doi: 10.1684/nrp.2010.0067
Substrats cérébraux du déclin
de la mémoire épisodique :
contrastes entre vieillissement
normal et maladie dAlzheimer
Brain substrates of episodic memory
decline: contrasts between normal
aging and Alzheimers disease
Résumé Cet article insiste sur les différences qui opposent le
vieillissement et la maladie dAlzheimer (MA), dune
part sur le plan de la mémoire épisodique et, dautre part, sur le plan cérébral. Les travaux
de neuropsychologie portant sur le vieillissement normal convergent vers le déclin de la
mémoire épisodique, les effets de lâge se manifestant essentiellement dans les tâches de
rappel libre alors que les tâches de reconnaissance y sont peu sensibles. Ce profil est très
différent de ce qui est observé dans la MA où de multiples processus mnésiques sont affectés.
Les travaux dimagerie cérébrale sont bien en accord avec les résultats des études cognitives.
Lhypothèse frontale est privilégiée au cours du vieillissement normal comme le soulignent les
études dimagerie structurale et fonctionnelle. Les travaux qui se sont focalisés sur la région
hippocampique montrent des résultats plus controversés, liés en partie à la diversité des
méthodologies utilisées. Quoi quil en soit, là aussi, les résultats obtenus sont très différents
de ceux observés dans la MA. Les régions atteintes dans cette maladie (lhippocampe sur le
plan structural, le gyrus cingulaire postérieur sur le plan fonctionnel) sont les mieux préservées
dans le vieillissement normal. Enfin, les études les plus récentes insistent sur la présence de
mécanismes compensatoires aussi bien dans le vieillissement normal que dans les maladies
neurodégénératives, mécanismes qui seraient essentiellement sous-tendus par des régions
frontales.
Mots clés : vieillissement
maladie dAlzheimer
mémoire
imagerie par résonance magnétique
tomographie par émission de positons
mécanismes compensatoires
Abstract This article emphasizes the differences on episodic
memory changes and their neural substrates, between
normal aging and Alzheimers disease. While normal aging is mainly characterized by an
impairment of strategic processes, both at encoding and retrieval stages, Alzheimers
disease induces genuine episodic memory deficits, at all stages. Studies that have asses-
sed regional brain deterioration show clear differences between normal and pathological
aging. Indeed, in healthy aging, the frontal cortex manifests the greatest deterioration,
both structurally and functionally, while the anterior hippocampus and (functionally)
the posterior cingulate cortex are the least affected. This pattern supports the develop-
mental theory which postulates that the first regions to emerge phylogenetically and
ontogenetically are the most resistant to age effects and the last ones, the most vulne-
rable. Furthermore, it appears to mark the parting of the ways between normal aging
and Alzheimers disease, which is characterized by early and prominent deterioration
of both hippocampus and posterior cingulate cortex. In addition, cognitivo-metabolic
Dossier
Rev Neuropsychol
2010 ; 2 (2) : 114-23
Correspondance :
B. Desgranges
Grégoria Kalpouzos,
Francis Eustache,
Béatrice Desgranges
Inserm EPHE Université de
Caen/Basse-Normandie, Unité U923,
GIP Cyceron, CHU Côte de Nacre,
14033 Caen Cedex, France
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correlations and activation studies have shown that episodic memory impairment in nor-
mal aging mainly results from prefrontal deterioration, a finding which clearly contrasts
with that found in Alzheimers disease where the hippocampus and the posterior cingu-
late gyrus play a key role. Finally, although the deterioration of different brain regions
seems to mediate episodic memory impairment, functional compensatory mechanisms
may take place within the prefrontal cortex in both normal and pathological aging.
