l’axe somatotrope L’exploration de la fonction somatotrope dans le diagnostic de l’acromégalie est rarement soumise à des difficultés liées aux traitements intercurrents (4). Les médicaments augmentant la sécrétion de GH (growth hormone), tels que les bêtabloquants, voient leur effet inhibé lors des épreuves de freination. L’effet des bêtabloquants peut être plus manifeste sur les dosages de base, notamment d’IGF1 (insuline-like growth factor 1). Il a été plus récemment mis en évidence un effet stimulant de la testostérone sur les taux de base d’IGF1 et, a contrario, un effet inhibiteur du raloxifène et des traitements estrogéniques (19). Certains médicaments peuvent générer des difficultés dans l’interprétation des tests utilisés pour l’exploration des déficits somatotropes. Les antidopaminergiques, les antisérotoninergiques, les antihistaminiques, les anticholinergiques, les corticoïdes et la théophylline diminuent la réponse aux tests de stimulation de la GH du fait de leur action hypophysaire et hypothalamique. Le pegvisomant (Somavert®) est un analogue de l’hormone de croissance humaine modifié par génie génétique pour être un antagoniste hautement sélectif du récepteur de l’hormone de croissance. Il est utilisé dans le traitement de l’acromégalie. Les similitudes structurales du pegvisomant avec l’hormone de croissance ellemême engendrent des interférences analytiques lors du dosage radio-immunologique de la GH pratiqué sous ce traitement, le rendant ininterprétable du fait d’une fausse élévation du taux plasmatique de GH. Influences médicamenteuses sur les paramètres d’exploration de l’équilibre phosphocalcique Les traitements à base de sels de lithium, encore largement utilisés dans la psychose maniacodépressive, 62 Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (XI), n° 2, mars-avril 2007 peuvent induire des hyperparathyroïdies responsables d’hypercalcémies parfois extrêmement sévères (20). Sur le plan biologique, l’hyperparathyroïdie induite par le lithium associe une hypercalcémie et une élévation de la parathormone intacte plasmatique, alors que la calciurie reste normale, de même que le taux de l’AMPc (adénosine-monophosphate cyclique) urinaire. Il s’agit beaucoup plus d’une réelle iatrogénie que d’une simple interférence pharmacologique. En revanche, il est bien établi que les traitements estrogéniques sont associés à une décroissance des marqueurs d’ostéogenèse et d’ostéolyse, notamment en période postménopausique (21). L’estrogénothérapie substitutive permet de réduire le taux de PTH circulante. Cette observation pourrait être la conséquence d’effets extra-osseux des estrogènes, notamment sur l’absorption intestinale, sur le transport rénal du calcium et possiblement sur la sécrétion de PTH (21). Enfin, les glucocorticoïdes exercent des effets complexes sur le métabolisme phosphocalcique, incluant notamment une inhibition de l’absorption digestive du calcium qui résulte de leur action antivitaminique D. Cet effet hypocalcémiant, le plus souvent gênant, peut parfois être utilisé à des fins thérapeutiques (18). Le dosage de la PTH bio-intacte, c’est-à-dire la PTH (l84), exclut les interférences liées à l’usage des analogues de la PTH. Ce n’était pas les dosages de première et deuxième générations actuellement tombés en désuétude. Influences médicamenteuses sur les dosages des hormones pancréatiques Il a été clairement démontré que les dérivés cortisoniques étaient capables de s’opposer aux sécrétions d’insuline et de polypeptide pancréatique et, au contraire, de stimuler la production de glucagon. Ces observations expliquent au moins en partie l’effet diabétogène des corticoïdes (18). Les mécanismes physiopathologiques impliqués dans la réduction des taux d’insuline par les glucocorticoïdes sont multiples, faisant intervenir des phénomènes d’activation des récepteurs α2-adrénergiques et de protéines-kinases ou encore d’apoptose des cellules β-pancréatiques (22). Enfin, la prise d’oméprazole induit une élévation significative du taux plasmatique de somatostatine (23). Les inhibiteurs de la pompe à protons devront donc être arrêtés avant tout dosage de somatostatine. Il n’a pas été retrouvé dans la littérature d’interférences analytiques avec les dosages des hormones pancréatiques. Mise au pointM Les traitements médicamenteux sont donc susceptibles d’affecter de multiples façons l’interprétation de dosages biologiques couramment utilisés en endocrinologie. La connaissance de la physiologie hormonale et des différents sites d’interaction des molécules exogènes avec les axes endocriniens devrait permettre au clinicien d’anticiper les modifications hormonales et d’éviter différents pièges diagnostiques et thérapeutiques. En cas de résultat biologique anormal, la recherche d’une cause médicamenteuse doit être la première étape du diagnostic étiologique. Parmi les multiples médicaments pouvant être impliqués, quelques classes thérapeutiques sont de grandes pourvoyeuses d’interférences pharmacologiques et/ou analytiques dans les dosages, d’autres restant très occasionnellement impliquées. Lorsque cela est possible, le traitement mis en cause sera arrêté, ce qui aboutira généralement à une normalisation plus ou moins complète et rapide des marqueurs hormonaux étudiés. Il est évident que la prise en charge du patient ne sera optimale que s’il existe une bonne communication entre le clinicien et le biologiste. Le clinicien devra pouvoir identifier les interférences pharmacologiques et suspecter d’éventuelles interférences analytiques que le biologiste se chargera de confirmer ou d’infirmer. Références 1. Kailajarvi M, Takala T, Gronroos P et al. Reminders of drug effects on laboratory test results. Clin Chem 2000;46:1395-400. 2. Jones AM, Honour JW. Unusual results from immunoassays and the role of the clinical endocrinologist. Clin Endocrinol 2006;64:234-44. 3. Surks MI, Sievert R. Drugs and thyroid function. N Engl J Med 1995;333:1688-94. 4. Segrestaa JM, Bergmann JF. Drug-induced interference with endocrine function immuno-assays. Immunoanal Biol Spec 1989;17:27-33. 5. Young D. Effects of drugs on clinical laboratory tests. 3rd ed. Washington: AACC PRESS, 1990. 6. Vigersky RA, Filmore-Nassar A, Glass AR. Thyrotropin suppression by metformin. 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En raison de leurs perfectionnements récents, les dosages hormonaux radio-immunologiques ne sont plus jamais pris en défaut. a. Vrai b. Faux 2. Le cortisol circule en grande partie sous forme liée à une protéine porteuse dont le taux est susceptible d’être augmenté sous l’influence des estrogènes. a. Vrai b. Faux 3. De nombreux traitements impliqués dans les hyperprolactinémies sont des agonistes dopaminergiques. a. Vrai b. Faux Réponses : 1b – 2a – 3b. Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (XI), n° 2, mars-avril 2007 63