Les troubles mentaux liés à des lésions cérébrales dans le DSM

Journal Identification = PNV Article Identification = 0436 Date: December 4, 2013 Time: 2:50 pm
Synthèse
Geriatr Psychol Neuropsychiatr Vieil 2013 ; 11 (4):403-15
Les troubles mentaux liés à des lésions
cérébrales dans le DSM-5
à la lumière des versions précédentes
Mental disorders due to brain lesions in the DSM-5
in the light of the previous versions
Christian DerouesnÉ
Université Pierre et Marie Curie (Paris
VI) ; EA 4556. Laboratoire Epsilon,
Dynamique des capacités humaines
et des conduites de santé, Université
Paul Valéry, Montpellier 3, France
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a part :
C. Derouesné
Résumé. La catégorie des troubles cognitifs dus à des lésions cérébrales a été profondé-
ment modifiée dans le DSM-5. L’évolution de la classification des troubles mentaux liés
à des lésions cérébrales dans les DSM est retracée depuis le DSM-I. Le DSM-III a cons-
titué une rupture par rapport aux deux premières versions en substituant une approche
syndromique à l’approche étiologique antérieure et en définissant une catégorie Démence
avec des critères opératoires inspirés de la symptomatologie de la maladie d’Alzheimer,
qui n’ont été que peu modifiés par le DSM-IV. Le DSM-5 représente une seconde rupture
en substituant à la catégorie démence, le Trouble neurocognitif majeur et introduisant une
catégorie intermédiaire, le Trouble neurocognitif mineur, en même temps qu’une défini-
tion plus précise des déficits cognitifs. Au plan étiologique, de nouvelles catégories sont
définies comme la dégénérescence fronto-temporale et la maladie à corps de Lewy. Ces
avancées, incontestables, s’accompagnent toutefois d‘un renforcement d’une conception
essentiellement cognitive et biologique qui présente le risque d’une approche réduction-
niste, doléable pour les patients et les familles si elle n’est pas complétée par une approche
psychologique et environnementale.
Mots clés : démence, DSM-5, troubles mentaux organiques, trouble neurocognitif,
démence fronto-temporale, démence à corps de Lewy
Abstract. The DSM-5 introduces major modifications in the category of mental disorders
due to brain lesions compared to the previous DSM versions, which are reviewed in this
paper. The description of the category Major neurocognitive disorder, as a substitute for
dementia, seems to fit better for patients and families, and more adapted to many neurode-
generative cognitive disorders for which memory impairment is not predominant. Similarly,
the introduction of the category of Mild neurocognitive disorder appears to be an improve-
ment although some difficulty still remains for distinguishing mild cognitive disorder from
normal aging. The addition of new etiological categories such as fronto-temporal NCD or
NCD with Lewy bodies should also to be considered as a significant improvement. Des-
pite these advances, to circumscribe the mental disorders due to brain lesions to cognitive
deficits and biological mechanisms remains highly questionable, and does not provide an
adequate care for the patients and families if not complemented by a psychological and
environmental approach.
Key words: dementia, organic brain lesions, neurocognitive disorder, fronto-temporal
dementia, Lewy bodies disease
L’histoire ne doit pas seulement satisfaire la curiosité, elle doit for-
mer le jugement. En médecine, l’étude de l’évolution des idées
sur une question est beaucoup plus instructive que les discus-
sions, toujours un peu faussées par la passion, par la tendance
naturelle de chacun à grossir l’importance de ses travaux. Sans
compter, qu’à certaines époques, il s’établit des courants d’erreur
qui semblent aveugler tous les esprits et que la discussion ne fait
qu’accentuer. Un coup d’œil rétrospectif nous ramène, en géné-
ral, à une plus juste appréciation des choses et permet d’établir
l’origine de ces courants d’erreur qui réside, presque toujours, dans
un fait réel, dans une découverte utile dont la signification a été mal
interprétée.