Key words: aging
Alzheimersdisease
memory
magnetic resonance imaging
positron-emission
tomography
compensatory mechanisms
La mémoire épisodique, définie comme le système
mnésique permettant dencoder et de récupérer des
événements personnels situés dans un contexte
spatio-temporel spécifique, est sensible aux effets de lâge
et très perturbée dans la maladie dAlzheimer (MA). Les tra-
vaux en neuropsychologie ont permis de montrer que cer-
tains processus, comme la récupération contrôlée, sont
atteints dans les deux populations, avec des différences
quantitatives, et surtout quil existe des différences qualita-
tives majeures. Des études récentes en neuro-imagerie ont
été déterminantes dans la distinction entre vieillissement
normal et MA : elles ont notamment montré un pattern
datteinte cérébrale morphologique et fonctionnelle bien
distinct, sous-tendant les performances diminuées lors
de tâches mnésiques. Le cerveau nétant pas passif, des
processus neurocognitifs supplémentaires ou différents
semblent se mettre en place aussi bien dans le vieillisse-
ment normal que dans la MA afin de compenser le déficit.
Modifications de la mémoire épisodique
Le déclin lié à lâge est inégal entre les différents sous-
systèmes mnésiques. La mémoire épisodique et la mémoire
de travail sont les plus atteintes, alors que la mémoire
procédurale, la mémoire sémantique et le système de
représentations perceptives (qui sous-tend les effets damor-
çage perceptifs) sont relativement préservés. Au sein de
la mémoire épisodique, les processus dencodage, de
stockage et de récupération ne sont pas atteints de façon
uniforme. Lencodage opère des transformations de linfor-
mation provenant de stimulations externes ou encore résul-
tant de traitements cognitifs et permet ainsi lintégration des
données sous un format de représentation mentale. La récu-
pération de linformation va dépendre de la nature du trai-
tement de linformation à lencodage. La manipulation du
traitement est lun des facteurs qui a montré un effet intéres-
sant dans le vieillissement. Craik et Lockhart [1] ont postulé
que « la persistance de la trace mnésique est fonction de la
profondeur de traitement, les niveaux de traitement profond
étant associés à des traces mnésiques plus élaborées, plus
résistantes dans le temps, et plus robustes ». Des différences
de performances en fonction de lâge ont été observées à
des tâches qui requièrent des processus contrôlés ; une
hypothèse est que la diminution des ressources cognitives
accompagnant le vieillissement serait responsable du
déclin mnésique [2]. Ainsi, la diminution des performances
chez les sujets âgés peut être conçue comme le résultat
dune incapacité à mettre spontanément en œuvre un trai-
tement profond (sémantique par exemple) de linformation
lors de lencodage. Cependant, lorsquun encodage séman-
tique profond est induit chez ces sujets, une amélioration,
voire même une normalisation des performances des sujets
âgés est observée. Un ensemble détudes a néanmoins
montré un effet délétère de lâge sur la récupération dinfor-
mations encodées après un traitement profond. Ces études,
qui avaient inclus un groupe de sujets dâge intermédiaire
ou dits « moyennement âgés », ont effectivement montré
des performances similaires de ces sujets comparées aux
scores des sujets jeunes, mais une diminution significative
des performances chez les sujets appartenant au groupe
le plus âgé [3, 4]. Par contraste, les performances de récu-
pération des items encodés superficiellement (traitement
perceptif) diminuent dès lâge intermédiaire (figure 1).
Les capacités de stockage des informations en mémoire,
peuvent être évaluées en calculant un taux doubli entre
deux sessions de récupération dinformation. Lorsque le
délai est court, ce qui correspond à la situation habituelle
dévaluation de la mémoire, la plupart des études nont pas
mis en évidence de différence de taux doubli en fonction de
lâge [5]. En revanche, lorsque le délai dépasse plusieurs
heures, les informations sont oubliées plus rapidement
chez les sujets âgés que chez les sujets jeunes. La diminution
de lefficacité des processus de consolidation chez les sujets
âgés pourrait provenir des modifications du sommeil, notam-
ment de la réduction du sommeil lent profond, compte tenu
du rôle maintenant bien établi du sommeil dans la consoli-
dation des informations épisodiques [6].
