Conduite à tenir chez un patient ayant survécu à une mort subite

Urgences
Conduite à tenir
chez un patient ayant
survécu à une mort subite
Jacques Mansourati, Thu-Nguyen Tram
Département de cardiologie, CHU La Cavale Blanche, 29609 Brest Cedex
En dehors de l’infarctus du myocarde à la phase aiguë, d’un trouble conductif clairement
documenté et du cas particulier du faisceau de Kent malin, un patient ayant survécu à une mort
subite recevra dans la majorité des cas un défibrillateur implantable automatique. Toutefois, il
faut insister sur la nécessité de réaliser un bilan étiologique précis et de rechercher une cause
génétique éventuelle. En effet, dans ce dernier cas, une enquête familiale sera nécessaire afin
de prendre des mesures adéquates de prévention vis-à-vis des autres membres de la famille. Le
but de cet article est de rappeler les différentes étiologies à rechercher devant une mort subite
récupérée et les recommandations actuelles dans leur prise en charge.
Mots clés :mort subite, défibrillateur automatique implantable, prévention secondaire
Après avoir réanimé un patient
d’une mort subite (MS) et lorsque
son état général le permet, l’équipe
médicale le prenant en charge doit
réaliser une enquête étiologique
minutieuse afin de mettre en route un
traitement efficace prévenant la réci-
dive chez le patient lui-même, sans
oublier la prévention de la pathologie
dans son entourage lorsque celle-ci
est génétiquement transmissible
(comme c’est le cas dans les « canalo-
pathies » de type Brugada ou QT long,
la dysplasie du ventricule droit ou les
cardiomyopathies familiales). Les
informations recueillies sur place par
l’équipe de secours sont déterminan-
tes pour l’enquête étiologique ulté-
rieure (circonstances et tracé ECG de
bonne qualité). Si, dans certains cas,
le diagnostic étiologique est facile-
ment établi, dans d’autres il peut être
plus problématique rendant la déci-
sion thérapeutique plus difficile, en
particulier celle de l’implantation
d’un défibrillateur automatique (DAI).
Nous nous baserons sur les recom-
mandations concernant les causes et
la prise en charge de la MS qui ont été
éditées par un groupe de travail de la
Société européenne de Cardiologie.
Celles-ci datent déjà de 2001 [1] mais
une mise à jour a eu lieu en 2003 [2]
concernant la prévention primaire de
la MS suite à la publication des études
CAT et MADIT II.
Prise en charge initiale
au cours de la phase
hospitalière
La prise en charge d’un patient qui
vient d’être « ressuscité » d’une MS
débute par une évaluation précise du
pronostic vital (en particulier neurolo-
gique si la réanimation était prolon-
gée) qui déterminera le délai de la
mise en route du bilan étiologique
et du traitement éventuel après
une concertation multidisciplinaire
(figure 1). Un monitoring des constan-
tes vitales (monitoring cardiaque per-
manent, pression artérielle, fonctions
respiratoires, conscience) sera entre-
pris en permanence jusqu’à la mise en
route du traitement adapté qui pré-
viendra la récidive. L’interrogatoire du
m
t
Tirés à part : J. Mansourati
mt, vol. 11, n° 3, mai-juin 2005 199
Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017.
Évaluation du pronostic vital
Circonstances de survenue
ECG au moment de l'événement
Bilan biologique minimum
Surveillance continue et maintien des constantes vitales et biologiques
Évaluation et traitement
urgents
de la pathologie causale
Stabilisation clinique
Bilan étiologique précis
Syndrome coronaire aigu
Coronarographie
Revascularisation urgente
TDR ou de la conduction
nécessitant une prise
en charge urgente
Monitoring ECG
Échographie cardiaque
Coronarographie
Éventuellement : IRM,
exploration électrophysiologique,
test d'effort ou pharmacologique
Traitement de la pathologie
causale
Éviction des circonstances
de survenue (QT long,
exercice physique...)
Et
Enquête familiale
selon l'étiologie
Traitement antiarythmique
ou
Stimulation cardiaque provisoire
Correction de troubles électrolytiques
Élimination d'un traitement responsable
d'un QT long
Surveillance
de la cardiopathie
ischémique
Stratification
du risque ultérieur
de MS
Figure 1. Prise en charge d’un patient ayant présenté une MS récupérée.