Henri Parinaud, Histoire du strabisme et de son
traitement, 1896. In : Poirier J, ed. Henri Parinaud
(1844-1905) : un pionnier de l’ophtalmologie franc¸aise.
doi:10.1684/pnv.2013.0436
Pour citer cet article : Derouesné C. Les troubles mentaux liés à des lésions cérébrales dans le DSM-5 à la lumière des versions précédentes. Geriatr
Psychol Neuropsychiatr Vieil 2013; 11(4) :403-15 doi:10.1684/pnv.2013.0436 403
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C. Derouesné
La5
eédition de la classification américaine des
troubles mentaux (Diagnostic and statistical manual
of mental disorders, fith edition, DSM-51), éditée
en mai 2013 par l’American psychiatric association (APA)
[1] présente des modifications importantes par rapport aux
précédentes versions en ce qui concerne les troubles men-
taux liés à des lésions cérébrales. Le DSM-5 a été précédé
d’une longue concertation, mais il a également suscité une
vive contestation. Toutefois, l’essentiel de la polémique ne
porte pas sur les troubles cognitifs d’origine organique,
qui sont seuls envisagés ici. Afin de mieux comprendre
les modifications apportées par le DSM-5, il est apparu
utile de présenter un bref historique des précédentes ver-
sions, en s’appuyant sur les textes originaux et les objectifs
que s’assignaient leurs auteurs avant d’en présenter les
commentaires.
Les classifications des troubles mentaux aux États-Unis
ont été développées de fac¸on largement indépendante des
références européennes et dans un objectif pragmatique
inscrit dans l’histoire politique et sociale du pays [2, 3].
Les troubles mentaux résultants de lésions cérébrales
ont toujours occupé une place spéciale dans les classifica-
tions des maladies mentales, mais cette place a varié au
cours des différentes éditions des DSM (tableau 1).
L’édition originale : le Diagnostic
and statistical manual
of mental disorders
Le Diagnostic and statistical manual of mental disor-
ders (devenu DSM-I) a été créé par l’APA en 1952 [4]
pour unifier les classifications existantes aux États-Unis. La
première classification américaine datait de 1915 (The sta-
tistical manual for the use of institutions for the insane),
mais c’est l’introduction, sous l’égide de l’APA, d’un cha-
pitre sur les troubles mentaux dans la version de 1935 de
la Standard classified nomenclature of diseases (SCND),
qui va constituer la référence ; son objectif était toute-
fois purement statistique et ne concernait que les hôpitaux
psychiatriques (mental state hospitals). La SCND a été plu-
sieurs fois remaniée, mais également appliquée de fac¸on
très variable selon les endroits. En outre, elle s’est révé-
lée inadéquate pour classer les troubles mentaux observés
chez les combattants lors de la Deuxième Guerre mondiale.
1Le passage des chiffres romains utilisés dans les précédentes ver-
sions aux chiffres arabes a pour objectif d’assurer l’homogénéité avec la
Classification internationale des maladies et de permettre des révisions inter-
médiaires (5,2 ; 5,3...).
Dans les années 1940, une classification de l’Army and
veterans administration est alors réalisée sous la direction
du brigadier général William Claire Meinninger (1899-1966).
Cette classification décrit les troubles mentaux comme des
réactions spécifiques à des événements vitaux, emprun-
tant la terminologie d’Adolf Meyer (1856-1950) qui influenc¸a
durablement la psychiatrie américaine. En 1948, peu après
sa fondation, l’Organisation mondiale de la santé (OMS)
(World heath organization, WHO) adjoint un chapitre sur les
troubles mentaux à la 6eClassification internationale des
maladies (CIM-6) (International classification of diseases,
ICD-6). Le DSM-I, édité par l’APA sous la présidence de
George N. Raines (1908-1959), capitaine et psychiatre de la
Navy, correspond ainsi à la 8eédition de la SCND et inclut
la classification de l’armée, tout en prenant en compte la
CIM-6.
Le DSM-I divisait les troubles mentaux organiques en
deux catégories principales : 1) les troubles causés par ou
associés à une altération du parenchyme cérébral (Disor-
ders caused by or associated with impairment of brain
tissue function) qui peuvent être aigus (Acute brain disor-
ders) ou chroniques (Chronic brain disorders)et2)les
troubles d’origine psychologique ou sans cause physique
clairement définie ou altération structurelle du cerveau
(Disorders of psychogenic origin or without clearly defi-
ned physical cause or structural change in the brain). Une
classification secondaire gardait la référence à la psychana-
lyse, dominante à cette époque, distinguant les psychoses,
les psychonévroses et les troubles de la personnalité. La
classification des troubles organiques était clairement étio-
logique : ainsi les «Maladies cérébrales sénile et présénile »
étaient incluses dans le chapitre Troubles du métabolisme,
de la maturité et de la nutrition, la Démence artériopathique
dans celui des Troubles cérébraux circulatoires.