La récupération de linformation dépend largement des
conditions dans lesquelles elle se déroule. Ainsi, la diminu-
tion des capacités de rappel libre chez les sujets âgés sains
est nettement plus marquée que celle des capacités de
reconnaissance [7]. La récupération de linformation peut
mettre en jeu des processus de nature différente, et ceci
peut sévaluer en questionnant le sujet sur limpression
subjective qui accompagne ses réponses. Ainsi peuvent
être différenciées les réponses jugées « je me souviens »
(« remember », R) où le sujet se rappelle parfaitement
du contexte dans lequel litem a été encodé (donc une
« recollection » de lévénement), et les réponses jugées
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« je sais » (« know », K) où le sujet sait (avec certitude) quil
a effectivement encodé cet item mais via un sentiment de
familiarité, sans recollection. La récupération fondée sur la
recollection diminue significativement avec lâge, ce qui
nest pas le cas pour la récupération fondée sur un senti-
ment de familiarité [8].
La comparaison des effets de lâge et de la MA peut se
faire sur deux axes, un axe quantitatif et un axe qualitatif. En
effet, certains processus semblent être altérés dans les deux
cas, mais de façon plus importante dans la MA, telle la
récupération contrôlée, tandis que dautres sont sélective-
ment atteints dans la MA, comme lencodage [9]. De plus,
la sévérité du syndrome démentiel et laltération dautres
fonctions cognitives sont des facteurs qui contribuent à la
baisse des performances mnésiques dans la MA.
Peu de travaux relatifs à la nature du traitement des
items à lencodage ont été publiés dans la MA. Les quelques
résultats tendent à montrer, malgré une diminution globale
des performances de récupération, leffet bénéfique certes
faible mais significatif dun encodage profond sur un
encodage superficiel [10]. Cependant, les patients à un
stade avancé de la maladie ou présentant des troubles de
nature sémantique ne bénéficient pas dun encodage pro-
fond. La MA se caractérise par une augmentation du taux
doubli avec le temps et par une altération des capacités
de reconnaissance [11]. De plus, que ce soit en rappel
libre ou en reconnaissance, les patients produisent un
nombre significatif derreurs, des intrusions et des fausses
reconnaissances [12]. Concernant enfin le mode de récupé-
ration, le nombre de réponses R des patients diminue par
rapport à des sujets âgés sains, et de surcroît, même lors-
quils estiment avoir eu accès au contexte dencodage, ils
éprouvent des difficultés à justifier leurs réponses [13].
Altérations cérébrales structurales
et fonctionnelles au repos
dans le vieillissement normal
et dans la MA
Diagnostiquer au plus tôt la MA constitue lune des prio-
rités en matière de santé publique dans notre société, mais
cela implique de bien connaître lévolution physiologique
0
1
2
3
4
5
6
7
Encodage
superficiel
Encodage
profond
Jeunes Intermédiaires Âgés
Figure 1. Scores de rappel libre obtenus à la tâche de mémoire épisodique (ESR [35]) par des sujets sains jeunes, dâge intermédiaire et âgés. Après enco-
dage superficiel, les performances des sujets dâge intermédiaire (> 40 ans) sont significativement diminuées par rapport aux sujets jeunes. Après enco-
dage profond, tandis que les sujets dâge intermédiaire obtiennent en moyenne la même performance que les sujets jeunes, les individus âgés (> 60 ans)
se rappellent significativement moins ditems (voir [4]).
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du vieillissement cérébral. De nos jours, un outil indispen-
sable à la détection de modifications cérébrales est la
neuro-imagerie. Concernant le vieillissement normal, les
études dimagerie morphologique et fonctionnelle (en
tomographie par émission de positons (TEP) après injection
de glucose marqué) montrent une atrophie corticale et un
hypotabolisme qui prédominent dans le cortex préfrontal
[14]. Ces altérations concernent aussi les cortex pariétal et
temporal. Les résultats concernant les autres régions céré-
brales sont plus divergents. Lhippocampe a notamment
fait lobjet de nombreuses recherches, tant parce que
cette structure joue un rôle-clé dans le fonctionnement
de la mémoire épisodique que parce quelle est la cible
préférentielle des lésions de la MA. Cependant, certaines
études montrent une atrophie de cette région chez les
sujets sains âgés, tandis que dautres concluent à sa rela-
tive préservation. Dans notre laboratoire, nous avons mené
une étude dont le but était de dresser un profil complet des
modifications structurales et métaboliques survenant au
cours du vieillissement normal, à savoir non seulement
les régions cérébrales les plus détériorées mais aussi les
mieux préservées (figure 2) [14]. Nous avons montré que
les régions les plus détériorées sur le plan morphologique
sont les cortex frontal et pariétal, ainsi que la partie cau-
dale de lhippocampe. Les régions les mieux préservées
sont la partie rostrale de lhippocampe et le thalamus.