Urgences
mt, vol. 11, n° 3, mai-juin 2005
200
Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017.
patient et des témoins de la MS analysera ses circonstan-
ces de survenue et recherchera en particulier des antécé-
dents familiaux similaires, une pathologie cardiovascu-
laire déjà connue et des traitements en cours pouvant être
mis en cause. L’examen clinique et l’ECG permettront
d’orienter les investigations, de même qu’un bilan biolo-
gique minimum, en particulier à la recherche de perturba-
tions de la kaliémie ou de la calcémie afin de les corriger.
Le résultat du dosage des protéines cardiaques (troponine)
à la recherche d’un infarctus du myocarde (IDM), même
s’il doit être systématique, ne doit pas retarder la réalisa-
tion d’une coronarographie en urgence lorsque le dia-
gnostic ECG est évident.
Ainsi, selon les circonstances de survenue de la MS, le
bilan initial et le traitement s’imposeront dans l’urgence :
un syndrome coronaire aigu par exemple nécessitera une
coronarographie et éventuellement une revascularisation
dès l’arrivée du patient, un trouble conductif ou des torsa-
des de pointes mal contrôlées imposeront parfois la mise
en place d’une stimulation cardiaque provisoire, des TDR
ventriculaires persistants ou incessants nécessiteront la
mise en route d’un traitement antiarythmique (en particu-
lier bêtabloqueur et amiodarone) car leur contrôle sera
déterminant dans la décision d’implanter un DAI... Dans
d’autres cas, la prise en charge s’effectuera de façon moins
urgente, le temps de réaliser un bilan étiologique complet
et précis : réalisation d’une échographie cardiaque et
d’une coronarographie à la recherche d’une cardiomyo-
pathie ischémique, dilatée (CMD) ou hypertrophique
(CMH) et permettant l’évaluation précise de la fonction
ventriculaire gauche, exploration électrophysiologique
avec ou sans test pharmacologique à la recherche d’un
trouble conductif ou du rythme si le diagnostic n’est pas
encore certain, IRM cardiaque et recherche de potentiels
tardifs ventriculaires... Comme nous le verrons ci-dessous,
certains de ces examens n’auront pas d’implication
directe sur la décision d’implanter un DAI dans cette
situation de prévention secondaire de la MS où le trouble
du rythme ventriculaire est la principale cause (80 % des
cas). Les recommandations dans ce contexte sont actuel-
lement claires (tableau 1).
Il ne faudra pas oublier enfin, à plus long terme,
l’intérêt d’une enquête familiale clinique et génétique
lorsque la pathologie causale est héréditaire (tableau 2) ou
de façon générale lorsque l’interrogatoire retrouve
d’autres événements familiaux suspects. Le recours à
l’aide de centres spécialisés dans ces anomalies généti-
ques permettra de faciliter le déroulement de cette
enquête.
Stratégie diagnostique
et thérapeutique en fonction
de l’étiologie de la MS
Cardiopathie ischémique
Il s’agit de la cause la plus fréquente de MS dans les
pays développés. La MS peut survenir à la phase aiguë de
l’IDM en raison de complications mécaniques (rupture en
paroi libre par exemple) ou rythmologiques (tachycardies
ou fibrillations ventriculaires et troubles conductifs) expli-
quant qu’un nombre relativement important de patients
meurent avant d’être pris en charge par le SAMU ou avant
leur arrivée à l’hôpital. À plus long terme après un IDM, la
survenue de MS est plus souvent en rapport avec un
trouble du rythme (TDR) ventriculaire, d’autant plus que la
fonction ventriculaire gauche est altérée. Deux situations
peuvent donc se présenter :
Le patient a un antécédent connu d’IDM et présente
une MS en rapport avec un TDR ventriculaire : après une
première série d’études ayant montré une meilleure effi-
cacité de l’amiodarone comparée aux autres antiarythmi-
ques [3, 4], trois études cliniques évaluant la place du DAI
dans cette situation sont venues confirmer la supériorité de
ce dernier limitant ainsi la place des antiarythmiques dans
le choix thérapeutique : il s’agit des études AVID [5], CIDS
[6] et CASH [7]. Au vu de ces différentes études, les
examens complémentaires tels que la recherche de poten-
tiels tardifs, l’enregistrement holter ou l’exploration élec-
trophysiologique dans le but d’induire un TDR ventricu-
Tableau 1.Niveau d’évidence des recommandations pour la
prévention secondaire de la mort subite par DAI selon l’étiologie [1]
Etiologie de la MS Recommandations Niveau
d’évidence
Cardiopathie ischémique Classe I A
Cardiomyopathie dilatée Classe I -
Cardiomyopathie hypertrophique Classe I B
Dysplasie arythmogène du VD Classe I C
Syndrome du QT long Classe I C
Syndrome de Brugada Classe I B
TV polymorphe catécholergique Classe I -
Rétrécissement aortique Classe I C
Prolapsus mitral Classe I -
Classe I : existence de preuves évidentes et/ou accord général qu’une procé-
dure est utile et efficace. Niveau A : résultats provenant de plusieurs études
randomisées ou de méta-analyses. Niveau B : résultats provenant d’une seule
étude randomisée ou d’études non randomisée. Niveau C : consensus
d’experts.