La seconde édition, DSM-II
La seconde édition, le DSM-II, présidée par Ernest
Gruenberg (1915-1991) est parue en 1968 [5]. Elle a été
développée en référence à la CIM-8 (ICD-8) publiée par
l’OMS en 1965, mais en gardant des traits conformes
aux habitudes américaines : elle reste très marquée par la
classification psychanalytique, mais rejette la terminologie
d’Adolph Meyer.
Le DSM-II reprend la première catégorie du DSM-I sous
l’appellation de Syndromes cérébraux organiques (Organic
brain syndromes). Les syndromes organiques ne sont plus
divisés en aigus et chroniques (cet aspect est simplement
mentionné, mais non codifié), mais en fonction de leur
sévérité :
404 Geriatr Psychol Neuropsychiatr Vieil, vol. 11, n 4, décembre 2013
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Les troubles mentaux liés à des lésions cérébrales dans le DSM-5
Tableau 1. Classification des troubles mentaux organiques du DSM-I au DSM-5.
Table 1. Classification of organic brain disorders from DSM-I to DSM-5.
DSM I (1952) : Troubles causés ou associés à une altération du parenchyme cérébral ; Troubles cérébraux organiques
Aigus
Chroniques
Troubles causés par ou associés à une syphilis du système nerveux central
Troubles causés par une infection autre que syphilitique
Troubles causés par ou associés à une intoxication (alcool, poison...)
Troubles causés par un traumatisme
Troubles associés à des perturbations circulatoires (artériosclérose ou autres)
Troubles associés à un trouble convulsif
Troubles associés à une perturbation du métabolisme, de la nutrition
Maladie cérébrale sénile
Maladie cérébrale présénile
Troubles associés à une tumeur cérébrale
Troubles associés à des maladies d’origine inconnue ou incertaine (maladie de Huntington, sclérose multiple, maladie de Pick et autres
maladies familiales ou génétiques)
DSM II (1968) : Syndromes cérébraux organiques causés par ou associés à une altération du parenchyme cérébral
A. Psychoses associées à des syndromes cérébraux organiques
Démence sénile et présénile
Psychoses alcooliques
Psychoses associées à une infection intracrânienne (paralysie générale, encéphalite épidémique...)
Psychoses associées à d’autres conditions (artériosclérose, épilepsie, traumatisme cérébral...)
B. Syndromes cérébraux organiques non psychotiques
Syndromes cérébraux organiques de même étiologie (sauf maladie cérébrale sénile ou présénile)
DSM III (1980) : Troubles mentaux organiques
1. Troubles mentaux organiques dont l’étiologie ou le processus physiopathologique est répertorié
Démence dégénérative primaire survenant dans la sénescence ou le présenium
Démence par infarctus multiples
Troubles induits par des substances toxiques
2. Syndromes cérébraux organiques dont l’étiologie ou le processus physiopathologique est inconnu ou noté comme diagnostic
supplémentaire
Delirium
Démence
Syndrome amnésique
Syndrome délirant organique ; état hallucinatoire organique ; syndrome affectif organique ; psychosyndrome organique
Trouble mental organique non spécifié
DSM III-R (1987
1. Troubles débutant dans la sénescence et le présenium
Démence dégénérative primaire de type Alzheimer débutant dans la sénescence
Démence dégénérative de type Alzheimer débutant dans le présenium
Démence par infarctus multiples
Démence sénile non spécifiée
Démence présénile non spécifiée
2. Troubles mentaux organiques associés à des affections ou à des troubles physiques de l’axe III ou d’étiologie inconnue
Delirium
Démence
Trouble amnésique
Trouble délirant organique ; état hallucinatoire organique ; trouble thymique organique ; trouble anxieux organique ; psychosyndrome
organique
Trouble mental organique non spécifié
DSM IV (1994) : Delirium, Démences, Troubles amnésiques et autres troubles cognitifs
Delirium
Démence
Avec critères de diagnostic spécifiés :
Démence de type Alzheimer à début précoce
Démence de type Alzheimer à début tardif
Démence vasculaire