Ainsi, les divergences observées dans la littérature quant
àlévolution avec lâge du volume hippocampique pour-
raient sexpliquer au moins en partie par le fait que cette
structure ne se comporte pas de façon homogène.
Au niveau métabolique, les cortex frontal et pariétal
sont les plus sensibles aux effets de lâge, tandis que les
régions hippocampiques sont préservées, ainsi que le
gyrus cingulaire postérieur. Au total, les modifications céré-
brales suivent les axes phylo- et onto-génétiques : les
régions les plus altérées sont les dernières à être apparues
lors de lévolution (le néocortex, et surtout les aires préfron-
tales), et les régions les plus résistantes aux effets de lâge
Vieillissement normal
Atrophie AtrophiePréservation structurale
Maladie d'Alzheimer
Hypométabolisme HypométabolismePréservation métabolique
Figure 2. Profils daltérations cérébrales dans le vieillissement normal et la maladie dAlzheimer. Au cours du vieillissement normal (voir [14]), le cortex
frontal ainsi que le cortex pariétal sont les régions les plus détériorées sur le plan structural et fonctionnel au repos (bleu). En revanche, les régions qui
montrent une préservation relative (vert/jaune) sont lhippocampe antérieur (structural) et le gyrus cingulaire postérieur (métabolisme). Dans la maladie
dAlzheimer, les régions les plus détériorées (rouge/orange) sont les régions hippocampiques (structural) et le gyrus cingulaire postérieur (métabolisme).
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sont celles qui sont apparues en premier dans lévolution
(les régions appartenant au système limbique), étayant
lhypothèse développementale. Ceci nest pas le cas dans
la MA, où le profil inverse est observé pour deux régions :
lhippocampe (surtout sa partie antérieure, voir [15]) sur le
plan structural et le gyrus cingulaire postérieur au niveau
métabolique sont les structures les plus atteintes dans la
pathologie [16], alors quelles sont les mieux préservées
au cours du vieillissement normal (figure 2) [17].
Dautres perturbations fonctionnelles ont été récem-
ment mises en évidence dans le vieillissement normal et la
MA, en utilisant lIRM fonctionnelle (IRMf) au repos. Cette
technique a permis de démontrer chez le sujet sain jeune
lexistence dun réseau activé en continu lorsque ce dernier
nest pas engagé dans une activité cognitive. Ce réseau,
dénommé réseau par défaut, comprend principalement
des régions médianes du cerveau, telles que les cortex
préfrontal médian, le gyrus cingulaire postérieur et anté-
rieur, le précuneus, et, de façon moins systématique, le
lobe temporal interne. Lactivité de ce réseau diminue
(déactivations) lorsque le sujet sengage dans une tâche
cognitive. Les données actuelles suggèrent une perturbation
du réseau par défaut sur un axe antéro-postérieur dans le
vieillissement normal incluant les cortex préfrontal et parié-
tal médians, tandis que la MA serait plutôt caractérisée par
une perturbation fonctionnelle plus particulièrement locali-
sée entre le lobe temporal interne (hippocampe) et le gyrus
cingulaire postérieur dans les premiers stades de la maladie,
cette perturbation sétendant à lensemble des régions
constituant le réseau au fur et à mesure que la maladie
progresse [18].