Ta b l e a u 2 .Pathologies responsables de mort subite
dont la prédisposition génétique est déjà établie
Syndrome du QT long
Syndrome du QT court
Syndrome de Brugada
Cardiomyopathie hypertrophique
Dysplasie arythmogène du ventricule droit
Tachycardie ventriculaire catécholergique polymorphe
Cardiomyopathie dilatée
mt, vol. 11, n° 3, mai-juin 2005 201
Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017.
laire n’apportent pas d’élément supplémentaire dans la
décision d’implanter un DAI. Toutefois, la recherche
d’ischémie myocardique aiguë à l’origine du TDR
s’impose (coronarographie) en vue d’une éventuelle
revascularisation myocardique [8]. De même, en cas de
suspicion de trouble conductif paroxystique, l’exploration
électrophysiologique permettra de confirmer le diagnos-
tic. Dans tous les cas, le traitement à visée cardiologique
doit être optimisé (bêtabloqueurs, inhibiteurs de l’enzyme
de conversion, statines, antiagrégants plaquettaires et
éventuellement aldactone en cas d’insuffisance cardia-
que) car ces différents traitements ont démontré leur effet
favorable sur la mortalité, en particulier par MS. Quant au
choix du DAI, en l’absence de trouble conductif, un DAI
monochambre ventriculaire est suffisant [9]. En cas de
dysfonction sinusale ou de bloc auriculoventriculaire, le
DAI double chambre est indiqué. En cas de bloc de
branche gauche et d’altération sévère de la fonction ven-
triculaire gauche chez un patient en classe III à IV de la
NYHA, un DAI triple chambre « multisite » semble alors
préférable. Enfin, en fonction de l’évolution, un traitement
par amiodarone (en plus des bêtabloqueurs) peut se justi-
fier en cas d’arythmie ventriculaire fréquente afin de
mieux contrôler le TDR.
Le patient est ressuscité après un syndrome coronaire
aigu : si dans ce cas l’arrêt cardiaque est le plus souvent lié
à une fibrillation ventriculaire, il peut aussi être secondaire
à une asystole surtout lorsque ce syndrome concerne la
coronaire droite. C’est la coronarographie en urgence qui
permet de poser l’indication d’une revascularisation chi-
rurgicale ou par angioplastie. Le traitement est en général
celui de l’IDM, associant antiagrégant plaquettaire, bêta-
bloqueur, inhibiteur de l’enzyme de conversion et statine.
Il n’y a pas dans cette circonstance d’indication systéma-
tique à implanter un DAI ni un stimulateur cardiaque.
L’indication du DAI peut être rediscutée si la fraction
d’éjection ventriculaire gauche à 3 semaines de l’infarctus
est inférieure ou égale à 30 % au vu des résultats de
MADIT II [10]. L’existence de potentiels tardifs ventricu-
laires a une faible valeur prédictive positive [11] de MS.
L’exploration électrophysiologique n’apporte pas plus de
valeur prédictive que celle de la fraction d’éjection ven-
triculaire seule [12], malgré les résultats des études
MUSTT [13] et MADIT [14]. Quant au stimulateur cardia-
que, il ne sera discuté qu’en cas de persistance du trouble
conductif après la phase aiguë de l’IDM. Mais dans la
majorité des cas, notamment dans l’IDM inférieur, il est
régressif.