Sans critères de diagnostic spécifiés :
Démence due au VIH, à un traumatisme cérébral, à la maladie de Parkinson, de Huntington, de Pick, de Creutzfeldt-Jakob, à une
affection médicale systémique ; démence non spécifiée
Troubles amnésiques
Autres troubles cognitifs non spécifiés
DSM IV-TR (2000) : Pas de modifications notables
DSM-5 (2013) : Troubles neurocognitifs
Delirium
Trouble neurocognitif majeur ou mineur
TNCM (probable ou possible) ou TNCm dû à la maladie d’Alzheimer :
TNCM (probable ou possible) ou TNCM fronto-temporal TNCM (probable ou possible) ou TNCm à corps de Lewy
TNCM (probable ou possible) ou TNCM vasculaire TNCM ou TNCM dû à un traumatisme cérébral :
TNCM ou TNCM induit par une substance
TNCM ou TNCM dû à l’infection VIH
TNCM ou TNCM dû à la maladie de Parkinson
TNCM ou TNCM dû à une maladie à prions
TNCM ou TNCM dû à la maladie de Huntington
TNCM ou TNCM dû à une autre affection médicale
TNCM ou TNCM dû à de multiples étiologies
Trouble neurocognitif non spécifié
Geriatr Psychol Neuropsychiatr Vieil, vol. 11, n 4, décembre 2013 405
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C. Derouesné
- les psychoses associées à un syndrome cérébral orga-
nique (Psychoses associated with organic brain syndrome)
sont caractérisées par : 1) une altération du fonctionne-
ment mental suffisante pour interférer grossièrement avec
les activités de la vie quotidienne et traduisant une sévère
distorsion de la capacité de reconnaître la réalité ; 2) un
déficit de l’orientation, de la mémoire, de toutes les fonc-
tions intellectuelles (comme la compréhension, le calcul, la
connaissance, l’apprentissage...), du jugement, une labilité
et un manque de profondeur des affects. Le syndrome pou-
vait être aigu ou chronique, être isolé ou s’accompagner de
troubles psychotiques ou comportementaux ;
- les syndromes organiques non psychotiques (Non-
psychotic organic brain syndrome. Mental disorders not
specified as psychotic associated with physical conditions)
sont définis par une sévérité des troubles insuffisante pour
entrer dans la catégorie psychose.
Les étiologies sont identiques quelle que soit la sévérité.
Toutefois les termes de Démence sénile et présénile utili-
sés dans la catégorie psychose sont remplacés par le terme
Maladie cérébrale sénile et présénile dans la catégorie non
psychotique.
La troisième édition, DSM-III :
continuité et rupture
La troisième édition, le DSM-III, présidée par Robert
Spitzer (1932-), est éditée en 1980 [6]. Elle introduit un para-
digme radicalement différent des deux premières versions
car elle est résolument axée sur le diagnostic pour la pra-
tique clinique comme pour la recherche et vise à établir
un langage commun entre les psychiatres d’orientations
différentes (psychanalytique, comportementaliste, systé-
mique ou biologique). Cette nouvelle classification doit
répondre à deux impératifs : 1) elle doit être essentielle-
ment descriptive (a-théorique) et éliminer toute référence
à la physiopathologie, car l’inclusion des principales théo-
ries est considérée «comme un obstacle à l’utilisation du
manuel par des praticiens d’orientations théoriques diffé-
rentes »; 2) elle doit permettre d’établir des catégories bien
définies au plan opératoire et fournir des définitions pré-
cises des termes employés pour obtenir des diagnostics
homogènes.
Tout en reconnaissant «qu’il n’existe aucune défini-
tion satisfaisante des limites précises et du concept de
trouble mental », le DSM-III le définit comme «un syn-
drome cliniquement significatif qui survient chez un individu
et est associé à une souffrance (distress) ou à un handi-
cap (disability) dans l’un au moins des principaux domaines
de fonctionnement ». Chaque syndrome ne doit toutefois
pas être considéré comme une «entité circonscrite, net-
tement délimitée, avec une discontinuité entre celui-ci, les
autres troubles mentaux ou l’absence de trouble mental ».