Substrats cérébraux des troubles
de la mémoire épisodique
Lexistence de modifications structurales et fonctionnelles
au repos accompagnant le vieillissement normal, dune
part, et la diminution des performances de mémoire épiso-
dique, dautre part, conduisent naturellement à tenter
détablir des liens entre ces deux phénomènes. Des études
réalisées en activation montrent que différentes régions sont
impliquées lors dune tâche de mémoire en fonction de
lâge. Une autre méthode, consistant à corréler des données
cérébrales et des scores mnésiques, permet de mettre en
évidence les régions dont latrophie ou le dysfonctionne-
ment est responsable du déclin de la mémoire. Les résultats
obtenus dans les deux séries détudes ont permis de poser
des hypothèses explicatives de la diminution des capacités
en mémoire épisodique, mais aussi de suggérer des proces-
sus compensatoires.
Études en activation
Un nombre important détudes dactivation en TEP ou
en IRM fonctionnelle (IRMf) sest focalisé sur les activations
du cortex frontal, lors de tâches de mémoire épisodique.
Ces travaux ont été décisifs dans la formulation du modèle
HERA (hemispheric encoding/retrieval asymmetry), qui
décrit une asymétrie hémisphérique des processus denco-
dage et de récupération en mémoire épisodique au niveau
du cortex frontal [19] : le cortex frontal gauche sactive plus
que le droit lors de lencodage, tandis que le cortex frontal
droit sactive davantage que le gauche lors de la récupéra-
tion. Dans le vieillissement normal, plusieurs auteurs ont
montré que lasymétrie du modèle HERA tend à satténuer
chez les sujets âgés, avec des activations frontales bilatéra-
les, tant lors de lencodage que de la récupération.
Ces résultats ont donné naissance au modèle HAROLD
(hemispheric asymmetry reduction in older adults) [20].
Deux explications ont été proposées quant à ce phéno-
mène : lhypothèse de la compensation et celle de la
dédifférenciation. Selon la première, ce phénomène de
bilatéralisation de lactivation frontale pourrait intervenir
dans le but de contrer le déclin neurocognitif lié à lâge.
Elle implique que les performances des sujets qui présen-
tent une activation bilatérale soient supérieures à celles
des sujets dont lactivation est unilatérale. Selon lhypo-
thèse de la dédifférenciation, cette réduction de lasymétrie
refléterait des difficultés à recruter les mécanismes neuroco-
gnitifs spécifiques. Cabeza et al. [21] ont testé ces deux
hypothèses en comparant lactivité cérébrale de sujets jeu-
nes, de sujets âgés présentant les mêmes performances que
les jeunes, et de sujets âgés présentant des scores inférieurs,
à une tâche de récupération de la source en mémoire épi-
sodique. Chez les sujets jeunes, seul le cortex préfrontal
droit est activé, en accord avec le modèle HERA. Il en est
de même chez les sujets âgés qui ont eu de moins bonnes
performances. En revanche, chez les sujets âgés présentant
des performances similaires aux sujets jeunes, une activa-
tion frontale bilatérale a été observée. Ces résultats sont
donc en faveur de lhypothèse de la compensation : lacti-
vation frontale bilatérale refléterait une réorganisation
neurocognitive bénéfique. En réalité, les deux hypothèses
ne sont pas exclusives, dans la mesure où lexistence de
phénomènes compensatoires implique la nécessité de com-
penser et, par conséquent, lexistence de mécanismes
neurocognitifs déficitaires tels quune diminution de la spé-
cificité de certains réseaux neuronaux. Ces réseaux moins
efficaces au cours du vieillissement pourraient se situer
dans les aires corticales postérieures, notamment le cortex
occipital, dont lactivité est souvent réduite chez les sujets
âgés. Davis et al. [22] ont par exemple montré que les adul-
tes âgés ayant le moins dactivité occipito-temporale acti-
vaient davantage le cortex frontal, lactivité frontale étant
positivement corrélée aux performances cognitives, un
phénomène quils ont dénommé PASA (Posterior-Anterior
Shift in Aging). Néanmoins, la bilatéralisation de lactivité
frontale nest pas toujours associée à des processus de com-
pensation efficaces. Ainsi, il a été montré que des sujets
âgés présentant un déclin en mémoire épisodique sur un
suivi longitudinal activaient de façon supplémentaire le
cortex frontal droit lors de lencodage, ce qui nétait pas le
cas chez des sujets âgés qui présentaient des performances
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