Cardiomyopathie dilatée
La MS représente 30 % des causes de décès dans la
CMD et peut survenir quelle que soit la classe NYHA du
patient. Si dans les formes évoluées la MS peut être en
rapport avec des TDR ventriculaires, des troubles de la
conduction, des accidents emboliques systémiques ou
pulmonaires ou enfin une dissociation électro-
mécanique, dans les formes moins sévères les troubles du
rythme ventriculaires en sont la cause la plus fréquente
[15-17]. En dehors de l’échographie cardiaque confirmant
le diagnostic et évaluant la fonction ventriculaire gauche,
la recherche de potentiels tardifs, l’évaluation de la varia-
bilité sinusale ou la dispersion du QT n’apportent pas
d’élément supplémentaire pour la décision d’implanter un
DAI en prévention secondaire. La coronarographie est
bien sûr nécessaire pour éliminer une éventuelle cardio-
pathie ischémique. Le traitement de l’insuffisance cardia-
que doit être optimisé (inhibiteur de l’enzyme de conver-
sion, bêtabloqueur et aldactone en particulier). Dans
40 % des cas, les cardiomyopathies dilatées peuvent être
familiales [18], d’où l’importance d’une enquête familiale
et le cas échéant génétique.
Cardiomyopathie hypertrophique
La MS survient dans ce cas plus particulièrement chez
le sujet jeune (< 30 ans), le plus souvent asymptomatique
[19]. La MS ne survient pas nécessairement au cours d’un
exercice physique important. Les mécanismes sont multi-
ples : ischémie myocardique, fibrillation atriale, bloc
auriculo-ventriculaire, arythmie ventriculaire et, excep-
tionnellement, altération de la fonction ventriculaire gau-
che. Le diagnostic sera essentiellement échographique.
L’exploration électrophysiologique n’apportera pas d’aide
dans la décision thérapeutique à moins qu’un trouble de la
conduction ne soit suspecté ou en cas de préexcitation
associée. Si l’implantation d’un DAI est fortement recom-
mandée chez les patients ayant survécu à une MS [20, 21],
il n’y a pas de preuve d’un bénéfice lié à la réduction
pharmacologique ou interventionnelle de l’hypertrophie
en particulier septale obstructive (alcoolisation septale,
stimulation cardiaque ou myomectomie). Les bêtablo-
queurs ou les inhibiteurs calciques (vérapamil) peuvent
avoir un intérêt dans l’amélioration des symptômes. La
CMH est également une pathologie familiale où l’enquête
génétique a un grand intérêt.
Dysplasie arythmogène du ventricule droit
(DVDA)
La survenue de la MS à l’effort devrait faire évoquer
cette hypothèse en raison de l’importance du facteur
adrénergique dans le déclenchement des TDR ventriculai-
res dans la DVDA. Le diagnostic passe par l’existence
d’anomalies ECG (ondes epsilon, ondes T négatives dans
les précordiales droites en l’absence de bloc de branche
droit, extrasystolie ventriculaire à type de retard gauche),
l’échographie cardiaque, la ventriculographie gauche et
droite et l’IRM cardiaque mettant en évidence l’anomalie
myocardique. L’existence de potentiels tardifs apportera
un argument supplémentaire. Chez les patients ayant sur-
vécu à une MS, l’implantation d’un DAI pourrait réduire la
mortalité malgré l’absence de preuve formelle. Il faut
Urgences
mt, vol. 11, n° 3, mai-juin 2005
202
Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017.
toutefois noter quelques problèmes rencontrés dans cette
indication tels que : la faible amplitude de la détection
ventriculaire, les seuils de défibrillation élevés et les per-
forations ventriculaires par la sonde de défibrillation [22].
Le succès de l’ablation par courant de radiofréquence est
limité dans cette pathologie en raison de la possible impli-
cation de plusieurs régions du ventricule droit, voire gau-
che. Un traitement bêtabloqueur est par ailleurs recom-
mandé ainsi que l’arrêt de toute compétition sportive [23].
Dans au moins 30 % des cas, un terrain familial est
retrouvé. La transmission est autosomique dominante à
pénétrance variable [24]. Une enquête familiale sera alors
conseillée.