Par ailleurs, Spitzer insistait sur le fait que la classification
des troubles mentaux porte sur les troubles et non sur les
individus, d’où l’expression d’individu avec trouble schizo-
phrénique en place de schizophrène.
Les critères diagnostiques du DSM-III «ne repré-
sentent qu’une étape initiale, conduisant à la formation
d’un plan thérapeutique. Il sera toujours nécessaire d’avoir
des informations sur le sujet à évaluer supplémentaires à
celles qui sont requises pour la seule démarche diagnos-
tique. »L’introduction d’un système multiaxial vise ainsi à
compléter l’approche syndromique. Les trois premiers axes
constituent l’évaluation diagnostique officielle : l’axe I décrit
les syndromes cliniques, l’axe II, les troubles de la person-
nalité et l’axe III, les troubles et affections physiques. Ils sont
complétés par l’axe IV évaluant la sévérité des facteurs de
stress psychosociaux et l’axe V le niveau d’adaptation et de
fonctionnement le plus élevé dans l’année écoulée.
Enfin, il est souligné que le DSM-III ne représente qu’un
«arrêt sur image »et doit être adapté régulièrement pour
corriger les erreurs et les insuffisances de la classification.
Spitzer préside lui-même une version révisée du DSM-III en
1987, le DSM-III-R (revised), qui n’apporte toutefois pas de
modifications majeures à la structure de la version initiale.
Le DSM-III reprend l’appellation de Troubles mentaux
organiques qui sont maintenant divisés en deux sections
selon que l’étiologie ou la physiopathologie est connue
ou non : Section 1 : Troubles mentaux organiques dont
l’étiologie ou le processus physiopathologique est décrit ci-
dessous (d’après les Troubles mentaux de la CIM-9-CM)
(Organic mental disorders whose etiology or pathophy-
siological process is listed below taken from the mental
disorders section of ICD-9-CM) ; Section2:Syndromes
organiques dont l’étiologie ou la physiopathologie est notée
comme un diagnostic additionnel d’après la CIM-9 ou
est inconnu (Organic brain syndromes whose etiology or
pathophysiological process is either noted as an additio-
nal diagnosis from outside the mental disorders section of
ICD-9-CN or is unknown). Dans la section 1 sont inclus la
Démence dégénérative primaire débutant dans la sénes-
cence (non compliquée ou associée à un delirum, des
idées délirantes ou une dépression), la Démence dégénéra-
tive primaire présénile, la Démence par infarctus multiples
et les Troubles induits par des substances toxiques (e.g.
l’alcool). La section 2 définit des critères pour le Delirium,
la Démence, le Syndrome amnésique, mais également les
Troubles délirants, hallucinatoires, affectifs, et de la person-
nalité d’origine organique.
406 Geriatr Psychol Neuropsychiatr Vieil, vol. 11, n 4, décembre 2013
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Journal Identification = PNV Article Identification = 0436 Date: December 4, 2013 Time: 2:50 pm
Les troubles mentaux liés à des lésions cérébrales dans le DSM-5
La démence devient ainsi un syndrome spécifique, indé-
pendant de l’étiologie, dont l’origine organique est attestée
par l’anamnèse, l‘examen physique ou les examens de labo-
ratoire, ou bien par l’exclusion des troubles autres que
les troubles organiques. Sa définition est proche de celle
du DSM-II et associe retentissement social et profession-
nel et déficits cognitifs multiples. Toutefois, elle introduit
une hiérarchie des symptômes au profit des troubles de
la mémoire, considérés comme un critère majeur, alors
que les autres troubles des fonctions supérieures (dont
la pensée abstraite, le jugement, éléments essentiels
des définitions traditionnelles de la démence2, deviennent
des critères mineurs, non obligatoirement présents). La
démarche diagnostique se fait alors en deux temps : remplir
les critères de démence, puis en préciser l’étiologie.
L’élément fondamental est que, pour la première fois,
ces critères diagnostiques sont définis de fac¸on opératoire
et présentés avec des définitions précises.
La sévérité de la démence est appréciée sur le degré de
restriction de l’autonomie.
