FICHE À DéTACHER
La Lettre du Cardiologue Risque Cardiovasculaire • n° 423 - mars 2009 | 25
fiche
technique
Sous la responsabilité de ses auteurs
n° 2
Athul Pathak*
Comment gérer les effets indésirables
musculaires des hypolipémiants ?
* Service de pharmacologie et fédération de cardiologie, faculté de médecine, CHU de
Toulouse.
L
es effets indésirables musculaires des hypolipémiants se
retrouvent tant avec les statines et les fibrates qu’avec
l’ézétimibe. Ces effets indésirables ont un spectre clinique
large, qui va de la simple douleur musculaire au tableau de
rhabdomyolyse. Leur fréquence varie selon les séries, mais
des études observationnelles suggèrent que, en présence de
fortes doses, leur prévalence peut atteindre 10 %.
Y a-t-il des marqueurs diagnostiques spé-
cifiques pour les troubles musculaires liés
à l’exposition aux hypolipémiants ?
Non, la douleur, qui siège préférentiellement au niveau de la racine
des membres, n’est pas spécifique. Le dosage des enzymes dites
“musculaires” (LDH, aldolase, CK-MB ou TGO) peut être normal en
présence d’une gêne musculaire ou, au contraire, élevé en l’absence
de symptomatologie clinique. L’absence de spécificité et la discordance
clinico-biologique sont caractéristiques de cet effet indésirable.
Face à une gêne musculaire, que faire en
premier lieu ?
Éliminer les facteurs favorisants. Cette gêne est dose-dépen-
dante, elle est favorisée par la présence d’une hypokaliémie,
d’une hypothyroïdie, d’une hyperthermie. L’association à des
médicaments myotoxiques augmente le risque, et l’intérêt des
médicaments doit être réévalué (corticoïdes, fibrates, etc.).
Si les effets indésirables musculaires ne dis-
paraissent pas, cela veut-il dire qu’ils ne sont
pas imputables aux hypolipémiants ?
Non, la rémanence des effets indésirables musculaires peut
être importante, ceux-ci pouvant persister plus de 6 mois après
l’arrêt de la prise.
Ces effets indésirables sont-ils évitables ?
Oui, il faut si possible diminuer la dose du médicament,
ne pas hésiter à contrôler les facteurs, médicamenteux ou
non, susceptibles d’augmenter le risque d’effet indésirable
musculaire. Une attention particulière sera portée aux sujets
âgés et insuffisants rénaux.
S’agit-il d’un effet de classe ?
Non, il ne faut pas hésiter à essayer différents hypolipémiants,
en respectant, à l’arrêt de l’un, le délai nécessaire à son élimi-
nation (au moins sept fois sa demi-vie) avant d’en introduire
un nouveau. Les effets indésirables musculaires sont davantage
liés à la dose, à la concentration circulante de l’hypolipémiant
et à l’action de la molécule qu’à l’impact sur le LDL-c, d’où
l’intérêt d’essayer différentes molécules.
Comment surveiller un patient sous statine ?
Il faut doser les transaminases au moins une fois dans les
trois mois qui suivent l’initiation, puis une fois par an, et arrêter
en fonction de la présentation clinique et biologique (en général, si
les transaminases sont supérieures à 3 fois la normale). Le dosage
initial systématique des CPK n’est pas justifié, sauf si le patient a
plus de 70 ans, s’il est insuffisant rénal, hypothyroïdien ou s’il a
des antécédents personnels ou familiaux de maladie musculaire.
Si un patient a déjà présenté des effets indésirables musculaires
sous hypolipémiant, le dosage est également justifié. ■
»
Prise en charge du patient dyslipidémique (3 mai 2005). Site Internet de l’Afssaps :
www.afssaps.fr/Infos-de-securite/Recommandations-debonne-pratique/Prise-en-
charge-du-patient-dyslipidemique.
»Harper CR, Jacobson TA. The broad spectrum of statin myopathy: from myalgia
to rhabdomyolysis. Curr Opin Lipidol 2007;18:401-8.
Pour en savoir plus