Syndrome du QT long
Le syndrome du QT long peut être primitif ou secon-
daire à la prise de certains médicaments. Une hypokalié-
mie favorisée par un contexte pathologique (diarrhée ou
vomissements) peut précipiter la survenue de torsades de
pointes. Le diagnostic de QT long est aisé à la lecture de
l’ECG (bien que dans certains cas le QT ne soit pas allongé
mais l’onde T est alors anormale) et après l’interrogatoire
(du patient ou de son entourage) à la recherche d’un
traitement éventuellement impliqué. En attendant l’élimi-
nation du produit causal, le patient est surveillé aux soins
intensifs avec vérification de sa kaliémie et supplémenta-
tion potassique si nécessaire. Le sulfate de magnésium
peut être utile ainsi que le maintien d’une fréquence
ventriculaire minimale par stimulation ventriculaire pro-
visoire ou par perfusion adaptée d’isuprel. Dans les formes
primitives et malgré l’absence d’étude randomisée l’ayant
évalué, un traitement bêtabloqueur est conseillé. Parmi les
études rétrospectives, la plus large a suivi 233 patients
ayant présenté une syncope ou une MS pendant 15 ans
[25]. La mortalité dans le groupe traité par bêtabloqueurs
et/ou dénervation sympathique du cœur était de 9 %
contre 60 % chez les patients n’en recevant pas. Le risque
élevé de récidive chez les patients ayant survécu à un arrêt
cardiaque fait recommander l’implantation d’un DAI en
prévention secondaire. En cas de bradycardie favorisant
l’arythmie, un DAI double chambre sera préféré pour
maintenir un rythme cardiaque minimal. Il sera conseillé
au patient de réduire toute activité sportive en particulier
toute compétition. Enfin, il devra éviter tout médicament
pouvant entraîner un allongement de l’intervalle QT (dont
il est préférable de lui fournir la liste) afin de prévenir le
risque de torsades de pointes (tableau 3). Le syndrome du
QT long étant une pathologie familiale, une enquête fami-
liale est recommandée.
Syndrome du QT court
Inversement, le syndrome du QT court a été décrit
comme une nouvelle entité clinique et électrocardiogra-
phique susceptible d’être responsable de troubles du
rythme à l’étage auriculaire et ventriculaire. Le raccourcis-
sent du QTc < 300 ms semble être associé à des cas fami-
liaux de mort subite [26-28]. Ce syndrome est dû à une
mutation du gène HERG codant pour le canal Ikr entraî-
nant une perte de l’inactivation de Ikr, et à une mutation
KCNQ1 responsable d’une perte de sensibilité aux blo-
queurs d’Ikr. Les palpitations constituent le symptôme le
plus fréquemment décrit (dues dans 60 % des cas à des
troubles du rythme auriculaires) ; les syncopes et les morts
subites sont rapportées dans la moitié des cas. La mort
subite est le premier symptôme dans 20 % des cas. 10 %
des sujets sont asymptomatiques. Ce syndrome doit être
évoqué en cas d’antécédent familial de mort subite, en
particulier chez les enfants, de fibrillation atriale surve-
nant à un âge jeune, et en présence d’une syncope en
l’absence de cardiopathie. Après avoir éliminé les autres
causes de raccourcissement du QT (accélération de la
fréquence cardiaque, hyperthermie, hypercalcémie,
hyperkaliémie, acidose, traitement digitalique...), on peut
réaliser une exploration électrophysiologique qui montre
un raccourcissement des périodes réfractaires auriculaire
autour de 130 ms, et ventriculaire autour de 150 ms. Une
fibrillation ventriculaire est inductible par stimulation
Ta b l e a u 3 .Médicaments contre-indiqués en cas de QT long
Médicaments cardiovasculaires
Antiarythmiques de classe IA et III
Bépridil
Diurétiques
: tous les diurétiques hypokaliémiants
Vasodilatateurs cérébraux :
les dérivés de la vincamine
Psychotropes
Neuroleptiques :
chlorpromazine, dropéridol, halopéridol,
sultopride, thioridazine
Antidépresseurs :
imipramine, désipramine, amiptyline, doxépine,
maprotiline
Anti-infectieux
– Erythromycine, amphotéricine B, triméthoprime sulfamethoxazole
– Amantidine, pentamidine, chloroquine, halofantrine
– Azolés : kétoconazole, miconazole, itraconazole
Anti-allergiques
– Antihistaminiques H1 non anticholinergiques : astémizole, terfénadine
Médicaments déconseillés ou à utiliser avec précaution en cas de
QT long
Médicaments cardiovasculaires
– Antiarythmiques de classe IC
Psychotropes
Tous les médicaments de la famille des phénothiazines, des butyrophénones,
des benzamides, des imipraminiques, le lithium.
Anti-infectieux
– Quinine, méfloquine, amodiaquine
Anti-allergiques
– Cétirizine, laratidine, oxatomide
– Les antihistaminiques anticholinergiques
– Les « décongestionnants » contenant des antihistaminiques
Autres
– Les laxatifs irritants
– L’Héxaquine
®
mt, vol. 11, n° 3, mai-juin 2005 203
Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017.
1 / 8 100%