n° 2 fiche technique Athul Pathak* Sous la responsabilité de ses auteurs Comment gérer les effets indésirables musculaires des hypolipémiants ? es effets indésirables musculaires des hypolipémiants se retrouvent tant avec les statines et les fibrates qu’avec l’ézétimibe. Ces effets indésirables ont un spectre clinique large, qui va de la simple douleur musculaire au tableau de rhabdomyolyse. Leur fréquence varie selon les séries, mais des études observationnelles suggèrent que, en présence de fortes doses, leur prévalence peut atteindre 10 %. L Ces effets indésirables sont-ils évitables ? Y a-t-il des marqueurs diagnostiques spécifiques pour les troubles musculaires liés à l’exposition aux hypolipémiants ? S’agit-il d’un effet de classe ? Non, la douleur, qui siège préférentiellement au niveau de la racine des membres, n’est pas spécifique. Le dosage des enzymes dites “musculaires” (LDH, aldolase, CK-MB ou TGO) peut être normal en présence d’une gêne musculaire ou, au contraire, élevé en l’absence de symptomatologie clinique. L’absence de spécificité et la discordance clinico-biologique sont caractéristiques de cet effet indésirable. Éliminer les facteurs favorisants. Cette gêne est dose-dépendante, elle est favorisée par la présence d’une hypokaliémie, d’une hypothyroïdie, d’une hyperthermie. L’association à des médicaments myotoxiques augmente le risque, et l’intérêt des médicaments doit être réévalué (corticoïdes, fibrates, etc.). Si les effets indésirables musculaires ne disparaissent pas, cela veut-il dire qu’ils ne sont pas imputables aux hypolipémiants ? Non, la rémanence des effets indésirables musculaires peut être importante, ceux-ci pouvant persister plus de 6 mois après l’arrêt de la prise. Non, il ne faut pas hésiter à essayer différents hypolipémiants, en respectant, à l’arrêt de l’un, le délai nécessaire à son élimination (au moins sept fois sa demi-vie) avant d’en introduire un nouveau. Les effets indésirables musculaires sont davantage liés à la dose, à la concentration circulante de l’hypolipémiant et à l’action de la molécule qu’à l’impact sur le LDL-c, d’où l’intérêt d’essayer différentes molécules. Comment surveiller un patient sous statine ? Il faut doser les transaminases au moins une fois dans les trois mois qui suivent l’initiation, puis une fois par an, et arrêter en fonction de la présentation clinique et biologique (en général, si les transaminases sont supérieures à 3 fois la normale). Le dosage initial systématique des CPK n’est pas justifié, sauf si le patient a plus de 70 ans, s’il est insuffisant rénal, hypothyroïdien ou s’il a des antécédents personnels ou familiaux de maladie musculaire. Si un patient a déjà présenté des effets indésirables musculaires sous hypolipémiant, le dosage est également justifié. ■ Pour en savoir plus »» Prise en charge du patient dyslipidémique (3 mai 2005). Site Internet de l’Afssaps : www.afssaps.fr/Infos-de-securite/Recommandations-debonne-pratique/Prise-encharge-du-patient-dyslipidemique. »» Harper CR, Jacobson TA. The broad spectrum of statin myopathy: from myalgia to rhabdomyolysis. Curr Opin Lipidol 2007;18:401-8. * Service de pharmacologie et fédération de cardiologie, faculté de médecine, CHU de Toulouse. F iche à d é tacher Face à une gêne musculaire, que faire en premier lieu ? Oui, il faut si possible diminuer la dose du médicament, ne pas hésiter à contrôler les facteurs, médicamenteux ou non, susceptibles d’augmenter le risque d’effet indésirable musculaire. Une attention particulière sera portée aux sujets âgés et insuffisants rénaux. La Lettre du Cardiologue Risque Cardiovasculaire • n° 423 - mars 2009 | 25