Le DSM-III-R [7] reprend la même classification,
mais la Démence dégénérative primaire devient Maladie
d’Alzheimer (MA) sénile ou présénile, les autres affections
dégénératives étant incluses dans les démences non spé-
cifiées.
Commentaires
Les raisons du vif succès international du DSM-III
tiennent sans doute à la publication, pour la première fois,
de critères opératoires permettant une certaine homogé-
néisation des diagnostics. En même temps, il représentait
une alternative crédible à la domination de la psychana-
lyse, ébranlée par le développement des neurosciences et
de la pharmacothérapie. Les critiques qui lui furent adres-
sées furent néanmoins tout aussi vives que son succès,
accusant le DSM-III de réductionnisme et soulignant les
insuffisances du système catégoriel. Par ailleurs, la caté-
gorie Démence du DSM-III était définie sur le modèle de la
MA, donnant la primauté aux troubles de mémoire. Cette
définition était adaptée pour la MA comme en témoigne
l’utilisation, dans les essais thérapeutiques, des critères de
démence conjointement aux critères spécifiques de la MA
[8], car ces derniers n’exigeaient qu’un déficit portant sur
deux fonctions cognitives non spécifiées. En revanche, les
2La démence était jusqu’alors caractérisée, depuis la fin du XIXesiècle, par
une altération globale des fonctions intellectuelles, chronique et irréversible,
les premiers troubles étant une altération du jugement et de la pensée abs-
traite. Cette définition n’était pas définie au plan opératoire et correspondait
ainsi à des déficits cognitifs de types et de sévérité très variables.
critères de démence ont vite été reconnus comme inadé-
quats pour le diagnostic des autres syndromes démentiels.
En outre, la catégorie Démence restait mal définie [9] en
même temps qu’elle introduisait une dichotomie entre nor-
malité et démence qui était loin de correspondre à la réalité.
La quatrième édition, DSM-IV
La mise en chantier du DSM-IV est développée sous
la présidence d’Allen Frances (1942-) et est associée à la
préparation de la CIM-10 (publiée en 1993). Les révisions
ont été effectuées après analyse des critiques des DSM-
III et DSM-III-R, et des essais cliniques ont été effectués
pour vérifier la fiabilité des nouveaux diagnostics. Publié en
1994 [10], le DSM-IV diffère notablement de la CIM-9 et du
DSM-III-R. Son objectif affiché est d’en faciliter l’utilisation
par les cliniciens et la communication entre différents uti-
lisateurs, en améliorant la concision des textes, la clarté
du langage et en rendant plus explicite le contenu des cri-
tères diagnostiques, tout en corrigeant les insuffisances et
les erreurs des précédents DSM. Un changement notable
est introduit au plan théorique : la disparition de la distinc-
tion entre troubles mentaux organiques et non organiques,
les auteurs considérant, en effet, que cette division est
un «anachronisme réductionniste du dualisme esprit/corps
(mind/body)»reconnaissant l’importance des troubles phy-
siques dans les troubles mentaux et inversement.
Le DSM-IV supprime donc la catégorie Troubles men-
taux organiques et la nouvelle classe diagnostique ne
contient plus que des troubles cognitifs : Delirium,
Démence, Troubles amnésiques et Autres troubles cogni-
tifs. Les syndromes non cognitifs associés à des lésions
cérébrales (dépression, idées délirantes, troubles de la
personnalité...) sont maintenant répertoriés dans les caté-
gories correspondantes.
Le DSM-IV reprend les critères de démence du DSM-III,
mais introduit plusieurs modifications : le retentissement
sur l’activité sociale et professionnelle doit marquer un
déclin par rapport au fonctionnement antérieur et les
troubles des fonctions exécutives sont inclus dans les défi-
cits cognitifs. En revanche, la référence à des modifications
de la personnalité disparaît de même que l’évaluation de la
sévérité.
Le DSM-IV fait apparaître la mention d’examens complé-
mentaires comme les examens neuropsychologiques,
l’imagerie cérébrale structurale (scanner X ou IRM) et fonc-
tionnelle (PET-scan ou Spect). Toutefois, ces éléments ne
sont pas retenus dans les critères diagnostiques car ils ne
sont pas accessibles à tous.
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